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Un « pôle d’expertise » pour le suivi, le pilotage et la garantie des droits ? des droits ?

L’hétérogénéité des pilotages institutionnels via les CASNAV

2. L ES MISSIONS DES CASNAV : ACCUEIL , FORMATION , INFORMATION ,

2.2. Un « pôle d’expertise » pour le suivi, le pilotage et la garantie des droits ? des droits ?

179 Circulaire 2012-143 du 2-10-2012 sur l’organisation des CASNAV.

180 Région académique Occitanie, académie de Montpellier, « Procédure d’accueil CASNAV » [en ligne], novembre 2015, <www.ac-bordeaux.fr/cid93438/procedure-d-accueil-CASNAV.html>, consulté en décembre 2017.

2.2.1. Une capacité des CASNAV plus ou moins grande à assurer leur travail de coordination sur l’ensemble de l’académie

Les missions des CASNAV ne peuvent être honorées que si les cadres et les formateurs sont en capacité de se déplacer sur l’ensemble du territoire académique. Là encore, tous les CASNAV ne disposent pas des mêmes possibilités. Le rapport d’activité du CASNAV de Bordeaux 2014-2015 précise notamment que : « L’autorisation de circuler depuis janvier 2015 permet à la coordonnatrice académique de se rendre dans les établissements et les réunions départementales : le CASNAV accroît sa visibilité académique et sa nécessaire présence sur le terrain, afin d’accompagner les équipes dans l’accueil des EANA et des EFIV »181. Ainsi comprend-on qu’avant cette date récente, les membres du CASNAV n’avaient pas les moyens de se déplacer dans les lieux éloignés de l’agglomération bordelaise afin d’effectuer un travail de suivi sur le terrain. Et ce, alors même que comprenant plus de 41 000 km2, la région Aquitaine représentait la troisième plus grande du pays en superficie, avec des départements comptant parmi les plus vastes de France comme la Gironde, les Landes ou la Dordogne, ainsi qu’une large bande frontalière avec le voisin espagnol avec lequel les flux migratoires sont constants.

À Créteil, nous avons constaté que certains acteurs scolaires exprimaient un manque d’intérêt pour les formations proposées par le CASNAV ; d’autres n’arrivaient pas à y avoir accès faute de place ou d’avoir de lien avec les acteurs du CASNAV. Dans l’impossibilité d’enquêter directement auprès de lui, nous n’avons pas pu avoir de retour du CASNAV sur ces questionnements.

2.2.2. Un suivi des effectifs très inégal selon les académies

L’un des corollaires à ce déploiement très inégal sur le terrain académique est une méconnaissance parfois relative de la situation des élèves allophones et des élèves itinérants à différents endroits du territoire académique. Ainsi, le CASNAV de Bordeaux est en mesure de fournir des informations de première main uniquement sur les élèves évalués à Bordeaux même, donc seulement sur une partie de ceux qui arrivent et non sur l’ensemble des EANA de l’académie. Le CASNAV de Bordeaux complète ses lacunes sur son propre territoire par les données de l’enquête nationale de la DEPP. Par contraste, le CASNAV de Montpellier a mis en place une grande enquête, dont le protocole est présenté dans son rapport 2014-2015182 et dont il indique avoir inspiré l’enquête de la DEPP effectuée en 2015. Un travail minutieux a été effectué dans toute l’académie pour recueillir les données qui sont analysées et informent ensuite les orientations du CASNAV. Par exemple, les manques dans les informations fournies par certains établissements sont repérés comme des indices possibles « d’un manque de regard sur l’élève à besoins éducatifs particuliers » et sont identifiés par les acteurs du CASNAV comme des éléments à améliorer. Par ailleurs, le rapport du CASNAV de Montpellier renseigne également sur le déploiement des moyens mis en œuvre pour le suivi des effectifs au niveau départemental :

« Pour le Gard, les élèves sont suivis par un dispositif départemental qui oriente tous les élèves du second degré tout d’abord vers les CIO puis vers un centre départemental de bilan initial (CDBI) ; l’enquête nationale ne permet pas de faire apparaître ce dispositif en tant que tel. Dans

181 CASNAV de l’académie de Bordeaux, op. cit., p. 4.

182 Ministère de l’Éducation nationale (2015), CASNAV de l’académie de Montpellier, op. cit.

l’Hérault, un double dispositif (Montpellier et Béziers) remplit une fonction analogue. Dans l’Aude, il s’agit de créer un maillage territorial d’enseignants pour assurer cette première évaluation. Dans les Pyrénées-Orientales, le dispositif prévoit une semaine d’accueil qui met à contribution de nombreux enseignants d’UPE2A ; pour la suite de l’année, l’évaluation des élèves pèse lourd dans la charge de travail »183.

