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Reconnaissance des manifestations émotionnelles en situation professionnelle

2. RÉPONSE AU DEUXIÈME OBJECTIF DE RECHERCHE

2.2 Reconnaissance des manifestations émotionnelles en situation professionnelle

En fait, l'analyse par théorisation ancrée incite le chercheur à s'interroger notamment sur le sens des mots pour tenter de qualifier par des mots ou des expressions le propos d'ensemble sur lequel porte l'enquête (Paillé, 1994). Comme la codification demeure une étape indispensable, voire cruciale pour une théorisation, ces questions deviennent un automatisme soit : de quoi s'agit-il ? Qu'est-ce que c'est ? De quelle émotion parle-t-on ? Est-ce une émotion, un sentiment ou un état ? Une des caractéristiques importantes de l’émotion est la vitesse avec laquelle elle peut se mettre en place, et ce, avec une capacité d’adaptation (Rimé, 2009), tandis que les sentiments et les états émotionnels sont des manifestations émotionnelles pouvant avoir des caractéristiques de rupture, de transformation et de durabilité. D’après l’approche behaviorisme70, « l’état émotionnel ne constitue rien d’autre qu’un indicateur de la désorganisation ou du bouleversement des réponses de l’individu » (Rimé, 2009, p. 21). D'ailleurs, ce processus d'interrogation a permis l'inscription de plusieurs codes insoupçonnés au départ et nécessaires à l'identification des compétences émotionnelles. C'est ainsi que nous avons ajouté une catégorie qui concerne les états émotionnels. L’étude relève que les directrices et les directeurs généraux sont parfois confrontés à gérer différents états émotionnels ou à se retrouver soi-même dans un état émotionnel. À titre d’exemple, un état de fatigue, raconté par trois sujets :

Benoit (DG, cégep en milieu rural) : « Puisqu’il était fatigué, et démontrait une certaine

usure quant à cette fonction de travail, il a trouvé une opportunité ailleurs et il a quitté ».

Laurent (DG, cégep urbain) : « Cela peut s’illustrer avec les cadres en constatant par

exemple qu’ils sont trop fatigués. Il est alors possible d’aller se reposer à la maison ».

Sophie (DG, cégep urbain) : « Un moment donné, j’observe cette direction qui me semblait

très fatiguée, alors qu’elle est en rencontre statutaire avec moi. Je lui ai dit de ne pas venir au CA prévu en soirée, de partir à la maison pour s’occuper d’elle ».

En cours d'analyse, nous avons parfois eu de la difficulté à coder certains segments saillants, car il était parfois difficile de distinguer la véracité étymologique de l’émotion à

70 John Watson, le behaviorisme dur et la campagne anti-émotions, d’après Rimé (2009) Watson, J.B. (1919). Psychology from the standpoint of a behaviorist, Philadelphia, Lippincott.

travers certaines expressions québécoises. En fait, de quoi s’agit-il ? D’une émotion, d’un sentiment ou d’un état émotionnel, et ce, malgré la manifestation d'une émotion. Or, le français parlé au Québec est différent de tous les autres français du monde, soit par son accent, soit par ses onomatopées, soit selon certaines expressions typiquement québécoises. Par ailleurs, les expressions québécoises apportent à la langue française une saveur dialectique et une particularité unique au monde. De plus, nous avons constaté que l’utilisation de ces expressions était majoritairement accompagnée d’indicateurs émotionnels dont les signes paralinguistiques.

L’analyse thématique s’est effectuée avec une faible inférence et plus conservatrice sur le plan conceptuel, de manière à limiter l’interprétation (Paillé et Mucchielli, 2013). Le degré de difficulté quant à la validité du codage était bien présent, considérant la préoccupation constante de relever un thème dont la dénomination devenait suffisamment précise, et en lien avec la teneur d’un extrait du corpus. (Ibid., 2013).

En cours d'analyse, nous avons réalisé que les composantes « les émotions » ne sont pas toujours présentes dans les phrases, mais elles sont là par le choix des mots, des verbes et des expressions. Implicitement, les émotions sont là, mais pas toujours explicitement. Parfois, il était difficile d’aborder l’analyse du texte, pour construire notre réflexion argumentée autour de cette problématique qui renvoie à l’identification des compétences émotionnelles. Afin de nous assurer de la validité du codage, nous avons procédé à la révision des huit REdEPP en nous appuyant sur un procédé d’analyse qui se rapporte à la méthodologie philosophique (Choulet, Folscheid et Wunenburger, 2013), et ce, pour l’identification des compétences émotionnelles. D’après Choulet et al. (2013) l’explication de texte est « le meilleur moyen d’accéder à la pensée des philosophes […] et dans son principe, identifiable à la lecture approfondie, qui est la lecture philosophique par excellence » (p. 27).

