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Afin de clore le Chapitre 3 consacré à l’étude des actifs en management puis en marketing, nous proposons une synthèse de cette littérature. D’abord, nous présentons les principaux enjeux existants autour des actifs marketing (voir 1.). Ensuite, nous mettons en exergue les lacunes de la littérature sur les actifs marketing qui justifient notre sujet de recherche (voir 2.). Enfin, nous justifions l’ancrage de la thèse spécifiquement dans un des courants de l’approche par les ressources : la théorie des capacités dynamiques (voir 3.).

118 1. Principaux enjeux autour des actifs marketing

Après avoir étudié la littérature sur les actifs marketing, deux grands enjeux peuvent être identifiés : la distinction des concepts de « capacités » et de « compétences » marketing (voir 1.1.), et la reconnaissance des différents niveaux d’analyse des actifs marketing (voir 1.2.).

1. 1. Confusion et manque de distinction entre capacités et compétences marketing

On peut reprocher à la littérature sur les actifs marketing son manque de clarté. Notamment, il semble souvent difficile de faire la différence entre les capacités et les compétences marketing.

Pour soutenir cette idée, on peut s’appuyer sur l’article de Morgan (2012). Premièrement, les capacités marketing spécialisées exposées par l’auteur (e.g. capacité de management de produit, capacité de pricing, ...) semblent difficiles à distinguer des compétences marketing en tant que telles (e.g. compétence de management de produit, compétence de pricing, ...). Cette confusion est accentuée par le vocabulaire utilisé pour décrire les capacités. Ainsi, pour donner une définition de certaines capacités marketing, Morgan (2012) utilise des termes liés à la compétence (skills) ou le terme de capacité lui-même (capability), ce qui perd le lecteur45. Ainsi, le fait d’utiliser alternativement les termes de « capacité » et de « compétence » pour définir les capacités marketing entraîne un manque de clarté du concept de « capacité » d’une part, ainsi qu’une difficulté à dissocier « capacités » et « compétences » marketing d’autre part. Par ailleurs, la mesure empirique des capacités et des compétences marketing dénote également cette confusion : les mesures des deux concepts se rapprochent, la mesure d’une capacité marketing pouvant parfois être assimilée à la mesure d’une compétence marketing.

La littérature reconnaît par ailleurs ce manque de distinction entre les termes de « capacités » et de « compétences ». Remarquant que la définition de la capacité organisationnelle de Winter (2003) s’approche de la définition de la compétence organisationnelle de Heene et Sanchez (1997), Madhavaram et Hunt (2008) considèrent notamment les termes de « capacité » et de « compétence » marketing comme interchangeables. Par ailleurs, pour Hunt (2000), du fait de conceptualisations similaires, ces deux concepts peuvent tous deux être définis comme « des combinaisons complexes socialement et interconnectées de ressources tangibles basiques (e.g. une machine spécifique, un software ou un hardware) et de ressources intangibles (e.g. des pratiques et des procédures organisationnelles spécifiques, l’expérience spécifique de certaines employés) qui se correspondent de façon synergétique pour permettre à l’entreprise de produire avec efficience et/ou efficacité des offres de marché de valeur ». La littérature soulève donc les difficultés à dissocier le concept de capacité du concept de compétence. Alors que des auteurs les considèrent au final comme interchangeables (Hunt, 2000 ; Madhavaram et Hunt, 2008), nous nous efforcerons de les distinguer dans la thèse46.

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A titre d’exemple, en parlant de la capacité de management de la communication, Morgan (2012) écrit que « le fait de communiquer efficacement avec les consommateurs et les prospects est une capacité (capabiliy) marketing essentielle ». Plus loin, toujours en décrivant cette-même capacité, Morgan (2012) écrit que « communiquer les bénéfices des nouveaux produits de l’entreprise (...), rappeler aux usagers habituels les bénéfices et la disponibilité du produit, et renforcer la décision d’achat pour réduire la dissonance cognitive sont des compétences (skills) essentielles que les entreprises doivent posséder ».

46 Lors de l’analyse empirique des actifs captés par l’organisation marketing, nous distinguerons clairement les

119 Pour résumer, il nous semble que la littérature sur les actifs marketing gagnerait à distinguer et illustrer clairement les concepts de « capacités » et de « compétences », aussi bien dans les articles théoriques que dans les articles empiriques. Par ailleurs, si le concept de « capacité » semble aujourd’hui le moins clair des deux, c’est toutefois le plus étudié. En effet, alors que le champ des capacités marketing est en plein développement, celui des compétences marketing est restreint. Il faut alors souvent se reporter aux travaux sur les capacités marketing (du fait de la proximité de ces deux concepts) pour approcher la notion de « compétence marketing ».

