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QUESTIONS, CADRES, OPTIONS

2. LES CADRES DE LA RECHERCHE : LE PROJET PETEN NORTE-NAACHTUN, LE SITE ARCHEOLOGIQUE ET SA TRAJECTOIRE

2.5. Synthèse préliminaire de l’histoire des groupes sociaux de Naachtun

La cité de Naachtun fut édifiée tout au long de la période classique dans une zone modestement occupée dès le Préclassique récent. Elle connut de nombreuses réorganisations spatiales avant son abandon à la fin du Classique terminal. Cette dynamique de développement s’étale sur quatre grandes phases chrono-céramiques, elles-mêmes subdivisées en deux ou trois facettes (Tabl. 3.2), formant la séquence du site telle que définie par le céramologue A. Patiño (2015).

Complexes  céramiques 

Phases ‐ dates 

approximatives  El Mirador  Uaxactún  Classique 

terminal  Muuch  830 – 950/1000 apr. J.‐C.Muuch               Post Lac Na  Tepeu 3 

Classique  récent  Ma'ax  Ma'ax 3        750 ‐ 830 apr. J.‐C.  Lac Na  Tepeu 2/3  Ma'ax 1‐2        600 ‐ 750 apr. J.‐C.  Tepeu 1‐2  Classique  ancien  Balam  Balam 3        500/550 ‐ 600 apr. J.‐C.  Acropolis  Tzakol 3  Balam 2        350 ‐ 500/550 apr. J.‐C.  Tzakol 2  Balam 1        150 ‐ 350 apr. J.‐C.  Tzakol 1  Préclassique 

récent  Kuts'  ? ‐ 150 apr. J.‐C. Kuts'           Cascabel  Chicanel 

Tableau 3.2: complexes chrono-céramiques et datations approximatives des phases d’occupation du site de Naachtun (Patiño, 2015), comparés aux complexes établis pour El Mirador (Forsyth, 1989) et Uaxactún (Smith et Gifford, 1966)

Naachtun est un site structuré autour d’un centre monumental, ou épicentre, de plus de 5 ha s’étirant le long d’un axe est-ouest sur deux élévations naturelles (Fig. 3.7), un secteur cerné de zones résidentielles s’étendant sur plus de 150 ha au sud, à l’est et à l’ouest de l’épicentre (Nondédéo et al., 2013 : 124-125). La zone monumentale est constituée de trois

groupes de structures délimitant des places publiques. Au centre se trouve le Groupe A, un secteur de type politico-cérémoniel incluant les grandes Places Nord, Ouest et Sud dotées de monuments de type stèles, d’un réservoir, d’un groupe dit « astronomique de type E », d’un terrain de jeu de balle, de pyramides et d’un complexe à enceinte réunissant palais et temples.

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A l’ouest, relié par un sacbé (Chaussée Balam) au Groupe A, est situé le Groupe C, un secteur

à vocation essentiellement cérémonielle composé notamment d’un groupe triadique. Enfin, à l’est du Groupe A, est localisé le Groupe B caractérisé par ses deux places publiques, Place Est et Place Río Bec, et leurs édifices monumentaux, ainsi que trois complexes à caractère résidentiel réunissant dans une configuration très compacte plus d’une quarantaine de patios résidentiels à structures en majorité voûtées, entièrement maçonnées (voir Chap. 5).

Les zones d’habitat situées tout autour de cet épicentre monumental (Fig. 3.7), Zones Nord-ouest, Zone Sud et Zone Nord-est, se présentent comme des secteurs où alternent des structures isolées et des groupes à patio (plus de 115 identifiés à ce jour). Ces derniers sont souvent réunis au sein de concentrations d’habitat plus larges comportant chacune une composante monumentale, et des espaces libres de construction correspondant à des terrains à vocation agricole ou à des zones d’extraction de pierre (Castanet et al., 2015 ; Lemonnier et

Cotom-Nimatuj, 2015).

2.5.1. Le Préclassique récent : phase Kuts’ (?-150 apr. J.-C.), une occupation limitée

La phase Kuts’ (Tabl. 3.2) est très mal connue à ce jour, un seul contexte « pur » ayant pu être identifié sous la Chaussée Balam (Nondédéo et al., 2013 : 125). Ailleurs, le

matériel céramique préclassique est partout mêlé à des tessons plus récents. La présence de ce mobilier, associée au faible nombre de niveaux clairement datés de cette période, laissent supposer que la zone était le siège d’une occupation limitée, peut-être à l’échelle d’un petit village (Ibid.). D’un point de vue céramique cette phase est définie par la présence de

récipients appartenant notamment aux groupes Sierra, Polvero, Flor et Zapote, qui montrent

des similarités typologiques avec le matériel du Bassin de Mirador, du nord du Belize et du sud du Campeche (Patiño, 2015).