À nouveau, nous avons examiné les textes en notant la sémantique d’intelligibilité qui permet la prise de décision pour l’analyse. Par cette opération itérative, nous avons relu

chaque REdEPP en utilisant un code de distinction, et ce en notant directement dans le texte, à savoir :

 les mots parlants en rouge ;

 les segments parlant en soulignement ;

 les verbes d'action (vécu émotionnel) en bleu.

Selon Choulet et al. (2013) pour aborder un texte, « il faut avant tout se mettre dans l’attitude requise, c’est-à-dire en situation de réceptivité […] sans préjugés d’aucune sorte, sans attentes, sans savoirs préalables ou souvenirs de savoir » (p. 31). Ce procédé d’analyse philosophique a permis de s’élever au-dessus de l’explication linéaire, tout en lui restant fidèle, et se demander à chaque fois ce qui en est question (Ibid., 2013). Par exemple : S’agit-il d’une émotion ou d’une manifestation émotionnelle ? Ce travail d’analyse complémentaire a permis de reconnaître les manifestations émotionnelles en situation professionnelle et d’obtenir une vision globale et visuelle des compétences émotionnelles.

Puis alors, le procédé de l’explication de texte a soutenu une rigueur d’analyse du corpus que l'on peut qualifier de procédural pour s’assurer de l'identification des compétences émotionnelles et de s’assurer de la validité des codes correspondants aux émotions, aux sentiments et aux états émotionnels. À l’avenant de cette vérification de validité du codage, nous avons conçu un tableau individualisé afin de recenser les mots parlants et les segments significatifs qui avaient une connotation émotionnelle. Puis, nous avons inventorié les verbes d’action faisant partie du propos ; ceux-ci ont contribué à éclairer nos choix vers l’énoncé de compétence.

À titre indicatif, le tableau 18 présente un exemple d’analyse de phrase de chaque sujet, et ce, à partir des huit tableaux individualisés.

Tableau 18 : Mots aidants à la prise de décision pour l’analyse

Sujet Mots parlants Segments

significatifs Verbes d’action Compétences émotionnelles 1) Laurent avait touché J'ai trouvé

ça « cheap shot » exprimer Exprimer ses émotions de manière adaptée au contexte

2) Benoit (l'effet) dévastateur

Ça détruit, c'est la terre brûlée, et il ne reste plus rien !

expliquer Exprimer ses

émotions de

manière adaptée au contexte

3) Marie insensible ne pas me sentir

perdue, abattue ou démolie

touchée Comprendre son

vécu émotionnel dans le contexte présent

4) Caroline crédibilité je devais m'assurer de ne pas tomber dans des zones d'émotion (ne pas) tomber Gérer ou réguler ses émotions désagréables en fonction du contexte et de ses objectifs

5) Marguerite calmer perde la face au sein du collège

protéger Prendre soin de

l’état émotionnel d'autrui

6) Anne processus

d'élaboration

j'y greffe des images d'impact

construis Utiliser les

émotions des autres pour accroître leur efficacité

7) Sophie en

communion avec moi

j'ai utilisé l'humour tandis que cette année, j'étais plus sur les émotions

utilisé Utiliser les

émotions des autres pour accroître leur efficacité

8) Fabien Partageons ce

qu'on vit ! Passer à travers cet épisode-là, arriver à faire sentir à ta communauté que c'est ça qu'on doit retenir de ce qui vient de se passer

réfléchit Réguler les

émotions positives dans la relation

Traduction libre : coup bas

En fait, le procédé d’analyse qui se rapporte à la méthodologie philosophique peut ressembler à une dislocation sémantique de manière à comprendre le sens du propos, et ce, en se référant parfois au paragraphe. Rappelons que le paragraphe énonce couramment des éléments de contexte qui sont nécessaires à l’analyse. Tout au long de ce processus d’analyse, l’interprétation des manifestations émotionnelles a été possible et certes plus précise avec l’interposition du procédé de l’explication de texte. Ce traitement analytique a permis notamment la confrontation du modèle de compétences émotionnelles (Mikolajczak et al. 2014) avec les données empiriques avec l’intention de mettre en épreuve sa validité. 2.2.1 La classification des émotions, des sentiments et des états émotionnels

