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Michel Séguin : sur les traces du premier djembé africain au Québec Parmi la brochette d’informateurs sélectionnés pour cette recherche, Michel Séguin est désigné par

Histoire du djembé au Québec

2.2 Histoire du djembé au Québec : la genèse

2.2.1 Michel Séguin : sur les traces du premier djembé africain au Québec Parmi la brochette d’informateurs sélectionnés pour cette recherche, Michel Séguin est désigné par

ses pairs comme le premier à avoir joué du tambour djembé au Québec. Tout au long de notre entrevue, deux grandes trames interrogatives ont conduit mes recherches à propos de Michel Séguin. D’abord, par quels phénomènes interculturels ce dernier a-t-il été initié aux jeux des percussions latines et africaines. Ensuite, considérant son statut de percussionniste professionnel intégré à la communauté artistique, quelle incidence son choix de jouer du djembé a-t-il eu sur les pratiques de percussions frappées à la main au Québec?85 L’entrevue avec le percussionniste s’est produite tardivement dans les étapes de ma recherche et j’anticipais avec excitation le moment ou j’entendrais de sa propre bouche « sa » version des faits. Ces événements de la vie professionnelle de Michel Séguin marquaient-ils réellement le point de départ historique de l’arrivée du premier djembé? Et était-il oui ou non l’initiateur des Tamtams du Mont-Royal?

Les points de repère soulevés par le musicien lors de notre entrevue marquent aussi le contenu de cette section : la Superfrancofête de 1974, la fondation de Toubabou le premier groupe musical à intégrer les percussions africaines, les activités professionnelles du groupe, l’apparition des pratiques du tambour sur les places publiques et enfin, celui de la fabrication locale des premiers djembés québécois.

85 Un questionnement qui reflète mon cadre ethnographique « individualy create », assumant que les individus interviennent dans la dynamique culturelle d’une société donnée.

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Michel Séguin

Michel Séguin est né au début des années 1940 dans une famille modeste de la région de Gatineau. Dans ses antécédents musicaux familiaux, il y a les veillées traditionnelles chez sa tante Laura. Il les décrit ici avec beaucoup d’enthousiasme et d’humour :

Ti-Min qui jouait du violon, lui y passait l’lait. Ti-Mine y jouait du matin au soir. Donc, le soir y arrivait après qu’on avait fini le souper, pi tout ça, la table se poussait, ma tante Laura embarquait su’l piano, les autres commençaient à jouer. Y finissait, on allait s’coucher, le matin ma mère criait « fait attention pour pas réveiller Ti-Mine ». Y dormait comme ça, entre les deux portes, les portes étaient pas hautes à cause des hivers, le violon à terre accoté comme ça [sur le mur]. C’est là qui passait ses nuits, pi ses nuits commençaient à 5 heures 4 heures et demie le matin. On passait là pour aller à toilette, en arrière, d’in bécosses. Fallait pas réveiller Ti-Mine, y passait ses nuits comme ça. Quand y s’réveillait, y prenait son café noir, y embarquait dans voiture, pi y avait, j’pense que c’est Gilles qui s’appelait, un jeune qui travaillait pour lui. Lui, y passait lait pi l’beurre pi toute ça. C’est l’jeune qui faisait toute, pi Ti-Mine s’assoyait dans voiture là, pi y jouait du violon (éclat de rire). Y jouait du violon pratiquement 24 sur 24. Pour moi c’était une inspiration incroyable86.

Stimulé par la musique au caractère festif qui baignait son enfance, son goût pour la percussion s’est déclaré très jeune. Il raconte que sa première percussion était fabriquée avec une canne : « Mon père m’avait aidé, on avait mis un chamois, pour laver les chars, ça sonnait! Y avait les p’tits barils de clous aussi, ceux d’la construction87. »

86 V01 Michel Seguin 02.42 Montréal 01-09-2012 par Monique Provost 87 V01 Michel Seguin 06.13 Montréal 01-09-2012 par Monique Provost