2.5.2. Le Classique ancien : phase Balam (150-600 apr. J.-C.), construction de la zone monumentale et des premières unités résidentielles

Le Classique ancien coïncide avec un important essor démographique et architectural de Naachtun (Fig. 3.8a) qui devint alors un véritable centre de pouvoir (Lemonnier, Hiquet et Cotom-Nimatuj, sous presse ; Nondédéo et al., 2013 : 126). Trois facettes céramiques

distinctes de Balam correspondent chacune à une phase du développement du site. Lors de la phase Balam 1 (150 - 350 apr. J.-C. ; Tabl. 3.2) eurent lieu les premiers aménagements du Groupe C à l’ouest, ainsi que des apports de niveaux de terre argileuse très sombre, issue des

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bajos, couches identifiées comme des niveaux agricoles et localisées dans l’épicentre de la

cité sous la Chaussée Balam, la Place Ouest du Groupe A et le Complexe Ouest du Groupe B (Castanet et al., 2015 : 35 ; Nondédéo et al., 2013 : 127). Du point de vue céramique, Balam 1

est défini par l’apparition des groupes Aguila, Balanza, Dos Arroyos, Quintal et Triunfo, ainsi

que par la persistance de la production de types préclassiques ayant intégré des caractéristiques du Classique ancien. Ce matériel montre des similarités typologiques avec celui du nord du Belize et du sud du Campeche, mais également du Petén Central (Patiño, 2015).

La phase Balam 2 (350 - 500/550 apr. J.-C. ; Tabl. 3.2) correspond à une période de très grandes dynamiques constructives avec les investissements architecturaux les plus importants de toute l’histoire de Naachtun. Des unités d’habitat ont alors été construites dans la Zone Sud (Lemonnier, Hiquet et Cotom-Nimatuj, sous presse) comme au niveau du Complexe Ouest du Groupe B. Mais les efforts monumentaux ont surtout été concentrés dans les Groupes A et C, avec l’émergence de structures politico-cérémonielles monumentales : le complexe triadique, la pyramide La Pérdida, le groupe de type E, le complexe à enceinte, le terrain de jeu de balle ou encore la Chaussée Balam (Nondédéo et al., 2013 : 126). Cette

phase Balam 2 correspond également à l’époque d’érection des premières stèles à Naachtun dans les Groupes A et C21 (Patrois, 2012), certains des monuments illustrant l’existence d’une alliance entre les dirigeants de cette communauté et Teotihuacan (Cases et Lacadena, 2015). Au niveau de la typologie céramique, les liens avec la grande métropole mexicaine sont perceptibles dans la présence de vases tripodes de style Teotihuacan et de récipients du type

Competencia Inciso. Balam 2 voit aussi la continuité de la production des groupes Aguila, Balanza, Dos Arroyos, Quintal et Triunfo, alors associés aux Groupes Caldero, Dos Hermanos, Remate et Yaloche. Ce matériel montre de nettes similarités typologiques avec

celui du Petén Central, mais aussi du nord du Belize et du sud du Campeche (Patiño, 2015). La dernière étape du Classique ancien, la phase Balam 3 (500/550-600 apr. J.-C. ; Tabl. 3.2), est marquée par un coup d’arrêt dans les dynamiques constructives de structures monumentales, dont certaines n’ont jamais été achevées, comme le soubassement pyramidal de La Pérdida ou la seconde version de la Structure XIX du Groupe A (Nondédéo, Michelet et Garrido, 2015). Les constructions datées de cette période se concentrent alors dans les unités

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La Stèle 3, datée de 534 apr. JC., est située au sud-est de la Place Est du Groupe B (Patrois, 2012), une localisation suggérant qu’elle a pu être déplacée tardivement car les espaces publics associés sont rattachés à des phases de construction du Classique récent.

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résidentielles de la Zone Sud, ou prennent la forme de niveaux de remblais dans le Complexe Sud du Groupe B. En ce qui concerne la céramique, l’assemblage connaît surtout des évolutions au niveau des formes, des techniques de production et de décoration, comme à Tikal, à Uaxactún et au nord du Belize. Cet assemblage céramique se distingue aussi par l’apparition des groupes Saxche et Tinaja, ainsi que du type Caal Rojo Policromo

certainement importé depuis la région de Río Azul (Patiño, 2015).