1. 2. L’importance du niveau d’analyse des actifs marketing

La revue de littérature sur les actifs marketing révèle un second enjeu crucial pour ce champ : la reconnaissance de l’existence de différents niveaux d’analyse des actifs marketing.

En management stratégique par exemple, Grant (1996) propose l’existence de différents niveaux de capacités intégrant le savoir présent aux niveaux inférieurs, apportant ainsi la notion d’ « architecture des capacités » dans l’organisation. Ainsi, il existe tout d’abord des single-task capabilities (niveau 1), des specialized-capabilities (niveau 2), des activity-related capabilities (niveau 3), des broad-functional capabilities (niveau 4) et, enfin des cross-functional capabilities (niveau 5). A chaque fois, la capacité de rang n intègre la capacité de rang n-1 (voir Figure 8).

Figure 8. L’architecture des capacités dans l’organisation, d’après Grant (1996)

De façon plus générale, dans la littérature de management stratégique, il existe différents niveaux d’analyse reconnus pour les capacités et les compétences (e.g. Sanchez, 2004). En suivant cette voie, et en nous basant sur la synthèse de Retour (2006) en GRH, nous proposons de définir quatre niveaux d’analyse « principaux » des actifs marketing : (1) le niveau individuel, (2) le niveau collectif, (3) le niveau organisationnel stratégique, (4) le niveau environnemental. Au vu de cette classification, on distingue donc un

120 niveau lié à l’individu (i.e. le niveau individuel) et des niveaux liés à l’organisation (i.e. les niveaux collectif, organisationnel stratégique, et environnemental) qui nous intéressent plus spécifiquement. Or, on constate qu’il est difficile de distinguer ces différents niveaux dans les recherches (y compris en management stratégique) car les auteurs n’y font pas référence. A titre d’exemple, l’architecture des capacités de Grant (1996) présente différents niveaux, allant d’un niveau lié aux tâches opérationnelles à des niveaux fonctionnels voire cross-fonctionnels, sans toutefois recourir aux niveaux d’analyse « principaux » rapportés. Qui plus est, pour un niveau d’analyse principal donné, on trouve encore un redécoupage des capacités et des compétences selon différents niveaux d’analyse « secondaires ». A titre d’exemple, en management stratégique, Chiesa et Manzini (1997) mettent l’accent sur le fait que différentes formes de compétences naissent à différents niveaux d’activité dans l’organisation. Egalement, dans le domaine marketing, la typologie de Morgan (2012) fait état de différentes capacités marketing situées au niveau organisationnel stratégique, celles-ci présentant une hiérarchie : on commence par des capacités marketing spécialisées, pour évoluer vers des capacités marketing cross-fonctionnelles, architecturales puis dynamiques.

Pour résumer, selon nous, on est en présence de différents niveaux d’analyse « principaux » des actifs marketing de l’organisation (i.e. niveaux collectif, organisationnel stratégique, et environnemental), ces derniers pouvant par ailleurs chacun être redécoupés en plusieurs niveaux d’analyse « secondaires ». Un enjeu important émerge alors : il convient de se positionner par rapport à ces différents niveaux d’analyse possibles lorsqu’on travaille sur les actifs marketing.

2. Des lacunes dans le champ sur les actifs marketing justifiant le sujet de thèse

En nous basant en partie sur les enjeux précédemment exposés, nous identifions quatre lacunes dans la littérature sur les actifs marketing qui représentent des opportunités et justifient notre sujet de thèse : le manque de reconnaissance des différents niveaux d’analyse possibles des actifs marketing (voir 2.1.) ; le manque de typologies et d’outils disponibles pour étudier les actifs marketing à ces différents niveaux (voir 2.2.) ; le manque d’étude en profondeur d’une capacité ou d’une compétence marketing située à un niveau d’analyse supérieur (voir 2.3.) ; le manque de précision quant aux éléments captés grâce aux capacités et aux compétences supérieures d’apprentissage (voir 2.4.).

