I.2 Le principe du radar ` a ouverture synth´etique
I.2.1 Le radar ` a vis´ee lat´erale ou compression en distance
Les premiers radars imageur sont bas´es sur le principe du radar `a vis´ee lat´erale appel´e SLAR (Side Looking Real-Aperture Radar) ou RAR (Real-Aperture Radar). Ce syst`eme offre une tr`es bonne r´esolution dans l’axe distance (axe de propagation de l’onde ´elec-tromagn´etique) grˆace `a la technique de compression d’impulsions mais la r´esolution dans l’axe azimut (axe de d´eplacement du radar) est soumise `a la longueur physique de l’an-tenne. Ainsi une bonne r´esolution en azimut est inversement proportionnelle `a la longueur de l’antenne, ce qui n´ecessite, pour la plupart des applications d’imagerie de trop grandes antennes : dans le cas d’une antenne `a bord d’un bateau visant une cible `a une distanceR de 10 km et avec une longueur d’ondeλcest de 3 cm, une r´esolutionδx de 25 cm requiert une longueur d’antenneLa d’environ 1.2 km. Carl Wiley [Curlander 1991] propose alors de discriminer les cibles suivant leur r´eponse en fr´equence Doppler et permet d’am´eliorer de mani`ere consid´erable la r´esolution en azimut. Ce principe a permis des progr`es remar-quables dans l’observation de la Terre et des plan`etes [Curlander 1991, Kasischke 1997].
e
τp
déplacement du porteur
axe azimut axe distance
Wg
O
x y
α RADAR
H
V
Fig. I.2 – G´eom´etrie d’un syst`eme SLAR
Comme le montre la Figure I.2, le SLAR est un syst`eme radar port´e par une plate-forme mobile (avion ou satellite). Cette plateplate-forme est suppos´ee se d´eplacer `a vitesseV et hauteur H constantes. Le faisceau du radar ´eclaire le sol dans une direction perpendicu-laire `a sa trajectoire. Le signal ´emis par le radar est un train d’impulsions. La fr´equence de r´ep´etition de ces impulsions est not´eeP RF et la fr´equence porteusefc. L’axe distance ou axe des ordonn´eesOy, est perpendiculaire `a l’´evolution du radar. L’axe transverse `a l’axe distance, ou axe des abscissesOx, est appel´e axe azimut. L’information de distance est donn´ee par le temps d’aller-retour de l’impulsion ´emise.
Nous rappelons que la r´esolution d’un syst`eme radar est d´efinie par la distance mi-nimale r´eelle ou angulaire entre deux points apparaissant distincts sur l’image radar. Si deux points peuvent ˆetre dissoci´es l’un de l’autre, alors la distance les s´eparant est su-p´erieure `a la distance de r´esolution. Pour ´etudier la r´esolution en distance, consid´erons deux points au sol1et2de mˆeme abscisse (Figure I.3). En supposant l’hypoth`ese d’onde
axe azimut
axedistance
αe
cτp
∆R R η
O x
y
Ws
Wg RADAR
1 2
∆Rg
Fig. I.3 – g´eom´etrie du syst`eme SLAR dans le plan distance
plane, le point1est situ´e `a une distanceRdu radar et le point2`a une distanceR+∆R1,2. La distance∆R1,2 s´epare les points1 et2 suivant la direction de propagation du front d’onde plane. Donc l’´echo associ´e au point2pr´esente un retard∆tde 2 ∆cR1,2 par rapport
`
a l’´echo associ´e au point 1. Afin de pouvoir dissocier les deux ´echos (Figure I.4), il est
signal ´emis
´echo 1
´echo 1
´echo 2
´echo 2
}
}
1ercas : ´echos distincts
2iemecas : ´echos indissociables
τp
Fig. I.4 – ´Echos des points1 et2
n´ecessaire que le retard∆tsoit sup´erieur ou ´egal `a la largeur d’impulsionτp, c’est-`a-dire :
∆R1,2 ≥ cτp
2 (I.1)
L’´egalit´e de l’expression (I.1) nous donne la r´esolutionδRs. La r´esolution en distanceδRg est la projection de la r´esolutionδRs sur l’axe distance :
δRg = δRs
sinη = cτp
2 sinη (I.2)
L’angle η repr´esente l’angle d’incidence du faisceau : il est ´egal `a l’angle d’´el´evation du radar, αe, pour R suffisamment grand. L’´equation (I.2) montre que la r´esolution peut ˆetre am´elior´ee en diminuant la dur´ee τp de l’impulsion. Toutefois, afin de conserver un rapport signal `a bruit acceptable, il est n´ecessaire de pouvoir ´emettre une forte puissance pendant une dur´ee d’impulsion τp faible. Il existe donc une limitation technologique.
