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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE

5. LES ENSEIGNANTS EXPERTS

5.1. Les caractéristiques des enseignants experts

Différents chercheurs se sont penchés sur les caractéristiques des enseignants experts dans l’enseignement de la littéracie et ont dégagé de nombreuses caractéristiques d’expertise13. Dans cette recherche, nous en avons sélectionné quatre qui se rapportent directement à nos objets de recherche.

Une des caractéristiques des enseignants experts est qu’ils réfléchissent sur leurs pratiques d’enseignement et sur les moyens de les améliorer (Pressley, Allington,

13 À titre d’exemple, Ruddell (2004) a recensé, à lui seul, dix éléments caractéristiques des

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Wharton-McDonald, Block et Morrow, 2001). Un enseignant expert est alors un praticien réflexif, c’est-à-dire qu’il est un professionnel capable d’autoréguler son

action … et de guider son propre apprentissage par une analyse critique de ses pratiques et des résultats de celles-ci (Paquay, 1994, p.19). La notion de

réflexivité est aussi valorisée par le MEQ (2001b) qui, dans un document sur la formation à l’enseignement, souligne que l’enseignant doit réfléchir sur sa

pratique (analyse réflexive) et réinvestir les résultats de sa réflexion dans l’action

(p.157). En tenant compte des éléments que nous venons de présenter, nous avons choisi pour notre recherche des enseignants experts réflexifs.

Par ailleurs, une enquête menée au Québec a montré que les pratiques de lecture à haute voix ne sont pas uniformes dans les milieux scolaires (Giasson et Saint- Laurent, 1999). Cette constatation nous amène à considérer deux autres caractéristiques des enseignants experts, spécifiques à l’utilisation de la littérature de jeunesse en classe. D’une part, en ce qui a trait aux pratiques d’enseignement de la littérature de jeunesse, plusieurs chercheurs soulignent qu’il est nécessaire que l’enseignant ait une bonne connaissance de la littérature de jeunesse (Giasson, 2003) afin de pouvoir mettre en place des pratiques de littérature de jeunesse efficaces (Morrow et Gambrell 2000; 2002). C’est pourquoi, dans notre recherche, nous avons sélectionné des enseignants qui ont une bonne connaissance de la littérature de jeunesse. D’autre part, le développement professionnel est essentiel

pour les enseignants afin qu’ils développent une connaissance étendue de la littérature, connaissance nécessaire pour une pratique efficace (Morrow et

Gambrell, 2000, p.580)14. À ce propos, les concepteurs du MEQ (2001b), dans un

document concernant la formation à l’enseignement, insistent sur la nécessité de l’engagement des enseignants dans une démarche personnelle de formation continue. En considérant ce dernier élément, nous avons privilégié dans notre recherche des enseignants qui visent à accroître leurs compétences

14 Traduction libre de professional development opportunities for teachers are essential for

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professionnelles en s’engageant activement dans une démarche de formation continue15 relative à l’enseignement de la littéracie.

Enfin, les enseignants experts développent des buts clairs par rapport à leur pratique (Ruddell, 2004). En ce qui concerne cet aspect, Grossmann (2000) a mené une étude qui visait à décrire les pratiques (déclaratives) de lecture des enseignants en maternelle. Celle-ci lui a permis de remarquer que l’objectif poursuivi par l’enseignant permettait de distinguer les comportements et les attitudes des

enseignants dans le domaine de la transmission textuelle (Grossmann, 2000,

p.199). Dans notre étude, nous avons décidé de considérer cet objectif, car celui-ci semble avoir des répercussions sur les pratiques de l’enseignant et sur la qualité de ces dernières. Compte tenu de notre objet d’étude, nous comparons les pratiques de lecture à haute voix d’enseignants qui ont pour objectif de travailler la compréhension inférentielle des élèves au cours de ces lectures avec celles d’enseignants qui ne poursuivent pas cet objectif.

Comme il semblerait que les inférences soient peu travaillées lors des lectures à haute voix (Maisonneuve, 2010; Scheiner et Gorsetman, 2009) et que les indications quant à la façon de conduire ce travail sont très rares (Dupin de Saint- André, Montésinos-Gelet et Morin, 2007), il nous est apparu fort difficile de trouver des enseignants ayant comme objectif d’amener les élèves à construire le sens des inférences lors des lectures à haute voix. Pour cette raison, nous avons décidé de former des enseignants à le faire et de comparer leurs pratiques, et les effets de celles-ci sur les élèves, aux pratiques d’enseignants non formés. Ce faisant, nous cherchons à contribuer au développement professionnel des enseignants, c’est-à-dire au processus de changement, de transformation, par

lequel les enseignants parviennent peu à peu à améliorer leur pratique, à maîtriser leur travail et à se sentir à l’aise dans leur pratique (Uwamariya et

Mukamurera, 2005, p.148).

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5.2. Former des enseignants experts pour travailler les inférences

Sachant que les formations de courte durée, sous la forme d’ateliers, sont critiquées quant à leur impact sur le développement professionnel des enseignants (Lafortune et Martin¸2004; MEQ, 2001b; Raymond, 1998; Savoie-Zajc et Bednarz, 2007), et que, pour espérer jouer un rôle dans la modification des pratiques des enseignants, il est notamment souhaitable de leur offrir un soutien en classe comme complément à une formation (Butler, 2005), nous avons opté pour une recherche collaborative, qui apparaît être une avenue intéressante pour soutenir le développement professionnel des enseignants (Couture, Bednarz et Barry, 2007; Desgagné, 1997; Duchesne et Savoie-Zajc, 2007; Savoie-Zajc et Bednarz, 2007). Ainsi, notre but est de tenter de bonifier les pratiques de lecture à haute voix des enseignants en les aidant à y intégrer un travail sur les inférences afin qu’ultimement ces pratiques aient un impact sur le développement de l’habileté des élèves à faire des inférences.