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Les représentations scientifiques du risque volcanique : entre classification des aléas et scenarii envisagés

Des représentations scientifiques contemporaines aux évolutions des mesures réglementaires

1. Les représentations scientifiques du risque volcanique : entre classification des aléas et scenarii envisagés

1.1. Les aléas : éléments essentiels à appréhender dans le cadre de la vulnérabilité sociale

Les éruptions volcaniques se manifestent à travers toute une série de phénomènes variés, aux actions mécaniques, thermiques, chimiques ou encore électriques multiples : les aléas. Ils se définissent comme la source du danger. En lui-même, « l’aléa est un élément neutre : il n’est ni bon ni mauvais» (Veyret, 2004). Mais en présence d’enjeux, il peut constituer une menace. Il se caractérise par sa nature, sa fréquence et son intensité mais peut relever de différentes origines. Un aléa naturel est par exemple considéré comme produit par le milieu naturel. Il existe également des aléas dits anthropiques, économiques ou encore sanitaires (Bailly, 1996 ; Demangeot, 1999). Dans les années 1950, les géographes américains ont défini l’aléa comme le produit des interactions avec la société par les adaptations qu’il entraîne.

Dans le cadre de l’approche de la vulnérabilité sociale lors d’une crise éruptive, il est essentiel de comprendre le fonctionnement des épisodes physico-chimiques potentiels. Il est possible de hiérarchiser les aléas volcaniques. Si l’on se réfère à Blong (2000) qui a établi un classement suivant les zones auréolaires pouvant être graduellement touchées lors d’une éruption, nous pouvons dans un premier temps nous intéresser à l’extension

spatiale de chaque phénomène(Tableau 3.1). Par la suite, une véritable organisation des

aléas a été réalisée. Ils sont présentés selon leur potentiel à faire subir des dommages aux installations humaines des sociétés établies au pied d’un édifice volcanique (Blong,

2000). Un indice, pouvant se traduire en pourcentage, est alloué à chaque aléa2,

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-Il est cependant impossible de prévoir totalement un événement naturel. Le risque zéro étant illusoire, les scénarii d’aléas sont dès lors mis en place dans le but de gérer au mieux une situation de crise.

Tableau 3.1: Extension spatiale des aléas volcaniques

(Mas, 2012. D’après Blong, 2000)

Tableau 3.2 : Potentiel d’endommagement des aléas volcaniques directs

(Mas, 2012. D ‘après Blong, 1996 et 2000)

1.2. Grands types d’éruptions et scénarios éruptifs de la Montagne Pelée

Les éruptions engendrées par l’activité d’une zone de subduction sont rares mais particulièrement violentes. L’andésite est une lave très visqueuse à forte teneur en silice qui piège les gaz volcaniques au sein de la matière en fusion. Cette lave presque solide ne s’épanche donc pas de manière fluide ; au fur et à mesure de sa progression, elle forme un véritable dôme de lave. Sous ce dôme, les pressions exercées par les différents

Phénomènes Distance moyenne d'effet (km) Distance maximale d'effet (km) Surface moyenne affectée (km²) Surface maximale affectée (km²) Gaz et pluies acides 20 à 30 100 inf. à 100 20 000+

Séismes inf. à 20 50+ sup. à 1000 7000+

Retombées aériennes 20 à 30 800+ sup. à 100 100 000+ Projections balistiques inf. à 2 5+ 10 env. 80 Mouvements de terrain

et déformation du sol inf. à 20 50+ env. 10 100

Tsunamis inf. à 50 500 à 600+ 100 5000

Lahars env. 10 300+ 5 à 10 200 à 300

Intrusion et coulées de

lave 1 à 4 100 inf. à 2 500

Avalanche de débris 5 à 10 sup. à 100 10 sup. à 1000 Coulées pyroclastiques inf. à 10 50 à 100 50 1000

gaz sont extrêmes. L’éjection brutale de ces gaz entraîne la destruction partielle ou totale

du dôme, suivi quasi-immédiatement par d’autres aléas aussi destructeurs(Tableau 3.3).