107 À la fin de l’adolescence, l’apprentissage des congas de Michel Séguin s’est fait en même temps que s'amorçait sa carrière professionnelle à Ottawa, vers la fin des années 1950 et au début des années 196088. Le contexte interculturel était en pleine transformation, une résultante du changement des politiques d’immigration du Canada et du Québec qui se traduisait par l'accueil d'immigrants en provenance de pays autres qu’européens. C’est à partir de cette nouvelle souche de culture que Séguin nourrit sa pratique du tambour. En effet, il a été recruté par un musicien jamaïcain, qui l’a invité à faire partie d’un groupe formé d’étudiants universitaires provenant des Caraïbes. Selon le souvenir de Séguin, ces derniers étaient venus de Jamaïque et de Trinidad pour étudier au Canada en communication et en technologie. Ils bénéficiaient de bourses d’études octroyées par des organismes ayant pour mission le développement de la main-d’œuvre spécialisée des pays nouvellement décolonisés et nouvellement indépendants89. Dès les premiers moments de la rencontre, la chimie entre les musiciens a opéré. Il explique :

Je jouais déjà un peu [en parlant des congas], j’étais dans un club en train de

jammer [improviser avec d’autres], y avait

un gars sur le bord de la porte les bras croisés qui me regardait avec un gros smile, pi dans le temps, y en avait pas beaucoup de monde qui ressemblait à Aunt Jemima90. Y é venu pi y dit : I’m Rupert Bent from Jamaïca, on s’est assis pi ça commencé de même91.

88 Le récit de Séguin est vague quant à la datation. Malgré mes recherches, je n’ai pu déterminer avec précision les dates. De plus, Séguin est difficile à contacter; il a une vie plutôt nomade. Je me considère chanceuse de l’avoir eu en entrevue.

89 Il y avait l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT). Le Canada a établi des relations diplomatiques officielles et a ouvert un haut-commissariat à Kingston lorsque la Jamaïque a accédé à l’indépendance, en 1962. Le 6 août 2012 sera célébré le 50e anniversaire de l’indépendance de la Jamaïque; cette année souligne également le 50e anniversaire des relations diplomatiques du Canada avec ce pays.

90 Aunt Jemima (Tante Jemima en français) est une marque commerciale de farine à crêpe, de sirop et d’autres produits pour le petit déjeuner propriété actuelle de la Quaker Oats Company. Je me souviens que dans les années 1960, il y avait des publicités à la télévision et c’est un souvenir qui parle au baby boomer. « Anna Short Harrington became the face of Aunt Jemima in 1935. Quaker Oats, which owns the brand, used her likeness for the Aunt Jemima logo, while her recipes were also used for product offerings. Now, 59 years after her death, two of her great-grandsons are suing Quaker Oats and its parent company, PespsiCo, for exploiting Harrington and not paying royalties to her estate. Site Web : http ://www.manufacturing.net/blogs/2014/08/the-2b-lawsuit-against-pepsico-pinnacle-foods-and- quaker-oats

91 V04 Michel Seguin 04.40 Montréal 01-09-2012 par Monique Provost

Figure 15 - Emballage de préparation à crêpes de la compagnie Quacker. Source : manufacturing. net

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Séguin et ces musiciens ont alors formé le groupe The Caraïbs, un nom évocateur du lieu d’origine des musiciens. Séguin enregistra avec eux son premier album. Cette formation musicale, aux dires du musicien, sonnait comme Santana et jouait aussi de la salsa et du calypso. Durant cette même période des années 1960, il fait partie du groupe Los Chorales : « on jouait avec des manches à frill ». La musique latine, qui s’était surtout fait connaître au Québec par les disques comme musique de danse, ou par les musiciens de jazz américains en tournée, s’insinuait dans les pratiques musiciennes locales du Québec et de l’Ontario. Je rappelle qu’à cette époque, l’immigration des Noirs en provenance de l’Afrique ou des Caraïbes était à peu près inexistante au Québec92 et au Canada. On comprend donc qu’au milieu du XXe siècle, les musiques latines qui se faisaient entendre au Québec n’étaient pas le résultat de rencontres interculturelles, comme c’était alors le cas aux États-Unis, mais bien le fruit du développement de l'industrie de la musique enregistrée et des émissions de radio.

