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« Droits des femmes et droit de la famille ont longtemps entretenu des relations houleuses, voire d’opposition. S’il est un fait avéré, dans l’histoire des femmes, c’est que la principale source et cause de leur aliénation juridique a toujours résidé dans le souci de consolider la famille et de lui donner stabilité et sécurité »

Françoise Dekeuwer-Defossez375

Longtemps l’autorité a régné dans la famille à travers la puissance paternelle et la puissance maritale, deux formes d’autorités qui régissaient les rapports entre époux d’une part et les relations entre les parents et les enfants d’autre part. D’ailleurs, Régine Beauthier souligne que : « Les historiens du droit, de la vie privée et de la famille tendent le plus souvent à présenter la puissance maritale comme une réalité intangible de l'ordre familial durant tout le XIXe siècle »376.

De toute évidence, les rôles d’épouse et de mère sont les deux fonctions que la femme est susceptible d’endosser dans la famille au XIXe et XXe siècle377, dès lors

« L’autorité du mari et père, de même que l’obligation de fidélité de l’épouse étaient garantes du bon fonctionnement de l’institution, pour le plus grand bien de ses membres. Dans une organisation de ce type, l’égalité des sexes comme la liberté de l’épouse n’avaient guère de sens »378.

Pourtant si ces rôles lui sont dévolus depuis des siècles, ils ne lui ont pas toujours donné un état identique et ne lui ont pas toujours fourni les mêmes droits,

375 Françoise Dekeuwer-Defossez, « Les droits des femmes face aux réformes récentes du droit de la famille » in L’Année sociologique 2003/1 (Vol. 53), p. 175

376

Régine Beauthier, Le secret intérieur des ménages et le regard de la justice, Bruxelles, Bruylant, 2008, 1444 p.

377 André Isoré, La guerre et la condition privée de la femme, op.cit., p. 34.

378

ni infligé les mêmes charges. En fonction de l’évolution du statut de la femme, « peu à peu l’épouse-mère voit son pouvoir dans le ménage se développer et son infériorité vis-à-vis de son conjoint diminuer. S’inscrivant dans la continuité sociale, son sort se relève à travers davantage de considération et plus d’importance »379.

Eu égard à ces considérations : « le Code civil de 1804 peut véritablement être

considéré comme un modèle achevé de l’équilibre d’une famille patriarcale »380. Pour

autant, il ne cessera de se métamorphoser pour s’adapter aux évolutions de la société

en consacrant à la femme dès le début du XXe siècle des droits plus importants en

matière familiale. Cependant, la prépondérance du père dans la famille en tant que chef de famille ne donnera initialement à la mère qu’un rôle de « subordonnée » en matière de droit au sein du foyer familial. Dans la subordination, il y a ainsi l’exclusion de compétence pour la mère comme précédemment étudié à travers l’article 373 et la primauté du chef de famille.

Ce titre second permettra de mieux comprendre la persistance de la supériorité du père, à travers l’analyse de la place qui lui est faite au sein de la famille en 1804 et sa conséquence directe sur le rôle subordonné de la mère (Chapitre 1) à travers l’analyse des différents courants politiques et de leur influence sur l’organisation de la famille.

Cela étant, alors que le modèle de la famille légitime traditionnelle s’accommodait assez aisément d’une « puissance paternelle » attribuée au père seul, qui se combinait en définitive plutôt bien avec une prééminence maternelle dans la vie domestique quotidienne, ce modèle ne pouvait cependant subsister dans un

379

André Isoré, La guerre et la condition privée de la femme, op.cit., p. 34.

380 Françoise Dekeuwer-Defossez, « Les droits des femmes face aux réformes récentes du droit de la famille » in L’Année sociologique 2003/1 (Vol. 53), p. 176 : « Titulaire de la puissance paternelle et de la puissance maritale, le mari est seigneur et chef de la communauté. Il est seul juridiquement capable, l’épouse ne pouvant donc pas gérer ses biens, même si elle a hérité une fortune de sa propre famille. Le cœur du mariage est la présomption de paternité qui lie les enfants de l’épouse au mari et donne donc une descendance à celui-ci ».

système juridique où l’égalité des sexes devenait progressivement une norme fondamentale. En effet, « cette promotion des droits des femmes dans la famille s’est construite sur le modèle général de l’égalité des sexes, qui est l’indifférenciation des rôles. Le combat de l’émancipation féminine s’étant déroulé par la démonstration de ce que les femmes étaient capables d’assumer les mêmes fonctions et responsabilités que les hommes dans la cité, l’égalité s’est aussi réalisée en droit de la famille par le biais d’une indifférenciation des rôles du mari et de la femme, du père et de la mère »381. L’évolution a été particulièrement importante en la matière puisque la loi

du 18 février 1938 va supprimer l’incapacité de la femme mariée, mais sans toucher à la puissance maritale, ce que fera la loi du 22 septembre 1942 qui l’a fait disparaitre. Chemin faisant, il est nécessaire de comparer l’évolution de la condition de l’épouse à celle de la mère dans la famille au XXe siècle382 (Chapitre 2).

381

Françoise Dekeuwer-Defossez, « Les droits des femmes face aux réformes récentes du droit de la famille » in L’Année sociologique 2003/1 (Vol. 53), p. 194, op.cit., p. 177.

382 Françoise Dekeuwer-Defossez, « Les droits des femmes face aux réformes récentes du droit de la famille » in L’Année sociologique 2003/1 (Vol. 53), p. 194.

Chapitre I. La prédominance du père de famille dans le Code

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