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L’affectation des élèves dans des dispositifs variés et les choix pédagogiques associés

1. L’ ENTREE DANS DIFFERENTES MODALITES DE SCOLARISATION Il convient de différencier les différentes modalités de scolarisation :

1.2 Pour les EFIV ou les EANA vivant dans des conditions très précaires

1.2.2. Quelle scolarité au sein des UPS ?

Dans la commune de l’académie de Bordeaux où ont été réalisées les observations de dispositifs UPS (primaire et collège), il y a trois ETP d’enseignants pour quatre dispositifs UPS (l’un d’eux partage son temps d’intervention entre primaire et collège, un autre intervient dans deux écoles et le dernier dans une école). Dans cette commune de 15 000 habitants, les enseignants UPS interviennent au total auprès de 250 EFIV.

Au collège, entre 25 et trente élèves sont pris en charge par mois dans l’UPS avec emplois du temps aménagé (au total, 46 depuis le début de l’année). Le dispositif UPS a été longuement réfléchi et travaillé en concertation avec l’IEN de circonscription : prônant l’adaptation et l’individualisation des parcours scolaires, l’enseignante UPS utilise fréquemment des PPRE (programme personnalisé de réussite éducative) avec un aménagement possible de l’emploi du temps de l’élève EFIV  comme nous le verrons en détail ci-après.

En primaire, dans cette école, sont scolarisés cinquante EFIV par an. L’absentéisme concerne assez peu d’enfants, selon l’enseignant d’UPS. D’après les statistiques effectuées dans l’établissement, environ 50 % des élèves sont à plus de 75 % de présence et 50 % sont à 35 % de présence. Il ajoute également qu’il y a quelques familles pour lesquelles les absences sont vraiment problématiques, car les enfants ne sont pas présents régulièrement du tout, mais précise qu’« ils se comptent sur les doigts d’une main ».

Des « fiches de poste » travaillées avec l’inspecteur

Dans l’UPS collège ont été définis des « blocs » de travail, correspondant à un découpage des objectifs de l’enseignant UPS dans ce cadre. Celle-ci explique :

« En fait, je me vois un petit peu comme enseignante urgentiste. Tu sais, comme y a des médecins urgentistes, c’est un peu ça, on est dans l’urgence toujours ! Ça veut dire dès qu’y a un élève qui arrive, il faut tout faire, là ! Tout mettre en place dès la première minute. L’accueil, la pédagogie, l’évaluation, les liens familles, et ils partent en plus, ils peuvent partir très vite ! Et on sait pas quand ils reviennent donc c’est là, tout de suite ! ».

Les blocs en question peuvent être résumés ainsi :

Blocs 1 et 2 : accueil des élèves lecteurs scripteurs débutants, niveaux CP CE1 et CE2,

« profil SEGPA mais comme y a pas de SEGPA dans ce collège… ».

Bloc 3 : des élèves qui sont au contact des autres, niveau CM1 / CM2, qui peuvent suivre mais qu’il faut quand même suivre parce que le décrochage n’est pas loin, parce qu’ils peuvent être absentéistes, parce que les familles ont peur et qu’il faut faire des suivis.

Bloc 4 : évaluation des nouveaux arrivants, l’accueil des familles, l’explication du parcours aux familles, mise en place des PPRE.

Bloc 5 : englobe toute la médiation, écriture PPRE, liens avec équipe, assistante sociale, infirmière, « parce qu’il me faut du temps pour discuter avec tout le monde, je pouvais pas faire ça sur ma pause midi-deux sinon je mange plus ! ».

Bloc 6 : accueil des élèves du CNED via convention CNED / collège,

« […] notamment pour gens du cirque qui n’ont pas d’autre solution que malheureusement d’inscrire leurs enfants au CNED, mais quand ils passent l’hiver ici sur la commune, ils restent un peu plus longtemps, environ trois, quatre mois, et pour eux envoyer les enfants au collège, c’est

bien, du coup ils ont le CNED et donc, ils viennent au collège pour suivre peut-être d’autres cours, mais surtout pour être aidés ».

