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VI. RESULTATS

1. Le discours des enseignants

1.1. La procédure d’orientation et les documents à fournir

1.1.2. La rédaction d’un rapport par l’enseignant de 6 ème primaire pour le cycle

La deuxième étape de ce processus d’orientation consiste en la rédaction d’un rapport personnalisé, pour chaque élève, de la part de l’enseignant de 6ème primaire. Neuf enseignants sur 10 en parlent. Selon ces derniers, ce rapport est rédigé au mois de février-mars et doit être envoyé au cycle à la fin du deuxième trimestre. Ce rapport est destiné à plusieurs personnes : à la fois le directeur et le doyen du cycle, ainsi que l’inspecteur, mais les parents peuvent également avoir accès à ce document.

Ce rapport contient les notes de l’élève ainsi que des informations qui peuvent être, selon les enseignants interrogés, de l’ordre du comportement, de l’attitude face au travail, de l’aptitude scolaire, mais également concernant les situations familiales, les associations d’élèves à éviter ainsi que le suivi médical de l’enfant s’il en a un. Un des enseignants dit remplir ce rapport selon des entrées qu’il a choisies : Autonomie, Apprentissage, Relations avec les autres, Respect des règles. Il explique que cette façon de procéder lui permet de ne pas oublier un élément important et de ne pas se focaliser sur un défaut ou une qualité de l’élève, mais d’avoir une vision globale et d’émettre un avis sur l’apprenant au plus proche de la réalité.

Les enseignants (9 sur 10) mentionnent, dans le rapport, des informations qu’ils perçoivent comme indispensables et importantes à savoir avant que l’élève arrive au cycle. Nous constatons que la manière de remplir le rapport semble dépendre du degré d’importance que l’enseignant accorde ou non aux informations qu’il transmet. Aussi, nous aimerions savoir pour quelles

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éléments de réponse récoltés auprès de notre échantillon :

- D’abord, parce que les enseignants sont libres d’écrire autant qu’ils veulent et sur des points de leur choix qu’ils pensent importants pour le cycle : « Non, on est pas obligé [de mettre des commentaires] » (AE1,TDP60) ; « On a une page A4 à remplir pour chaque élève en fait et là-dessus on met ce que l’on veut » (AE,TDP72).

- Ensuite, cela semble dépendre du niveau de l’élève. En effet, si les élèves sont considérés comme ayant des résultats très satisfaisants, les enseignants avouent écrire moins que lorsqu’il s’agit d’élèves plus en difficulté : « Ben ceux qui ne posent pas problème, ben c’est clair, c’est vite rempli » (AE1,TDP58). Plus encore, selon un enseignant, les formules utilisées sont parfois les mêmes pour les élèves qui n’ont pas de problèmes, elles semblent moins personnalisées : « Si c’est un élève qui pose aucun problème, ben voilà, on peut mettre R.A.S. » (AE3,TDP42). Pour les élèves plus en difficulté, les enseignants transmettent souvent plus d’informations au cycle. A ce sujet, un enseignant précise : «Ceux qui vont moins bien ou qui sont sur le balan, ben j’écris plus » (AE1,TDP64).

- Enfin, ce rapport est rempli de manière différente à cause d’un destinataire potentiel : les parents. Huit des 9 enseignants qui mentionnent la présence de ce rapport expliquent que ce rapport est destiné au cycle mais il est également consultable par les parents. C’est-à-dire qu’à l’inscription, les parents peuvent demander de voir ce rapport que le maître de 6ème primaire a fait sur leur enfant. Certains enseignants (2) ne voient pas les parents comme des destinataires gênants. L’enseignant AE explique que, pour toutes les décisions, et surtout si l’élève est en difficulté, il prend du temps pour discuter avec les parents. Selon un autre, « les parents peuvent demander à voir ce qui a été écrit sur leur enfant et moi j’ai rien à cacher donc c’est pas un problème » (AE3,TDP50).

