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D YNAMIQUE DANS UN CAMPUS VIRTUEL

3. Evaluation : tous les échanges évoquant les modalités de validation des acquis et des consignes, l’évaluation de l’avancée dans l’étude

2.3.2.4 Dispositif Espace stage 2005

Le dispositif d’enseignement expérimenté de Janvier à Juin 2005 s’inti-tule « Espace Stage ». Il répond à la volonté d’accompagner les étudiants dans une démarche de professionnalisation hors de l’école. L’intention du CERAM Sophia Antipolis est ainsi d’utiliser les technologies informa-tiques en réseau à travers le portail Webintec, issu de la plate-forme DO-KEOS, pour accompagner une promotion d’étudiants en stage long par un tutorat mensuel et individualisé assuré par 35 professeurs de l’école (1 pro-fesseur = 15 stagiaires). En parallèle, le CERAM Sophia Antipolis met à la disposition des élèves deux cours en auto formation (achetés chez Thom-son NetG) sur des domaines de compétences sollicités lors de cette pre-mière expérience professionnelle significative (entre 6 et 9 mois) : le Mana-gement de projet et les Compétences Managériales (communication, ges-tion des conflits, négociages-tion, travail en équipe). Chacun des deux cours représente plus de 40h d’auto formation (cours et simulation de situations professionnelles) à effectuer pendant 6 mois de stage. La population totale est constituée de 420 étudiants de deuxième année d’école de commerce (niveau licence). Ils sont âgés en moyenne de 20 ans.

Les techniques de cueillette de données ont été les suivantes :

– Analyse du corpus de textes. Il est composé de 553 messages échan-gés dans les forums des deux cours et du suivi mis en ligne durant

6 mois (de janvier à juin 2005). Les archives de ces corpus étant des structures observables car écrites, nous avons pu analyser la nature des messages et des relations des membres concernés. Pour ce faire, nous avons repris l’architecture de Audran et Simonian (2003) qui structure les échanges en trois catégories : contenu sur la technique, sur la pédagogie et sur les consignes, et les échanges socio-affectifs (catégorie « lien social » (évoquée dans la section précédente). – Questionnaire d’auto évaluation en ligne édité sur le logiciel

Epis-tema. L’échantillon est constitué de 308 répondants42. Le question-naire constitue une source d’information quantitative qui autorise les comparaisons chiffrées. Les données qualitatives sont également extraites grâce aux questions ouvertes (on préférera alors l’analyse lexicale).

Les résultats de l’expérience sont proposés en deux temps : les obser-vations suite à l’analyse du corpus des forums puis les appréhensions des étudiants sur le dispositif issues du questionnaire en ligne.

Le premier constat de l’analyse du corpus du forum (voir figure 2.4) est que le nombre de messages postés varie entre 62 (suivi de stage), 183 (Compétences Managériales : CM) et 308 (Management de projet : MP).

Les messages postés dans les deux cours sur le mode auto formation (total : 491 messages) sont principalement (à 68 % et 81%) des remarques ou questions techniques43 Ils ont, en effet, générés de nombreuses ques-tions quant à l’installation, la gestion des cookies nécessaire à leur

ouver-42Rapport complet en ligne sur http://webintec.ceram.fr/epistema/ eval05/admin/index.php

43Les deux cours achetés nécessitent une connexion Internet haut débit car ils sont animés de sons, images, simulations. Ils nécessitent également l’installation d’un applet java et une gestion de cookies spécifique.

FIG. 2.4: Statistiques 2005 Espace Stage : nature échanges en ligne ture. Nous avons sous estimé le fait que l’étudiant travaille sur un poste client (dans son entreprise par exemple) sur lequel il n’a pas toujours les droits d’administration nécessaires pour télécharger un « applet ». Ces deux cours ont donc généré beaucoup de messages techniques, de type échanges informationnels, de lien social faible. Le suivi de stage a solli-cité moins de messages par forum. (Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu communication par téléphone et par messagerie électronique, mais ils n’ont malheureusement pas pu être ’pistés’ dans cette pré-étude).

