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III) DYNAMIQUE MOLECULAIRE

1) Algorithmes de NEMD directe

⋅ = 0 0 e dt F t F Lij

ω

i j iωt (III.59)

où Fi et Fj sont deux fonctions de l’espace des phases. Les coefficients de transport courants sont la limite à fréquence nulle (ω→0), de la relation (III.59), soit la limite hydrodynamique (Boon et Yip, 1991). À titre indicatif, si les deux fonctions représentent le flux de masse d’un composé, alors le coefficient calculé est un celui associé à la diffusion de masse, pour la conductivité thermique, la corrélation se fait sur le flux de chaleur et enfin, pour le coefficient de thermodiffusion, une des fonctions correspond au flux de chaleur et la seconde au flux de masse. Un exposé complet de ces deux méthodes peut être trouvé dans (Evans et Morris, 1990) ou encore plus récemment dans (Perronace, 2001).

Pour l’évaluation des coefficients de diffusion de masse nous avons utilisé la relation, dite d’Einstein, qui peut être déduite du formalisme de Green-Kubo assez simplement (Reith, 1998). Le coefficient d’autodiffusion d’une espèce j s’écrit alors (Rapaport, 1995) :

( ) ( )

= − = j N i j i j i j t j t t N D 1 2 ) ( ) ( 0 6 1 lim r r (III.60)

où ri(j)est le vecteur position d’une particule i faisant partie de l’espèce j. La moyenne est réalisée sur l’ensemble des particules d’un composé, Nj. En ce qui concerne le coefficient de diffusion mutuelle, dans un mélange binaire, il existe une formulation mais les résultats obtenus n’étant pas probant du fait d’erreurs statistiques trop importantes, nous ne les présenterons pas dans ce mémoire.

d) Propriétés de transport thermiques.

Pour évaluer la conductivité thermique et le facteur de thermodiffusion, nous avons utilisé la dynamique moléculaire hors équilibre directe. C’est-à-dire qu’au lieu de profiter des fluctuations instantanées du fluide, on impose au système un flux ou un gradient, afin de le maintenir hors équilibre. Puis en mesurant la réponse, gradient ou flux suivant le choix de la grandeur imposée, on déduit, après atteinte de l’état stationnaire, le coefficient de transport correspondant à la perturbation. Une des difficultés majeures vient du fait qu’il faut à la fois conserver la quantité de mouvement et l’énergie totale du système mis hors équilibre, voire les conditions périodiques. C’est pourquoi la perturbation imposée ne peut s’appliquer que sur une faible portion de la boîte de simulation, au niveau des conditions aux limites, le reste du système étant libre. Ceci peut être réalisé en couplant le système avec un réservoir d’énergie, de particules, de quantité de mouvement, etc. Cette méthodologie générale peut s’appliquer pour déduire tous les coefficients de transport directs, tant qu’il est possible, en suivant les contraintes précédemment énoncées, d’appliquer un gradient correspondant au processus à étudier. Cette approche a pour but de reproduire le phénomène naturel.

Par ailleurs, comme le système se trouve thermodynamiquement hors équilibre, les processus de transports croisés peuvent également intervenir et être mesurés. C’est notamment le cas de la thermodiffusion qui apparaît sous l’imposition d’un flux de chaleur, ou d’un gradient de température, au système simulé dans le cas de mélange. Dès lors, à l’état stationnaire, en évaluant le gradient de température et le gradient de fraction molaire, il est possible de déduire directement, d’où le nom de la méthode, le facteur de thermodiffusion.

Il existe de nombreux algorithmes qui peuvent être classés dans la catégorie de ceux correspondant à de la NEMD Directe appliquée à l’étude du transfert de chaleur. C’est-à-dire une méthode qui amène le système hors équilibre par la modification de l’énergie cinétique d’un nombre restreint de particules localisées aux frontières du système simulé, le gradient thermique étant simplement instauré par le biais d’une augmentation de la température à un bord de la boîte de simulation et en la réduction à une autre extrémité.

La première approche de ce type est due à Tennebaum et al. (1982). Ils ont pu mesurer la conductivité thermique de l’argon liquide et vérifier la validité du postulat de l’équilibre local. Ils ont aussi montré que le régime linéaire, la loi de Fourier, était valide jusqu'à des gradients de température extrêmes, de 1,8 109 K/cm.(Kincaid et al. (1992, 1994) ont appliqués une technique similaire non plus sur un corps pur mais sur des mélanges binaires d’isotope d’argon. Ils ont pu noter qu’apparaissait, après atteinte de l’état stationnaire, un gradient de fraction molaire caractéristique du phénomène de thermodiffusion. Ainsi, la démonstration était faite que la dynamique moléculaire hors équilibre directe était à même de reproduire le processus de thermodiffusion. La technique utilisée jusqu'à lors, le fuzzy wall, posait néanmoins un problème : elle brise les conditions périodiques suivant la direction perpendiculaire au gradient de température et introduit un confinement indésirable. Hafskjold et al. (1993) trouva une alternative qui permet de conserver les conditions périodiques suivant toutes les directions de l’espace. Cet algorithme nommé HEX (pour Heat EXchange), consiste non plus à faire rebondir des particules sur un mur thermalisé, mais à découper la boîte de simulation en tranches, puis à échanger de l’énergie cinétique entre les couches à thermaliser. On évite donc les effets de surfaces, mais également dans le cas de molécules flexibles une profonde modification de la dynamique interne lors des rebonds sur le mur thermalisé. Depuis, de nombreuses techniques similaires ont vu le jour, aussi bien pour l’étude des solides (Kotake et Wakuri, 1994), (Jund et Jullien, 1999) que pour celle des fluides (Bedrov et Smith, 2000), (Colombani et al., 2002), (Müller-Plathe, 1997). La figure (III.8) représente le mécanisme général sur lequel sont basées ces techniques.

