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IV) RESULTATS PRELIMINAIRES

3) Sur un mélange ternaire

Figure (IV.11) : Champs de température, à gauche, et de masse volumique, à droite, lors de l’application de l’algorithme HEX sur un mélange équimolaire méthane/n-pentane/n-décane.

Dans la continuité des résultats précédents nous avons appliqué l’algorithme HEX à un mélange ternaire, chose qui n’a, à notre connaissance, jamais été réalisée. L’optique étant de pouvoir faire une étude de ces mélanges ternaires qui introduisent des difficultés de formalisme et qui sont une porte d’entrée vers les systèmes multiconstituants. Le mélange étudié est composé equimolairement de méthane, de n-pentane et de n-décane. Il est lui aussi en phase supercritique à T*=2,273 et ρ*=0,4227. Pour ce mélange nous avons calculé une

pression réduite P*=1,045. Ce qui correspond en variables thermodynamiques non réduites à

T=799 K, ρ=0,3288 g/cm3 et P=30,98 MPa.

Les paramètres numériques de la simulation sont les mêmes que pour le mélange binaire précédent. La valeur du flux de chaleur appliqué est 50% plus élevée que pour le mélange précédent.

De même que pour les deux exemples précédents, le gradient de température est linéaire sur la demi-boîte de simulation, excepté au niveau des couches limites. De la même manière, de par l’équilibre mécanique, un gradient de masse volumique linéaire s’est établit avec un signe opposé à celui du gradient de température comme le montre la figure (IV.11). Les comportements thermique et thermodynamique de ce mélange ternaire semblent donc cohérent.

Quand on analyse les courbes de la figure (IV.12), on voit qu’il y a bien eu thermodiffusion et qu’une migration relative des espèces les unes par rapport aux autres s’est instaurée De plus les gradients de fractions molaires sont linéaires et permettent donc d’estimer directement le facteur ou le rapport de thermodiffusion.

Figure (IV.12) : Fractions molaires des différents composés d’un mélange équimolaire méthane/n-pentane/n-décane après application d’un gradient thermique suivant x.

Pour ce mélange il apparaît que, relativement aux deux autres espèces, le composé le plus lourd a tendance à migrer vers les zones froides. Ce résultat est en accord avec les quelques

règles empiriques qui ont été établies. Par ailleurs le n-pentane dans cette configuration ne subit quasiment aucune thermodiffusion par rapport aux deux autres espèces. Ce résultat peut être en partie expliqué en terme de composé équivalent dont nous traiterons dans la suite du document.

Comme sur la figure (IV.10), la répartition des particules donnée sur la figure (IV.13) a été normalisée de telle manière qu’à l’équilibre cette valeur soit égale à l’unité. Ces graphes nous indiquent que ce sont les composés les plus lourds qui engendrent les gradients de fraction molaires, le méthane restant répartit de manière quasiment homogène dans toute la boîte de simulation. On voit ainsi que le n-décane migre plus que le n-pentane qui lui même se déplace plus que le méthane vers les zones froides de la boîte de simulation. Une explication thermodynamique similaire à celle que nous avons fournie pour le mélange binaire semble à même d’expliquer le fait que ce soit les composés les plus lourds qui se déplacent dans ces conditions supercritiques de gaz dense

Figure (IV.13): Répartition normalisée des particules d’un mélange équimolaire de méthane, de n-pentane et de n-décane soumis à un gradient de température le long de l’axe x.

Ces résultats cohérents indiquent que notre programme est valide lorsqu’il est appliqué à des mélanges ternaires et permet d’appréhender ces situations complexes.

c) Choix de l’algorithme de mise hors équilibre

N-décane

N-pentane

Comme dans toute démarche de simulation numérique, une attention toute particulière doit être portée à l’étude des différents algorithmes existant, afin d’utiliser, si possible, le plus performant. De même, une étude de sensibilité aux paramètres purement numériques est fondamentale, car elle permet de valider les résultats obtenus pour une méthodologie et un modèle donné.