Au contraire, pour certains, cela peut avoir une incidence sur le jugement qui est transmis par l’enseignant au cycle. Six enseignants perçoivent ce destinataire comme limitant leurs actions et la possibilité qu’ils ont de transmettre des informations sur l’élève au cycle. Selon ces enseignants : « C’est un peu gênant parce que selon les renseignements qu’on aurait envie de mettre on peut pas » (BE1,TDP12). Un autre précise que « dès que c’est sur la famille, [il]évite » (BE,TDP25).

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l’obligation de les remplir et de les transmettre au cycle d’orientation. Au-delà de cette demande institutionnelle, nous nous demandons dès lors s’ils y perçoivent un intérêt. Les enseignants mettent en évidence que ces rapports servent différents buts dont :

- la pré-organisation des classes en fonction des vœux réalisés concernant les regroupements (selon 2 enseignants sur 9). En effet, ces documents sont des moyens pratiques pour le CO afin d’organiser l’année suivante, autant au niveau de l’organisation des classes que de l’engagement éventuel de professeurs. Comme le souligne un enseignant : « c’est rien de définitif […] c’est pour qu’ils puissent aussi commencer à planifier, pour qu’ils puissent prévoir un peu les besoins qu’ils vont avoir » (AE3,TDP38).

- la transmission au cycle des informations concernant l’élève, pour mieux connaître l’enfant et donc mieux l’orienter. Deux enseignants émettent clairement cette idée, alors qu’elle est présente de façon implicite chez tous les enseignants qui citent la présence de ce rapport. Un enseignant dit à ce sujet : «On leur transmet en fait le flambeau. Tout ce que nous on sait au niveau primaire on le leur dit » (AE,TDP78).

- la transmission des informations sur l’élève au cycle pour mieux travailler avec lui ensuite. A ce sujet, 2 enseignants émettent une interrogation quant à la transmission de ce rapport aux enseignants du cycle, travaillant avec les élèves eux-mêmes : « [La direction du cycle] qui à mon avis devrait transmettre aux enseignants les informations...ce qui je pense, n'est pas toujours le cas » (AE4,TDP58).

Néanmoins, selon 2 enseignants, ces rapports ne servent pas à grand chose. En effet, ils laissent supposer dans leurs discours que ceux-ci n’ont pas une grande utilité quant au choix de l’orientation la plus favorable à l’élève. En effet, selon eux, ces rapports ne sont pas lus, et n’indiquent rien de plus précis que ce qui a déjà été souligné dans le livret scolaire.

Un rapport qui sert à rien [...]c’est pas parce que je veux cacher des choses aux parents simplement ben à ce moment-là qu’ils regardent le carnet scolaire ça rvient au même […]

j’ai pas l’impression que ce soit très utile (BE2,TDP120) ;

Ca m’est arrivé d’arriver au cycle et de voir l’enveloppe avec mes rapports qui n’avait pas été ouverte (TDP14) […] On s’dit juste que bon ben […] c’est ptêtre euh du travail qui a pas

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Ces 2 mêmes enseignants pensent que, plus qu’être inutiles, ces rapports peuvent même, dans certains cas, desservir l’enfant qui arrive au cycle. L’enseignant BE2 pense que ce rapport ne donne pas une nouvelle chance aux élèves qui en auraient besoin mais les catalogue, avant même qu’ils ne soient admis dans l’établissement :

J’pense que ouais y a des choses qui doivent être sues […] pis les élèves ils ont droit aussi à une chance de de faire peau neuve et de de démarrer sur des avec des des gens qui n’ont pas d’a priori sur eux en tous cas pas d’a priori scolaires (TDP120).

Un enseignant sur les 10, seulement, n’évoque pas la présence de ce rapport. Selon lui, le cycle auquel son école est rattachée ne lui demande aucun document de ce type. Cela nous interpelle au cours de l’entretien. En effet, d’après les dires des autres enseignants, ce document est officiel. Malgré le fait que nous ayons reformulé la question, la réponse est claire : « On nous demande rien […]. En tous cas, dans ce cycle-là, on nous demande rien » (BE3,TDP50). Il explique cela du fait que le cycle en question est « très spécial », tout comme son directeur (BE3,TDP16).