2.5.3. Le Classique récent : phases Ma’ax 1-2 (600-750 apr. J.-C.), apogée démographique et extension des zones résidentielles

La première partie du Classique récent, c’est-à-dire les phases Ma’ax 1-2 (600-750 apr. J.C. ; Tabl. 3.2), constitue la période d’apogée démographique de la communauté de Naachtun avec une réelle extension des zones résidentielles, alors que l’investissement dans l’architecture monumentale se limita presque exclusivement aux places publiques du Groupe B et à leurs alentours (Fig. 3.8b). Tous les groupes d’habitat de la Zone Sud étaient alors occupés et connaissaient des épisodes de construction substantiels, en lien avec la très forte croissance démographique que connaissait le site de Naachtun (Lemonnier, Hiquet et Cotom-Nimatuj, sous presse ; Nondédéo et al., 2013 : 127). Dans le Groupe B, la Place Est était

dominée au nord par l’Edifice 5O-5 et devint l’espace d’érection de nombreux monuments, Stèle 1 (623 apr. J.-C.), Stèle 2 (642) et Stèle 4 (721) (Patrois, 2012)22, alors que dans le Complexe Ouest voisin, les édifices et les patios furent bâtis au-dessus de structures classiques anciennes. Cet espace public de la Place Est s’affirmait comme le lieu du pouvoir dynastique au VIIème et au début du VIIIème siècle (Chap. 5.1.2). A la fin de cette période, dans le second quart du VIIIème siècle, la dynamique de développement impliqua un déplacement de l’investissement vers le sud-est du Groupe B, au niveau de la Place Río Bec où d’importants travaux de terrassement précédèrent l’édification de la Pyramide 6O-3 et la consécration de plusieurs monuments sculptés dont la Stèle 17 (751 apr. J.-C. ?) et la paire de Stèles 18 et 19 (731/751 ?) (Ibid.), ainsi que la construction des premières unités résidentielles

des Complexes Central et Sud (Chap. 5.1.3). C’est précisément cette expansion vers le sud-est, vers 750, avec la formation de l’ensemble compact de patios résidentiels qui a suscité nos

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En parallèle à l’érection de ces monuments, il semble que d’autres plus anciens, datés du Classique ancien ou du début du Classique récent, aient été déplacés pour leur « annulation ». C’est ainsi le cas de Stèle 26, enterrée dans les remblais d’un bâtiment d’accès au groupe triadique du Groupe C au début du Classique récent, ou de la Stèle 27, réutilisée dans un escalier du complexe à enceinte du Groupe A au cours du Classique récent (Mathews, 2013).

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premières questions sur l’identité et la croissance des groupes sociaux dominants. Il faut également noter que de nouvelles stèles furent mises en place dans le Groupe A à cette époque, la Stèle 8 (751 apr. J.C.) et la Stèle 9 (731) (Ibid.), démontrant un renouveau des

activités politico-cérémonielles réalisées dans ce secteur.

L’assemblage céramique connaît de nombreuses évolutions typologiques à cette période, avec l’apparition des groupes Encanto, Cambio, Infierno, Palmar, Zacatal, et Santa Rosa (importé de la région de Piedras Negras), et la présence plus massive des groupes Tinaja, Remate et Saxche. Les récipients témoignent toujours à cette époque d’importants

liens avec les productions de sites comme Tikal et Uaxactún, mais aussi avec la céramique du Bassin de Mirador, notamment domestique, alors que les vases Estilo Codice sont quant à eux

quasiment absents de Naachtun (Patiño, 2015).

2.5.4. Le Classique récent final : phase Ma’ax 3 (750-830 apr. J.-C.), concentration des populations et disparition du pouvoir royal

