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4 – Le rôle des bannis entre 345 et 338

L’histoire de l’Élide nous échappe à maintes reprises, mais aussi lacunaire que soit la documentation, elle dévoile d’intenses luttes civiles provoquées par les différentes factions162. Ainsi, les luttes civiles nées lors de la guerre avec l’Arcadie, permettent l’arrivée au pouvoir des oligarques vers 365/4. Environ quatre cents démocrates prennent le chemin de l’exil et trouvent refuge à Pylos sur le Penée sur la zone frontalière entre Élis et l’Acroria. La cité devient le lieu de rassemblement de tout banni éléen. Une partie d’entre eux est tuée et deux cents sont faits prisonniers lors d’une offensive organisée par les oligarques éléens avec l’appui de l’Achaïe et plus particulièrement la cité de Pellène et de Sparte. Selon H.-J. Gehrke environ quinze ans plus tard vers 350, les oligarques tendent la main à leurs anciens adversaires. À l’issue de la réconciliation, une réforme constitutionnelle est mise en œuvre avec l’aide extérieure du platonicien Phormion qui conduit à une démocratisation d’Élis163. Il est possible que la dédicace à l’Homonoia

160

TEEGARDEN 2014, p. 100 -101. Le conseil est impliqué dans l’expulsion de Charinos accusé d’agir pour la Macédoine et la relève de Charidémos de sa position de général en charge de la défense de la cité après la défaite de Chéronée, charge confiée à Phocion. Il ordonne également l’exécution de ceux qui sont tentés de quitter la cité dans le même contexte.

161

MOSSÉ 1970, p. 71-78. L’auteur se demande, sans certitude, s’il ne s’agit pas simplement d’appliquer la recommandation de Philippe II aux Grecs, de ne pas procéder à aucun changement constititutionnel. Raison pour laquelle, les Athéniens remettre en vigueur une loi ancienne, sans trop éprouver le besoin d’en changer les termes, puisqu’il n’y a pas de tentative précise de renversement de la démocratie (p. 76).

162ROY 1999, p. 151-176. 163

« Ϝαλείων · περὶ ὀμονοίαρ. » découverte à Olympie soit contemporaire à ces évènements164.

Pourtant, nos sources nous apprennent que la région est à nouveau habitée par la stasis et souillée par des bains de sang.

Démosthène, Sur l’ambassade, 260

« εἰς Πελοπόννησον δ' εἰσελθὸν τὰς ἐν Ἤλιδι σφαγὰς πεποίηκε, καὶ τοσαύτης παρανοίας καὶ μανίας ἐνέπλησε τοὺς ταλαιπώρους ἐκείνους ὥσθ', ἵν' ἀλλήλων ἄρχωσι καὶ Φιλίππῳ χαρίζωνται, συγγενεῖς αὑτῶν καὶ πολίτας μιαιφονεῖν… ». « Pénétrant dans le Péloponnèse, ce mal a provoqué les massacres de l’Élide et a rempli les malheureux habitants de ce pays d’une telle folie et d’une telle fureur que, pour se commander mutuellement et faire plaisir à Philippe, ils se souillent du sang de parents et concitoyens » 165.

Plus loin dans le même discours, Démosthène prétend qu’en Élide des gens volaient l’argent de l’État, sans qu’ils n’aient pour autant participé au renversement de la démocratie166.

De son côté, Pausanias accuse Philippe d’avoir corrompu les Éléens en semant l’or et l’argent parmi eux, faisant naître des divisions entre les principaux citoyens : « στασιάζουσι πρῶτον τότε Ἠλεῖοι » (Pausanias, IV, 28). Il est possible de rapprocher ces dires du discours de Démosthène prononcé en 330, où ce dernier présente Euxithéos, Cléotimos et Aristaichmos, comme les créatures de Philippe. Il les accuse d’avoir trahi l’intérêt commun, trompant et corrompant leurs concitoyens, n’obéissant qu’à leur cupidité personnelle167. Diodore quant à lui, nous rapporte l’entreprise malheureuse de bannis éléens désireux de reprendre le pouvoir168.

Alors que s’est-il réellement passé en Élide ?

