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Propos recueillis auprès de Rémi Olivier, délégué territorial, AFEV Agen

Dans le document Enfants et jeunes nouvellement arrivés (Page 73-77)

À Toulouse, des étudiants interviennent auprès d’un groupe d’enfants non francophones d’une classe d’accueil. En étroit partenariat avec les personnels du collège, avec une coordi- nation assurée par le CASNAV, les étudiants, particulièrement investis, articulent les temps passés au collège avec des sorties régulières qui permettent aux jeunes de découvrir leur nou- vel environnement. Animer, gérer le groupe (ses dynamiques, ses tensions…) tout en indivi- dualisant le soutien : c’est le défi qu’ont relevé les étudiants en se ménageant de nombreux temps d’échange et d’analyse de leurs pratiques avec les autres partenaires.

Le territoire

La région Midi-Pyrénées est depuis longtemps une terre d’immigration. Avec 4 % de la tota- lité des immigrés vivant sur le territoire français, la région Midi-Pyrénées se situe au cin- quième rang des régions françaises. Entre 1999 et 2002, les entrées ont augmenté de 67 %. La concentration des arrivées, principalement dans la ville de Toulouse, se caractérise par un grand nombre de dispositifs mis en place par l’Éducation nationale afin d’accueillir les élèves nouvellement arrivés. Ainsi, dans ce département, neuf classes d’accueil, cinq dispositifs d’ac- cueil et deux CLA-NSA sont à disposition des enfants nouvellement arrivés.

L’AFEV sur Toulouse

L’AFEV est présente sur Toulouse depuis 1993. Historiquement, du fait des partenariats locaux, les accompagnements ont été ciblés très largement sur les collégiens et se déroulent généralement dans les établissements scolaires. Depuis quelques années, elle a été fortement sollicitée sur la question des enfants nouvellement arrivés en France. Ainsi, l’AFEV Toulouse fut le premier pôle à mettre en place des actions d’accompagnements d’enfants nouvellement arrivés en 2001.

Contexte et historique

De quand date la mise en place du dispositif spécifique pour les élèves nouvellement arrivés ?

L’action a été mise en place à la rentrée 2001 après un an de préparation du projet par les par- tenaires en 2000-2001.

Où se déroule l’action ?

En accord avec le responsable de l’établissement, l’action se déroule au sein même du collège Bellefontaine à Toulouse, les mercredis. Le collège est situé en zone d’éducation prioritaire et classé « ambition réussite ».

Le projet

Qu’est-ce qui a amené la création du projet ?

Des établissements scolaires de Toulouse, démunis face aux besoins scolaires et sociaux très diversifiés des élèves nouvellement arrivés, ont sollicité l’AFEV Toulouse en 2000. L’AFEV a conditionné son accord à la participation du CASNAV dans le dispositif en tant que partenaire central qui puisse réguler le projet et coordonner les acteurs impliqués. Il s’agissait ainsi de concevoir une action permettant aux jeunes d’acquérir des repères et des informations facili- tant leur prise d’autonomie.

Objectifs

– Contribuer à l’intégration scolaire et sociale des enfants nouvellement arrivés.

– Rendre visible et compréhensible la société d’accueil, avec ses codes et son fonctionne- ment particulier.

– Considérer et faire reconnaître le jeune nouvellement arrivé comme un individu avec des besoins spécifiques, des envies et centres d’intérêt personnels.

– Accompagner le jeune dans l’élaboration de son projet individuel d’insertion dans la société d’accueil.

– Contribuer à la prise d’autonomie de l’adolescent. Qui sont les partenaires impliqués ?

L’AFEV est le porteur de projet. Le collège Bellefontaine met à disposition une salle pour les séances d’accompagnement et s’occupe de la communication entre les différents acteurs du projet (famille, AFEV, responsables pédagogiques, enseignants, enfants). Les interlocuteurs principaux au sein du collège sont les professeurs de FLE, le principal du collège, l’infirmière scolaire et la conseillère principale d’éducation. Le CASNAV joue un rôle clé dans la « régula- tion pédagogique » de l’action.

Qui sont les financeurs ?