2. 1. Manque de reconnaissance des différents niveaux d’analyse des actifs marketing

En nous basant sur les travaux de GRH, nous avons mis en exergue quatre niveaux d’analyse principaux des actifs marketing, dont trois sont situés au niveau de l’organisation : le niveau collectif, le niveau organisationnel stratégique, le niveau environnemental. Ci-après, nous revenons sur ces niveaux et rappelons comment la littérature marketing les a jusqu’à présent traités :

▪ Avec le développement du paradigme du réseau en marketing, le niveau d’analyse environnemental des actifs marketing s’est un peu développé (e.g. O’Driscoll et al., 2000 ; Day, 2011). Des recherches mettent l’accent sur les actifs marketing détenus par des entités extérieures faisant partie d’un réseau et dont la mise en œuvre ou l’orchestration peut influencer le fonctionnement interne de l’entreprise.

▪ Les recherches sur les actifs marketing au niveau organisationnel stratégique sont surreprésentées par rapport aux autres niveaux. A titre d’exemple, du point de vue théorique, certaines capacités identifiées

121 par Day (1994, 2011) se situent à ce niveau. Du point de vue empirique, Douglas Vorhies et Neil Morgan étudient des capacités marketing spécialisées ou architecturales, également situées au niveau organisationnel stratégique.

▪ Le niveau d’analyse lié au collectif marketing est, à notre connaissance, quasiment absent de la littérature marketing. Tout comme en GRH (Retour, 2006), il est donc sous-investigué.

On assiste donc à une focalisation importante sur les niveaux d’analyse supérieurs, et en particulier sur le niveau organisationnel stratégique. A titre d’exemple, les typologies de ressources et de capacités marketing proposées par Morgan (2012) sont valables au niveau de la SBU ou de l’organisation en général : même le plus bas niveau traité par Morgan (2012) dans sa typologie des capacités (i.e. les capacités marketing spécialisées) se trouve déjà à un niveau d’abstraction élevé alors que, en management stratégique, Grant (1996) fait par exemple débuter son architecture des capacités à des niveaux plus opérationnels liés aux activités ou aux tâches. Au final, dans les articles conceptuels (e.g. Madhavaram et Hunt, 2008 ; Day, 2011) comme empiriques (e.g. Vorhies et al., 2011), les capacités et les compétences marketing sont toujours étudiées à un niveau d’abstraction élevé. On étudie notamment les capacités marketing spécialisées, architecturales, cross-fonctionnelles, dynamiques et adaptatives, sans jamais descendre plus bas que le niveau « spécialisé » (premier niveau présenté par Morgan (2012)), c’est-à-dire sans interroger les capacités liées à certaines activités ou certains postes de travail dans la fonction marketing.

Dans le cadre de notre sujet, les niveaux « environnemental » et « collectif » semblent pourtant très intéressants. Tout d’abord, le niveau environnemental pourrait rendre compte de la démarche générale d’Open Marketing. L’Open Marketing, en tant que démarche d’ouverture de l’organisation marketing à un réseau de prestataires extérieurs dans le but d’apprendre de ces acteurs et de capter des actifs marketing, correspond en effet à la nature des capacités environnementales. Ensuite, le niveau collectif nous semble pertinent pour rendre compte de l’enrichissement des collaborateurs marketing comme un collectif dans le cadre de l’Open Marketing.

Situé de façon intermédiaire entre ressources et compétences individuelles et ressources et compétences purement organisationnelles, le niveau d’analyse collectif pourrait en effet rendre compte de l’enrichissement collectif des collaborateurs de l’organisation marketing sur les tâches et les activités qu’ils doivent réaliser. Pour rappel, la compétence collective s’analyse comme la présence d’un facteur permettant d’apporter un élément supplémentaire à la seule addition de compétences individuelles, et comme l’existence d’une coopération et de transferts de savoir-faire au sein du groupe permettant aux individus appartenant au groupe d’accroitre leurs propres compétences individuelles (Retour, 2006). Ainsi, dans ce niveau d’analyse, on interroge le développement de compétences liées à un poste de travail et leur partage entre les membres du groupe afin de développer le stock global de compétences du groupe considéré. Avec l’Open Marketing, nous nous intéressons aux connaissances et aux compétences liées aux tâches et aux activités réalisées par les collaborateurs marketing. Nous cherchons à étudier comment les prestataires peuvent contribuer à enrichir le stock de ressources, de capacités et de compétences des collaborateurs marketing. Aussi, le niveau d’analyse collectif des actifs marketing semble le plus adéquat. Retenant ce niveau d’analyse pour la thèse, nous proposerons donc d’étudier la captation (grâce au réseau de prestataires) d’actifs marketing liés à des tâches ou des activités marketing réalisées par les collaborateurs marketing, ces actifs étant ensuite repartagés en interne afin de développer le stock d’actifs marketing collectifs de l’organisation, utile aux collaborateurs marketing.

