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CHAPITRE 2 : CADRE CONCEPTUEL

4. L’ACTIVITÉ DE L’ENSEIGNANT : LES PRATIQUES DE LECTURE

4.3. LES APPORTS DE LA LECTURE À HAUTE VOIX POUR LES ÉLÈVES

La lecture à haute voix présente de nombreux intérêts pour le développement des habiletés des élèves (Smith, 1989; Galda, Ash et Cullinan, 2000). Diverses recherches ont été menées sur les apports de la lecture à haute voix de livres en classe, elles portent, principalement, sur la lecture de livres d’histoire36. Dans cette partie, nous étudions les recherches sur les effets des lectures à haute voix sur les habiletés de compréhension des élèves du préscolaire et du primaire et sur le développement d’habiletés en lien avec la compréhension.

4.3.1. Le développement des habiletés de compréhension des élèves Dans une étude réalisée avec des élèves du préscolaire, Dickinson et Smith (1994) ont noté que la lecture à haute voix de l’enseignant avait un effet à long terme sur le développement des habiletés de compréhension des élèves. Ces chercheurs ont observé 25 enseignants qui lisaient à leurs élèves. À partir de ces observations, ils ont relevé les trois styles de lecture à haute voix décrits précédemment. Un an après leurs observations, ils ont fait passer aux élèves (n=25) des épreuves de compréhension d’un texte oralisé par l’adulte. Leurs résultats indiquent qu’un des styles de lecture à haute voix (orienté sur l’acte de raconter) générerait une amélioration de l’habileté des élèves à comprendre un texte. Notons au passage que l’épreuve utilisée pour mesurer les habiletés de compréhension des élèves incluait une section sur les inférences. Cependant, dans l’analyse des résultats, il n’y a pas de retour sur cette habileté, qui nous intéresse particulièrement.

36 Voir Smolkin et Donovan (2004) pour une recherche sur la lecture à haute voix de livres

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L’étude expérimentale de Rosenhouse, Feitelson, Kita et Goldstein (1997), menée auprès d’élèves de première année en Israël (n=339), a permis de montrer que la lecture à haute voix quotidienne, accompagnée de discussions, a un effet sur les habiletés de compréhension en lecture des élèves. Les élèves des groupes expérimentaux, auxquels la lecture était faite, pendant six mois, vingt minutes par jour ont obtenu de meilleurs résultats lors d’une tâche de compréhension en lecture autonome.

Les pratiques de lecture à haute voix n’offrent pas seulement la possibilité aux élèves de développer leurs habiletés de compréhension d’un texte qu’il soit oralisé par l’adulte ou lu de manière autonome, elles favorisent également le développement d’autres habiletés en lien avec la compréhension et de ce fait qui seront utiles lors de la lecture de textes de façon autonome.

4.3.2. Le développement d’habiletés en lien avec la compréhension des élèves

4.3.2.1.L’acquisition de nouveaux mots de vocabulaire

Une étude réalisée par Robbins et Ehri (1994) avec des enfants du préscolaire (n=33) ne sachant pas lire révèle que ceux-ci peuvent acquérir de nouveaux mots de vocabulaire durant l’écoute d’une histoire. À cette fin, les mots doivent être répétés plusieurs fois37. Toutefois, tous les enfants n’ont pas un gain de vocabulaire équivalent lors de l’écoute des histoires, les élèves qui bénéficient le plus de ce type d’activité sont ceux qui ont un niveau de vocabulaire de base plus élevé.

Similairement, Elley (1989) a effectué deux recherches qui ciblaient des enfants de deuxième et de troisième année (n= 284) en Nouvelle-Zélande. Celles-ci ont mis en évidence que les enfants de 7 et 8 ans peuvent aussi acquérir de nouveaux mots

37 D’après ces chercheuses, quatre fois sont nécessaires, mais pas forcément suffisantes, pour que

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de vocabulaire à travers l’écoute d’une histoire. De plus, ce chercheur a remarqué que les gains étaient nettement améliorés si les mots de vocabulaire ciblés dans le texte étaient expliqués par l’enseignant au cours de la lecture. Pour finir, ces gains semblent être stables, car lors d’un post-test trois mois après la lecture de l’histoire, ils ne montrent qu’un léger déclin. Une nuance est à apporter à cette étude. En effet, lorsqu’Elley a réitéré cette expérience avec une autre histoire, les gains se sont avérés plus faibles. Ce chercheur a émis l’hypothèse que le thème de la deuxième histoire — moins familier des élèves — avait moins retenu leur attention (élément corroboré par les enseignants) et que, de ce fait, ils avaient été moins enclins à mémoriser de nouveaux mots.

4.3.2.2.Une sensibilisation à la structure d’une histoire

Connaître la structure d’une histoire offre un support pour en organiser et en résumer les idées, ce qui facilite la mise en œuvre des macroprocessus lors de la lecture (Irwin, 1986). Dans une étude sur les styles de lecture des enseignants et les habiletés de compréhension d’élèves du préscolaire, Teale et Martinez (1996) ont remarqué que la lecture à haute voix de textes narratifs a une influence sur la façon dont les élèves comprennent la structure de l’histoire. En effet, les élèves sont davantage sensibilisés à celle-ci si l’enseignant discute des informations clés dans le texte, notamment des personnages avec leurs buts et leurs réactions.

4.3.2.3.Une expérience avec le langage écrit

Le langage écrit se différencie du langage oral en fonction de plusieurs aspects, par exemple les constructions syntaxiques et le vocabulaire utilisés (Garton et Pratt, 2004; Oakhill et Cain, 2004). De plus, l’usager d’une langue à l’écrit a plus souvent recours à un registre de langue soutenu. Lors de leur appropriation de l’écrit, les enfants doivent apprendre à faire la distinction entre ces deux types de langage. L’écoute d’histoires oralisées par l’enseignant donne aux enfants l’occasion d’avoir une expérience avec le langage écrit, dit décontextualisé, c’est-

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à-dire qu’ils réfléchissent sur une histoire qui est hors du ici et maintenant (Garton et Pratt, 2004).

4.3.2.4.Synthèse des apports de la lecture à voix haute

Nous venons de voir que les apports de la lecture à haute voix pour les élèves sont multiples. Ces expériences de lecture ont différents effets :

Les élèves ont une plus grande familiarité avec le langage des livres; ils ont développé le concept d’histoire; et peut-être le plus important, ils savent que le sens peut être extrait du texte, ils peuvent comprendre et utiliser le discours et la narration, et le plus important de tous, ils prennent du plaisir à lire38 (Garton et Pratt , 2004, p.226).

Toutefois, la lecture d’histoires comme pratique d’enseignement n’améliore pas systématiquement les habiletés des élèves par rapport à l’écrit (Meyer et al., 1994). C’est davantage la qualité des interactions en jeu lors de cette lecture qui aurait un effet sur les habiletés des enfants plutôt que la lecture prise isolément (Meyer et al. 1994). Certaines pratiques d’exploitation des œuvres en classe sont plus fécondes que d’autres quant au développement des habiletés des élèves (Beck et McKeown, 2001; Dickinson et Smith, 1994; Morrow et Gambrell, 2000; Teale et Martinez, 1996). Par conséquent, nous nous penchons maintenant sur les caractéristiques des pratiques effectives de lecture à haute voix de livres en classe.

38 Traduction libre de Children have greater familiarity with the language ok books; they have

developed the concept of a story; and perhaps most importantly, they know that meaning can be extracted from the printed page, they can understand and use discourse and narrative, and most importantly of all, children enjoy reading stories.

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4.4. Les caractéristiques des pratiques de lecture à haute voix les plus