Au dernier tiers du Classique récent, phase Ma’ax 3 (Tabl. 3.2), se produisent de profonds bouleversements dans l’organisation spatiale et socio-politique de Naachtun (Fig. 3.8c). En effet, deux dynamiques concomitantes mais inverses peuvent être observées au niveau de l’occupation du site : alors qu’un certain nombre d’unités d’habitat de la Zone Sud était progressivement abandonné au cours du Classique récent final, le Groupe B connaissait, quant à lui, une augmentation significative du nombre de ses espaces résidentiels due à la construction du Complexe Central et à une intense activité architecturale dans le Complexe Sud (Graph. 3.1). Ces deux dynamiques laissent supposer un déplacement d’une partie de la population à l’intérieur même du site (Chap. 5.1.4). De fait, alors que toutes les unités d’habitat de la Zone Sud étaient occupées en Ma’ax 1-2 (n=41, 100%), cette proportion diminue légèrement en Ma’ax 3 (n=33, 80%) avec l’abandon dès le début de cette période de quelques petites UH, une probable contraction de l’occupation dans plusieurs complexes de patios, puis un abandon progressif de certaines UH. A l’inverse, cette période du Classique récent final correspond à un pic d’occupation des patios des complexes résidentiels du Groupe B, tous occupés ou en cours d’aménagement (Sion, sous presse ; J. Hiquet, com. perso. 2015).

Analogue à ce qui est observé au même moment à Mirador, Calakmul et Río Bec (voir Chap. 2.3.2.1), ce début de probable « contraction de l’habitat » (Arnauld et al., 2014 ;

Arnauld, Michelet et Nondédéo, 2013) était contemporain du lancement de programmes architecturaux sur la Place Est et la Place Río Bec du Groupe B, dont plusieurs, comme la

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rénovation de la Pyramide 6O-3 et la construction du Soubassement 6O-4, ne furent jamais achevés (Nondédéo et al., 2013 : 128-131 ; Sion, sous presse) (voir Chap. 5.1.5). Dans le

Groupe A, les édifices ont apparemment été abandonnés au cours de cette période, à l’image du complexe à enceinte, et le programme d’érection se limita à la Stèle 10 (761 apr. J.-C.) (Patrois, 2012) ainsi qu’au déplacement d’un fragment de stèle du Classique ancien érigé dans la Place Ouest (Morales-Aguilar, 2012b). D’un point de vue socio-politique, c’est le moment de la disparition du pouvoir royal à Naachtun, notamment perceptible par l’arrêt de l’érection de stèles à partir du dernier tiers du VIIIème siècle. Dans le même temps, le glyphe-emblème

Suutz’ apparaît dans des inscriptions plus tardives sur les sites de Calakmul et d’Oxpemul, et

il est alors possible de penser que les profonds changements ci-dessus mentionnés doivent être corrélés au déplacement du siège de pouvoir de cette dynastie hors de Naachtun à la fin du VIIIème siècle, comme cela est aussi évoqué pour la dynastie Kaan (Vásquez López, 2014 :

140). A ce jour, aucune évidence non équivoque de violence concomitante n’a été détectée.

Graphique 3.1 : variation du taux d’occupation des unités d’habitat de Naachtun entre le Classique récent et le Classique terminal dans la Zone Sud (41 UH datées) et les Complexes Ouest (11 patios datés), Central (7 patios datés) et Sud (17 patios datés), d’après les résultats préliminaires des différents programmes de sondages/fouilles entrepris entre 2010 et 2015 (Sion, sous presse ; J. Hiquet, com. perso. 2015)

Cette période d’intenses évolutions se traduit au niveau de la typologie céramique par une augmentation significative des récipients importés, comme ceux des groupes Chablekal,

en provenance de la région de Palenque, et Belice, produits sur les rives du fleuve Belize, le

type Cabrito Crema Policromo (groupe Zacatal), rattaché à la région de Naranjo, ainsi que le

type Torro Gubiado Inciso (groupe Achote) et le groupe polychrome Campeche Lustroso liés

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

Ma'ax 1‐2 Ma'ax 3 Muuch

Classique récent Classique récent final Classique terminal

Zone Sud Complexe Ouest Complexe Central Complexe Sud

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en particulier à la région Río Bec. L’assemblage Ma’ax 3 se distingue aussi des précédents par un accroissement de la présence de Tres Micos Impreso (groupe Infierno) et Pantano Impreso (groupe Tinaja/Remate), l’apparition des groupes Tiich et Ceroso Tardío, ainsi que

divers changements formels et décoratifs (Patiño, 2015).