La démarche de simulation numérique que nous avons choisie, dite de dynamique moléculaire hors équilibre directe, peut être réalisée par trois algorithmes différents, HEX, TEX et PEX, tels que nous les avons défini dans le chapitre III.7.d.1.

Ces approches, bien qu’algorithmiquement différentes, restent semblables dans l’idée directrice, à savoir un échange d’énergie cinétique entre différentes parties de la boîte de simulation, tout en conservant les conditions périodiques. Assez étonnamment il n’existe pas dans la littérature de comparaison directe entre ces différentes approches.

La première étape a été de vérifier leur capacité à fournir des résultats cohérents entre eux sur la thermodiffusion pour un mélange donné. Pour ce faire nous avons choisi deux mélanges équimolaires de méthane/n-décane dans des conditions thermodynamiques différentes. Un en phase liquide à T*=0,977 et ρ*=0,8227 et un en phase supercritique à T*=2,273 et ρ*=0,4227. Soit pour le premier mélange une température de 311K et une masse volumique de 656,7 kg/m3 et pour le second une température de 802,7K et une masse volumique de 337,43 kg/m3.

Les paramètres du potentiel de Lennard-Jones des deux composés ont été tirés de (Simon et al., 1999), excepté que pour le mélange en phase supercritique nous avons pris kij=0. Le système simulé est composé de 3000 centres de forces pour le mélange liquide et de 1500 pour le mélange supercritique. Les simulations ont été réalisées avec un pas de temps de 5.10

-15s, avec un rayon de coupure de 2,5 fois la valeur des diamètres atomiques. Enfin l’ensemble des simulations a été mené pendant 17,5 millions pas de temps, soit 87,5.10-9 s. Les 12,5.10-9 premières secondes ont été écartées pour faire les mesures du facteur de thermodiffusion, afin de s’assurer de l’atteinte de l’état stationnaire (cf. chapitre II.1.c).

Figure (IV.14) : Evolution du facteur de thermodiffusion dans un mélange liquide équimolaire méthane/n-décane avec la durée de la simulation par trois méthodes hors équilibre

Dans toutes les simulations nous avons noté une légère dérive de l’énergie totale du système n’excédant pas le pourcent, essentiellement traduite par une baisse de la température moyenne (Galliéro, 2000). Des trois méthodes c’est l’approche PEX qui limite le plus cette dérive. L’approche TEX, la plus intrusive, étant celle qui engendre la plus forte dérive. Afin d’éviter tout problème plus important dans d’autres configurations, nous avons introduit un thermostat qui s’active uniquement que lorsque la température moyenne diffère de plus de 5% de celle de consigne et ceci de manière ponctuelle dans le temps.

Les résultats obtenus avec les trois approches pour le facteur de thermodiffusion sur le mélange liquide sont en très bon accord entre eux. En effet nous avons obtenu, αT=2,05±0,05 par la méthode HEX, αT=2,06±0,06 avec PEX et αT=2,03±0,05 avec TEX. Une simulation sur ce même système, utilisant l’algorithme HEX, avait été réalisée par Hafskjold (Simon et al., 1999) et il avait obtenu αT=1,8±0,1. La différence de 15% entre les valeurs obtenues peut s’expliquer par deux aspects indépendants: la taille du système simulé, nous en parlerons par la suite, et la forme du potentiel utilisé qui est dans le cas d’Hafskjold un potentiel de Lennard-Jones splinés qui donne des résultats qui diffèrent de ceux utilisant un Lennard-Jones tronqué (Bordat et al., 2001), qui est le modèle pour lequel nous avons opté.

Comme le montre la figure (IV.14), les résultats convergent après un temps de l’ordre de 5.10-8s. Sur cette figure, pour éviter une surcharge, les barres d’erreurs n’ont pas été indiquées, mais après cette durée de simulation les résultats fournis par les différentes approches sont dans les barres d’erreurs les unes des autres.

