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une pyramide de ponzi : l’adC

Dans le document UNE FRAUDE PRESQUE PARFAITE (Page 51-57)

La règle proposée sur la valeur nette limitait la croissance en relevant le niveau d’adéquation des fonds propres pour les caisses à croissance rapide. Gray proposait d’inverser la politique anté-rieure du Bank Board, la moyenne quinquennale, qui réduisait, au contraire, les fonds propres obligatoires pour les caisses à crois-sance rapide. Il a pris cette décision parce que les pires faillites avaient

tendance à se produire dans ces caisses-là. L’autorité de contrôle ne comprenait pas pleinement la pyramide de Ponzi « acquisition, développement et construction » (ADC) quand elle a rédigé la règle.

Encore une ironie de la situation, parce que cette règle frappait le talon d’Achille des fraudes patronales et allait être la mesure de reréglementation la plus cruciale. Une pyramide de Ponzi fonc-tionne en grossissant vite et en utilisant une partie de l’argent des nouveaux investisseurs pour rembourser les anciens tandis que l’escroc empoche le reste. Les pilotes disent : « La rapidité, c’est la vie. » Pour une pyramide de Ponzi, « la croissance, c’est la vie ».

Les Ponzi des caisses d’épargne investissaient dans des actifs sans valeur de marché immédiatement déterminable, ce qui permettait aux caisses de traiter des revenus non monétaires (fictifs) comme réels dans le cadre des PCGA. Lorsqu’un actif n’a aucune valeur de marché claire, ce sont des professionnels, comme les agents d’éva-luation immobilière, qui déterminent combien il vaut. Tous les patrons-escrocs de caisses d’épargne ont pu trouver des profession-nels de premier ordre pour surévaluer massivement leurs actifs, et obtenir la bénédiction d’un des « huit grands » cabinets d’audit à leurs bilans truqués. L’avantage d’utiliser un « revenu » non moné-taire comme véhicule de la fraude était clair : cette méthode garan-tissait la production du revenu.

Dans ADC, « acquisition » désigne l’achat d’un terrain vierge ;

« développement », l’ajout d’infrastructures comme un réseau d’égouts, des lignes électriques et des routes ; « construction », la création d’un immeuble de bureaux ou d’un complexe résidentiel pour plusieurs familles. Les patrons-escrocs qualifiaient leurs tran-sactions ADC de « prêts », et les structuraient comme des prêts, mais le prêt ADC typique était en réalité un investissement direct. Sur ce point, le droit, les sciences économiques et financières et la compta-bilité sont tous d’accord : si la réalité économique est que le prêteur prend un risque capitalistique, la transaction est un investissement direct ou en capital, pas un prêt. Quand le succès du projet sous-jacent (par exemple la construction effective d’un immeuble de bureaux) détermine si l’emprunteur va rembourser ou non la caisse d’épargne, c’est que le prêteur assume un risque capitalistique.

Les Huit Grands – malgré trois tentatives de la profession d’interdire cette pratique abusive – ont constamment avalisé la présentation comptable des transactions ADC en tant que prêts.

Traiter les transactions ADC comme des prêts créait des revenus (frauduleux) extraordinaires et dissimulait des pertes réelles gigan-tesques. Les caisses d’épargne associaient la fraude comptable à la déréglementation et à la croissance massive pour créer la pyramide de Ponzi idéale. Si les experts-comptables avaient exigé des patrons-escrocs qu’ils comptabilisent leurs ADC en tant qu’investissements directs, ils n’auraient pas pu inscrire le revenu fictif.

Le patron-escroc typique consentait des prêts ADC aux caractéris-tiques suivantes :

– Aucun apport personnel.

– Versement d’avance à la caisse de sommes substantielles en commissions fixes et pourcentage du prêt accordé.

– Autofinancement de l’ensemble de ces commissions et pour-centages : la caisse prête à l’acheteur l’argent nécessaire pour les lui payer.

– Maturité du prêt de deux ou trois ans.

– Aucun remboursement du capital avant maturité (prêt in fine, ou sans amortissement).

– Autofinancement par la caisse de tous les paiements d’inté-rêts. La caisse se paie les intérêts à elle-même chaque fois qu’ils arrivent à échéance en puisant dans une réserve des intérêts.

Elle augmente la dette de l’emprunteur d’un montant égal à la réserve des intérêts.