Le conseil régional, le conseil général, la mairie de Toulouse (politique de la ville), la préfec- ture, mais aussi la CAF, la DDASS et le FASILD. L’établissement met à disposition une salle de cours pour les séances d’accompagnement et fournit du matériel de fonctionnement. Les sorties culturelles sont financées par les subventions accordées à l’établissement par le FASILD.

Spécificité de l’action

Quel est le public visé et pourquoi ?

Le groupe accompagné est composé exclusivement d’enfants nouvellement arrivés inscrits en classe d’accueil (CLA) du collège Bellefontaine. La constitution du groupe dépend de critères définis par l’équipe (autonomie dans la lecture, niveau scolaire, maturité).

Sous quelle forme se présente le projet ?

Interventions hebdomadaires des étudiants bénévoles

Les interventions des étudiants ont lieu un après-midi par semaine. Les séances servent de relais aux cours de FLE. Au fur et à mesure de l’année, une fois qu’une certaine relation de confiance a été établie entre étudiants et jeunes, les séances portent sur la prise de repères spatiaux, temporels, sociaux et administratifs. Une grande importance est accordée aux docu- ments usuels qui sont utilisés comme supports éducatifs : plan de la ville, plan du métro, tic- kets, monnaies…, afin d’acquérir du nouveau vocabulaire, des nouveaux repères linguistiques et sociaux.

Sorties mensuelles

Les sorties sont conçues comme un moyen de réinvestir le vocabulaire acquis lors des séan- ces dans une situation de communication réelle en milieu « non protégé » (c’est-à-dire hors encadrement au sein de l’établissement scolaire). Les adolescents devaient à chaque fois pré- parer la sortie, contacter les lieux de visite à l’avance pour se renseigner, ce qui les faisait tra- vailler leur communication orale. Les principales sorties ont pris la forme de visites de la ville, de sorties au cinéma ou à la bibliothèque, ainsi que de visites de fermes pédagogiques…

Réunions de formation et d’échange entre partenaires

Les réunions entre le chef d’établissement, le responsable AFEV et le représentant du CASNAV ont pour but d’assurer le suivi du projet et de permettre d’éclairer chacun des acteurs au sujet de problématiques internes à l’établissement ou relatives au dispositif. Un autre niveau d’échange est celui des stages d’établissement réunissant professeurs, étudiants et autres partenaires. Ces stages avaient lieu à raison d’une journée par mois. Une première réunion de début d’année est organisée, à laquelle sont conviés les principaux acteurs impliqués dans le projet (professeur de FLE, étudiants, responsable AFEV, conseiller principal d’orientation, infirmière), ainsi que les personnes travaillant avec les élèves de la CLA (professeurs des matières autres que le français), en présence des parents. Ce moment permet également de prendre un premier contact avec les familles et de présenter tous les partenaires.

Les réunions suivantes étaient l’occasion de créer un lien pédagogique entre le contenu des cours des professeurs de FLE et les séances d’accompagnement délivrées par les étudiants. Professeurs, étudiants et autres acteurs pouvaient exprimer leur point de vue, s’exprimer sur leur perception de chacun des enfants, les problèmes qu’ils avaient pu noter chez certains et les moyens de les résoudre.

Des réunions d’accompagnateurs (étudiants, responsable AFEV et le formateur du CASNAV), menées par le formateur du CASNAV, avaient lieu à la demande des étudiants. Ces réunions constituaient un temps de régulation permettant aux étudiants de s’exprimer librement sur le dispositif, sur leurs relations avec les enfants et avec les autres partenaires. Y étaient abor- dées des questions propres à la fonction d’accompagnateur et d’animateur : comment gérer un groupe, comment faire en sorte que chacun des animateurs soit reconnu et respecté par l’ensemble des adolescents…

Leviers et freins

Quels sont les facteurs de réussite et de pérennité ?

La démarche de partenariat

La démarche de partenariat a été très bien comprise par la majorité des acteurs impliqués dans le projet. Les partenaires s’entendent pour dire que c’est principalement cet engagement fort de certaines personnes, et non « d’institutions », qui a rendu possible la longévité de ce projet. Dans un projet de ce type, il est primordial que le professeur de FLE/FLS se sente impli- qué. Il est donc primordial que professeurs et personnels de l’Éducation nationale accordent aux étudiants bénévoles la considération qui leur est due en tant qu’accompagnateurs.

