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2. Collaboration interorganisationnelle

2.3 Résultats attendus

De manière générale, le principal résultat des collaborations interorganisationnelles consiste en sa capacité à réunir et à faire converger plusieurs acteurs interdépendants dans la résolution satisfaisante d’une problématique complexe (Logdson, 1991). Par

l’entremise de différents processus, la collaboration leur permet de coordonner leurs perspectives, leurs intérêts et leurs actions. Ce qu’explicitent davantage Sharfman, Gray et Yan (1991) en soutenant que bien qu’une collaboration permette de résoudre un problème à court terme, elle doit aussi être en mesure de le gérer à plus long terme pour parvenir à y mettre fin de manière définitive. La collaboration doit ainsi pouvoir s’adapter et évoluer au rythme des influences et des forces nouvelles auxquelles la confronte son environnement. D’autres auteurs soutiennent plutôt que, la majorité du temps, les collaborations se situent dans une catégorie intermédiaire où leur contribution n’a pas permis de résoudre complètement le problème, mais où elle a tout de même amélioré la situation (Turcotte et Pasquero, 2001).

Outre la résolution d’un problème, comme résultats des collaborations interorganisationnelles, certains auteurs vont chercher à savoir si la question initiale a été tirée au clair, si le développement d’une expertise, d’une compréhension commune du problème et la manière de le gérer se sont manifestés, si des normes collectives en terme de responsabilité ont été adoptées ou si la collaboration est en mesure de poursuivre ses activités (Pasquero, 1991; Nathan et Mitroff, 1991). D’autres chercheurs ont plutôt étudié des thématiques telles que le partage des coûts, des responsabilités et des bénéfices entre les organisations, la quantité et le genre d'information partagé, la production d'un capital social, politique et intellectuel, l'augmentation du pouvoir, de l'influence et de la légitimité de certains acteurs, l'identité et la solidarité collective, les changements observés à l'intérieur de chacune des organisations, l'accès à de nouvelle technologie ou la contribution à de nouvelle institution (Lotia et Hardy, 2008; Lawrence, Hardy, Phillips, 2002).

En terme d’apprentissage, la participation et l’intégration des participants contribuent en outre à créer des nouvelles connaissances. Non seulement la collaboration facilite le transfert de savoir déjà acquis par les acteurs, mais elle favorise également la création et le partage de connaissances inédites qu’aucune des organisations ne détenait auparavant (Nahapiet, 2008). Les collaborations représentent un espace interactionnel où les acteurs partagent, développent et réalisent des apprentissages. Les participants agissent ainsi à la fois comme des transmetteurs et des récepteurs d’information. En provenant de secteurs d’activité différents, ce partage permet de développer une perspective beaucoup plus complète des problématiques étudiées. Il ne s’agit pas de « mettre en œuvre une pédagogie pour faire passer ses idées... c’est plutôt solliciter ses partenaires pour faire émerger une idée » (Beuret, 2012, p. 82). Puisque ces savoirs émergent d’un réseau de participants, leur propriété n’est plus individuelle ou exclusive, mais bien collective. La collaboration ne sert alors pas uniquement à combler un manque ou une lacune en matière de ressource ou d’expertise, pas plus qu’à permettre une série d’actions ponctuelles, mais aussi à engendrer un mouvement continu et évolutif qui conduit à la production de compétences et de connaissances nouvelles, ce que précisent les auteurs Hardy, Phillips et Lawrence (2003) :

Both involvement and embeddedness are important for knowledge creation: high involvement facilitates the interorganizational learning necessary to create new knowledge, while embeddedness facilitates the transmission of this knowledge beyond the boundaries of the collaborative relationship to distribute learning more widely in the community. (p. 340)

En plus d’apprendre sur le domaine d’activité, la problématique étudiée et les membres engagés, en participant à des collaborations les acteurs développent leur habileté à

interagir et à coopérer dans un contexte interorganisationnel. Cette expérience et cette connaissance acquises au fil des activités collectives les rendent plus efficaces en regard des processus de négociation et de délibération. Ces apprentissages prennent la forme d'un bagage cognitif leur servant de référence lors d’interactions subséquentes. Les acteurs deviennent ainsi en mesure de tirer parti du maximum d'avantages que l’exercice de collaboration peut leur apporter :

Learning about the social structure of the domain itself (that is, the people, the organizations, and the networks involved in the issue), as well as learning how to collaborate, were cited by most participants as an important outcome of the roundtable. Learning also occurred in problem diagnosis: Participants learned how to fragment complex problems. (Turcotte et Pasquero, 2001, p. 460)

En favorisant l’apprentissage, les collaborations interorganisationnelles participent de plus au développement d’innovation. Qu’elle se rapporte à une mesure ou à une politique publique, l’innovation représente une nouveauté à caractère unique qui suppose une modification dans les procédures et les connaissances habituelles propres à un certain contexte ou à un domaine d’activité. Selon le degré de changement, l’innovation peut être soit progressive, soit radicale (Roberts et Bradley, 1991). Une innovation progressive engage des ajustements et des améliorations mineures que les acteurs peuvent aisément interpréter puisqu’elle se rapporte à leur cadre normatif. Inversement, une innovation radicale crée une rupture dans les manières traditionnelles de penser et d’agir. Les acteurs ne peuvent alors l’appréhender en fonction des connaissances dont ils disposent. Dans ce contexte, les organisations doivent être prêtes à accepter et à s’adapter aux impacts et aux effets suscités par la mise en œuvre de cette innovation.

Dans le contexte d’une innovation progressive ou d’une innovation radicale, les auteurs Roberts et Bradley (1991) apportent une précision :

Incremental innovation involves novel ideas representing a refinement or modification of a given social context; it is a change in degree. In contrast, radical innovation is a change in kind involving new ideas representing discontinuity in a social context; it is a qualitative departure from existing practice. (p. 220)

Les relations qu’entretiennent les acteurs peuvent toutefois compromettre ou favoriser ce potentiel à innover. Une collaboration où les acteurs partagent des liens étroits entre eux peut nuire au développement de l'innovation. Ils se retrouvent confinés dans un système fermé où les acteurs et leur connaissance demeurent les mêmes et où l'ouverture et l'accès à la nouveauté sont limités : « network closure typically decreases variation in a group, reinforcing the status quo » (Nahapiet, 2008, p. 586). À l’opposé, les nouvelles associations stimulent et accroissent l'apprentissage et les compétences des participants. Autrement dit, bien que la flexibilité et la variété s'avèrent essentielles à l'innovation et à la créativité, la densité et la force des relations se retrouvent néanmoins à l'origine des mécanismes de construction de confiance mutuelle, de complicité et de sentiment d’appartenance; des aspects bénéfiques aux succès des collaborations (Nahapiet, 2008).