– Taux d’intérêt considérablement supérieur au prime rate (le taux préférentiel).

– Aucune responsabilité personnelle de l’emprunteur pour la dette (prêt dit « sans recours »). Son entreprise de construction est endettée, mais pas le promoteur. Il ne fournit aucune garan-tie personnelle importante pour la dette de son entreprise.

– Sécurisation du prêt par le complexe immobilier à construire, que le promoteur donne en nantissement (c’est le collatéral).

– Montant du prêt égal à la (prétendue) valeur du collatéral.

– Pratique d’usage courant : versement à l’emprunteur, lors de la conclusion de l’affaire, d’un « profit de promoteur » pouvant représenter jusqu’à 2 % du capital prêté.

– Autre pratique d’usage courant : octroi par l’emprunteur à la caisse – cerise sur le gâteau – d’une participation au capital, c’est-à-dire d’un intérêt dans les profits nets du promoteur sur le pro-jet immobilier. Au début, ce « petit geste » dépassait souvent 50 %.

Puis, la profession comptable ayant précisé, dans un « avis aux praticiens », qu’une participation au capital de 50 % prouvait que la transaction n’était pas un véritable prêt, on a pris l’habitude de le fixer à 49 %. (Pour les points figurant sur cette liste, voir NCFIRRE 1993a ; Black 1993b ; Lowy 1991 ; O’Shea 1991 ; Strunk et Case 1988 ; Mayer 1990 ; Pizzo, Fricker et Muolo 1991 ; Calavita, Pontell et Tillman 1997.)

Les conséquences de ces caractéristiques ne sont pas évidentes.

Il faut connaître le mécanisme de la fraude, la réglementation du Bank Board et un peu de comptabilité pour mesurer l’élégance de la pyramide de Ponzi créée par les patrons-escrocs. Premièrement, on voit pourquoi les caisses d’épargne ne consentaient pas un prêt, mais prenaient un risque capitalistique. Les promoteurs immobi-liers n’étaient pas personnellement tenus de rembourser le prêt.

Leurs entreprises ne l’étaient pas vraiment non plus : elles faisaient signer la reconnaissance de dette par des sociétés-écrans sans aucun actif. Le promoteur ne rembourserait la caisse qu’en cas de suc-cès de son projet immobilier. Et même de sucsuc-cès total, puisque le prêt représentait 100 % de la valeur prévue ; si l’agent d’évaluation immobilière avait gonflé cette valeur, même légèrement, la caisse d’épargne perdrait de l’argent. Aucun doute n’est permis : le prêt typique de la pyramide de Ponzi ADC était clairement un investis-sement en capital. Ce qui rend encore plus troublante l’attitude des partenaires des cabinets d’audit, qui l’ont constamment traité comme un véritable prêt.

Les liquidités allaient toujours dans le même sens au sein d’une pyramide de Ponzi ADC : de la caisse au promoteur. Ce dernier, en règle générale, ne faisait aucun versement au patron-escroc de la caisse – pas d’apport personnel, pas de commissions et pourcenta-ges, pas de versements d’intérêts. Il n’était tenu de verser de l’argent que lorsque le prêt arrivait à maturité, et même à ce moment-là, je vais l’expliquer, il le faisait rarement.

Cela paraît peut-être une façon stupide d’escroquer, mais en réalité c’est très habile. Le premier avantage est qu’un prêt ADC ne peut jamais être en défaut de paiement avant maturité. Le Bank Board fondait son système de supervision sur les taux de défaut et de retard de paiement. Ce sont de très bons indicateurs précoces du risque de faillite dans le crédit immobilier résidentiel traditionnel.

Aux yeux des superviseurs, les caisses qui avaient de faibles taux de retards de paiement étaient saines et sûres. Le crédit ADC semblait sûr et extrêmement rentable. C’était évidemment trop beau pour être vrai, mais peu de superviseurs, au début, pensaient en crimi-nologues spécialistes des cols blancs. Pratt chantait les louanges des compétences managériales des nouveaux entrepreneurs. La vir-tuosité managériale apporte les profits. Un des Huit Grands l’avait bénie. C’était forcément vrai.

