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Chapitre IV Stratégies d’élevage

2. Formulation des stratégies

2.4.2. Les régulations à court terme ; gestion de l’incertitude climatique

Charge importante de travail pour les membres présents

La main d’œuvre présente sur l’exploitation est âgée ou féminine et le chef d’exploitation a une activité exclusivement agricole. Les travaux d’astreinte sont réalisés par les membres de la famille présents sur l’exploitation (chef, femmes, enfants). Les travaux sur les cultures – moisson, récolte des olives – mobilisent temporairement la main d’œuvre masculine.

Stock de ressources pastorales maximum en année pluvieuse, réalisé par les personnes présentes sur l’exploitation.

Tous les hommes jeunes travaillent à l’extérieur de l’exploitation.

La situation de précarité que vivent généralement les membres appartenant à ces fractions ou tribu, sur le plan foncier et d’emploi extra agricole, entraîne des tensions qui ont pour conséquence une diminution de l’entraide pour la réalisation des travaux agricoles, notamment la mise en commun des troupeaux ainsi que les travaux sur les productions végétales. C’est en contrepartie une des raisons qui explique l’unité de la famille élargie autour des activités agricoles.

Conduite de l’élevage : maintenir le troupeau sur les communs

Objectif de production : pas d’objectif à proprement parler, il s’agit de vendre des produits lorsqu’ils sont en « état » (cf. Figure 26 p. 186).

Année sèche

Période 1 : Maintenir le troupeau en abandonnant les exigences de production.

Face à de fortes contraintes financières, ces éleveurs retardent l’achat d’aliments du bétail et assument une réduction importante de la fécondité du troupeau, qui tombe à 0% pour l’espèce ovine chez un éleveur ; l’espèce caprine, plus résistante, enregistre des taux de fécondité entre 35 et 73%. Le troupeau sort quotidiennement sur les espaces de parcours – colline, sebkha – et les éleveurs complètent la ration par des ressources pastorales cueillies au jour le jour et ponctuellement par du son acheté.

Dans le cas d’un pâturage en plaine côtière (sebkha), la famille est installée sur place dans un abri de fortune, car le parcours est éloigné de plus de 5 km du siège d’exploitation.

Figure 26 : Fonctionnement de l’élevage des « occupants des communs »

Sept . Déc. Jan. Fev. Mar. Av. Mai Juin Juil. Août

Déc. Jan. Fev. Mar. Av. Mai Juin Juil. Août Sept

.

Oct. Nov.

2002 2003

Cycle de production : mise bas aléatoire (luttes permanentes)

Gestion de l’alimentation année sèche

Gestion de l’alimentation année pluvieuse

Déc. Jan. Fev. Mars Av. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov.

Déc. Jan. Fev. Mars Av. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov.

Pâturage : Distribution : Main d’œuvre : Ressources : Pâturage : Distribution : Main d’œuvre : Ressources :

Secteurs » mixtes »/enclos

Pâturage sur secteurs « mixtes » Pâturage sur secteurs « mixtes »

Pâturage sur secteurs « mixtes »

Correction (30% des besoins) Deux ou trois personnes

Trois personnes minimum Activité principale de femme

Activité quotidienne de femme

Soutien Soutien Soutien

Une ou deux personnes

1

Deux ou trois personnes Une ou deux personnes

1 2 Légende : Lutte Agnelage Ventes 1 Périodes de conduite

Période 2 : Assurer la survie de troupeau.

La durée de la sécheresse est parfois telle qu’une partie des adultes du troupeau décèdent ; l’apport d’intrants alimentaires devient alors une condition de survie des animaux. Si les revenus d’un fils actif en dehors de l’exploitation le permet, alors la décision est prise de complémenter le troupeau en attendant le retour des pluies. Dans l’échantillon suivi, la complémentation a ainsi démarré entre le printemps et l’été 2002 et s’est prolongée jusqu’en septembre 2002. Le cas de l’éleveur 11, qui a vendu son troupeau à l’automne 2002 juste avant le retour des pluies, illustre à ce propos la décision d’arrêt des dépenses d’alimentation supportée par les fils.

Tout le troupeau reçoit alors une ration quotidienne de compléments – voire de fourrages – achetés, qui ne suffisent cependant pas à couvrir la totalité des besoins alimentaires des animaux (autour de 30%). En plaine côtière, les sorties au pâturage sont alors stoppées car la famille rentre sur le siège d’exploitation pour se rapprocher des lieux d’approvisionnement d’aliments du bétail. Elles sont réduites mais perdurent quelques heures par jour dans le cas d’une exploitation située en piémont.

Année pluvieuse

Relancer la production en misant sur la présence de ressources pastorales et en apportant un soutien alimentaire ponctuel.

Dès le début de la saison des pluies (octobre 2002), les éleveurs stoppent la distribution de compléments ; le troupeau tire alors toute sa ration du pâturage. Néanmoins, afin de soutenir les femelles qui mettent bas (janvier – février, les taux de fécondité remontent à 70% approximativement), les éleveurs apportent un complément de ration sur de courtes périodes (1 mois entre 10 et 20% des besoins énergétiques annuels). Les achats sont alors financés par la vente de jeunes femelles d’un an.

Parallèlement, une ou deux personnes du foyer cueillent des ressources pastorales en vue de les stocker pour une distribution à partir du début de l’été (juin). Cette activité n’implique pas de retour de la main d’œuvre masculine expatriée car elle ne représente pas d’enjeux majeurs. Un éleveur reçoit néanmoins l’aide ponctuelle d’une fille et d’une petite fille pour cette opération.

Régulations financières : limiter les dépenses

Les revenus extra agricoles des fils soutiennent la famille, mais leur situation est généralement précaire, car ces revenus sont dégagés par des activités instables exigeant peu de compétences particulières (bâtiment, jardins….) donc peu rémunératrices.

En terme d’élevage, il s’agit de limiter les dépenses en prenant le risque de perdre du cheptel productif. En année sèche, il n’y a pas de produits d’élevage ou très peu, le choix vise à reporter les ventes l’année suivante pour en augmenter le prix. La première année pluvieuse suivant une sécheresse, les bénéfices sont faibles, car le troupeau est affaibli, mis à part l’espèce caprine qui résiste mieux à des conditions d’élevage extrêmes et montre des résultats productifs moyens dès le retour des pluies (autour de 90% de chevrotements).

La limitation foncière ne permet pas de dégager des revenus provenant de cultures de rente. Vente difficile des réformes en période sèche étant donné le mauvais état des animaux. Décès majoritaires (entre 15 et 30% du cheptel).

La vente des jeunes nés en année sèche est différée sur l’année suivante pour bénéficier d’un prix plus important – cette pratique est surtout valable pour les femelles -.

Faire pâturer et collecter toutes les ressources pastorales disponibles

Ces éleveurs sont dépendants des ressources pastorales sur les espaces communs. L’état de végétation des steppes conditionne celui du troupeau car il n’y a pas de possibilités de « d’artificialiser » le système de production.

Leur position ethnique marginale et le manque d’accès aux territoires de transhumance pénalisent d’autant plus ces éleveurs qui sont par ailleurs limités dans les espaces « mixtes ».

Figure 27 : Rapport au territoire des "occupants des communs"

Transhumance Mixte Sédentarisation M Troupeau Ressources Pastorales F Main d’œuvre (masculine, féminine/âgée/enfants,

em ployés) E Code couleur : année pluvieuse année sèche chaque année Flux d’argent Déplacem ent physique Com pléments Fourrages Type de territoire Légende : M F F M