2.5.5. Le Classique terminal : phase Muuch (830-950/1000 apr. J.-C.), abandon partiel de la cité et transformations socio-politiques

Le Classique terminal à Naachtun, ou phase Muuch (Tabl. 3.2), est une période pendant laquelle les processus engagés précédemment se poursuivirent, c’est-à-dire une réorganisation spatiale et une crise démographique (Fig. 3.8d). En effet, la contraction de l’occupation autour de la Place Río Bec (Chap. 5.1.5) se renforça avec une multiplication des réaménagements au sein des espaces résidentiels à l’intérieur des Complexes Central et Sud. En parallèle, le Complexe Ouest et la Place Est étaient en partie désertés. L’abandon des unités d’habitat de la Zone Sud se poursuivait également et seules 41% des UH (n=17) occupées lors des phases Ma’ax 1-2 l’étaient toujours en Muuch, certaines de celles encore habitées ne l’étant plus que de manière résiduelle (Nondédéo et al., 2013 : 131-136 ; Sion,

sous presse ; J. Hiquet, com. perso. 2015). Bien que constituant le nouveau « cœur » politique de la cité, la Place Río Bec et ses alentours ne connurent le lancement d’aucun programme architectural monumental et aucune stèle n’y fut érigée lors de cette phase Muuch, qui est véritablement « post-monumentale » (Bey, Hanson et Ringle, 1997). De même, les espaces politico-cérémoniels des Groupes A et C ne présentent pas de signes d’activité pour cette époque.

Cette ultime phase d’occupation du site est diagnostiquée par la présence de différents marqueurs céramiques correspondant en particulier à des productions importées, illustrant un dynamisme dans les échanges mercantiles qui contraste avec la quasi cessation des investissements architecturaux. De fait, ce complexe se définit notamment par l’apparition des groupes à pâte fine Altar et Balancan produits aux abords des fleuves Pasión et Usumacinta,

ainsi que dans une moindre mesure du groupe Tres Naciones, par la présence des

polychromes Campeche Lustroso et Tiich liés au Campeche, par l’augmentation des quantités

de récipients du type Torro Gubiado Inciso (groupe Achote) et des groupes Belice et Ceroso Tardio, ainsi que par certaines évolutions formelles et décoratives de récipients domestiques,

notamment la présence d’une bande peinte à l’intérieur du col des petites jarres (Patiño, 2015). Aucune subdivision de ce complexe céramique n’a pour l’instant pu être validée, une

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situation découlant notamment l’absence presque totale de contextes scellés datant de cette période (A. Patiño, com. perso. 2015).

2.5.6. La fin du Classique terminal : ultimes décennies de la phase Muuch (vers 950/1000 apr. J.-C.), abandon définitif de Naachtun

Les ultimes manifestations de l’occupation précolombienne de Naachtun, datées aux alentours de 950-1000 apr. J.-C., à la fin de la phase Muuch, prenaient la forme de rituels liés à l’abandon du site par ses derniers habitants et étaient principalement constitués de dépôts de mobilier et de cendres, souvent en association avec des ossements humains (Nondédéo et al.,

2013 : 136-138 ; Sion, sous presse), similaires à ceux observés dans les unités de la Zone Sud et du Complexe Ouest abandonnées dès la phase Ma’ax 3. Pour la phase Muuch, les indices de ces ultimes rituels se concentraient dans les Complexes Central et Sud, des espaces ayant connu un abandon progressif (Chap. 5.1.6). Par la suite, le site ne fut plus visité que de manière épisodique au Postclassique, ce que démontre la présence d’encensoirs du type Chen-Mul Modelado découverts en surface (Walker et Reese-Taylor, 2012 : 68).

Pour résumer, en ce qui concerne l’objet de notre recherche, à savoir les élites dominantes en phase Muuch, il faut noter particulièrement les interprétations suivantes :

les patios résidentiels en configuration compacte du Groupe B comportent les résidences urbaines de l’élite sociale du Classique récent, rassemblées notamment près de la Place Est et ses édifices royaux, en particulier 5O-5 (Fig. 3.10) ;

les principaux changements dans l’organisation spatiale de la cité au Classique récent final paraissent chronologiquement contemporains de la possible disparition de la dynastie Suutz’ à Naachtun, peut-être du fait d’une relocalisation à Calakmul puis à

Oxpemul, en bordure du secteur Río Bec (Fig. 3.5) ;

un processus de contraction des habitants de Naachtun dans les grands complexes résidentiels de la Zone Sud et du Groupe B est une probabilité pour les phases Ma’ax 3 et Muuch ;

la croissance du Groupe B a eu lieu depuis le Complexe Ouest vers le Complexe Central jusqu’au Complexe Sud ; ces deux derniers complexes sont en partie postérieurs à la cité dynastique Suutz’ et à son apogée monumental.

Ces avancées permettent de préciser nos hypothèses de travail et de justifier nos options d’objets de recherche dans le site.

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