Bloc 7 : suivi des élèves préprofessionnalisation,

« […] pour les stages, aller démarcher pour les stages, parce que ces élèves, ils savent pas, quand les familles arrivent auprès des patrons, ben souvent, ça le fait pas ! Donc proposer des stages, chercher des partenariats, des associations, il a fallu tout créer. Entraîner les élèves au CFG [certificat de formation générale], préparer les dossiers pour l’oral du CFG… ».

Bloc 8 : « être porteur de projets pour permettre une inclusion plus facile de ces élèves avec les autres, donc des projets pour inclure mes élèves à l’intérieur de ce projet pour développer le vivre ensemble ».

Ce fonctionnement est repris dans ses grandes lignes dans les quatre écoles primaires de la commune, de manière plutôt logique car il a été travaillé avec l’IEN de circonscription.

Les priorités dans les apprentissages

Différentes modalités d’organisation des UPS et d’intervention des enseignants existent.

Elles sont généralement les conséquences des différences entre IEN sur les modalités de prise en charge des EFIV : ainsi, la nouvelle IEN aimerait que les enseignants UPS soient des sortes de surnuméraires en intervenant dans les classes directement, en soutien aux enseignants

« ordinaires » et non à part.

Beaucoup d’enseignants UPS en primaire disent, à la demande de leurs IEN de circonscription, effectuer un travail de mise en lien entre les familles et le collège, en réalisant tout un travail d’approche d’élèves de CM2 avec le collège. La même chose est souvent effectuée en ce qui concerne la maternelle : soit les enseignants tentent d’amener les familles vers la maternelle pour que leurs enfants y soient scolarisés avant l’entrée en primaire, soit certains vont « repérer » en maternelle les difficultés pour entrer dans l’écrit ou favoriser le lien avec élèves et familles pour assurer le passage maternelle / primaire.

En Gironde, la plupart des enseignants UPS rencontrés privilégient le cycle 2, souvent à la demande des IEN, mais aussi le cycle 3 « pour ceux qui sont décalés en français ». De manière générale, les savoirs de base (lire, écrire, compter) sont privilégiés dans ces dispositifs censés apporter du soutien aux élèves dans ces apprentissages. Un fonctionnement par compétences à un niveau individuel est souvent mis en place. Si la priorité des enseignants est la lecture, il s’agit plus généralement de mettre du sens dans les apprentissages en partant de situations concrètes qui renvoient à du vécu. Ainsi, l’enseignant d’UPS dans l’école enquêtée suit beaucoup d’élèves scolarisés en CP et CE1 pour apprendre à lire. Il a également quelques élèves de CE2 pour la remédiation ou l’intégration dans des projets, mais souligne que « le but est qu’ils restent dans leur classe ». Il prend aussi quelques élèves de CM2 pour effectuer un travail particulier, sur lequel l’enseignant de la classe de référence a identifié un besoin de soutien / d’explication supplémentaire.

Dans l’UPS collège, la plupart des élèves ont un niveau CE2 ; les autres se répartissent de manière équitable entre un niveau CP / CE1 et un niveau CM1 / CM2, d’après les évaluations effectuées régulièrement par l’enseignante. Elle dit avoir l’impression qu’il existerait une sorte de « plafond de verre » au niveau CE2 pour les EFIV, en se demandant comment ça pourrait s’expliquer. De ce fait, l’enseignante UPS du collège met en place un fonctionnement par compétences à un niveau individuel : « il faut des petits objectifs ».

Il convient de souligner des divergences existantes entre enseignants UPS concernant l’apprentissage de la lecture des EFIV : la question étant de savoir qui doit apprendre à lire à ces élèves pris en charge, l’enseignant UPS ou celui de la classe d’inclusion ?

Parfois, les enseignants des autres classes « envoient » un élève pris en charge par ce dispositif dans l’UPS pour travailler quelque chose de particulier, afin de se mettre à niveau ou de préparer une évaluation. Il s’agit donc d’une demande de l’enseignant à l’enseignant d’UPS qui peut passer par l’élève ou par les enseignants entre eux.

Selon ces enseignants, l’existence de ces postes permet globalement de développer de nouvelles façons d’apprendre : être acteur, se réaliser, valoriser, montrer ce qu’ils sont.

