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125- La tendance naturelle est de considérer que celui à l’égard duquel une procédure collective peut être ouverte doit se livrer à une activité, autrement dit qu’il est en exercice, ce qui est le cas d’une personne qui exerce actuellement une activité commerciale. Il s’agit là, sans doute, de la situation la plus courante. Cependant, deux textes apportent des dérogations à cette règle générale : les articles L. 631-3 et L. 640-3 du Code de commerce.

Le contexte dans lequel se trouvent leurs dispositions nous permet de comprendre de quoi il s’agit : les articles L. 631-2 et L. 640-2 sont précisément les textes que nous venons d’étudier et qui énumèrent les personnes physiques auxquelles la procédure de redressement (pour l’article L. 631-2) ou de liquidation (pour l’article L. 640-2) est applicable. Les textes suivants (L. 631-3 et L. 640-3)

78 La jurisprudence considère que le gérant d’une SARL qui agit au nom de la société qu’il représente et non en

son nom personnel, n’exerce pas une activité professionnelle indépendante au sens de l’article L. 631-2 du Code de commerce et ne peut donc être mis en redressement judiciaire : Com. 12 nov. 2008, Act. proc. coll. 2008, n° 310, obs. Regnaut-Moutier ; JCP E 2009.1023, note Lebel. De même, la jurisprudence considère que la seule qualité de gérante d’une société ne suffit pas à faire relever la personne concernée du régime des procédures collectives et à l’exclure du champ d’application des dispositions du Code de la consommation relatives au surendettement des particuliers : Civ. 2, 21 janv. 2010, RTDCom. 2010.437, obs. Paisant, JCP E 2010.1296, n° 2, obs. Pétel ; elle décide aussi que l’avocat qui a cessé d’exercer son activité à titre individuel pour devenir associé d’une société civile professionnelle n’agit plus en son nom propre mais exerce ses fonctions au nom de la société et cesse dès lors d’exercer une activité professionnelle indépendante : com. 9 févr. 2010, RTDCom. 2010.391, obs. Monsèrié-Bon, JCP 2010.602, note J.-J. Barbiéri.

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ajoutent, dans des termes pratiquement identiques que la procédure de redressement ou de liquidation est également applicable aux mêmes personnes que celles qui sont énumérées dans les articles L. 631-2 et L. 640-2 après la cessation de leur activité professionnelle ainsi que leur décès.

Il convient de noter qu’aucun texte analogue n’existe pour la procédure de sauvegarde. Dans l’esprit du législateur, cette procédure ne doit donc trouver application que si la personne physique est toujours en activité. Ce sont seulement les procédures de redressement et de liquidation qui peuvent trouver application après la cessation de l’activité.

Les textes distinguent deux cas de figure : celui de la cessation de l’activité professionnelle (1) et celui du décès (2).

a - La cessation de l’activité professionnelle

126- Les alinéas 1er des articles L. 631-3 et L. 640-3 du Code de commerce énoncent que la procédure de redressement ou de liquidation est applicable « après la cessation de l’activité professionnelle, si tout ou partie du passif provient de cette dernière ». Les seules conditions prévues par les textes sont donc les suivantes : il faut que l’activité ait déjà cessé et que le passif, en tout ou en partie, provienne de cette activité.

A priori, la première condition est aisément compréhensible : l’activité doit déjà avoir cessé, comme c’est le cas par exemple, d’une personne qui se livre à une activité commerciale, artisanale ou agricole et qui prend sa retraite79. Mais, la cessation de l’activité peut être une conséquence du changement dans les modalités de son exercice. Ainsi, un avocat qui exerce son activité à titre

79 Dans un avis du 17 sept. 2007, la Cour de cassation a rappelé qu’à compter du 1er janv. 2006, une procédure

collective de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire peut être ouverte, sur le fondement de la loi du 26 juill. 2005, à la demande d’un professionnel ayant cessé son activité et qui n’est pas déjà soumis à une procédure collective, dès lors qu’il se trouve en état de cessation des paiements et que tout ou partie de son passif provient de son activité professionnel, peu important la date à laquelle il a cessé son activité (Bull. civ., n° 6 ; Gaz. Pal. 26-27 oct. 2007, p. 31, note Lebel ; Act. proc. coll. 2007, n° 212, obs. Jacquemont ; JCP E 2008.1207, n° 3, obs. Pétel ; Rev. proc. coll. 2008, n° 112, obs. Saintourens.

