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Outils du formateur et dispositifs de formation prévus

4.2. Le genre du texte : un mégaoutil

4.2.1. Modèles et séquences didactiques des genres oraux retenus pour la formation formation

4.2.1.2. La séquence didactique sur le débat

Notre séquence didactique, conforme au modèle proposé par Dolz, Noverraz et Schneuwly (2001a, 2001b), comprend une étape de mise en situation, une production initiale, des modules et une production finale. Nous avons procédé à certaines adaptations, mais l’essentiel reprend la séquence « Le débat public » réalisée par S. Érard dans les Séquences didactiques pour l’oral et pour l’écrit (Dolz, Noverraz & Schneuwly, 2009b)9. La présentation de chaque étape de la séquence renferme des éléments de contenus liés à la planification de l’enseignement, aux formes sociales de travail10 souhaitées, aux activités possibles et aux variantes de ces activités en vue d’une progression.

La mise en situation

La planification de la mise en situation demande à l’enseignant de sélectionner le thème et de réfléchir à son traitement. L’enseignant peut décider de choisir le thème seul ou de demander l’avis des élèves. Il est libre aussi de maintenir un thème unique ou de traiter différents thèmes au cours de la séquence. Le maintien d’un thème unique favorise son approfondissement et un travail plus poussé des dimensions autres que celles des contenus thématiques. En revanche, la reprise du thème comporte comme désavantage d’entrainer à la longue une certaine lassitude chez les élèves.

La mise en situation vise à clarifier l’objet du travail, à faire saisir les enjeux d’une controverse et à préparer les contenus entourant le thème du débat. La présentation du projet de la séquence est suivie d’une brève discussion sur ce qu’est un débat. À cette étape,

9 Les séquences ont été éditées par la Commission romande des moyens d'enseignement et d'apprentissage (COROME).

10 Voici des exemples de ces formes : le travail individuel, la discussion, le travail en groupe, le travail par une démarche question – réponse entre enseignants et classe, la correction de travaux, individuelle ou en groupe, le travail par écoute d’un exposé, cours ou explication de l’enseignant.

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l’enseignant peut distribuer des textes courts sur le thème traité et annoncer les questions du débat. Il forme les équipes. Pour s’assurer de la participation de tous, il peut prévenir les élèves que les débatteurs seront déterminés au hasard et que tous doivent donc s’informer sur le sujet.

La production initiale

Cette première série d’activités concerne le ou les débats initiaux. Il est alors possible pour l’enseignant d’évaluer les connaissances de base des élèves sur le thème et les moyens dont ils disposent pour argumenter et tester leurs capacités. Il importe que ces premiers débats soient informels et spontanés, sans régulation des échanges de la part de l’enseignant, pour ne pas fausser le caractère authentique des prestations des élèves. L’enseignant ne distribue pas de grille d’observation pour ne pas induire des critères et pour laisser émerger ceux que les élèves jugent pertinents. À la fin de cette étape, l’enseignant peut procéder à une récapitulation des principaux points observés et discutés : on définit le débat, on détermine ses enjeux, sa signification, on liste les principales difficultés éprouvées, on examine les questions suscitant un véritable débat.

Les ateliers

Le premier des cinq ateliers porte sur la documentation du thème du débat ; il approfondit des éléments de contenus. De meilleures connaissances du sujet devraient amener les élèves à des prises de position plus poussées et, de fait, rendre le débat plus riche.

Le second atelier porte sur la production d’interventions pour appuyer ou objecter un argument. À cette étape, on travaille l’implication de l’autre dans son discours par la reprise d’arguments et leur développement en utilisant différents procédés d’étayage : des exemples, des illustrations, des citations d’autorité. Ce module implique l’étude des mécanismes de reprise, la périphrase, la nominalisation, des expressions pour reprendre les arguments de l’autre pour y adhérer ou s’y opposer, les formes et propriétés des discours rapportés. L’expression du désaccord tout « en ménageant la face de l’autre » (Dolz, Noverraz & Schneuwly, 2001b) nécessite le repérage et la production de contre-arguments.