Nous avons programmé trois techniques différentes de NEMD directe afin d’évaluer leurs qualités et défauts respectifs. Toutes trois s’appuient sur un découpage en couches de la boîte

de simulation, puis sur une modification des propriétés des deux couches extrêmes et des deux couches centrales. Elles peuvent être résumée comme suit :

• la méthode HEX (Heat EXchange Algorithm) (Hafskjold et al., 1993) qui consiste en l’échange à chaque pas d’une quantité donnée d’énergie cinétique entre les couches froides, centrales, et les couches chaudes, extrêmes. Ceci impose un flux de chaleur qui induit un gradient de température par conduction. L’algorithme, outre la conservation de l’énergie totale, conserve la quantité de mouvement ;

• l’approche que nous appelons TEX (Température EXchange Algorithm) (Galliéro, 1998), est une méthode très similaire à HEX, qui s’appuie sur la thermalisation à des températures données des couches centrales et limites. Puis les composantes des vitesses sont à nouveau modifiées afin d’avoir et la quantité de mouvement et l’énergie totale constante. Dans ce cas ce n’est plus le flux de chaleur qui est imposé, mais le gradient de température ;

• enfin la méthode que nous appelons PEX (Particle EXchange Algorithm) (Müller-Plathe, 1997) qui consiste en l’échange des composantes de vitesse de la particule la plus « agitée » de la couche froide avec celles de la plus « calme » de la couche chaude. Cette démarche est effectuée périodiquement (période de l’ordre de 100 pas) afin d’augmenter l’énergie cinétique des couches chaudes et d’abaisser celle des couches froides. De ce fait un flux de chaleur s’instaure progressivement. Par ailleurs cette méthode conserve intrinsèquement la quantité de mouvement et l’énergie totale du système puisque aucun recalage de vitesse n’est effectué (Müller-Plathe et Bordat, 2003).

Figure (III.8) : Mécanisme général des algorithmes de dynamique moléculaire hors équilibre directe pour la création d’un gradient de température.

Bien que nous n’ayons appliqué ces algorithmes que sur des systèmes composés de sphères de Lennard-Jones, il est possible de les utiliser sur des mélanges de molécules flexibles, (Bedrov et Smith, 2000), (Müller-Plathe et Bordat, 2003), (Simon, 1997).

Par ailleurs toutes ces méthodes perturbent localement, au niveau des couches chauffées et refroidies, la dynamique du système et il est possible de montrer par des mesures du flux de chaleur dans ces zones, grâce à la relation (III.58), que le transport de chaleur est fortement

Flux de chaleur

Échange d’énergie (Opérations sur les vitesses)

perturbé dans ces zones (Galliéro et al., 2002c), (Maghari et Yeganegi, 2001). Plus précisément le flux calculé est environ deux fois plus faible que le flux imposé. De même en regardant le gradient de température obtenu, il apparaît une brisure de la pente au niveau de ces couches thermalisées et ceci que ce soit en phase gazeuse, liquide ou solide (Chantrenne et Raynaud, 2002), (Maghari et Yeganegi, 2000), (Simon, 1997). Pour Hafskjold et al. (1993) l’équilibre local n’est plus respecté dans ces zones, ce qui provoque ces comportements particulier. Il est possible d’imaginer qu’à la lumière des résultats de la thermodynamique irréversible étendue, il soit possible de donner un éclairage nouveau à cette bizarrerie. Cela pourrait provenir du fait que la thermalisation s’effectue de manière isotrope, suivant tous les degrés de libertés du système, or d’après (Jou et al., 2001) il semblerait que la répartition de l’énergie ne se fasse pas de la même manière suivant tous les degrés de liberté dans un système soumis à un flux de chaleur.

Aussi, lors des mesures du gradient de température, avons nous systématiquement écarté les couches thermalisées ainsi que leurs voisines immédiates.

Afin de conserver la symétrie du système, il est nécessaire que le nombre de couches soit un nombre pair. De plus il faut qu’il y ait une quantité non négligeable de particules dans chaque couche afin que la thermalisation ne perturbe pas trop le système. Dans nos simulations, nous avons choisi de découper la boîte de simulation en 32 couches, excepté pour les simulations sur les petits systèmes pour lesquels le nombre de couches a été adapté de manière à ce que le système soit stable.

La technique de NEMD directe peut être également appliquée à l’étude d’autres propriétés de transport directes ou croisées (Müller-Plath et Bordat, 2003). Ainsi nous avons appliqué l’algorithme PEX pour l’étude de la viscosité sur un mélange méthane/n-décane à température ambiante pour différente fraction molaire, ceci au cours du projet de 3ème année d’école d’ingénieur ENSCPB de Sébastien Bihoué (Bihoué et al., 2000). Les résultats obtenus sont en bon accord avec ceux provenant d’expérimentations et de simulations sur des molécules flexibles (Dysthe et al., 1998) et cela malgré la simplicité du modèle de Lennard-Jones pour la description du fluide. Les temps de simulation nécessaire pour l’obtention de coefficients croisés sont inférieurs à ceux utilisant une méthode Green-Kubo.