Il est généralement admis que vers 345, Philippe apporte son soutien à des oligarques éléens. La stasis tourne à l’avantage des oligarques et la démocratie est renversée à Élis. De nombreux Éléens prennent le chemin de l’exil. Ces derniers désireux de réintégrer la cité et renverser le pouvoir en place, reviennent en 343/2 et tentent un coup de force

164

I. Olympie, 260 ; I. éléennes dialectales, n° 51. Grand bloc de pierre trouvé en 1876 à l’Est du temple de Zeus,

actuellement au Musée d’Olympie. MINON 2007, p. 244, date le texte du milieu du IVe/IIIe s. Voir également ROY 2008, p. 67 – 72.

165

Traduction MATHIEU 1956.

166

Démosthène, Sur l’ambassade, 294.

167

Démosthène, Sur la couronne, 297.

168

contre leur patrie. Pour ce faire, ils prennent à leur service les « débris » des contingents mercenaires du Phocidien Phalaicos et se rendent dans le Péloponnèse169.

Secondés par les Arcadiens, peut-être les Mantinéens et leurs alliés170, favorables à Philippe, les Éléens sortent vainqueurs de l’affrontement. Les bannis sont écrasés, nombre de mercenaires sont tués et d’autres au nombre de quatre mille sont faits prisonniers. Les captifs sont partagés en guise de butin entre les Arcadiens et les Éléens, les premiers vendent ceux qui leurs sont échus comme esclaves, les seconds égorgent les leurs. L’oligarchie reste en place tout du moins jusqu’en 335.

Récemment, G. Bourke vient bousculer cette tradition en émettant l’hypothèse que ce ne sont pas des démocrates mais des oligarques qui tentent le coup de force de 343/2 et la révolution démocratrique à Élis remonterait à ca 351 - 348. Selon l’auteur, les démocrates ont probablement dénoncé l’alliance avec Sparte et pour s’allier avec leurs voisins arcadiens, appartenant à la ligue basée à Mégalopolis. L’auteur voit dans les faits relatés par Démosthène, et Pausanias, trois aspects différents d’un même épisode. Les citoyens, victimes des luttes civiles, ne sont autres, que d’un côté, les bannis présents sur le champ de bataille au côté des mercenaires et, de l’autre, les citoyens qui défendent leur patrie. G. Bourke suppose que Démosthène a négligé de parler dans son discours de mercenaires pour des raisons rhétoriques : il apparaît difficile de faire naître de la sympathie pour ceux qui ont tant pillé les biens d’Apollon durant la Guerre Sacrée et il ne veut pas rappeler à ses auditeurs que c’est Philippe qui a mis fin à tous ces sacrilèges.

À partir, de ces arguments, il semble crédible pour l’auteur, qu’un groupe d’oligarques tente de reprendre le contrôle dans leur patrie avec le concours de quatre mille mercenaires, pris à leur solde en Italie. Ces derniers sont défaits par le pouvoir en place, des démocrates qui obtiennent l’assistance militaire de la ligue arcadienne basée à Mégalopolis et le soutien financier de Philippe, avec lequel, ils vont s’allier171

. Par le sort réservé aux mercenaires, les Éléens comptent envoyer un message fort à tous ceux qui pensent pouvoir s’approprier les trésors d’Apollon ou de Zeus. En agissant ainsi, ils se font l’instrument du châtiment divin mais également celui des volontés royales et de l’Amphictionie qui prévoit que les Phocidiens exilés ainsi que leurs complices soient partout mis hors la loi172.

169

Diodore, XVI, 63, 3 - 4. Le Phocidien Phalaicos s’est rendu en Crète à la fin de la Troisième Guerre sacrée en 346 avec des troupes mercenaires et c’est là qu’il trouve la mort.

170

GEHRKE 1985, p. 57.

171

Pausanias, V, 9,6.

172

Pour G. Bourke, l’hypothèse d’une contre-révolution menée par des oligarques vers 345 peut être écartée et il est possible de conclure que la démocratie établie vers 348 reste en place et que durant la période de domination macédonienne en Grèce, c’est une cité éléenne, démocratique qui entretient des relations cordiales avec les Macédoniens. Malgré l’intérêt soulevé par cette reconstitution et un modus operandi qui se rapproche de celui d’autres oligarques du IVe siècle, elle n’en mérite pas moins d’être manipulée avec grande prudence en raison du maigre faisceau d’indices.