Dans cette académie, le travail entrepris permet même d’aller plus loin et plus finement que l’enquête de la DEPP. La comparaison en termes de suivi des effectifs entre ces deux académies est instructive : les moyens alloués et les différents dispositifs qui font sas d’accueil assurent que, grâce également à un maillage territorial, la quasi-totalité des EANA dans l’académie de Montpellier sera évaluée et connue. À Bordeaux le CASNAV n’a pas de visibilité sur ce qui se passe en dehors de la Gironde, ni même sur les élèves qui ne sont pas passés par le CASNAV (par exemple, ceux évalués par les CIO qui ne fournissent pas tous les informations sur le positionnement au CASNAV).

On repère également des disparités dans le suivi et la coordination des différents dispositifs à l’intérieur même des territoires départementaux. S’exprimant au sujet de la coordination des différents dispositifs d’accueil des élèves « allophones », un chargé de mission pour le second degré du CASNAV en Alsace décrit ainsi les difficultés rencontrées par les formateurs :

« La première mission c’est la coordination des UPE2A, et donc j’essaie de revenir régulièrement aux coordinateurs pour qu’on travaille dans un certain nombre de directions. […] On a travaillé sur la coordination je ne sais plus quand, on a travaillé sur l’orientation et on va travailler encore d’ici à la fin de l’année pour… essayer d’établir ensemble un document d’évaluation commun. Voilà, donc ça fera quatre réunions sur l’année. Le principe est que j’informe les coordinateurs de la tenue de la réunion, je propose plusieurs dates, et puis ils s’inscrivent s’ils le souhaitent. Il y a un compte rendu que je fais parvenir à tous après. […] C’est sur une base volontaire, voilà. Cela met certaines limites, parce qu’effectivement il y a des coordinateurs que j’aimerais rencontrer plus souvent et si on est sur la base du volontariat on ne les voit pas forcément. […] C’était la recommandation de l’inspecteur, de toute façon, une base de volontariat, mais j’y vois certaines limites. Par exemple sur l’orientation, disons qu’il y a des établissements où ça ne fonctionne pas forcément bien et justement les personnes n’étaient pas là. […] Ce n’est pas une implication bénévole, parce que les réunions se font sur le temps de travail, si la personne a cours, elle est déchargée de ses cours […] mais il y a des personnes qui ne viennent pas s’inscrire du tout ».

Dans cet extrait d’entretien, on comprend que ces chargés de mission et formateurs du CASNAV ne parviennent pas à avoir une visibilité complète sur les dispositifs activés dans leur département d’affectation. Émergent des difficultés dans la coordination et dans le suivi des dispositifs activés, ce qui limite fortement le travail des chargés de mission du CASNAV pour ce qui est de l’organisation générale, mais également en ce qui concerne les contacts avec les établissements et les pratiques quotidiennes en classe.

Dans l’académie de Créteil, la maîtrise des effectifs est encore plus précaire, particulièrement dans le département de la Seine-Saint-Denis et ceci, malgré un soutien ciblé pour répondre à l’enquête de la DEPP. Les acteurs du CASNAV apparaissent déconnectés des CIO où les tests sont passés et il semble que les professionnels de ces deux espaces ne communiquent pas. Ainsi, lorsqu’en réunion, nous avons demandé aux acteurs du CASNAV s’ils avaient un lien avec les tests de positionnement, la réaction d’un de nos interlocuteurs a

183 Ibid., p. 15.

été la suivante : « Ah, non, nous ne faisons pas passer les tests de positionnement ! C’est le CIO, on nous a dit que c’était le CIO qui s’occupait des tests, alors on ne le fait pas ! ». De fait, les résultats des tests de positionnement remontent à la Division des élèves (DIVEL), un service de la DSDEN et seront ensuite affectés sans que le CASNAV n’en soit systématiquement informé. Comme par ailleurs, il semble avoir peu de lien avec tous les établissements scolaires, sa vue sur les EANA scolarisés reste assez fragile. Interrogé sur cette question, un acteur d’une DSDEN nous confie à l’automne 2017 ne pas avoir de données sur le nombre d’EANA. Encore moins sur leur suivi. Le chiffre de 6 000 dans l’académie est avancé par cet interlocuteur…

mais il s’agit du chiffre de la DEPP portant sur l’année 2014-2015.

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