Pour ce qui concerne le mélange supercritique, les résultats sont également très satisfaisants. En effet nous avons obtenu αT=1,4±0,04 par l’approche HEX, αT=1,39±0,05 par TEX et αT=1,39±0,05 avec PEX.

La figure (IV.15) indique clairement une convergence des résultats les uns par rapport aux autres. Par ailleurs tout comme sur la figure (IV.14), l’approche HEX est la plus régulière et la plus stable au cours du temps. Ainsi dans les deux mélanges, c’est la méthode qui donne le plus rapidement un résultat valide. Néanmoins, il est probable que pour d’autres mélanges ou d’autres conditions initiales cette remarque ne soit plus valide.

Nous avons également analysé la manière dont se comportait chacune de ces approches avec la réduction de la taille du système. Une étude plus poussée appliquée à HEX sera présentée dans la section suivante. Les simulations ont été réalisées sur les deux systèmes précédents mais cette fois ci seulement composés au total de 500 particules.

HEX TEX PEX

Mélange liquide 1,75±0,12 1,69±0,15 1,55±0,14 Mélange supercritique 1,27±0,09 1,24±0,1 1,3±0,09

Tableau (IV.1) : Facteurs de thermodiffusion obtenus pour un petit système par les trois approches hors équilibre directes

Lorsque l’on compare les valeurs obtenues, données dans le tableau (IV.1) avec celles calculées précédemment sur les « gros » systèmes, il est manifeste que les diverses approches fournissent un facteur de thermodiffusion plus faible pour les simulations sur des systèmes plus petits. Cette différence étant induite par des effets de taille finie classiques en dynamique moléculaire (Haile, 1992). Cependant, il ne semble pas qu’il y ait une méthode qui soit nettement moins sensible que les autres à la taille du système. D’autres résultats non présentés ici confirme cette remarque. Il semble néanmoins qu’en phase liquide l’approche HEX soit la moins altérée par la taille du système (Galliéro, 2000).

Il existe d’autres arguments en faveur de l’approche HEX. Ainsi quand on la compare avec l’approche PEX, qui est la méthode la moins intrusive car elle conserve parfaitement quantité de mouvement et énergie totale du système, le fait que l’application du flux de chaleur s’effectue à chaque pas de calcul et non tous les M pas où M est de l’ordre de quelques centaines est un avantage indéniable. En effet il est probable qu’une excitation plus importante en amplitude, mais moins fréquente, va engendrer des oscillations dans le système. De plus il est possible que l’approche PEX excite certains modes préférentiellement au détriment d’autres. Ainsi (Calderon et Ashurst, 2002) ont montré que l’approche PEX appliquée au flux de quantité de mouvement induisait dans certains cas un flux qui n’était plus stationnaire et par la même une difficulté. De plus, de manière inhérente à la méthode PEX, on brise, lors des échanges de particules, des mouvements collectifs et donc des modes hydrodynamiques à grandes longueurs d’ondes. Modes qui contribuent certainement aux aspects diffusifs. Pour les deux autres approches les vecteurs vitesses étant seulement modulés en amplitude, cet effet bien que présent doit être de moindre importance.

Figure (IV.15) : Facteur de thermodiffusion dans un mélange supercritique équimolaire méthane/n-décane en fonction du temps de simulation par trois approches hors équilibre

différentes, (■) HEX, () TEX et () PEX.

Quant à l’approche TEX, elle pose deux problèmes. En premier lieu elle implique deux recalages successifs des vitesses, contrairement à l’approche HEX qui n’en nécessite qu’une. Ceci afin d’obtenir la température désirée dans les couches thermalisées tout en maintenant la quantité de mouvement ainsi que l’énergie totale constants. De plus dans cette approche on impose le gradient de température et non le flux de chaleur, ce qui pose problème vis à vis de ce à quoi l’on abouti en terme de production d’entropie, voir annexe B.

Ces différentes constatations nous ont incité à choisir l’approche HEX pour toutes les simulations que nous avons menées par la suite.