La contre-argumentation implique un examen des manières de contre-argumenter, des

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stratégies argumentatives de la réfutation, de la concession ainsi que, pour la textualité, des marques de modalisation et des formules pour exprimer le désaccord. L’expression de nuances, de doutes, de certitudes et les marques modales par lesquelles elles se manifestent s’insèrent également dans ce travail sur la contre-argumentation. L’écoute de débats, la production d’interventions à l’appui et la formulation d’objections font partie des activités possibles de ce module.

L’interprétation du rôle social, troisième atelier, demande un travail sur l’habillage de la parole en fonction du rôle défendu, que ce soit par l’adaptation du registre de langue, l’emploi d’un lexique ou d’une phraséologie particulière, une gestualité, une posture, des mimiques faciales typiques, une coordination d’attitudes (le gestus social 11) qui révèlent la pensée par le corps. Ici, le travail de la fictionnalisation, du « faire comme si » (Schneuwly, 1997 ; Bernié, 2002) vise, par la simulation, à appréhender « l’autre » dans toutes ses facettes et à amener une prise de distance des élèves face à eux-mêmes.

Le quatrième atelier porte sur le rôle du modérateur et de ses fonctions dans le débat. Ces fonctions se détaillent ainsi :

1. introduire et clore le débat,

2. reformuler les propos des débatteurs, 3. synthétiser les propos,

4. clarifier et recentrer les propos, 5. relancer le débat,

6. calmer les emportements ou susciter la controverse.

Le travail du modérateur requiert la gestion des différentes voies énonciatives, notamment par l’intégration des différents discours rapportés. Plusieurs activités sont envisageables dans ce module : l’écoute de débats filmés ou l’analyse de transcriptions permettant le repérage des formules linguistiques et des marques (reprise, connexion) pour introduire, effectuer des transitions, clore. Des activités de synthèse, qui demandent de reformuler des affirmations longues en affirmations plus courtes ou en mots-clés, sont envisageables. La

11 Nous empruntons l’idée de gestus social à Brecht qui l’utilise pour représenter ce qui détermine, chez le personnage, l’attitude corporelle, l’intonation et le jeu de physionomie (Brecht, 1949/2005).

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production fréquente de débats, de durées variables, aide indéniablement les élèves à maitriser ce rôle complexe.

Le cinquième atelier porte sur l’observation et l’analyse du débat. Il s’agit d’habiliter les élèves à devenir des observateurs critiques de débats. L’enseignant a la possibilité de constituer avec ses élèves une grille d’observation et de cibler avec eux les éléments pertinents à pointer. L’important est de les amener à voir le débat comme une réflexion collective où les interventions fonctionnent en interdépendance et non comme une suite de performances individuelles (Dolz, Noverraz & Schneuwly, 2001b). Une grille d’observation et d’évaluation pourrait être constituée des six questions suivantes :

1. les participants s’écoutaient-ils ?

2. les arguments étaient-ils convaincants ? 3. les arguments étaient-ils clairs ?

4. les arguments étaient-ils bien amenés ? 5. les positions étaient-elles nuancées ?

6. quelles étaient la qualité, la force, la nature des arguments présentés ? La production finale

La production finale implique la participation des élèves à un débat formel. Il leur faut maintenant mettre en pratique ce qui a été travaillé lors des ateliers. Ce dernier module permet aux élèves et à l’enseignant de constater s’il y a eu progression dans la maitrise des capacités. Comme le débat est une construction collective, ces progrès se mesurent tant au niveau de l’individu que du groupe. La production finale comporte les mêmes modalités que la production initiale. Il peut toutefois y avoir une variation du thème de manière à ne pas lasser les élèves.

L’enseignant commence par expliquer le but du débat final. Il présente ensuite la question du débat si celle-ci a changé. Il répartit les élèves en groupes et désigne un élève de chaque groupe pour participer au débat, il prendra soin de ne pas reprendre un des élèves ayant participé aux débats initiaux12. Le rôle du modérateur est confié à un élève. Tout comme au

12Pour une observation rigoureuse des progrès accomplis, on pourrait cependant reprendre les mêmes élèves.

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moment de la production initiale, les deux débats sont suivis d’une discussion avec les élèves spectateurs. Enfin, les élèves dressent le bilan du travail réalisé : les débats finaux sont-ils meilleurs que les premiers ? Pensent-ils savoir mieux argumenter ? Leur opinion sur le thème s’est-elle modifiée ?