Pour repousser cette limitation, on utilise la technique de compression d’impulsions : `a l’´emission, les impulsions sont modul´ees lin´eairement en fr´equence (ces impulsions sont appel´ees chirp) et `a la r´eception, on applique un filtre adapt´e. En consid´erant le signal
´emis se(t) pendant une r´ecurrence (|t|≤ 2PRF1 ), celui-ci peut s’´ecrire : se(t) = exp(2πfct).exp
La grandeur 2B0est l’excursion en fr´equence du signal ´emis et 2Bτ0
p est le taux de variation de la modulation. En pr´esence d’une cible ponctuelle i, le signal re¸cu (sr(t) = sri(t)) s’exprime comme le signal ´emis, retard´e du temps d’aller-retourδtde l’onde `a la cible et pond´er´e par un coefficient de r´eflexionρi. Apr`es d´emodulation, ce signal re¸cu en bande de basesrb(t) est corr´el´e avec un signal de r´ef´erencesref(t), ayant les mˆemes caract´eristiques que le signal ´emis se(t) en bande de base. L’op´eration de filtrage adapt´e revient donc `a effectuer une convolution entre ces deux signaux pour obtenir le signal compress´esc(t) :
sc(t) =#+∞ Le symbole ∗ d´esigne ici l’op´erateur du produit de convolution. Dans le domaine fr´e-quentiel, cette op´eration revient `a une multiplication du spectre du signal re¸cu avec le conjugu´e du spectre du signal chirp. Le r´esultat de ce produit donne un spectre d’am-plitude quasi-constante, de largeur la bande du signal ´emis. Dans cette bande, la phase du spectre est alors nulle. Si ce r´esultat est ramen´e dans le domaine temps par trans-form´ee inverse de Fourier, on trouve un signal dont le module est repr´esent´e par une fonction sinus cardinal dont la largeur du lobe principal est inversement proportionnelle
`
a la largeur du spectre initial. SoientSc(f),Srb(f) etSref(f) les transform´ees de Fourier respectivement du signal compress´e sc(t), du signal re¸cu en bande de base srb(t) et du signal de r´ef´erencesref(t), l’op´eration de filtrage adapt´e donne alors :
Sc(f) =Srb(f)Sref∗ (f)
≈exp(2π4Bτp
0f2)exp(−2πδtf)exp(−2π4Bτp
0f2) pour |f|≤B0 (I.5) Cette relation n’est pas exacte puisque la pond´eration en amplitude du spectre n’est pas une porte rectangulaire. Toutefois l’approximation (I.5) est consid´er´ee valide pour 2B0τp ≥ 100 [Curlander 1991]. En consid´erant cette condition remplie, nous pouvons
´ecrire :
sc(t) =T F−1[Sc(f)]
≈ sin(π2Bπ(t−δt)0(t−δt)) (I.6)
En r´ealit´e, un produit 2B0τp´egal `a 20 [Curlander 1991] est suffisant pour que l’´equation (I.6) soit valide. Le diagramme de la Figure I.5 r´esume la technique de compression d’impulsions. La relation (I.6) indique que la r´esolution temporelleδtc du signal compress´e
600 800 1000 1200 Spectre du signal de reference
−0.5 0 0.5 Resultat du produit des 2 spectres
880 900 920
Fig. I.5 – Technique de la compression d’impulsions est ´equivalente `a δtc = 2B1
0 ce qui implique une r´esolution spatiale dans l’axe distance
´egale `a :δRc = cδt2c = 4Bc
0 ou sa projection au sol : δRgc= c
4B0sinη (I.7)
La r´esolution ne d´epend alors que de l’occupation spectrale des impulsions et non plus de leur dur´ee. Pour illustrer ce r´esultat, nous pr´esentons les caract´eristiques du syst`eme spatial canadien RADARSAT dans le tableau I.2.1.
Naturellement, nous souhaitons obtenir une r´esolution selon l’axe azimut du mˆeme ordre de grandeur que la r´esolution en distance. Dans le cas d’un syst`eme SLAR, deux points sont discernables s’ils ne sont pas simultan´ement dans le faisceau de l’antenne (voir Figure I.6). La r´esolution δx en azimut correspond donc `a la trace au sol du faisceau de l’antenne dans l’axe azimut. En utilisant les notations de la Figure I.6, ceci se traduit par la formule suivante :
δx=RβH = Rλc La
(I.8)
Fr´equence porteuse fc 5.3 GHz Fr´equence de r´ep´etition des impulsions P RF 1300 Hz
Dur´ee des impulsions τp 40µs
Largeur de bande 2B0 30.002 MHz
Angle d’incidence αe 38.1◦
R´esolution en distance sans la compression d’impulsions (projet´ee au sol)
δRg 9724 m R´esolution en distance avec compression
d’im-pulsions (projet´ee au sol)
δRgc 8.1 m Tab.I.1 – Caract´eristiques du syst`eme canadien RADARSAT
o`uλc est la longueur d’onde du signal ´emis,La la longueur de l’antenne dans la direction de d´eplacement du porteur et βH l’angle d’ouverture de l’antenne `a -3 dB1. L’´equation (I.8) nous permet de constater que plus l’antenne est grande et meilleure est la r´esolution.
Pour donner quelques ordres de grandeur, voici deux exemples : un syst`eme radar de ba-teau avec une antenne de 1 m de long, travaillant en bande X (λc = 3 cm) a une r´esolution de 300 m `a 10 km de distance ; ce qui est acceptable pour une application de d´etection.
Mais, pour des plateformes spatiales, la r´esolution devient tr`es vite inacceptable : pour une distance R de 800 km et un rapport La/λc de 200, la r´esolution est de 4 km. La r´esolution est donc tr`es vite limit´ee par les caract´eristiques physiques de l’antenne. Cette performance est am´elior´ee par la technique d’ouverture synth´etique.