Lors de la rédaction des REdEPP, nous avons fait le choix de conserver dans le corpus la terminologie propre au domaine des émotions émanant des propos. Aussi, nous avons porté une attention particulière à l’utilisation des verbes d’action : identifier, exprimer, comprendre, gérer, réguler, utiliser et prendre soin important pour notre étude ; en effet la représentation adverbale a permis de mieux circonscrire la compétence émotionnelle et de particulariser la nature de l’émotion. De quelles émotions, de quels sentiments ou états émotionnels s’agit-il ? Ainsi, nous avons accordé une importance aux choix de ces mots empreints d’émotion et aux expressions familière, régionale ou poétique toujours très présents dans les discours. Cela a mis en évidence que ces mots transpirent la présence ou la prise en compte de l’intelligence émotionnelle au sein des situations professionnelles racontées. L’objectif de la classification est de déterminer des classes de mots, qui représentent avec objectivité le sens réel du vécu émotionnel. La classification se fait à partir du logiciel et permet de mettre en relief le vocabulaire spécifique de chaque classe ainsi que le pourcentage d’utilisation ou le nombre de références dans le texte associé au mot. La figure 12 présente les variétés d’émotions que les directrices et les directeurs généraux ont vécues dans leur environnement professionnel. Les variétés d’émotions ont été classifiées selon la catégorie des émotions, d’après la typologie des émotions de Damasio (2005). Nous y ajoutons les types d’émotions par catégorie, ce que Plutchick (2003) nomme les nuances des émotions.

Figure 12 : Les variétés d’émotions71

De plus, nous y inscrivons le pourcentage de fréquences par catégorie et, plus particulièrement les émotions ressenties par les huit sujets. Cette proportion permet de mieux évaluer le rapport entre les variétés d'émotions. À la lumière de cette figure, il y a lieu d’observer la prédominance des émotions primaires, avec un taux de 42,20 %, ayant 54 références taxonomiques.

71 L’appellation « Variétés d’émotions » est utilisée par Damasio et Fidel (2012) pour catégoriser les émotions

d’arrière-plan, les émotions primaires, les émotions secondaires et les émotions sociales, tandis que Plutchik (2003) présente autrement la typologie des émotions, soit par un modèle de circumplex en deux dimensions qu’il nomme « Roue des émotions » où les émotions et variations (ou nuances) sont représentées par des couleurs et des teintes différentes.

Les variétés d'émotions Émotions d'arrière-plan 6,3 % Émotions primaires 42,20 % Émotions secondaires 14 % Émotions sociales 37,77 % 1) Plaisir, 5,5 % 2) Douleur,0,8 % 3) Appétits, 0 % 1) Confiance, 18 % 2) Peur, 4,7 % 3) Surprise, 4,7 % 4) Bonheur, joie, 4,7 % 5) Colère, 3,9 % 6) Anticipation, 3,9 % 7) Tristesse, 2,3 % 8) Dégoût, 0 % 1) Frayeur, crainte, alarme, 3,9 % 2) Déception, 3,1 % 3) Agressivité, agression, 3,1 % 4) Optimisme, courage, 3,1 % 5) Anxiété, 0,8 % 6) Amour, 0 % 7) Soumission, 0 % 8) Remords, 0 % 9) Mépris, hostilité, 0 % 1) Respect, 13,3 % 2) Admiration, élévation, 5,5 % 3) Sympathie, 3,1 % 4) Gratitude, 3,1 % 5) Indignation, 3,1 % 6) Embarras, 1,6 % 7) Honte, 1,6 % 8) Empathie, 1,6 % 9) Envie, 1,6 % 10) Culpabilité, 0,8 % 11) Compassion, 0,8 % 12) Convivial, 0,8 % 13) Jalousie, 0,8 % 14) Mépris, 0 % 15) Orgueil, 0 %

La confiance est notamment l’émotion la plus fréquente par les directrices et les directeurs généraux, c’est dire que l’on retrouve cette émotion chez sept sujets. À titre d’exemple :

Laurent (DG, cégep urbain) : « On a créé des liens de confiance puis redynamisé

correctement les comités de relations de travail […] ».

Benoit (DG, cégep milieu rural) : « Il faut cultiver cette confiance qui se définit selon moi

par une communication, par une présence, par des gestes simples non compliqués, et ce, au bon moment ».

Sophie (DG, cégep urbain) : « Tout ça pour dire qu’il faut adopter une attitude

d’ouverture, de confiance et non de méfiance qui stipule une fermeture ».

Anne (DG, cégep urbain) : « Donc, quand l’équipe est solide, je m’appuie sur ça, ça

m’alimente, et je fais confiance aux données qu’ils m’offrent ».