Un objectif clair : valoriser les élèves

Pour l’enseignant d’UPS primaire, la partie la plus importante de son travail concerne la valorisation des enfants au sein de l’école et la valorisation de l’école auprès des enfants. De nombreux ateliers, événements et projets (cinéma, exposés, construction d’abris, potager, etc.) sont ainsi mis en place afin que les enfants reprennent confiance en eux mais également

« pour que l’école soit quelque chose qui leur plaise ». L’enseignante en UPS collège va dans le même sens : « Il faut qu’ils reprennent confiance en eux ».

Les outils dans la classe et dans l’établissement, et en dehors

Exposé sur le cirque comme activité économique familiale d’un élève du voyage devant sa classe

Le rôle d’enseignant d’UPS dépasse le cadre scolaire, de par le lien qu’ont les enseignants avec les familles lors d’une demi-journée dédiée (quand il y a problème, absentéisme, ou pour discuter d’un point…). Cela permet d’apporter une médiation entre famille et école d’un côté comme de l’autre et favorise l’interconnaissance, donc instaure de la confiance. Le fait que les enseignants soient repérés et accessibles en fait des « référents » pour les familles, ce qui est d’une importance considérable pour un bon fonctionnement de la scolarité des enfants, comme c’est souligné tant par les familles, les enseignants que les acteurs associatifs.

Au collège, divers outils spécifiques sont utilisés par l’enseignante UPS : les emplois du temps aménagés, le téléphone portable professionnel, pour être joint par les familles qui disent notamment quand elles partent et reviennent et / ou préviennent de l’absence de leurs

enfants, les stages pour leur faire découvrir le monde professionnel dès 14 ans (4e), le point mensuel sur les absences des élèves entre l’enseignante UPS et les CPE, l’infirmière, l’assistante sociale… Des projets interclasses sont également menés par l’enseignante UPS, pour favoriser l’interconnaissance des élèves et la mixité.

En primaire, l’équipe éducative garde les EFIV sur les listes pendant deux ans pour faciliter leur inscription lorsqu’ils reviennent sur la commune. Le directeur reconnaît qu’il s’agit aussi d’une stratégie pour éviter la fermeture de classe.

L’importance des liens avec les familles

Nous avons vu l’importance du travail de partenariat des enseignants avec les acteurs associatifs (spécialisés gens du voyage mais aussi protection de l’enfance) et acteurs institutionnels locaux, ainsi qu’avec les familles, pour favoriser / faciliter la scolarisation des EFIV.

Dans cette optique, les enseignants UPS de la commune étudiée avaient mis en place une visite annuelle du collège, spécialement pour les EFIV futurs collégiens. Les EFIV scolarisés en CM1 et CM2 étaient accueillis par les EFIV du collège, avec repas à la cantine et suivi des cours. Les parents étaient également conviés le soir pour une visite de l’établissement et un repas. Cela nécessitait un travail de longue haleine des enseignants en concertation avec les pasteurs pour convaincre les familles. Mais cela ne se fait plus ces dernières années, par manque de temps et d’énergie, selon l’un des enseignants.

En effet, pour beaucoup d’EFIV rencontrés, il est quasiment « impensable » que les parents se rendent au collège, sauf en cas de faute grave. Lorsqu’une cérémonie a été organisée pour récompenser certains élèves pour leurs efforts et les encourager à poursuivre dans cette voie, une élève de l’UPS a reçu une invitation qu’elle devait transmettre à ses parents pour s’y rendre. Après avoir bien écouté l’explication du déroulement d’un air intéressé, lorsque la personne de la vie scolaire repart, elle précise que de toute façon, ses parents ne viendront jamais et range le papier dans son sac.

En primaire, les parents des EFIV connaissent bien l’équipe enseignante, et ont des liens particulièrement soutenus avec l’enseignant de l’UPS et le directeur d’école. Tous deux sont présents sur leurs postes depuis plusieurs années, le premier ayant une demi-journée de décharge par semaine et le second ayant une décharge complète (en raison du grand nombre d’élèves, donc de classes dans l’école), ce qui leur permet de favoriser les relations avec les parents d’élèves.

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