Le second constat relatif au contenu des échanges sur le forum de dis-cussion a été le nombre important de messages de la catégorie « échanges socio-affectifs », porteur de lien fort. Bien que faible proportionnellement (respectivement 12%, 22% et 39% des échanges), le lien social fort est un indicateur de reliance (Morin, 2001) entre les apprenants. Dans le cas pré-sent, il reflète essentiellement des élans d’encouragement, d’entraide ou de de frustration individuelle (expression de son désarroi centrée sur soi) et collective (partage de frustration, conscientisation du groupe par les ex-pressions « comme tout le monde, je ne dois pas être le seul dans ce cas etc. »). Le tableau2.8reprend quelques extraits.

Extraits de citations dans la catégorie : Echanges socio-affectifs

Et dire que j’étais motivé pour travailler...tant pis, il fait beau, je vais à Saint Trop’ ! ! ! Keep on Rocking !

Rien a ajouter sur la problématique, il m’arrive la même chose, comme a tous j’ima-gine, ...mais je souhaitais exprimer ma tristesse face a ces dysfonctionnements Voilà bien une demi-heure que je lis les divers commentaires de mes camarades... et j’avoue ne pas arriver à garder mon sérieux...Je tiens à remercier chaleureusement le CERAM Sophia Antipolis, qui une fois de plus, aura innové dans le domaine du Management, et qui nous propose ces temps-ci, une des comédies interactives les plus hilarantes qui soient en ligne

Ma pauvre Aude,t’as vraiment pas d’bol...il va encore falloir tout recommencer !Moi j’ai tout fini depuis 2 semaines, mes résultats sont bien enregistrés (enfin, pour l’ins-tant), alors je ne touche plus à rien ! J’attends patiemment le jugement dernier.As-tu fait attention à la durée (limitée) de la session sur Webintec ? Parce qu’il ne faut pas plaisanter avec ça, cca ne pardonne pas ! ! ! Quand tu as fait un test, déconnectes-toi illico presto et reconnectes-toi pour continuer et ainsi de suite...Bon courage, et que Jimi Hendrix soit avec nous.

Ces ordinateurs, quelle calamité, on devrait revenir aux bouliers, ça au moins c’était fiable. Peut-être que ton ordi a un problème : vérifie le joint de culasse et le carburateur, ou alors c’est un problème d’allumage et là c’est plus embêtant...

Moi j’dirais que l’on est passé de la business attitude à... la business attitude On-line ; : la grande class ! Une chose de positive dans tout ça c’est que l’on est en phase avec les attentes de nos recruteurs... à lonnnnnng terme, on va arriver à développer un outil facile d’utilisation, sans bug... mais d’ici là, je sens que l’on sera passé à de nouveaux modes de formation, de nouvelles technologies. Enfin bon, c’est pas tout, mais y’en a qui bossent, hein Antoine ? ! lol

TAB. 2.8: Statistiques 2005 : citations étudiants

Le troisième constat reflète la dynamique des acteurs en ligne. Notre dernière analyse des messages croise le type des échanges initiés par les tuteurs-enseignants et ceux initiés par les élèves selon le type de cours en ligne. Nous constatons que les deux cours en auto formation génèrent sur-tout des messages basés sur la consigne et les questions techniques qui proviennent des élèves à 55% et des tuteurs à 45% car l’échange est vo-lontairement limité à des FAQ. La majorité des échanges suit la logique d’un « expert » qui s’adresse à un « novice », comme nous l’avons ob-servé dans l’étude précédante. Toutefois, on remarque que les échanges

minoritaires constituant du lien social sont tous initiés par les élèves. Sur les 61 messages générés dans les deux cours, seuls 4 ont été répondus par les tuteurs.

Concernant les perceptions des étudiants suite à l’analyse du question-naire en ligne , les ressentis suivants (satisfaction, appréhension du elear-ning, appréciation des moments d’apprentissage) sont analysés ci dessous. La satisfaction du cours a été partagée (48% ont été satisfait, 37% peu satisfait et 15% pas du tout satisfait). La principale source de mécontente-ment réside dans les problèmes techniques : les élèves ont majoritairemécontente-ment soufferts de ces problèmes (107 élèves ont eu des problèmes aléatoires, et 127 élèves ont eu des problèmes fréquents). Seulement 6% n’ont eu aucun problème. Dans le tableau 2.9 sont extraites plusieurs citations d’élèves concernant ce qu’ils ont retenu de cette expérience44

Concernant leur appréciation sur les moments d’apprentissages, il pensent avoir le plus appris grâce aux simulations des situations professionnelles, donc dès qu’ils étaient acteur d’une situation. L’apprentissage par mémo-risation suite à la lecture des modules de cours et chapitres a été cité en minorité par 95 répondants sur 309, soit 32%.