À cette époque, les musiques et danses latines étaient déjà populaires dans différentes communautés culturelles au Canada, dont les communautés juives qui étaient aussi très présentes aux États-Unis. Séguin était un des rares percussionnistes à frapper sur les congas, il a été repéré par Arny May Burger, un chef d’orchestre qui l’avait vu jouer avec The

Caraïbs. Arny May était d’origine juive et on lui

octroyait fréquemment des contrats au sein de sa communauté qui, selon Michel Séguin, était prospère à Ottawa. Il raconte avec beaucoup d’humour cette expérience professionnelle déterminante pour son apprentissage des rythmes latins :

92 Je donne des détails sur ce sujet un peu plus loin.

Figure 16 - Manches à frill

Album de musique de danse numérisé, Pochette de disque de danse produite par Golden Tone.

109 Des mariages juifs, des gros riches à qui appartenaient tous les magasins de la rue Rideau à Ottawa. Moi, je jouais des cha-chas, des mambos et des meringués et j’apprenais d’un juif, qui lui, apprenait dans des livres (éclat de rire)93.

Au moment de leur première rencontre, Arny May Burger cherchait un percussionniste de conga pour jouer dans sa formation musicale, style orchestre de bal ou de danse. Mais c’était pour répondre aux exigences d’un contrat peu commun : l’accompagnement d’Elvis Presley en spectacle à Ottawa. La vedette exigeait la présence de congas dans l’orchestre. Séguin raconte que c’était la première fois que la « Guilde94 » enregistrait un contrat de percussionniste de tambour conga au Canada.

Comme on l’a déjà constaté avec l’exemple d’Alys Robi, les musiques populaires des années 1960 étaient des traductions françaises des musiques américaines. À cette époque, les groupes de musiques populaires se veulent des imitations des vedettes américaines « mais en français ». Avec l’émancipation identitaire québécoise des années 1970, les artistes du Québec « s’affranchissent » de ce mode de production de la culture locale. C’est dans ce contexte que Michel Séguin s’installe en 1969 à Montréal, à titre de percussionniste de tambour frappé à la main. Il connait les répertoires rythmiques latins et il est sollicité pour mettre des couleurs dans ces musiques québécoises qui cherchent à se réinventer et surtout à exprimer le « soi » québécois par l’originalité des mélanges. Il nous explique comment son arrivée à Montréal a lancé sa carrière dans le milieu des musiques populaires.

C’est en 1969 que j’tarrivé ici moi. [en parlant de Montréal]. Là j’ai fait Charlebois, l’Album Jaune de Jean Pierre Ferland, Claude Dubois les premiers, Louise Forestier, Renée Claude, j’étais le gars qui faisait toutes ces affaires-là. J’amenais les grooves, j’amenais les épices. Charlebois disait « toi t’amènes les épices »95.

En 1969, à Montréal la faune des musiques populaires se divise en deux populations : les vedettes et leurs accompagnateurs, soit « les sessions men », aussi musiciens de studios. Les sessions men, selon la description de Séguin, forment une société musicienne, un milieu de vie musical. Ils aiment se retrouver pour improviser. Le « groove » fait partie de la culture musicale populaire des

93 V04 Michel Seguin 07.35 Montréal 01-09-2012 par Monique Provost

94 La Guilde des musiciens de Montréal est une section locale 406 de l’AFM (American Federation of Musician) 95 V02 Michel Seguin 00.45 Montréal 01-09-2012 par Monique Provost

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années 1970, beaucoup plus que l’exécution structurée à partir de traditions ou de partitions. Dans ce sillon, en 1973, Séguin devient membre d’une formation légendaire composée de ces musiciens qui avaient l’habitude de travailler ensemble pour accompagner les « vedettes » de l’heure : le Ville-Émard Blues Band96 (VEBB), en référence au lieu où se déroulaient fréquemment ces rencontres : le studio d’enregistrement du bassiste Bill Gagnon, dans le quartier Ville-Émard à Montréal.

Lorsqu’on écoute les enregistrements de VEBB, on y retrouve un exemple du climat d’ouverture et d’exploration musicale qui prévalait durant les années 1970. Michel Séguin faisait partie d’un

tout musical expérimental qui s'émancipait en arrière-plan des prestations des vedettes populaires. Ils ont marqué l’histoire identitaire du Québec par l’innovation et la rupture avec le passé. Forts d’être enfin Québécois, on ne craignait nullement d’explorer les univers sonores d’autres cultures ou de s'aventurer dans des univers sonores inconnus et audacieux97. Toutefois, l’exploration, même si elle cherchait à sortir des carcans musicaux stéréotypés en provenance des États-Unis, n’en utilisait pas moins les moyens de production : guitare et basse électrique, amplification,

96 Voir le site web de Progquebec : http ://www.progquebec.com/vebb.html

97 On peut lire à ce propos l’article de Pauline Curien (2006), « Une catharsis identitaire des Québécois » qui expose l’émancipation des Québécois à partir de l’Expo 1967.