Selon les verbatims, il y a lieu de croire que cette émotion à valence positive est particulièrement vécue dans un contexte de collaboration. Rappelons que plusieurs travaux dont ceux de Roseman (1996) abordent la valence des différentes émotions comme étant positive ou négative « ce qui déclenche respectivement des comportements d'approche ou d'évitement » (Belzung, 2007, p. 455). La valence positive ressort d'un vécu subjectif agréable et plaisant tandis que la valence négative ressort d'un vécu subjectif désagréable et déplaisant. Habituellement, la joie est décrite comme une émotion à valence positive tandis que la tristesse, le dégoût, la colère, la peur, la culpabilité comme des émotions à valence négative (Belzung, 2007).

En second lieu, les émotions sociales arrivent au 2e rang avec un taux de 37,77 %, dont nous observons que 48 références taxonomiques. De cette catégorie, le respect apparaît comme l’émotion sociale la plus fréquente, que l’on retrouve chez six sujets. Certains manifestent ou gèrent différemment cette émotion, mais elle est souvent associée à la mission de l’institution ou aux comportements attendus d’un professionnel en éducation. À titre d’exemple :

Laurent (DG, cégep urbain) : « C’est une démarche qu’il faut faire avec délicatesse et

Marie (DG, cégep urbain) : « Notre philosophie de gestion […] est compatible avec des

valeurs de dignité et de respect, un respect ouvert vers l’autre ».

Sophie (DG, cégep urbain) : « Nous voulions aborder avec eux l’organisation de cet

évènement afin que celui-ci s’effectue dans le respect et la sécurité des personnes pour le mieux-être dans notre cégep ».

En troisième lieu, les émotions secondaires ont une fréquence d'utilisation de 14 %, que l’on retrouve chez sept sujets. Or, nous remarquons que la frayeur, la déception et l'agressivité qui s’inscrivent plutôt comme étant des émotions à valence négative, représentent entre quatre et cinq manifestations. À titre d'exemple, plusieurs sujets ont manifesté singulièrement ces émotions :

Caroline (DG, cégep urbain) : « il me fallait « garder le CAP » avec une attitude positive et

calme, et ce, malgré une certaine déception puis une certaine peine de voir [...] ».

Sophie (DG, cégep urbain) : « J'avais de l'agressivité en moi, mais jamais je ne l'ai

extériorisé ».

Marguerite (DG, cégep urbain) : « D'un autre côté, cette histoire m'a permis de mieux voir

les gens qui m'entourent et d'être déçue par une personne qui aurait pu faire un travail auprès de son équipe ».

Fabien (DG, cégep urbain) : « [...], car j'avais une crainte que mes propos soient mal

rapportés ».

Finalement, les émotions d’arrière-plan ont une fréquence d'utilisation de 6,30 %, et ce, avec huit références taxonomiques, dont sept qui sont associées au plaisir et une à la douleur. Nous remarquons que le plaisir est souvent associé à l’environnement du travail, soit le climat de travail. Certains semblent promouvoir le plaisir au travail et organiser des activités qui génèrent cette émotion à valence positive. À titre d’exemple :

Laurent (DG, cégep urbain) : « Je les ai invités à être heureux en ayant du plaisir en

travaillant ».

Benoit : (DG, cégep urbain) « Il faut qu’on ait du fun dans une organisation, si tu n’as pas

de fun, si tu n’as pas de plaisir, il y a un problème. Le plaisir c’est dans ton travail, c’est le plaisir d’être avec les autres, alors le respect, le plaisir, c’est en corolaire aux relations humaines de qualité ».

Fabien (DG, cégep urbain) : « Tant que je vais avoir l’impression, qu’il y a encore des

2.2.2 Les sentiments et les états émotionnels

La figure 13 représente les sentiments et les états émotionnels. Les variétés d'émotions, ainsi que les sentiments et les états émotionnels recensés dans cette étude représentent le vécu émotionnel verbalisé par les sujets. Bien que restreinte, cette liste offre un éclairage sur la nature des émotions que peuvent vivre ou gérer les directrices et les directeurs généraux. Par choix d'analyse, nous avons traité séparément les variétés d'émotions. C'est-à-dire que nous avons considéré les sentiments et les états émotionnels comme étant la transformation des émotions. Selon l’analyse, il s'y dégage un phénomène de progression ou de durabilité à savoir que l’émotion vécue peut se transformer en sentiment ou en état émotionnel.