La deuxième conséquence est qu’une caisse d’épargne engagée dans une pyramide de Ponzi ADC était sûre d’annoncer un « revenu » extraordinairement élevé, du moins tant que son cabinet d’audit l’autorisait à classer ces transactions comme des prêts et non comme des investissements (les patrons-escrocs sont tous parvenus à faire en sorte que leurs auditeurs classent à tort les transactions ADC parmi les prêts, niant ainsi toutes les recommandations et mises en garde à ce sujet). C’était une simple question de mathématiques (et un petit supplément de comptabilité abusive). Les pyramides de Ponzi ADC inscrivaient sur leurs livres, en tant que revenus immé-diats, la plupart des pourcentages et commissions qu’elles autofi-nançaient, c’est-à-dire qu’elles se versaient à elles-mêmes. Environ 3 % du montant total du prêt devenait instantanément un revenu 6.

Les pyramides de Ponzi ADC inscrivaient comme revenu les inté-rêts autofinancés chaque mois ou chaque trimestre où ils arrivaient à échéance, en attribuant à l’emprunteur le paiement de l’intérêt à la caisse d’épargne à partir de la réserve des intérêts. Avec le haut niveau des commissions et des taux d’intérêt, tous autofinancés, un patron-escroc était sûr d’annoncer des profits élevés. Le taux de crois-sance extrêmement rapide des pyramides de Ponzi ADC garantissait que ces profits seraient extraordinaires. Toute caisse d’épargne qui avait une croissance rapide et consentait essentiellement des prêts ADC avait la garantie mathématique d’annoncer des profits excep-tionnels. C’est pourquoi les caisses dirigées par les pires patrons-escrocs se vantaient systématiquement de compter parmi les plus

6. Les PCGA ne permettaient pas que ces revenus de commissions soient inscrits comme un revenu immédiat, mais les patrons-escrocs le faisaient tout de même tous les jours et obtenaient des opinions sans réserve. Ici, le Bank Board est aussi à blâmer. Les caisses d’épargne pouvaient inscrire des revenus de commissions supplémentaires dans le cadre des PCR.

rentables. De fait, l’une des meilleures techniques pour repérer les fraudes patronales était de concentrer les efforts d’inspection sur les caisses annonçant les profits les plus élevés. Cela prouve aussi que les escrocs subornaient totalement les Huit Grands. Ils pou-vaient constamment obtenir des opinions sans réserve classant leur caisse parmi les plus rentables, alors qu’elle était en réalité insolva-ble au dernier degré.

Puisque l’optimisation des fraudes patronales imposait des traits structurels cohérents, cette structure aidait le Bank Board à les repé-rer. Le premier impératif des fraudeurs était de muer leurs commis-saires aux comptes en alliés. Après quoi les trois clés étaient le taux de croissance, le montant en dollars des prêts ADC et le niveau des taux d’intérêt, des commissions et de la participation au capital. Les pyramides de Ponzi ADC avaient souvent une croissance supérieure à 100 % par an ; en général, elle était de plus de 50 % ; chez certaines, le taux de croissance dépassait 1 000 %. Si la déréglementation a été une cause majeure de la débâcle, ce n’est pas parce qu’elle a permis d’accroître considérablement les investissements dans des actifs ris-qués, mais parce qu’elle a donné le droit d’investir dans des actifs qui étaient optimaux pour créer des revenus fictifs et dissimuler des pertes réelles. Déréglementation, supervision faible et garantie des dépôts : cette conjonction créait la pyramide de Ponzi idéale. Les pires caisses fraudeuses étaient des caisses d’épargne sous charte texane ou californienne, car elles avaient le droit de mettre 100 % de leurs actifs dans les investissements les plus propices à la fraude – le cas typique étant le prêt ADC. (Le choix des experts-compta-bles de ne pas traiter les prêts ADC en investissements a été nocif.

Les caisses d’épargne du Texas ne pouvaient consacrer qu’un petit pourcentage de leurs actifs aux investissements capitalistiques, mais 100 % aux prêts ADC.) Les sociétés à patrons-escrocs consen-taient quotidiennement des prêts ADC d’un montant nettement supérieur à la valeur de marché même du projet achevé, parce que le montant total en dollars des prêts ADC était le moteur de leurs revenus. Les règles interdisaient cette pratique ; c’est pourquoi les patrons-escrocs faisaient du « shopping d’agents immobiliers » pour obtenir des évaluations outrageusement gonflées de leurs biens.