Concernant leur navigation hypertextuelle, nous observons que les étu-diants interrogés ont navigué selon leurs choix, même si 39% ont suivi formellement la structuration du cours. Ceci est plus par liberté de na-vigation que par le manque de clarté du cours (89% sont satisfaits de ce dernier point).

Pour conclure, nous avons soumis aux élèves un test en ligne dans le

44Rapport complet en ligne (comprenant les commentaires des étudiants sur les questions ouvertes) surhttp://webintec.ceram.fr/epistema/eval05/admin/ index.php

Points positifs Points négatifs

– Apprentissage du travail en e-learning

– La persévérance, travailler vite pour aller à l’essentiel – L’auto formation n’est pas

évi-dente, mais je la crois plus for-matrice qu’une autre (on ap-prend toujours mieux par soi-même).

– Je retiens qu’avec beaucoup de bonne volonté on peut accomplir bien des choses même avec les plus mauvais outils.

– Ce que j’avais plus ou moins déjà su par les cours en amphi – Il est indispensable de savoir gérer son temps et l’informa-tion que l’on reçoit a distance de façon rigoureuse et régu-lière au risque d’être vite dé-bordé et dépassé

– que l’informatique n’est pas toujours fiable et a ses ca-prices !

– Le temps qu’il fallait prendre pour faire ces cours alors qu’on a autre chose a faire – Ce n’est pas facile de se

mo-tiver tout seul pour des cours qui ne semblent pas pédago-giques au premier abord – e-learning n’est pas un mon

moyen d’aborder des sujets concrets comme ceux que nous avons tenté d’étudier. – Je n’ai rien retiré de ce cours

TAB. 2.9: statistiques 2005 : évaluation du dispositif Stage par les élèves but de cibler ressenti face à la notion de travail à distance. Les résultats sont exposés dans le tableau2.10. Ainsi 60% n’ont pas l’impression d’avoir été entendus via le forum. Environ 1/3 des répondants ont cherché récon-fort auprès de leurs collègues (31%), se sont sentis plus désemparés qu’en cours traditionnel (30%), ont l’impression d’avoir plus travaillé à distance ( 32%). Par contre, ils ne sont pas forcément en demande de régulation par les enseignants en présentiel. Pourtant la majorité pense n’avoir pas été

Lorsque j’ai fait les cours en ligne : Oui J’ai l’impression d’avoir appris autant qu’en classe

28.62% (87)

J’ai l’impression d’avoir été entendu via le forum 34.54% (105) Je préférerais une régulation en présence du

pro-fesseur et non pas via le forum

53.62% (163)

J’ai l’impression d’avoir plus travaillé à distance 32.89% (100) J’ai recherché plus de réconfort auprès de mes

amis de promo

31.25% (95)

Je me suis senti(e) plus désemparé(e) qu’en cours traditionnel

29.93% (91)

Je me suis senti(e) seul 38.49% (117) J’ai le sentiment d’avoir plus appris sur les

pro-blématiques de la formation à distance que sur le contenu du cours

63.16% (192)

TAB. 2.10: Statistiques 2005 : Pré-étude

Nous pouvons conclure sur le fait que l’analyse des interactions entre apprenants confirme l’existence de pratiques d’échanges qui relèvent de l’entraide, soit pour faire face à une situation problème qui est apparue, ce qui a été le cas ici (95% ont eu des problèmes techniques dûs à l’appli-cation java et la gestion des cookies), soit pour compenser le sentiment d’isolement (39% des élèves) (Bothorel, 2006). Ces variables pourraient alors être des facteurs d’émergence des réseaux d’entraide dans un dispo-sitif en ligne, quelque soit la nature des tâches planifiées par le concepteur (apprentissage collaboratif ou en auto formation). Ces réseaux d’entraide (Foucault et al., 2002) informels peuvent avoir ainsi une durée de vie très brève ou au contraire, se cristalliser en communautés plus structurées et plus stables. Ils sont le reflet d’interactions entre apprenants, interactions suscitées par un besoin de soutien en ligne. Ils se matérialisent par des

échanges de conseils, mais aussi, plus simplement, par des discussions entre apprenants. Le réseau émerge ainsi des interactions des apprenants, non pas forcément d’un dispositif pré-déterminée par le concepteur.