Figure 13 : Transformation de l’émotion Transformation de l'émotion Sentiment 60,60 % État émotionnel 39,40 % 1) Difficulté, 27,2 % 2) Satisfaction, 7,4 % 3) Inquiétude, 4,5 % 4) Isolement, 3 % 5) Facilité, 2,5 % 6) Insatisfaction, 2 % 7) Solidarité, 2 % 8) Incapacité, 1,5 % 9) Instable, 1,5 % 10) Horreur, 1,5 % 11) Insécurité, 1 % 12) Réserve, 1 % 13) Sensible, 1 % 14) Être démoli, 1 % 15) Accomplissement, 0,5 % 16) Méfiance, 0,5 % 17) Injustice, 0,5 % 18) Incertitude, 0,5 % 19) Frustration, 0,5 % 20) Malaise, 0,5 % 21) Capacité, 0,5 %

1) Fierté (être fier), 8,4 % 2) Heureux, 4,5 % 3) Stressé, 4,5 % 4) Résilience, 3,5 % 5) Émotivité, 3 % 6) Morosité, 3 % 7) Fatigue, 3 % 8) Détresse, 2,5 % 9) Vulnérabilité, 1,5 % 10) Malheureux, 1 % 11) Insensible, 1 % 12) Calme, 0,5 % 13) Impatience, 0,5 % 14) Fragile, 0,5 % 15) Découragement, 0,5 % 16) Angoisse, 0,5 % 17) Nervosité, 0,5 % 18) Fébrilité, 0,5 %

Les résultats de l'étude démontrent que les manifestations émotionnelles en lien avec les sentiments ont une prédominance de 60,60 % tandis que nous relevons une différence de 39,40 % pour l'état émotionnel. En termes de sentiments, nous en avons recensé 21 selon des pourcentages de fréquence différents. À la lumière de la liste de ces sentiments, nous remarquons une différence de fréquence entre le sentiment de difficulté et les autres, c'est-à-dire la présence de 55 références au sentiment de difficulté. Toutefois, ce chiffre un peu élevé nous semble modérément biaisé par le fait que lors de l'entretien une des questions demandées était de raconter la situation professionnelle ayant été la plus difficile à gérer ; celle qui peut avoir été vécue comme une épreuve. Cette interrogation provoquait immanquablement une situation qui avait généré des émotions à valence négative, puis possiblement un sentiment de difficulté, ce qui peut expliciter la différence numérique. Plusieurs sentiments exprimés par les sujets explicitent bien l’émergence du sentiment de difficulté. À titre d’exemple :

Laurent (DG, cégep urbain) : « Le climat organisationnel témoignait alors de relations de

travail lourdes et de problèmes manifestes de gouvernance au cégep ».

Marie (DG, cégep urbain) : « D’ailleurs, j’ai dû procéder à un non-renouvellement pour

une direction en fin de mandat. C’est très difficile de faire ça, de faire ces rencontres-là, car la personne a des enfants, une famille. Le cœur te débat, car on est tous humain ! ».

Sophie (DG, cégep urbain) : « […] ça été difficile personnellement, mais ça été

particulièrement difficile professionnellement pour la raison qu’il n’était pas question que j’abandonne en cours de mandat. Il n’était pas question que j’y laisse ma peau […] ».

Nous observons72 que les sentiments de difficulté surviennent notamment lors de contexte de conflits en milieu de travail, de contexte de climat organisationnel ou d’un contexte de crise. En rappel, pour la catégorie : états émotionnels, nous avons prélevé et parfois inféré des conditions particulières dans lesquelles se trouve la personne ou une

72 En cours d’analyse, il était parfois malaisé de catégoriser la difficulté comme sentiment de difficulté ou comme sentiment de découragement ou comme situation de difficulté, car il pouvait manquer des éléments factuels (ou indicateurs) pour bien saisir ces nuances qualitatives. Toutefois, le mot « difficulté » pouvait nous permettre de traduire la présence d’une émotion, et par le fait même identifier une compétence émotionnelle.

disposition qui s’observe par la manière d’être quant à la situation professionnelle racontée. Pour cette catégorie, nous avons recensé 18 états émotionnels avec des pourcentages de fréquence différents. La distinction que nous apportons entre sentiment et état émotionnel est le fait que le sentiment émerge d'une émotion en lien avec une situation professionnelle, tandis que l'état émotionnel est davantage une manifestation du corps qui agit sur l'évaluation cognitive (Scherer, 2001) par l'individu. Nous y voyons une certaine progression émotionnelle qui s'intensifie chez la personne.

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