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Le renvoi des affaires

Dans le document Les États de la Ligue en Bretagne (1591-1594) (Page 139-144)

C. Le Conseil d’État et des finances

3. Le renvoi des affaires

Premièrement les États référent régulièrement des affaires au Conseil d’État et des finances. C’est d’abord le cas de Pierre Barrais, fermier des devoirs sur le vin pour la paroisse de Saint-Etienne-de-Montluc à partir de 1589, qui doit aller porter sa requête au Conseil. Celui-ci demande en effet un rabais sur sa ferme en raison de l’impossibilité qu’il eut de lever les devoirs à cause de la proximité de Blain. Le Conseil d’État lui avait ordonné de payer les trois quarts de sa ferme ce qui peut expliquer qu’il se tourne vers les États pour obtenir un jugement en sa faveur. Mais, selon l’article 21 du cahier des États, c’est le Conseil d’État et des finances qui est compétent pour toutes les demandes de rabais supérieures à 100 écus. Les

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ADIV, C 3203, Quittance en faveur des cordeliers de Quimper, 30 juin 1592.

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ADIV, C 3205, Requête d’Arthur Le Fourbeur et quittance du 3 février 1597.

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ADIV, C 3744, Arrêt conseil d’Etat et des finances sur arrestation du trésorier des Etats 11 septembre 1595 et Extrait du papier de l’écrou des prisons des régaires de Nantes.

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139 États ne font donc que respecter leur propre législation. Pourtant, en 1594, les États acceptent de traiter de la demande de rabais présentée par Olivier Lechet, fermier des devoirs de la pancarte de l’évêché de Nantes pour l’année 159267. Au contraire de l’article 21 et du

précédent de 1591, le procureur dit que le Conseil d’État n’est pas compétent pour juger des rabais. Olivier Lechet s’était déjà pourvu devant le Conseil et avait obtenu un rabais de 14000 écus, mais il semble qu’il n’était pas satisfait de la décision et présente une requête aux États68. Pour bénéficier du jugement des États, celui-ci doit se démettre de son arrêt du Conseil, ce qu’il fait. Les députés votent finalement de suivre l’arrêt du Conseil et accorde à Olivier Lechet le rabais de 14000 écus. Bien que le procureur avance que les rabais ne relèvent pas de la compétence du Conseil, c’est finalement les conclusions de celui-ci qui sont suivies et gardées.

Plusieurs autres petites affaires peuvent être relevées telle que la requête des paroissiens de Savenay69. En janvier 1591, les paroissiens avaient déjà présenté une requête devant le Conseil d’État demandant qu’il soit ordonné à la garnison de Goust d’arrêter ses prélèvements sur leur paroisse. Le Conseil n’a pas dû leur donner satisfaction, car ils décident de présenter une requête aux États. Mais l’assemblée décide de ne pas statuer sur cette affaire et renvoie les paroissiens devant le Conseil ou devant le duc de Mercoeur. La même année, c’est le trésorier qui est renvoyé vers le Conseil en ce qui concerne le port et la sureté des deniers de sa charge70. Enfin, le 8 mai 1594, l’évêque de Vannes et Jean Fourché sont renvoyés devant le Conseil pour le remboursement des frais de leur voyage fait à la demande duc de Mercoeur en 159171.

Les États pouvaient aussi être sollicités pour faire appliquer des décisions du Conseil ou le Conseil pouvait renvoyer des requêtes vers les États. La requête des habitants de Vannes de 1594 relève du premier cas. En effet, la ville avait obtenu par le duc de Mercoeur une part des taxes levées à Nantes afin de réaliser des travaux de fortifications. Les travaux ont commencé, mais le commis de Nantes n’a jamais versé les sommes qui montaient à 1500 écus par an. La ville demande aux États de faire exécuter les ordonnances prises au Conseil d’Etat et de faire commandement aux habitants de Nantes et à leur commis de payer les aréages dus

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Une requête d’Olivier Lechet (ADIV, C 3195) demandant 30000 écus de rabais fut traitée le 4 mai 1593 par les Etats. Celle-ci fut renvoyée devant le Conseil.

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ADIV, C 3198, PV des Etats, feuillet 24, 9 mai 1594.

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ADIV, C 3190, Requête des habitants de Savenay.

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ADIV, C 3187, PV des Etats, feuillet 15 recto, 9 avril 1591.

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ADIV, C 3198, PV des Etats, feuillet 20 recto, 8 mai 1594. Le duc les avaient commis pour faire un voyage dans toute la Bretagne afin de dresser un procès-verbal sur les levées de deniers dans la province.

140 depuis le 15 octobre 158972. La même année, d’autres demandeurs sont adressés aux États par le Conseil. Ce sont les commissaires au ravitaillement du siège de Vitré de 1589 qui s’étaient portés devant le Conseil afin d’être remboursés des frais de leur charge. Une fois l’estimation faite par le sénéchal de Fougères, ils adressent une demande au Conseil qui les renvoie devant les États pour obtenir leur remboursement73.

Les rapports entre les États et le Conseil d’État et des finances sont donc de diverses formes. Les États ont joué un rôle important lors de la création du Conseil que ce soit en choisissant une partie de ses membres ou en définissant ses compétences. Pourtant, on a vu dans le cas des attributions des rabais des fermes, les limites des compétences entre les États et le Conseil semblent assez mal déterminées et changeantes. Le Conseil avait tout de même l’autorité pour ordonner et imposer des dépenses au trésorier. Celle-ci ne semble pas avoir été contestée par les États, car aucune des dépenses ordonnées par le Conseil en 1591 et 1592 n’a fait l’objet d’une contestation dans l’assemblée. On peut formuler l’hypothèse que les États étaient compétents pour tout ce qui concerne le fonctionnement du Conseil, mais qu’ils n’avaient pas d’autorité sur les arrêts et les décisions du Conseil qui s’appliquaient également aux États.

Les États ligueurs étaient soumis à plusieurs autorités provinciales ou extérieures à la Bretagne. La première était incarnée par la Ligue et ses représentants notamment le duc de Mayenne pour lequel il est apparent que malgré son éloignement les États reconnaissent l’autorité sur le royaume que lui donne sa charge de lieutenant général. Au niveau de la province, l’assemblée est directement soumise au duc de Mercoeur. Les relations entre ces deux représentants d’une autorité différente peuvent se traduire par l’imposition de certains de leurs choix sur les États, mais aussi par leur aide et collaboration pour certaines demandes que les députés leur adressent. Bien entendu, malgré le partage de nombreux objectifs, les intérêts pouvaient diverger et être source de conflit. En effet, l’assemblée à aucun moment n’a semblé prête à renier la défense de ses intérêts et de ses privilèges même si parfois cette défense était purement symbolique. Leur faible capacité de recours auprès des souverains étrangers et leur absence de réel rôle diplomatique illustrent bien les limites des pouvoirs des États.

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ADIV, C 3200, Requête de la ville de Vannes.

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141 Pour autant, ils ne semblent pas avoir cherché à accaparer de nouvelles compétences par tous les moyens. De fait, sur l’ensemble des dossiers, l’on peut dire que globalement les États n’ont pas particulièrement cherché à empiéter sur les prérogatives judiciaires du Parlement ou du Conseil d’État et des finances. En ce sens, il apparait que l’assemblée n’avait pas la volonté de développer ses compétences en matière de justice. En revanche, les États étaient beaucoup plus offensifs pour tout ce qui touche à l’administration des finances ce qui génère de nombreux conflits avec la Chambre des comptes. Les finances semblaient donc être une des principales préoccupations des États ligueurs.

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