Un autre témoignage important en provenance d’Élis pose toujours question. Il s’agit d’un décret d’amnistie pour des bannis politiques, dont le contexte et la datation restent sujet à controverse. Sommes-nous en présence d’un nouveau témoignage de luttes civiles ou s’agit-il d’un règlement en lien avec l’amnistie générale de 324 ? Ou devons nous y voir le règlement du conflit présent ? Rien de moins sûr, les avis restent partagés quant à une datation précise.

Un terminus post quem dans les années 370/65 est généralement admis. Mais selon S. Minon pour la chronologie basse, l’absence de textes postérieurs à 365 empêche tout recours à la paléographie pour une datation précise de la damiurgie mentionnée. L’histoire politique troublée de l’Élide au cours du IVe

siècle a été propice à des bannissements successifs, mais il est impossible dans l’état actuel de nos connaissances de rapprocher l’inscription à l’une de ces vagues de bannissements en particulier173

. Bien que l’hypothèse reste fragile, les partisans de ca 350 placent l’inscription dans le même contexte que le retour des démocrates et l’instauration d’une constitution démocratique174

. Le décret pourrait également être en lien avec le soulèvement de 335 suite à la fausse rumeur de la mort d’Alexandre ou encore être consécutive à l’édit de 324.

Bien qu’aucune chronologie ne puisse finalement être établie avec certitude, S. Minon propose pour l’inscription un terminus ante quem en 324. Il semble que nous soyons en présence, toujours selon l’auteur, de l’abrégé d’une décision d’amnistie des bannis qui ne nous est pas parvenu175.

173

DUSANIC 1970, p. 61-64 (résumé en anglais) ; GAUTHIER 1971 (BE), n° 328 ; DUSANIC 1979, p. 321-323. L’auteur propose ainsi la datation la plus haute. Il met l’inscription en lien avec la mise en place de la constitution démocratique pensée par Phormion dans les années 371 à 366 avant de reconnaître en 1991, p. 82, l’incertitude d’un tel rapprochement. SZANTO 1898, p. 210-211 opte pour 335.

174

SEIBERT 1979, p. 149 ; GEHRKE 1985, p. 56.

175

MINON 2007, p. 198 et 199. Il manque notamment selon l’auteur, l’intitulé et la formule de sanction, les considérants n’étant pas nécessairement attendus dans les textes éléens de cette période.

Amnistie d’Élis :

Editeur : S. MINON, Les inscriptions éléennes dialectales (VIe – IIe siècle av. J.-C.), ,

2007, n°30, p. 199. 1 θεός· τύχα. ταὶρ δὲ γενεαὶρ μὰ φυγαδείημ μαδὲ κ- ατ' ὀποῖον τρόπον, μάτε ἐρσεναιτέραν μάτε θηλυτ- έραν, μάτε τὰ χρήματα δαμοσιῶμεν· αἰ δέ τιρ φυγαδ- είοι αἴτε τὰ χρήματα δαμοσιοία, φευγέτω ποτ' τῶ Δ- 5 ιὸρ τὠλυμπίω αἴματορ καὶ κατιαραίων ὀ δηλόμ<ενο>ρ ἀνάατορ ἤστω. ἐξήστω δέ, καί κα φυγαδεύαντι, τοῖ δ- ηλομένοι νοστίττην καὶ ἀττάμιον ἦμεν ὄσσα κα ὔ- σταριν γένωνται τῶν περὶ Πύρρωνα δαμιοργῶν. το- ὶρ δὲ ἐπ' ἄσιστα μὰ ἀποδόσσαι μάτε ἐκπέμψαι τὰ χρ- 10 ήματα τοῖρ φυγάδεσσι· αἰ δέ τι ταύτων παρ τὸ γράμ- μα ποιέοι, ἀποτινέτω διπλά σιον τῶ κα ἐκπέμπα κα- ὶ τῶ κα ἀποδῶται. αἰ δέ τιρ ἀδεαλτώℎαιε τᾰ στάλαν, ὠρ ἀγαλματοφώραν ἐόντα πάσχην. Vacat.

« Dieu. Fortune. Ne bannir en aucun cas la descendance, ni masculine, ni féminine et ne pas confisquer les biens. Si quelqu’un bannissait ou confisquait les biens, qu’il soit (lui-même) banni pour meurtre devant Zeus l’Olympien et que le maudisse impunément qui voudra.

Qu’il soit loisible à qui voudra, même s’il a fait bannir, de rentrer et d’avoir l’impunité pour tout ce qui aura suivi la damiurgie du collège de Pyrrhon.