122 Pour résumer, en élaborant sur les lacunes de la littérature, nous considèrerons l’Open Marketing comme une capacité située au niveau environnemental destinée à ouvrir l’organisation à un réseau de prestataires dans le but d’apprendre de ceux-ci. Néanmoins, les actifs marketing captés grâce à cette démarche d’apprentissage inter-organisationnel ne seront pas étudiés au niveau organisationnel stratégique, mais au niveau collectif. Cela signifie que nous étudierons les ressources, les capacités et les compétences liées aux activités et aux tâches marketing réalisées par les collaborateurs marketing qui sont captées puis partagées au sein du collectif de travail.

2. 2. Manque de typologies et d’outils disponibles pour étudier les actifs marketing aux différents niveaux d’analyse

La littérature sur les actifs marketing nous a permis de mettre à jour différentes ressources, capacités et compétences marketing ainsi que des typologies de ces actifs (Morgan, 2012), au niveau organisationnel stratégique principalement. Cependant, alors que nous avons mis en avant l’existence d’autres niveaux d’analyse, il devient intéressant de savoir quels types de ressources, de capacités et de compétences marketing existent et sont échangés à ces autres niveaux, et en particulier au niveau collectif. En effet, les ressources, les capacités et les compétences marketing sont certainement différentes, selon que l’on se place au niveau organisationnel stratégique ou au niveau des activités de travail quotidiennes des collaborateurs marketing. Que deviennent alors les typologies et outils actuellement uniquement disponibles pour le niveau organisationnel stratégique ? En étudiant les actifs rattachés aux tâches et aux activités marketing quotidiennes des collaborateurs marketing comme un collectif (niveau d’analyse collectif), la thèse permettra d’appliquer et/ou de faire évoluer ces typologies et ces outils.

2. 3. Manque d’étude en profondeur d’une capacité ou d’une compétence marketing située à un niveau d’analyse supérieur

D’un point de vue méthodologique, les recherches empiriques sur les capacités et les compétences en marketing sont essentiellement quantitatives. Cependant, la façon dont les auteurs mesurent ces concepts pose question, comprenant de multiples biais à notre sens47. De plus, le fait d’utiliser une méthodologie quantitative pour étudier les actifs marketing comprend des limites. Premièrement, les recherches ne permettent pas d’acquérir une compréhension en profondeur du fonctionnement d’une capacité ou d’une compétence supérieure (i.e. de niveau environnemental ou organisationnel stratégique). A titre d’exemple, alors qu’ils étudient les capacités supérieures de benchmarking de l’organisation, Vorhies et Morgan (2005) notent que leur étude quantitative ne permet pas de savoir « comment les entreprises doivent développer, déployer et améliorer leurs capacités de benchmarking d’ordre supérieur » (Vorhies et Morgan, 2005, p. 91). Ainsi, de façon générale, il manque des recherches s’attachant plus à comprendre et décrire un

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A titre d’exemple, étudiant les capacités marketing, Vorhies (1998) demande à ses répondants de noter sur une échelle l’importance qu’ils accordent aux différentes activités marketing listées. Or, noter l’importance accordée à une activité marketing n’est pas la même chose que de noter la capacité de l’entreprise à réaliser l’activité marketing en question via le déploiement de ses ressources. De même, parmi les items destinés à mesurer les huit capacités marketing proposées par Vorhies et Morgan (2005), certains items ne semblent pas mesurer une capacité en tant que processus de déploiement des ressources (e.g. « Knowledge of competitors’ price tactics »), au contraire d’autres items qui semblent eux davantage mesurer une capacité (e.g. « Developing new products/services to exploit R&D investments »).

123 fonctionnement et une mise en œuvre qu’à mesurer un niveau de capacité ou de compétence (et l’influence de ce niveau sur la performance). Deuxièmement, les capacités et les compétences marketing mesurées dans ces recherches sont toujours situées à des niveaux supérieurs. Des auteurs regrettent pourtant que les capacités et les compétences soient toujours mesurées à un tel niveau d’abstraction. Ainsi, « le développement de mesures plus fines des capacités marketing pourrait augmenter la connaissance des processus marketing spécifiques et le moyen de les améliorer au mieux » (Vorhies et al., 2009, p. 1330). A titre d’exemple, pour étudier et mesurer une compétence organisationnelle stratégique en communication, il convient d’identifier et de mesurer les multiples compétences sous-jacentes liées à des tâches ou des activités sur lesquelles elle repose (telles que des compétences de rédaction des briefs, de sélection créative, de gestion des agences, d’analyse des résultats de campagne, etc.).