La Montagne Pelée a donné son nom à un type d’éruption suite aux événements

marquants de 1902 : les éruptions «péléennes», présentent fréquemment une activité

discontinue. Elles sont généralement précédées d’une éruption phréatique, c’est-à-dire

une ou plusieurs explosions projetant d’importants volumes de cendres. Ces manifestations sont dues à des interactions entre les nappes phréatiques d’un édifice volcanique et la roche sous-jacente chauffée par une ascension du magma. Des éruptions phréatiques peuvent être déclenchées dans des zones où le gradient géothermique est élevé, sans relation directe avec un volcanisme récent (Lesales, 2005). Les séismes représentent l’aléa apparaissant souvent comme signe précurseur d’une éruption ; Leur intensité et leur fréquence augmentent avec l’imminence de l’arrivée en surface des activités éruptives. Les explosions phréatiques génèrent des projections de cendres mais

également des projections de lapillis et de blocs. Des retombées aériennes ou «téphras»

se produisent alors sur une aire plus ou moins étendue selon la puissance de l’éruption. Lorsque le magma ascendant entre directement en contact avec les couches aquifères, uneéruption phréatomagmatiquesurvient, se caractérisant par des manifestations plus violentes. Notons que ces deux manifestations éruptives peuvent intervenir indépendamment, c’est-à-dire sans être automatiquement suivies par une éruption péléenne.

Leséruptions magmatiquescomptent parmi les éruptions les plus violentes et donc les plus dangereuses qui soient. La montagne Pelée n’a connu que deux crises de ce type au cours de la période historique. Les dynamismes éruptifs du volcan ont cependant marqué la volcanologie moderne avec l’analyse des événements de 1902 et la découverte puis l’étude des nuées ardentes par Alfred Lacroix en 1904, aujourd’hui plus souvent

désignées sous le terme de coulées pyroclastiques. La forme générale des dômes de type

péléen est conique ou pyramidale du fait de la présence d’une couronne d’éboulis très développée (Bardintzeff, 1998). Les dômes péléens se distinguent également par une forte cohésion interne de la lave qui les compose. Les gaz ne peuvent par conséquent s’échapper librement, et doivent alors atteindre des pressions élevées pour leur expansion. Ce caractère explosif est responsable de la genèse de coulées et de déferlantes pyroclastiques. Il convient de distinguer ici les éruptions explosives exogènes, particulièrement violentes, engendrées par l’injection brutale de magma sous un dôme en place, des éruptions explosives endogènes, mettant en jeu du matériel préalablement extrudé (Fink, 2000). Une éruption péléenne se caractérise par des intrusions de magma,

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-ardentes pouvant s'élever à plusieurs kilomètres de hauteur, retombant sur une superficie plus ou moins vaste.

«Une crise éruptive peut comprendre de multiples scénarii d’éruptions tels qu’ils ont pu être identifiés pour la Montagne Pelée» (Traineau & Rançon, 1991). La Figure 3.1 prend en compte l’évolution graduelle de l’activité volcanique depuis les premiers signes précurseurs jusqu'au stade post-éruptif. La hiérarchie proposée s’appuie sur l’enchaînement possible des aléas au cours d’une éruption.

La connaissance des scénarii possibles permet d’améliorer les prévisions en cas d’éruption. Cependant, lorsqu’un tel phénomène se produit, les autorités doivent être capables d’organiser l’évacuation de la population si le besoin se présente. Pour cela une

cartographie des zones à risques (Carte 3.2) doit être établie non seulement pour

appréhender les zones menacées mais également dans le cadre de la gestion territoriale.

Figure 3.1 : Scénarii potentiels des éruptions identifiées à la Montagne Pelée, Martinique

(Mas, 2012. D’après Traineau & Rançon, 1991) Activité fumerollienne FIN Explosions phréatiques Explosion latérale dirigée Effondrement sectoriel

Avalanche de débris dirigées latéralementNuées ardentes

Mise en place d’un dôme Nuées ardentes d’avalanche Coulées de ponces Panache plinien Déferlante cendro-ponceuse FIN FIN FIN FIN FIN

Scénario 1 : Eruption phréatique

Scénario 2 : Eruption à coulées de ponces seules

Scénario 3 : Eruption ponceuse complexe avec phase plinienne Scénario 4 : Eruption à nuée ardente de type mai-août 1902 Scénario 5 : Eruption à nuées ardentes de type 1903-1932 Scénario 6 : Eruption de type Mt St Helens 1980

1.3. Grands types d’éruptions et scénarios éruptifs de la Soufrière de Guadeloupe

Selon Lepointe (1984), si le phénomène éruptif de 1976 en Guadeloupe en tant que tel demeura finalement sans gravité (sans occulter le déséquilibre économique et le désordre humain qui l’accompagnèrent), les pouvoirs publics ont pris conscience de l’importance des réseaux de surveillances de la Soufrière et des édifices volcaniques en

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