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Les enjeux religieu

Dans le document Les États de la Ligue en Bretagne (1591-1594) (Page 150-153)

C HAPITRE 1 : L' ACTIVITE POLITIQUE DES É TATS LIGUEURS

A. Modalités et objectifs d’un engagement partisan

2. Les enjeux religieu

Lorsque l'on étudie le serment de l'édit d'Union juré par les États en 1591 on peut identifier les enjeux du combat des États et les raisons de leur engagement dans la Ligue. Ainsi les députés dans ce serment jurent qu'ils s'engagent « pour l’avancement conservation d’icelle religion […] emploier nos moiens et vies a extirper tous chismes et heresies condamnez par les saincts consilles et principallement par celluy de trante20. ». Dans leur

serment, ils annoncent donc clairement qu’ils font de la lutte contre l'hérésie protestante et la

19 ADIV, C 3188, Serment des ligueurs. 20 ADIV, C 3188, Serment des ligueurs.

150 protection de la religion catholique en Bretagne et dans le royaume l'enjeu premier de leurs combats.

Cette volonté de lutter contre l'hérésie et protéger le catholicisme est réaffirmé à plusieurs reprises par les États. C'est le cas dans les réponses qu’ils font au duc de Mercœur. Ce document nous permet donc d'avoir un aperçu de l'opinion des États année par année. On y observe chaque année les États réitérer les objectifs et les enjeux de leur combat au sein de la Sainte-Union. En effet, tous les ans, la première demande adressée par les États au duc de Mercœur est de poursuivre la lutte contre les hérétiques et la défense du catholicisme.

En 1591, lors de la première réunion de l'assemblée ligueuse, les États dans leur conclusion supplient le gouverneur de Mercœur de poursuivre la lutte contre les hérétiques,

« de les assister tousiours de sa force et auctorite pour repousser les efforts et rompre les entreprises desdit heretiques et leurs faulteurs […] continuer en ceste pieuse et saincte devotion qu’il a tousiours eu a la restauration des ruines de l’eglise, a la manutention de la religion catholique appostolique et romaine, a l’extirpation de l’heresie et extermination des heretiques et de leurs faulteurs21 »

Les États soutiennent la lutte contre les protestants jugés hérétiques et leurs alliés c'est-à-dire les catholiques ralliés au parti du roi protestant Henri IV et ceux que l'on appelle « les politiques ». Ils soutiennent aussi la défense de la religion et du culte catholique dans la province et plus généralement dans l’ensemble du royaume. Le discours des États ligueurs bretons montre des catholiques qui sentent leur culte et leur Église menacés par la foi protestante alors que l'implantation du protestantisme en Bretagne fut relativement faible22.

Les réponses des États pour les années 1592 et 1594 contiennent une rhétorique tout à fait similaire23. L'engagement des États contre les hérétiques et en faveur de la défense de la

religion catholique est donc rappelé chaque année avec vigueur.

Dans le discours officiel de l’assemblée, leur objectif principal est donc bien la lutte contre les protestants hérétiques et leurs alliés ainsi que la protection et sauvegarde de la religion catholique qu'ils pensent menacée par la présence d'hérétiques protestants. C'est d'ailleurs aux protestants que les États attribuent la responsabilité des guerres24. L'enjeu

21 ADIV, C 3190, Réponse et conclusion des États 1591.

22 CORNETTE Joël, Histoire de la Bretagne et des Bretons, op. cit., p. 450-468.

23 ADIV, C 3194, Supplication des États 1592. Il n'y a pas la date sur le document mais il est signé par Charles de

Bourgneuf donc il doit dater de 1592 car il préside la clôture des États cette année-là.

24 ADIV, C 3194, Réponse des États de 1592 : « supplient mondit seigneur le gouverneur de les maintenir

tousiours par sa force et autres contre l’entreprise des heretiques et leurs faulteurs qui ont trouble la province et royaulme de France ».