Figure 17 - Ville Émard Blues Band, avec la permission de Copyright © ProgQuebec

Debout : Dion, Robichaud, St-Roch, Ouellet, Laferrière, Stanley, Gougeno, Montemiglio, Nadeau, Lachapelle (caché), Miller, Bankley (caché), Farmer. Assis : Gagnon, Cousineau, Séguin, Vallières, Huot.

111 sonorisation et bien souvent des structures musicales blues ou rock. D’ailleurs, en Amérique du Nord, le son rock est alors prédominant et semble délimiter l’espace de la « modernité » et la rupture avec le passé. La formation VEEB symbolise la présence de la créativité québécoise dans l’Amérique du Nord francophone; on explore, mais dans les paramètres existants des musiques pop américaines.

J’ouvre une parenthèse pour expliquer le contexte dans lequel évolue Michel Séguin. Avec l’avènement de l’État québécois, les musiques populaires de facture québécoise sont exportées à l’étranger. En effet, la culture industrialisée se développe par un système de diffusion de masse et dans ce système, qui fonctionne au volume des ventes, la population québécoise ne suffit pas à la survie d’un artiste, il doit s’exporter s’il veut survivre et rentabiliser ses productions culturelles. C’est dans ce contexte socioéconomique que l’État responsable doit construire des ponts avec les pays étrangers et développer des alliances au niveau des échanges culturels. Ce sont des processus mondialisants qui nécessitent des moyens de déplacement, et c’est justement à partir des années 1960 que se développe le phénomène de « démocratisation des transports aériens », phénomène qui joue un rôle majeur dans les échanges culturels « officiels ».

La démocratisation des transports aériens lance aussi un nouveau type de relations interculturelles : le tourisme culturel. Les Québécois peuvent à partir de ce moment envisager de connaître l’Autre, dans le cas qui nous intéresse « le Latin » et « l’Africain », chez lui, à la source. Plus besoin de vivre la musique par procuration; on peut se rendre directement sur place. Le Québécois, jusqu’alors privé de contacts avec les non-Européens, peut de façon autonome vivre sa propre expérience de l’Autre. C’est un outil supplémentaire dans la démarche d’émancipation du Québec face au Canada anglais, mais aussi face à la musique américaine : « l’acquisition des savoirs aux pays d’origine ». Je ferme ici la parenthèse pour poursuivre avec la vie de Michel Séguin.

Au début des années 1970, Michel Séguin fait la rencontre de Lise Vachon, qui venait de quitter le duo Les Alexandrins qu’elle formait avec Luc Cousineau. Elle était passionnée d’anthropologie et c’est après avoir lu un livre de Marcel Griaule sur le Mali qu’elle et Séguin décidèrent de se rendre en Afrique. Lise Vachon raconte :

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Michel terminait une tournée avec Robert Charlebois, et je suis allé le rejoindre à Paris. J’avais tout organisé et puis on s’est rendus à Dakar. Michel jouait plutôt des percussions latines, des rythmes cubains, Antilles et Cuba. On avait apporté du matériel pour enregistrer et des appareils photo. Il a joué sur les djembés des griots, on était dans le fond de la brousse. Il s’est acheté un djembé au Mali98.

C’est dans cette position d’ouverture sur un univers de tous les possibles, sans lois et loin des carcans de la transmission des traditions ou du dogme religieux, que Michel Séguin et Lise Cousineau, suite à une tournée en France avec Robert Charlebois en 1973, sont partis en voyage pour l’Afrique. Séguin rapporte alors le premier djembé répertorié dans l’histoire du Québec. Dès son retour en sol québécois, Michel Séguin et son frère Paul, qui jouait aussi des percussions, se sont empressés de reproduire le tambour à partir du modèle de ce djembé rapporté du Mali. Paul Séguin, selon mes données actuelles, aurait été le premier à fabriquer un djembé en sol québécois99.