2.4 Synthèse

Nous avons abordé les défis de l’implémentation de dispositifs d’en-seignement en ligne et à distance tels qu’ils ont été vécus dans un campus virtuel de l’Enseignement Supérieur. Ceux-ci sont multiples.

Il s’agit de créer des activités pédagogiques intentionnelles en favo-risant des environnements d’apprentissage adaptés. Cela nécessite une connaissance des usages des outils de communication instrumentés par la machine numérique à interface sensible (Gobert, 2003), une gestion du sentiment de présence à distance, en plus de la maîtrise des techniques de scénarisation et du savoir-faire nécessaires pour gérer le dispositif (ar-tefact) avec la situation pédagogique. Il s’agit également de prendre en compte l’environnement extérieur du dispositif. C’est à dire les contraintes financières45, les moyens humains et techniques à disposition, ainsi que les contraintes de production à grande échelle, comme cela est le cas au CE-RAM Sophia Antipolis).

Les expériences menées au CERAM Sophia Antipolis depuis 2002/2003 nous offrent une meilleure compréhension des pratiques, notamment sur plusieurs aspects :

45Les cours en auto formation ont un coût de production élevé car le contenu, très structuré, demande souvent l’intégration d’outils multimédia du type vidéo ou son. Le tutorat en ligne, de l’autre côté, peut aussi revenir très cher, bien que ces coûts sont essen-tiellement invisibles (ils font partis des plans de charge des enseignants, voir en annexe C.

1. Un cours collaboratif hybride centré sur une pédagogie active (mis-sion virtuelle à réaliser en équipes de 5) ne favorise pas forcément le travail collectif à distance et en ligne au sens de co-construction de liens forts (définis dans la section 1.3.1.1). En effet, les interactions en ligne se sont principalement portées vers de l’échange d’informa-tions, mais les élèves n’ont pas travaillé de façon collaborative en ligne. En effet, ils ont préféré se rencontrer physiquement pour tra-vailler ensemble, car le cours est dispensé en partie en face à face. Le lien social fort s’est donc produit dans les interactions en face à face principalement. (expérience 1)

2. Une discussion lancée sur des thèmes d’actualité ou provocateurs dans un forum (cours d’anglais sous la forme d’études de cas BBC ; 80% en face à face) peut générer de nombreuses discussions en ligne (224 messages, 1325 lus en deux semaines). Ces discussions se sont déroulées entre les apprenants (91% des messages), donc sans l’in-tervention soutenue du professeur tuteur (9% des messages). Elles étaient essentiellement centrées vers des débats et des prises de po-sition entre les participants. Le lien social n’en a été que plus fort (13% des messages).

3. La force du lien social se construit à partir d’échanges socio-affectifs et socio-cognitifs. Dans l’étude n°2, les échanges socio-cognitifs étaient composés de polémiques sur des thèmes d’actualité qui ont intéressé l’ensemble des élèves ; Dans l’étude n°3, les échanges socio-affectifs étaient composés d’expressions de soutien, d’entraide mais aussi de sentiments de frustration individuels et collectifs.

situation-problème, polémiques etc.) que de la nature d’un dispositif en ligne (auto formation ou collaboratif).

La découverte de ces quelques rites d’interaction en ligne nous amènent à nous approfondir la place des échanges dans l’apprentissage. Quelle se-rait alors la relation entre les rites d’interaction (échanges socio-affectifs) porteur de lien social fort, et les échanges socio-cognitifs (débats etc). L’un est-il la condition nécessaire de l’autre ? Quelle est la place des rites d’inter-action (échanges socio-affectifs) porteurs de lien social fort, et des échanges socio-cognitifs (débats, actes de signification partagés) dans les processus d’apprentissage ? Nous avons choisi d’aborder cette question à travers la notion de Faire œuvre, qui semble être au coeur des processus d’apprentis-sage individuels et collectifs.

Dialogie des liens pour Faire