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individuel et qui, par la suite, s’associe avec d’autres avocats au sein d’une société civile professionnelle : une procédure peut être ouverte à son égard pour la période au cours de laquelle il exerçait son activité à titre individuel.

La seconde condition se rapporte à la provenance du passif et, sur ce point, il suffit qu’une partie seulement de ce passif provienne de l’activité professionnelle afin que la procédure puisse être ouverte.

127- Les textes ne prévoient pas d’autres conditions. Mais, celles-ci seront certainement exigées si les règles applicables en général à la procédure envisagée les prévoient. Ainsi, dans la mesure où il n’est pas envisageable qu’une procédure de redressement ou de liquidation soit ouverte sans que le débiteur soit en état de cessation des paiements, cette condition doit également être vérifiée pour ouvrir une procédure collective à l’égard d’une personne ayant cessé son activité professionnelle. Toutefois, puisque les textes relatifs à la cessation de l’activité ne prévoient pas cette condition, il semble que la cessation des paiements doit exister au moment de l’ouverture de la procédure collective et non pas au moment de la cessation de l’activité. Ainsi, un commerçant qui prend sa retraite et deux ou trois ans après, son activité professionnelle fait l’objet d’un contrôle fiscal ou d’un contrôle par les administrations sociales et un redressement est décidé à son égard. Il se retrouve exposé, en raison de son activité professionnelle passée, à un paiement auquel il ne peut pas faire face, soit par ce que cette nouvelle dette le met directement en état de cessation des paiements, soit cette dette, ajoutée à d’autres dettes qu’il avait contractées, le met également en état de cessation des paiements.

128- L’ouverture même de la procédure est soumise à des conditions propres. Une distinction doit ainsi être faite selon que l’ouverture de la procédure est demandée par le débiteur ou non. Les articles L. 631-4 et L. 631-5 pour le redressement judiciaire ainsi que les articles L. 640-4 et L. 640-5 pour la liquidation judiciaire procèdent eux-mêmes à cette distinction.

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Si la demande émane du débiteur, celui-ci doit la formuler dans les quarante-cinq jours qui suivent la cessation des paiements, sauf si, dans ce même délai, il avait demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation. S’il y a une procédure de conciliation en cours et si elle échoue et qu’il ressort du rapport du conciliateur que le débiteur se trouve en cessation des paiements, le tribunal devra statuer sur l’ouverture de la procédure.

S’il n’y a pas une procédure de conciliation en cours, le tribunal pourra être saisi sur requête du ministère public ou sur l’assignation d’un créancier et cette assignation doit être exercée dans un délai d’un an dont le point de départ dépend des circonstances : un an qui suit la radiation du registre de commerce ou un an à compter de la cessation de l’activité s’il s’agit d’une personne physique qui exerçait une activité professionnelle.

b - Le décès

129- Pour le décès, les articles L. 631-3 et L. 640-3 sont plus explicites que pour la cessation de l’activité. Ils décident que lorsque l’une des personnes énumérées par l’article L. 631-2 ou par l’article L. 640-2 « est décédée en cessation des paiements », la procédure peut être ouverte.

Il résulte de ces textes que, contrairement à ce qui est prévu pour le cas de la cessation de l’activité, le législateur prévoit expressément que le décès doit être survenu à un moment où le débiteur était en état de cessation des paiements. La cessation des paiements doit exister au moment du décès.

La demande d’ouverture peut être faite par tout héritier, sans que le texte impose une condition de délai. Mais, l’on retrouve cette question de délai d’un an à compter de la date du décès pour que le tribunal soit saisi et ouvre la procédure collective. Cette condition de délai est imposée dans le cas où la demande d’ouverture émane d’un créancier ou du ministère public.

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