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E SQUISSE TOPOLOGIQUE DU LIEN

4.2.2 Qu’est ce que la topologie ?

4.2.2.1 Une science qui classifie les espaces

La topologie est la branche de la géométrie qui classifie les espaces en fonction de leur forme globale. Par définition, les espaces d’une même classe peuvent se déduire les uns des autres par déformation continue,

1Lévi-Strauss a proposé, dans «La pensée sauvage», une analyse de la pensée my-thique comme bricolage intellectuel.

sans découpage ni déchirure. La topologie est également définie par Stei-ner (1998, page 573) comme la science permettant d’établir « des rapports d’invariance à l’intérieur d’une transformation ». Elle semble ainsi a priori pouvoir se projeter dans notre recherche. D’autant plus qu’elle se situe dans un environnement complexe dont la difficulté se situe dans la for-malisation et la généralisation des « notions intuitives du borné, d’ouvert, de continu, de frontières, pour un ensemble de points »2constitutifs des pratiques sociales et de l’humain dans l’enseignement en ligne. L’approche topolo-gique permet ainsi de structurer géométriquement tout ce qui est à « bor-dures floues » comme le lien (technologique et social) ainsi que les struc-tures sociales émergentes en ligne (énoncées dans la section 1.3.2.1). Au-trefois, la topologie était appelée : « analyse de situation (analysis situs) » ou étude des lieux (grec topos lieu et logos étude). C’est donc sous cet angle que nous allons tenter d’affiner cette forme d’ensemble, cette struc-ture destinée à formaliser les notions intuitives, ouvertes et fermées pour une analyse des pratiques sociales médiatisées dans un campus virtuel.

4.2.2.2 Formes d’ensemble au détriment des mesures quantitatives

L’étude des propriétés géométriques invariantes ou paliers intégratifs des pratiques sociales semble complexe. La topologie de cet espace repré-sentant la dynamique des échanges est en effet constamment renouvelé, modifié. Si les études s’efforçant d’établir des mesures quantitatives appa-raissent rapidement datées, celles qui s’intéressent à la forme d’ensemble présentent des caractéristiques pluôt pérennes. C’est pourquoi l’approche des réseaux sociaux et ses graphes de relation semble ainsi peu

priée (voir dans la section1.3.1.1). En effet, les théories des réseaux sociaux (Granovetter, 1973 ; Burt, 1992 ; Chew, 2000) consistent à déterminer les re-lations entre individus (quantification des liens à l’aide de méthodes sta-tistiques). Elle propose un positionnement des personnes dans un réseau social (au centre du réseau, en dehors, quel pont local permet de mieux diffuser l’information) plutôt que d’évaluer la symbolique des signes (les textes écrits) à l’œuvre dans les échanges intersubjectifs (voir la section

3.3.1.3).

« La constitution d’une communauté peut difficilement se résu-mer à un agrégat simplement quantitatif d’un ensemble de personnes réunies en un lieu et a fortiori encore moins lorsque ce lieu existe simplement grâce à des moyens informatiques. (Audran & Pascaud, 2006, page 211) »

Nous nous sommes ainsi éloignés de cette approche quantitative que nous avions abordé en premier lieu pour cette recherche (ou du moins pour ce travail). En effet, il ne s’agit pas de déterminer ici quel type de lien apporte le plus de réussite dans la diffusion des informations3.

3Alors que Granovetter (1973) a défendu la prédominance du rôle joué par les liens faibles (relations peu emotionnelles) dans la réussite de la diffusion des informations, un modèle récent proposé par Chwe (2000) a mis en relief l’importance des liens forts grâce à une contrainte de proximité qui s’impose aux agents. Autrement dit, toute commu-nication d’informations est contrainte par une relation de proximité. Mais la proximité cognitive peut être amenuisée et disparaître si le réseau est de grande échelle. Les liens faibles doivent alors compensés par leur nombre. Si ce n’est pas le cas, soit la diffusion de l’information s’arrête, soit elle se poursuit plus lentement. Face à ces approches di-vergentes du rôle de la force des liens, certains auteurs, et notamment Burt (1992), ont souhaité remettre en cause cette approche. Les critères de redondance des liens faibles et de trou structural doivent être désormais pris en compte dans toute analyse des struc-tures relationnelles car seuls les liens constituant des trous structuraux permettent d’ac-croître les avantages informationnels (liens faibles qui relient deux réseaux permettent à l’information de passer d’un réseau à l’autre.

Le système ici envisagé est celui de l’environnement d’apprentissage des campus virtuels et ses constituants (dynamique des liens, degré d’in-teractivité, pratiques sociales, paradigmes d’apprentissage).

Quelques précautions sont toutefois à prendre avant toute démarche : – le lien est une entité réticulée (1) (en tant qu’organisation

macro-scopique, il hérite des propriétés microscopiques des éléments qui le composent, ce qui n’est pas le cas de tous les types d’organisa-tions complexes). Notre analyse, pour être pertinente, devra donc reprendre à son compte cette première propriété et signaler claire-ment le niveau auquel elle se place (macro ou micro).

– Ensuite (2), le lien se caractérise par une logique de flux et non d’états stables, lesquels flux s’organisent et se déploient selon des logiques différentes : s’ils sont de l’ordre du technique et/ou du machinique ils seront essentiellement linéaires (on parlera d’interactivité), alors que, s’ils sont de l’ordre de l’humain, ils seront plutôt de l’ordre du non-linéaire et de l’interaction.

– Enfin (3), le lien « trajet/trajectoire/relais », constitue la troisième logique à l’œuvre dans notre esquisse, une logique qui sert d’inter-face entre le niveau (1) – macro ou micro – et le niveau (2) – celui de la logique de flux. Le lien comme interface combine également les propriétés linéaires et non-linéaires des deux niveaux qu’elle permet de relier.

Ainsi, il apparaît que toute esquisse présente simultanément : – des éléments identifiés comme des relais,

– permettant de rendre compte d’une dynamique (flux),

spéci-fiques) mais de structure semblable (invariant).

4.3 Modélisation

Pour déterminer les types de flux, les relais et les propriétés spécifiques ou invariantes de nos esquisses, nous avons choisi de mettre en perspec-tive les approches des modèles théoriques cités jusqu’à présent. Nous nous situons dans un point de vue macro.