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CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL

7. SYNTHÈSE DU CADRE CONCEPTUEL ET OBJECTIFS DE LA

De l’ensemble de ces recherches, nous retenons que les enfants du préscolaire se situent dans une phase d’appropriation de l’écrit (Besse, 1995) au cours de laquelle ils réalisent des apprentissages en lien avec la lecture et l’écriture. Dans le but de soutenir cette appropriation, les chercheurs sont de plus en plus nombreux à souligner la nécessité de travailler dès le préscolaire la compréhension de textes écrits à l’oral à travers la médiation de l’enseignant (Bianco et al., 2010; Cain, 2010; Fayol, 1996; 2002; Florit et al., 2011; Giasson, 2011; Kendeou et al., 2009; Makdissi et al., 2010; Martinet et Rieben, 2010, Van den Broek et al., 2005). Les pratiques de lecture à haute voix constituent un excellent moyen de le faire. Par conséquent, nous avons choisi de nous intéresser à la lecture à voix haute de livres de littérature de jeunesse en tant que pratique d’éveil à la lecture. De façon à dégager des pratiques exemplaires, nous avons sélectionné des enseignants experts caractérisés par leur réflexivité (Perrenoud, 2003), leur connaissance étendue de la littérature de jeunesse (Morrow et Gambrell 2002) et leur engagement (actuel ou passé) dans une démarche de formation continue relative à l’enseignement de la littéracie (Taylor, Pressley et Pearson, 2000).

Dans une optique de prévention des difficultés en lecture, les chercheurs recommandent d’intégrer un travail sur les inférences aux pratiques de lecture à haute voix (Cabell et al., 2008; Kispal, 2008; Lafontaine, 2003; Makdissi et al, 2010; Tauveron, 1999; Van Kleeck, 2008), car de nombreux enfants éprouvent des difficultés reliées à la mise en œuvre du processus inférentiel (Golder et Gaonac’h, 2004, Lafontaine, 1997). Ces difficultés seraient en partie imputables au fait que les inférences sont peu travaillées en classe avec les jeunes enfants (Giasson, 2011, Goigoux, 1998; Tauveron, 2002). Or, la réalisation d’inférences est essentielle à la compréhension. En effet, c’est grâce aux inférences que le lecteur peut établir une cohérence locale et globale dans le texte, mais aussi qu’il peut en dépasser le sens

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en élaborant des prédictions (Irwin, 1986). Des recherches ont montré que de jeunes enfants — même d’âge préscolaire — sont en mesure de faire des inférences (Florit et al., 2011; Makdissi, 2004; Van den Broek et al., 2005), mais qu’ils le font moins spontanément et avec moins d’efficacité que des lecteurs plus vieux (Paris, Lindauer et Cox, 1977; Van den Broek et al., 2005). Bien que cette habileté se développe avec l’âge (Makdissi, 2004; Van den Broek et al., 2005), les élèves peuvent être entraînés à faire des inférences, et ce, dès le préscolaire (Bianco et Pellenq, 2002; Bianco, et al., 2004; Bianco et al., 2010; McGee et Johnson, 2003). Dans quelques rares études, des pratiques de lecture à haute voix axées sur un travail inférentiel ont été explorées (Dupin de Saint-André et al., 2008a; 2008 b; Makdissi et al., 2010), mais d’autres recherches sont encore nécessaires pour examiner les effets de lectures à haute voix avec un travail inférentiel sur le développement de l’habileté des élèves à faire des inférences. Comme il a été remarqué que les enseignants, peu conscients qu’un texte nécessite pour les élèves de réaliser des inférences, sont peu enclins à poser des questions pour les travailler (Scheiner et Gorsetman, 2009; Maisonneuve, 2010), nous avons décidé de former des enseignants à intégrer à leurs pratiques de lecture à haute voix un travail inférentiel et de comparer leurs pratiques – décrites principalement à travers les interventions mises en œuvres par les enseignants – à celles d’enseignants non formés à le faire. Nous avons également étudié les effets de ces pratiques sur le développement de l’habileté des élèves du préscolaire à faire des inférences.

Comme les formations de courte durée sous la forme d’ateliers sont critiquées quant à leur pertinence pour permettre aux enseignants d’apporter des changements dans leur pratique (Lafortune et Martin, 2004; MEQ, 2001; Raymond, 1998; Savoie-Zajc et Bednarz, 2007), nous avons choisi de nous engager avec des enseignants dans une recherche collaborative qui, en raison de son dispositif, semble offrir des conditions optimales pour soutenir le développement professionnel des enseignants (Couture, Bednarz et Barry, 2007;

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Desgagné, 1997; Desgagné et al., 2001; Duchesne et Savoie-Zajc, 2007; MEQ, 2001 b; Savoie-Zajc et Bednarz, 2007). En effet, de cette manière, nous avons pu former les enseignants et les accompagner lors de la mise en place des changements dans leurs pratiques. Intéressée par le potentiel, déjà souligné par quelques études (Butler et al., 2004; Butler, 2005; Savoie-Zajc et Bednarz, 2007), de ce type de recherche pour favoriser le développement professionnel des enseignants, nous avons souhaité l’examiner plus en détail toujours dans le but de mettre au jour des moyens de bonifier les pratiques des enseignants pour qu’ultimement ils puissent mieux guider les élèves dans leur appropriation de l’écrit.

À la lumière des résultats des études présentées dans le cadre conceptuel, nous formulons les objectifs suivants pour notre recherche :

Objectif 1

Décrire et comparer les pratiques de lecture à haute voix adoptées au préscolaire par des enseignants experts57 qui ont pour objectif de travailler la compréhension inférentielle et par des enseignants experts qui n’ont pas pour objectif de travailler la compréhension inférentielle lors de ces lectures.

Objectif 2

Examiner l’influence des pratiques de lecture à haute voix des enseignants experts sur le développement de l’habileté des élèves à faire des inférences lorsqu’un texte leur est lu.

Objectif 3

Étudier à titre exploratoire la recherche collaborative en tant que voie potentielle de développement professionnel pour les enseignants dans le but de maximiser les impacts de leurs pratiques sur le développement des habiletés de compréhension des élèves.

57 Dans cette recherche, les enseignants experts sont des enseignants réflexifs, qui connaissent la

littérature de jeunesse et qui s’engagent (ou se sont engagés) dans une démarche de formation continue relative à l’enseignement de la littéracie.

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