Que les proches ne vendent ni n’envoient leurs biens aux bannis. Si l’un (d’eux) commettait l’une de ces infractions au texte écrit, qu’il paie le double de ce qu’il envoie et de ce qu’il vend.

Si quelqu’un faisait disparaître la stèle, qu’il soit puni comme un voleur d’offrandes. ».

Nous sommes en présence d’un décret d’amnistie qui assure aux bannis rentrants l’immunité pour les actes commis sous la damiurgie de Pyrrhon, période qui marque sans doute le temps fort des luttes civiles. Dans l’état actuel de nos sources, aucun rapprochement prosopographique ne peut être proposé. Courant, le nom de Pyrrhon apparaît à plusieurs reprises en Élide. Il est même impossible d’établir, selon S. Minon, tout lien entre Pyrrhon, philosophe sceptique et, celui de notre décret.

Ce qui est moins fréquent, ce sont les dispositions concernant les enfants des bannis qui n’ont apparemment pas suivis leurs parents en exil. En effet, la cité affiche clairement à

travers la sévérité avec laquelle elle compte traiter tout contrevenant aux dispositions, sa volonté d’assurer leur protection et celle de leurs biens.

De l’interdiction pour les proches de vendre ou envoyer des biens aux bannis, nous pouvons déduire que ces derniers n’ont pas ou tout du moins pas encore fait l’objet d’une confiscation et d’une revente, comme cela est généralement d’usage, mais qu’ils ont été confiés à la gestion de la famille la plus proche. Toute infraction de ce type est sanctionnée par une amende équivalente au double des sommes incriminées. Mesure fort avisée, puisqu’elle permet d’éviter la dispersion des biens et/ou la fuite de capitaux, ce qui simplifie et allège de beaucoup le processus de réconciliation qui passe irrémédiablement par une restitution de biens confisqués le cas échéant.

Le décret punit également comme voleur d’offrande, celui qui vient à faire disparaître la stèle. Vu qu’il n’est pas possible dans l’état actuel de nos connaissances de replacer ce texte dans son contexte historique, il ne nous est pas possible d’identifier les bannis et, de ce fait, les rattacher avec certitude à un groupe politique distinct.

À Mégare, il s’en faut de peu pour que la cité ne passe par un coup de force orchestré par Périlaos aux mains des philippisants en 343. Accusé devant les Trois Cents de s’être rendu auprès de Philippe, Ptoédoros, premier de la cité par la fortune, la naissance et la réputation, « … καὶ παρελθὼν Πτοιόδωρος αὐτὸν ἐξῃτήσατο, καὶ πλούτῳ καὶ γένει καὶ δόξῃ πρῶτος Μεγαρέων… » (Démosthène, Sur l’Ambassade, 296), prend sa défense et demande son acquittement avant de le renvoyer auprès de Philippe. Peu de temps après ces faits, Périlaos revient et se présente sous les murs de la cité à la tête de troupes mercenaires, probablement financées sur les deniers de Philippe. Ses partisans, dont Ptéodoros et probablement un certain Hélixos sont pour leur part, chargés de brouiller les cartes dans la cité afin de lui faciliter les opérations.

Selon Démosthène, notre seule source, les Mégariens arrivent à contrôler la situation. L’entreprise est un échec. L’issue du coup de force pour les séditieux ne nous est cependant pas connue176. Nous savons en revanche que Phocion intervient à la demande du peuple de Mégare en 343/2 afin d’aider la cité à se protéger contre les ennemis177. Il commence par fortifier le port de Nisée et fait construire deux murailles depuis la cité jusqu’à ce port178

.

176

Démosthène, Sur l’Ambassade, 296.

177

GEHRKE 1976, p. 41 ; MOSSÉ 1997, p. 17.