On peut suggérer que l’utilisation de recherches qualitatives pour étudier les capacités et les compétences en marketing permettrait de répondre aux limites exposées. Outre le fait de limiter les biais de mesure, une approche qualitative permettrait d’abord d’acquérir une compréhension du fonctionnement et de la mise en œuvre des capacités et des compétences d’ordre supérieur. Par ailleurs, une méthodologie qualitative permettrait certainement d’affiner la compréhension des ressources, des capacités et des compétences situées à des niveaux inférieurs (voir Vorhies et al., 2009). Dans la thèse, nous proposerons donc d’utiliser une approche qualitative pour (1) mieux rendre compte de la capacité supérieure d’Open Marketing (i.e. son fonctionnement et son déploiement dans l’organisation) et (2) investiguer et comprendre les actifs marketing d’ordre inférieur, situés au niveau collectif.

2. 4. Manque de précision quant aux éléments captés grâce aux capacités et compétences supérieures d’apprentissage

La littérature sur les actifs marketing mobilise parfois le concept d’apprentissage. Notamment, cette littérature comprend l’idée qu’il est nécessaire de s’appuyer sur une capacité organisationnelle d’apprentissage pour développer des capacités et des compétences marketing (e.g. O’Cass et Weerawardena, 2010). Plusieurs travaux mettent ainsi à jour des capacités ou des compétences marketing de niveau organisationnel stratégique ou environnemental qui permettent d’apprendre, et qu’on pourrait donc rapprocher de la démarche d’Open Marketing. A titre d’exemple, les capacités décrites par Day (1994 ; 2011) s’inscrivent dans cette idée. La capacité market sensing (Day, 1994) consiste à « scanner » l’environnement et à faire de la veille sur le client, les concurrents et les évolutions de l’environnement au travers d’un processus d’apprentissage organisationnel classique. De même, la capacité vigilant learning (Day, 2011) est définie comme un état d’esprit d’alerte et de curiosité de l’organisation marketing pour capter des insights et apprendre. Egalement, O’Cass et Weerawardena (2010) mettent en avant le rôle clé de la capacité à apprendre du marché (market-focused learning capability) pour construire des capacités marketing supérieures, ce qui conduit conjointement à une performance accrue pour la marque.

Cependant, de façon cohérente avec les observations exposées dans le paragraphe précédent (voir paragraphe 2.1., p. 120), on peut mettre en avant deux limites dans ces travaux :

▪ Ces travaux mettent en avant des capacités et des compétences marketing permettant de développer un apprentissage dans l’organisation mais n’explicitent pas spécifiquement ce qu’elles permettent d’apprendre dans le détail. Le plus souvent, ces capacités ou compétences d’apprentissage permettent de capter des informations de marché (Day, 1994) ou encore de développer des capacités marketing là

124 encore à un niveau organisationnel stratégique (O’Cass et Weerawardena, 2010). Néanmoins, l’étude de ces capacités ou compétences d’apprentissage situées à un haut niveau d’abstraction ne permet pas de donner des indications concrètes sur les ressources, les capacités et les compétences marketing de niveau inférieur qu’elles permettent de capter. Ainsi, à notre connaissance, les recherches n’étudient pas de capacité ou de compétence d’apprentissage supérieure permettant de développer les actifs au niveau des collaborateurs marketing (i.e. leur savoir et savoir-faire).

▪ Ces capacités d’apprentissage ou de « scanning » (Day, 1994) ne sont pas spécifiquement dirigées vers un type d’acteur extérieur. Au contraire, de façon cohérente avec la littérature sur l’apprentissage en marketing, elles sont destinées à apprendre de façon large de l’ « environnement ». Par exemple, la capacité market sensing de Day (1994), présente dans les organisations orientées marché, n’est pas spécifiquement dirigée vers le scanning auprès des prestataires mais concerne la veille sur le client et la concurrence en général. Cela est cohérent avec le fait qu’on a surtout considéré l’orientation-marché comme une veille auprès des clients, des concurrents et de l’environnement technologique, oubliant un peu le poids que peuvent représenter les fournisseurs et les prestataires pour capter des informations (Slater et Narver, 1995).

Au vu de ces limites, une opportunité se dessine : étudier l’Open Marketing comme une capacité