Les patrons-escrocs cherchaient à prêter à des promoteurs à la solvabilité douteuse, parce que c’était ceux qui acceptaient de payer les commissions et les taux d’intérêt les plus élevés et d’octroyer

les plus fortes participations au capital (Pierce 1993 ; Akerlof et Romer 1993 ; Calavita, Pontell et Tillman 1997 ; O’Shea 1991 ; Lowy 1991 ; Pizzo, Fricker et Muolo 1991 ; Mayer 1990). S’efforcer délibé-rément de consentir ses prêts aux pires promoteurs paraît d’une absurdité totale à l’écrasante majorité des gens. L’intérêt manifeste des patrons-escrocs n’est-il pas de consentir des prêts rentables, afin de pouvoir rester en activité et de continuer à piller leur caisse ? La plupart des gens (heureusement) ne raisonnent pas comme des criminels en col blanc. Les patrons-escrocs opèrent selon des règles différentes, perverses et nuisibles à la société. Cela ne veut pas dire qu’elles sont irrationnelles.

Une pyramide de Ponzi finit toujours par s’effondrer, mais cela ne signifie pas que la fraude échoue : le PDG corrompu peut gagner énormément en pillant l’entreprise. Avec la prétendue rentabilité de ces pyramides et la garantie des dépôts, les caisses concernées pouvaient connaître une croissance rapide pendant plusieurs années avant de s’écrouler. Ces PDG n’avaient pas la possibilité de gagner de l’argent honnêtement, comme l’a illustré mon analyse sur l’incapacité de s’extraire de ses problèmes par la croissance. Les fraudes comptables ADC créaient un revenu fictif qui permettait aux patrons de convertir les actifs de l’entreprise en fortune per-sonnelle à travers des mécanismes normaux et apparemment légi-times : augmentations de salaire, primes, stock-options et avantages en nature 7.

Les pires promoteurs immobiliers acceptaient de payer les taux d’intérêt les plus élevés parce qu’ils avaient beaucoup à y gagner. La caisse d’épargne leur versait souvent d’avance un « profit de promo-teur ». Profit qui était encore supérieur si la caisse faisait en sorte qu’une autre entité achète le projet à un prix supérieur au montant du prêt. (J’expliquerai pourquoi ce type d’achat était à la fois cou-rant et frauduleux.) Les bénéfices d’une telle vente étaient répartis entre le promoteur et la caisse, puisque celle-ci avait une participa-tion au capital. Les promoteurs pouvaient aussi faire des profits

7. Beaucoup de patrons-escrocs actuels utilisent un mécanisme supplémentaire : de gigantesques prêts consentis directement par l’entreprise au PDG. L’entreprise peut ensuite effacer le prêt, ou le PDG ne pas le rembourser. Les caisses d’épargne ne pratiquaient pas ce système, car, en vertu d’une interdiction générale, il était illégal pour une caisse de prêter à son PDG.

en se livrant aux types de fraudes endémiques dans le bâtiment : recevoir des pots-de-vin des sous-traitants, détourner des fonds cen-sés financer la construction, substituer des matériaux bon marché et de mauvaise qualité à ceux qui étaient prévus, etc.

Les promoteurs immobiliers véreux ne perdaient rien de sérieux en accordant à la caisse fraudeuse de fortes commissions, des inté-rêts élevés et de grosses participations au capital. Ils ne prenaient aucun risque financier. Ils ne payaient pas vraiment ces commissions et intérêts prohibitifs. Les prêts ADC n’obligeaient ces mauvais promo-teurs ni à avancer ni à risquer le moindre centime de leurs deniers personnels. Tous leurs paiements étaient effectués, en réalité, par la caisse ; il n’y avait aucun apport personnel ; et ils n’avaient pas à garantir le prêt à titre personnel. Quand il y avait défaut de paie-ment sur le prêt, ils pouvaient se désintéresser de la situation.

Un bon promoteur aurait pu, lui aussi, se désintéresser du défaut de paiement sans subir aucune perte financière directe. Il aurait toutefois terni sa réputation. Avoir la réputation d’être un excellent promoteur a une importante valeur financière indirecte. Mais celui qui n’avait pas cette bonne réputation, voire qui en avait une mau-vaise, n’avait pas grand-chose voire rien du tout à perdre en termes d’image, quand le prêt était en défaut de paiement (éventualité fort probable puisque l’évaluation était généralement gonflée et que le promoteur n’avait guère le sens des affaires). Et les promoteurs à mauvaise réputation ne pouvaient pas obtenir de prêts du même ordre d’un établissement de crédit honorable. Cela maximisait l’emprise que les caisses fraudeuses avaient sur eux 8.