Le choix des étudiants

L’AFEV et le CASNAV ont très tôt insisté sur la nécessité d’avoir non pas des techniciens spé- cialistes en FLE et formés à l’enseignement, mais bel et bien des animateurs capables de moti- ver un groupe d’adolescents durant trois heures un après-midi par semaine. Les étudiants devaient faire preuve d’une grande motivation, de compétences en animation ainsi que de

grandes qualités d’empathie. Les partenaires ont mis l’accent sur la nécessaire diversité d’origine et de formation des étudiants, ainsi que sur la mixité (garçons/filles) du groupe d’intervenants.

Le financement

Le projet s’inscrivait dans le cadre des contrats locaux d’accompagnement à la scolarité. En outre, les crédits ZEP du collège ont permis de financer les journées de « stages d’établisse- ment » permettant de réunir tous les partenaires durant les quatre ans de mise en œuvre du projet.

Le contact avec les parents

Le projet ayant lieu au collège et non au domicile, il aurait été possible que les parents ne se sentent pas inclus dans l’accompagnement. Les partenaires ont donc eu à cœur de convier les parents à plusieurs réunions d’information. Les parents furent invités à voir l’exposition et à prendre la mesure des progrès faits par leurs enfants. En outre, la conseillère principale d’éducation appelait régulièrement les parents, en coordination avec l’assistante sociale, pour les maintenir informés des avancées du dispositif et discuter de la situation de leurs enfants. Quelles sont les difficultés rencontrées ?

Le problème de coordination et de motivation

Un projet de ce type est impossible à mettre en place s’il n’est pas conçu en complémentarité de l’action des professeurs de FLE. L’absence de volonté marquée et de dynamisme de cer- tains professeurs a pu représenter un frein à la bonne mise en œuvre du projet. Les réticen- ces semblaient être en partie liées aux peurs des enseignants que les étudiants veuillent les juger sur le travail qu’ils effectuent.

L’hétérogénéité du groupe d’ENA

L’écart d’âge entre les jeunes peut être très important (élèves souvent entre 12 à 18 ans), le niveau scolaire est lui aussi très hétérogène. Les jeunes sont originaires de pays différents, se trouvent souvent dans des situations familiales, administratives et sanitaires très complexes et diverses. Le travail en groupe rend plus difficiles les discussions et confidences person- nelles, ayant facilement lieu dans le cadre d’un accompagnement individuel. Toutefois, les adolescents se sentaient souvent suffisamment en confiance avec un ou plusieurs des accom- pagnateurs pour oser confier leurs soucis ou difficultés.

Le dispositif relativement contraignant

Le dispositif nécessite un engagement fort de la part des étudiants : ils acceptent d’intervenir une demi-journée par semaine auprès des enfants nouvellement arrivés et doivent préparer ces interventions, participer aux réunions d’établissement… Un engagement fort est aussi attendu de la part des enseignants. Au final, ce dispositif mobilise des moyens humains et financiers pour un groupe réduit d’enfants.

Bilan

En quoi l’action a-t-elle répondu aux objectifs ?

Durant les quatre ans de fonctionnement, les retours des adolescents, partenaires et parents ont été très positifs. Des changements significatifs ont été notés pour la plupart des jeunes (comportement en classe ou par rapport à leur environnement). Ils osent plus vite et plus tôt dans l’année s’exprimer et montre un intérêt à ce qu’ils font. En outre, le travail effectué sur la connaissance des lieux administratifs (visites, repérages, décodages) leur a permis de gagner en autonomie.

Évolutions et perspectives

Quelle sera la démarche adoptée dans le futur ?

Après quatre ans de mise en œuvre, le projet a été interrompu à la fin de l’année scolaire 2005- 2006 suite au transfert de la CLA du collège Bellefontaine dans un autre établissement qui, lui, n’a pas sollicité l’AFEV.

Dans le document Enfants et jeunes nouvellement arrivés (Page 73-77)