151 premier de lutte qui est proclamée par les États de la Sainte-Union est donc avant tout de nature religieuse.

Cet attachement à la religion catholique et les raisons religieuses de l'engagement dans le parti de la Sainte-Union sont visibles également dans les procurations des députés du clergé et du tiers état. Ceux-ci souvent mettent en avant la défense de la religion comme la principale raison de leur choix d'envoyer des députés aux États ou comme le but principal de la réunion de l’assemblée. Les chanoines du chapitre de Saint-Malo, dans leur procuration en 1591, précisent qu'il faut que dans l'assemblée soient prises des décisions « pour l’honneur de dieu conservation de sa saincte religion extirpation des heresies »25. On trouve des exemples de

cette importance de la religion également dans les procurations des députés du tiers état telle que celle de la ville de Dinan en 1592 qui demande à ses députés de faire aux États tout ce qui sera « utille, profitable et advantaigeux pour la religion catholique apostolique et romaine »26.

De nombreuses occurrences peuvent être relevées dans les procurations des députés du clergé et du tiers état27. Malheureusement, on ne dispose pas de telles déclarations pour la noblesse

qui ne fournit pas de procuration28.

A propos de la lutte contre les hérétiques et la défense de la religion catholique, les États de la Sainte-Union sont donc en adéquation avec les idées de la Ligue et s'inscrivent parfaitement sur ce point dans la politique suivie par la Sainte-Union depuis plusieurs années. Enfin, l'on remarque que les États sont fermes dans leur volonté de lutter contre les hérétiques et d'assurer le maintien de la religion catholique dans la province, mais le vocabulaire n’est pas excessif pour autant. Le ton du discours des États est différent de l'image que l'on se fait généralement des ligueurs comme des catholiques acharnés et violents. Ici, la condamnation des protestants comme hérétiques et ennemis est claire, mais sans donner lieu à un déferlement de violences verbales. Cette image des ligueurs excessifs est peut-être due aux sermons parfois agressifs des prêcheurs ligueurs. Cette observation nous montre bien que la défense de la religion ne doit pas nécessairement être associée à un fanatisme violent et que, le mouvement ligueur, fut complexe et multiforme dans les objectifs et les idées défendues,

25 ADIV, C 3189, Procuration du chapitre de Saint-Malo, 6 février 1591. 26 ADIV, C 3194, Procuration de Dinan, 26 février 1592.

27 ADIV, C 3189, Procuration du chapitre de Vannes 1591 : « au restablissement de la sainte religion catholique

apostolique et romaine extirpation des heresies soubz un roy qui soit catholique »

ADIV, C 3194, Procurations du chapitre Vannes 1592 : « conservation manutention et retablissement de la saincte religion catholique apostolique et romaine en cedit pais »

ADIV, C 3197, Procuration Evêque de Saint-Brieuc 1593 :« l’advencement de la religion catholique apostolique et romaine manutention de l’estat extirpation des heresies heretiques et leurs fauteurs ».

28 Existe dans la fond une procuration pour la noblesse de Léon qui envoi deux députés pour la représentée aux

États en 1593 mais le document est très succinct sans aucune déclarations d'intention ou de demandes particulières ADIV, C 3197, Procuration noblesse de Léon 1593.

152 mais aussi dans les formes de l'engagement et dans la façon dont il fut vécu et exprimé.

L'adhésion des États aux objectifs religieux de la Ligue ne fait pas de doute. Mais le combat religieux des États avait des conséquences politiques importantes, ainsi les États ligueurs, à l'instar de l'ensemble des ligueurs du royaume, ne reconnaissent pas Henri IV comme roi de France. Les ligueurs avaient érigé comme souverain le cardinal de Bourbon sous le nom de Charles X. Mais ce dernier est décédé en prison le 9 mai 1590. Il est donc nécessaire aux ligueurs de trouver une solution politique à ce problème de vacance du pouvoir royal.

Dans le document Les États de la Ligue en Bretagne (1591-1594) (Page 150-153)