178

À Thasos, nous assistons à un retour de bannis avant 343/2. La chronologie des faits n’est toutefois pas clairement établie179. Dans l’un des discours attribués à Démosthène, Philippe est accusé de débaucher les insulaires et de ramener, avec l’aide des stratèges athéniens, des bannis de Thasos réfugiés en Macédoine : « καὶ μὴ μόνον τοὺς φυγάδας τοὺς παρ' ἑαυτοῦ εἰς Θάσον κεκομικέναι διὰ τῶν ὑμετέρων στρατηγῶν » (Démosthène,

Sur l’Halonnèse, VII, 15). Ce qui peut, en soi, déjà laisser supposer un conflit préexistant

entre factions rivales, probablement entre démocrates et oligarques, bien que là encore aucune chronologie ne puisse être avancée. Pourtant aucun changement politique ne semble visible dans la cité de Thasos selon J. Pouilloux. Ce dernier suggère l’installation des bannis dans une cité voisine afin d’y créer un parti pro-macédonien. Quoi qu’il en soit, un changement politique s’opère par la suite au profit d’une faction partisane de Philippe conduite par un certain Aristoléos, implacable ennemi d’Athènes et de ses partisans : « Ἀριστόλεως ἐν Θάσῳ, οἱ καθάπαξ ἐχθροὶ τῆς πόλεως, τοὺς Ἀθηναίων κρίνουσι φίλους … » (Démosthène, Sur la couronne, 197).

Cette mention faite à Thasos et Naxos semble être le reflet de luttes civiles antérieures à 330, année où le discours a été prononcé. Celles-ci remontent probablement aux lendemains de Chéronée qui signe l’échec de la politique des démocrates. Les accusations dénoncées par Démosthène ont certainement mené à des bannissements et/ou exils volontaires des partisans d’Athènes. Rien ne permet d’exclure que ce soit à ce moment-là qu’Archippos de Thasos se réfugie à Athènes et fasse valoir son droit de cité180

. À Naxos, où le pouvoir passe aux mains d’Aristratos, des faits similaires sont envisageables181. Vers la même période entre 340 et 338, la situation d’Ainos en Thrace semble assez similaire. D’après un discours, attribué à Démosthène, la défection de la cité est imputable à Théocrinès, défection que vient confirmer le monnayage182. L’origine de l’affaire est un décret concernant des subsides dûs par la cité, contesté par un certain Charinos. L’affaire restée, un temps sans suite, est relancée par Théocrinès à un moment où Ainos est divisée en deux camps, l’un favorable à Philippe, οἱ μὲν ἐφιλίππιζον, et le second à Athènes, οἱ δ' ἠττίκιζον αὐτῶν183

. Toujours selon le discours, les citoyens d’Ainos décident de prendre le parti de Philippe et acceptent de prendre une garnison. La présence de cette garnison peut

179

POUILLOUX 1954, p. 28. Selon l’auteur un gouvernement démocratique favorable à Athènes est encore attesté dans la cité en 354/3 et la flotte athénienne est toujours présente en 341. Aussi, opte t-il de placer les évènements qui suivent en 338. SEIBERT 1979, p. 142 opte pour 342 ; GEHRKE 1985, p. 163 -164 ne se prononce pas quant à la datation des évènements.

180IG II2

, n°336.

181Démosthène, Sur l’Halonnèse. Discours prononcé en 343-342. Cf. également BONNIN 2015, p. 310. 182

HAMMOND & GRIFFITH 1979, p. 380.

183

suggérer des troubles, dont l’intensité ne peut être jugée au vu des informations dont nous disposons.

C’est durant la quatrième guerre sacrée, vers 340 dans le contexte de l’occupation de Kirrha par les Locriens qu’a lieu le bannissement d’un certain nombre de citoyens d’Amphissa. La cause d’ordre religieux évoquée par Eschine n’est pas vérifiable. Selon lui, ce sont des scrupules religieux qui ont conduit au bannissement d’un certain nombre de citoyens. Ces derniers sont autorisés à revenir dans leur patrie après la première intervention de l’Amphictionie au printemps 339, alors que les auteurs du sacrilège sont chassés. La cité est d’autre part condamnée à payer une amende à la divinité. La décision amphictionique n’est pas respectée, l’amende n’est pas payée, les anciens bannis, οἱ κατελθόντες, sont à nouveau chassés au bénéfice de ceux qui sont maudits, οἱ ἐναγεῖς. Il faut attendre l’intervention de Philippe en 338 pour que les anciens bannis retrouvent définitivement le chemin du retour184.

En 339, Thèbes et Athènes s’allient face à la puissance de Philippe dont l’ambition hégémonique ne fait plus de doute. La coalition compte dans ses rangs des cités qui agissent plus par crainte du Macédonien que par une éventuelle attractivité du modèle athénien. Elle constitue le premier échec d’envergure de Philippe185. À l’automne 338, l’affrontement devient inévitable.

I.5 - L’ordre macédonien au lendemain de Chéronée : la pacification