En Afrique, Lise Cousineau et Michel Séguin se sont rendus à l’origine des choses. À leur retour, ils ont travaillé à assimiler et à réinventer le répertoire collecté en Afrique. Michel travaillait les rythmes du Wassoulou100 et Lise avait appris et traduit la chanson Yamakneh, une pièce du folklore sénégalais. C’est sous l’inspiration de son voyage en Afrique que Séguin a formé un groupe du nom de Toubabou101 en 1974.

S’approprier et recréer est ce qui a caractérisé le mode d’apprentissage de Michel Séguin. Son statut de musicien s’est construit sur l’art d’acquérir, d’extraire les informations de son environnement et de les « faire siennes » (Turgeon 2005). Il n’a pas été formé pour s’inscrire dans une tradition de reproduction à l’identique ou de pérennisation, mais plutôt dans un registre de recréation et d’ingéniosité. D’ailleurs, cette attitude caractérisait le processus culturel d’émancipation des Québécois des années 1970, celle de s’affirmer culturellement par un mode d’expression créatif qui ne cherchait pas à s’inscrire dans la continuité. Séguin vibrait au même

98 A01 Lise Vachon 03.35 (téléphonique) Montréal 22-09-2009 par Monique Provost 99 Un chapitre est dédié à la fabrication du djembé.

100 Région de l’Afrique de l’Ouest qui borde la Guinée et le Mali.

101 Toubabou est un surnom donné à Michel Séguin par les Africains lors de son voyage. Chez les Sénégalais, le toubab est l’étranger, surtout l’étranger à peau blanche. J’ai fréquenté des Sénégalais à Montréal qui utilisaient cette expression. Le groupe Toubabou était formé, en plus de Michel Séguin à la percussion, du bassiste Michel Dion, de Denis Farmer à la batterie, de Robert Stanley à la guitare, de Lise Cousineau à la voix et d’Yvan Ouellette aux claviers. Puis, Georges Rodriguez percussionniste haïtien, a rejoint le groupe en 1975.

113 diapason que la génération de musiciens qu’il fréquentait. C’était dans l’air, et après leur voyage en Afrique, Michel Séguin et Lise Vachon étaient prêts pour la Superfrancofête de 1974.

2.2.2 La Superfrancofête de 1974

La Superfrancofête de 1974 est un festival international de la jeunesse francophone qui a eu lieu dans la Ville de Québec du 13 au 24 août 1974, grâce au soutien du gouvernement du Québec (Bourrassa) et du gouvernement du Canada (Trudeau). Pour comprendre le sens de cet événement, il faut le situer dans ses contextes international et historique. La Superfrancofête était une manifestation populaire qui visait à rendre concret la coopération internationale francophone dans le sillon de l’après décolonisation. La Convention intergouvernementale des États francophones signée à Niamey (Niger) en 1970102 est une des pierres angulaires de la Francophonie.

La solidarité des francophones des divers pays sur la planète fut d’abord élitiste et on peut suivre la courbe de son développement grâce à l’instauration de différentes associations qui témoignent de son existence. Par exemple, il y a eu l’Association des écrivains de langue française (ADELF) en 1926, l’Union internationale des journalistes et de la presse de langue française en 1950. Puis grâce au développement technologique des médias, la solidarité internationale francophone s’est démocratisée. En 1955, La Communauté des Radios publiques de langue française (CRPLF), à laquelle participait Radio-Canada avec Radio France, la Radio Suisse romande et la Radio Belge francophone, rendit accessible à toutes les classes sociales cette appartenance à une communauté francophone internationale. La dimension étatique de cette complicité s’officialisa en 1960 par la création de la première institution intergouvernementale francophone, la Conférence des Ministres de l’Education (CONFEMEN). Mais c’est dans l’espace politique des pays nouvellement indépendants, sous l’action des présidents Senghor du Sénégal, Diori du Niger et Bourguiba de Tunisie à la conférence de Niamey en 1970 que fut mis en place les structures opérationnelles des échanges culturels transnationaux de la Francophonie. L’idée de la Conférence de Niamey était d'instaurer une synergie, dans les domaines culturels et techniques, entre les pays ayant pour langue commune le français. Lors de cette Conférence, qui était placée sous le patronage du ministre

102 Voir la section Une histoire de la Francophonie pour compléter les informations sur la Francophonie exposées dans