8. Les patrons-escrocs avaient un moyen élégant de trouver de mauvais promoteurs. Ils maximisaient la « sélection adverse ». Les économistes ont d’abord repéré la sélection adverse dans le contexte des assurances. Une compagnie qui offre une assurance contre le cancer du poumon court le risque que les plus susceptibles de la souscrire soient aussi les plus susceptibles de développer un cancer du poumon.

La théorie et la pratique de l’assurance ont élaboré des moyens d’atténuer la sélection adverse. Les patrons-escrocs ont pris les mesures opposées. La meilleure façon de réduire la sélection adverse dans le crédit, c’est de faire en sorte que l’emprunteur pâtisse financièrement si le prêt n’est pas remboursé, et d’effectuer un excellent travail de vérification sur l’emprunteur et sur le projet immobilier qui sert de nantissement pour sécuriser le prêt. Les patrons-escrocs structuraient les prêts ADC pour qu’ils n’exigent ni apport personnel ni garantie personnelle, afin de garantir à l’emprunteur qu’il ne subirait aucune perte financière directe. Ils choisissaient des emprunteurs à mauvaise réputation qui ne subiraient pas non plus de perte financière indirecte en cas de défaut de paiement sur le prêt, et évitaient de prêter à des promoteurs de grande qualité.

Tout le monde en convient : l’étude des demandes de crédit par les high-fliers était effroyable de bout en bout (Patriarca 1987, p. 3-5 ; GAO Thrift Failures 1989, p. 31-38). Ils consentaient souvent des prêts ADC massifs à des particuliers sans vérifier leur solvabilité ni faire estimer la valeur des biens immobiliers. Cette habitude maximisait la sélection adverse (et les pertes). Et c’est justement pour cette rai-son que cette pratique perverse était rationnelle pour un patron-escroc. De plus, si l’évaluation initiale faisait apparaître une grosse perte (ou si la vérification de solvabilité révélait que le promoteur était insolvable), mieux valait consentir le prêt sans avoir ces docu-ments compromettants dans le dossier, car les inspecteurs du Bank Board pourraient les trouver et les utiliser pour prouver que le prêt n’était ni sain ni sûr.

Ce comportement serait illogique si les caisses « de haut vol » avaient été d’« honnêtes parieurs sur la résurrection » (Black, Calavita et Pontell 1995). D’honnêtes parieurs rationnels auraient tenté, au contraire, de faire un excellent travail de vérification avant de s’en-gager dans des investissements ultrarisqués (c’est d’ailleurs ce que postule la réflexion économique traditionnelle). Les parieurs honnê-tes ne gagnent que si leurs investissements ultrarisqués réussissent.

Leurs chances de succès sont intrinsèquement faibles, mais, sans un travail de vérification superbe, l’échec est certain.

Pour la phase de camouflage des pyramides de Ponzi ADC, il était crucial d’avoir de mauvais promoteurs (et des alliances informelles avec d’autres caisses fraudeuses). Avec la sélection adverse et l’in-citation perverse des patrons-escrocs à développer leurs prêts ADC en plein engorgement du marché de l’immobilier de bureau, le dénouement était prévisible : ces projets immobiliers allaient proba-blement échouer et les prêts seraient en défaut de paiement à leur arrivée à maturité. Les patrons-escrocs dissimulaient ces défauts et les transformaient en nouvelles sources de revenus frauduleux et en nouveaux moyens de tromper l’autorité de contrôle. Ils pouvaient, par ordre d’élégance croissante : refinancer leurs prêts ADC ;

Pour la phase de camouflage des pyramides de Ponzi ADC, il était crucial d’avoir de mauvais promoteurs (et des alliances informelles avec d’autres caisses fraudeuses). Avec la sélection adverse et l’in-citation perverse des patrons-escrocs à développer leurs prêts ADC en plein engorgement du marché de l’immobilier de bureau, le dénouement était prévisible : ces projets immobiliers allaient proba-blement échouer et les prêts seraient en défaut de paiement à leur arrivée à maturité. Les patrons-escrocs dissimulaient ces défauts et les transformaient en nouvelles sources de revenus frauduleux et en nouveaux moyens de tromper l’autorité de contrôle. Ils pouvaient, par ordre d’élégance croissante : refinancer leurs prêts ADC ;

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