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CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL

5. LES INFÉRENCES

5.1. DÉFINITION ET CLASSIFICATION DES INFÉRENCES

5.1.2. Notre classification des inférences

En vue de former des enseignants, nous avons choisi d’adapter la classification de Bianco et Coda (2002) en conservant une seule des dimensions proposées par ces chercheuses : celle sur la nécessité des inférences. En effet, afin de préparer ses lectures à haute voix, il nous semble primordial qu’un enseignant soit à même de distinguer les inférences nécessaires de celles qui sont optionnelles. De plus, comme il existe des types d’inférences qui selon le contexte vont être nécessaires

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ou optionnelles, notre classification, présentée dans le tableau III, comporte trois grandes catégories d’inférences : les inférences nécessaires, les inférences optionnelles et les inférences qui sont nécessaires ou optionnelles en fonction du contexte.

Aux inférences nécessaires (inférences anaphoriques et causales) relevées par Bianco et Coda (2002), nous avons ajouté les inférences lexicales qui font référence à la compréhension d’un mot du texte qui ne fait pas partie du répertoire lexical du lecteur ou de l’auditeur (Makdissi, Boisclair et Sanchez, 2006). Selon nous, ces inférences ne doivent pas être négligées, car elles jouent souvent un rôle crucial dans la compréhension.

Dans notre classification, les inférences optionnelles comprennent les inférences prédictives et les inférences pragmatiques. Ces deux types d’inférences, sans être nécessaires à la compréhension, permettent de la soutenir.

Enfin, nous avons choisi de classer, parmi les inférences nécessaires ou optionnelles selon le contexte, les inférences logiques décrites précédemment et les inférences de différents contenus. Ces dernières englobent les inférences de lieu, d’agent, de temps, d’instrument, d’objet, de sentiment-attitude, de catégorie et d’action (Johnson et Johnson, 1986; Graesser, Singer et Trabasso, 1994 et Van den Broek, 1994). Ces inférences vont revêtir une grande importance en ce qui a trait à la cohérence du texte (ex. : une inférence de sentiment-attitude peut permettre au lecteur de comprendre la réaction émotive d’un personnage à un événement) et d’autres fois vont simplement venir enrichir sa compréhension (Graesser et al., 1994). Par exemple, dans la phrase « Le zèbre, cerné par les lionnes, restait immobile, tremblant, ne sachant comment s’extirper de cette situation aux allures inextricables. », le lecteur doit inférer l’émotion éprouvée par le zèbre face à cette menace, soit la peur. Cette inférence est nécessaire à la compréhension, car elle nous permet de comprendre que le zèbre est en fait pétrifié et que c’est pour cette

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raison qu’il tremble et qu’il reste immobile. Le lecteur pourrait également faire une inférence de sentiment-attitude concernant les lionnes, il y a fort à penser qu’elles sont heureuses de cette situation et qu’elles se pourlèchent les babines en rêvant à leur festin. Cependant, cette inférence n’est pas nécessaire à la compréhension de la phrase.

Afin d’illustrer l’ensemble de notre classification, nous proposons un court texte dans le but d’exemplifier chaque type d’inférence dans le tableau III : « Émilie, telle une sprinteuse, se dirige vers son école. Elle est pressée, car elle a raté l’autobus scolaire. Lorsqu’elle met enfin les pieds dans la cour d’école, ses amis sont encore en train de jouer ». Ce texte et les exemples associés ont initialement été publiés dans Dupin de Saint-André, Montésinos-Gelet et Morin (2008a).

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Tableau III – Notre classification des types d’inférence (adaptée de Bianco et Coda, 2002)

Type

d’inférence Définition Exemples

Inférences nécessaires

anaphoriques

Lien entre un mot de substitution et son référent (Bianco et Coda, 2002; Fayol, 1996; Graesser, Singer et Trabasso, 1994 ; Van den Broek, 1994 ; Van den Broek et al., 2005).

Comprendre que le pronom « elle » renvoie à Émilie.

causales

Lien de causalité entre plusieurs événements (Bianco et Coda, 2002; Fayol, 1996; Johnson et Johnson, 1986 ; Graesser, Singer et Trabasso, 1994 ; Richards et Anderson. 2003 ; Van den Broek, 1994 ; Van den Broek et al., 2005).

Comprendre le lien de causalité entre les deux premières phrases, c’est-à-dire qu’Émilie court, car elle est pressée.

lexicales

Comprendre un mot peu familier (Makdissi,

Boisclair et Sanchez, 2006)

Comprendre le sens du mot sprinteuse44 qui est

probablement peu familier pour de jeunes enfants.

Inférences

optionnelles prédictives

Anticipations plausibles de la suite du texte (Bianco et Coda, 2002; Van den Broek, 1994).

Après la lecture des deux premières phrases, émettre des hypothèses sur ce qui va arriver à Émilie.

44 L’inférence lexicale sur le mot « sprinteuse » est considérée comme nécessaire dans ce texte, car

elle permet de comprendre qu’Émilie court très vite pour essayer de ne pas arriver en retard à l’école.

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pragmatiques

Élaboration qui donne lieu à un résultat plausible

(Bianco et Coda, 2002).

Imaginer la raison du retard d’Émilie (ex. : le réveil de ses parents n’a pas sonné; elle a voulu regarder la fin de son dessin animé préféré avant d’aller à l’école…). Inférences nécessaires ou optionnelles selon le contexte de différents contenus

Lieu, agent, temps, instrument, objet, sentiment-attitude,

catégorie et action (Johnson et Johnson, 1986; Graesser, Singer et Trabasso, 1994 et Van den Broek, 1994)

Réaliser une inférence d’agent pour

comprendre qu’Émilie est une enfant.

logiques

Déduction qui donne lieu à un résultat certain (Bianco et Coda, 2002).

Comprendre qu’Émilie n’arrive pas en retard à l’école puisque ses amis sont encore dans la cour d’école.

Cette classification nous sera utile pour créer notre épreuve d’évaluation de l’habileté des élèves à faire des inférences ainsi que pour former les enseignants.