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Les enfants nouvellement arrivés

Dans le document Enfants et jeunes nouvellement arrivés (Page 37-39)

et la politique

d’intégration :

un environnement

évolutif… et interactif !

Murielle Maffessoli

Murielle Maffessoli est directrice de l’Observatoire régional de l’intégration et de la ville, centre de ressources dans les domaines de l’intégration, de la lutte contre les discriminations et la politique de la ville, situé en Alsace. Intervenante depuis quelques années dans le domaine des politiques locales d’intégration, elle présente ici les principaux acteurs intervenant dans le champ de l’intégration des nouveaux arrivants, domaine mouvant et en construction perpétuelle. Au-delà de la question de l’intégration des personnes nouvellement arrivées, c’est celle de leur accueil qui est actuellement mis en avant, à tel point que des politiques spéci- fiques ont été expérimentées à partir de 2003. Elles se décident au niveau national, mais sont mises en œuvre de manières très différenciées selon les territoires. L’accueil prend ancrage dans le quotidien et dans la proximité, ainsi l’accueil des enfants nouvellement arrivés ne relève pas uniquement des prérogatives des institutionnels. Acteurs et décideurs locaux, associatifs, société civile : il revient à la société d’accueil d’offrir un accueil digne et respec- tueux à ces personnes, que ce soit à travers l’implication dans des actions (d’accompagne- ment éducatif ou autre), ou par le regard porté sur les personnes nouvellement arrivées.

Les ENA relèvent, au moins pour une partie d’entre eux, de ce que l’on appelle communément les « primo-arrivants », entendu comme une personne amenée à rester durablement sur le territoire français (c’est-à-dire relevant des flux permanents10).

L’action en direction de ces derniers constitue, depuis plusieurs années, un enjeu de la poli- tique publique d’intégration.

L’intégration est l’affaire de tous (nouvel arrivant comme société dite d’accueil). Le défi dans les sociétés modernes se trouve dans la possibilité de donner aux uns et aux autres la possi- bilité de trouver une place, de savoir comment faire face aux manques (linguistiques, infor- matifs…).

Pour agir dans ce cadre, il peut être intéressant de connaître les éléments constitutifs de cette politique d’autant qu’elle a fait l’objet d’évolution importante ces dernières

années sur le plan des enjeux, des dispositifs comme des acteurs.

QUESTIONS/RÉFLEXIONS

10/ Les personnes relevant de ces flux sont, principalement, celles ayant un contrat de travail (travailleurs étrangers) et celles arrivant afin de rejoindre un conjoint ou un proche (rejoignant dans le cadre de la procédure de regroupement familial, conjoint ou membre de familles de français et conjoint ou membre de familles de réfugiés) et les réfugiés.

La politique d’intégration et d’accueil, de quoi parle-t-on ?

Le terme d’intégration (généralement référé à la situation des immigrés installés de façon durable dans le pays d’accueil) désigne à la fois un processus et les politiques qui ont pour objet de faciliter sa mise en œuvre.

Le processus, qui s’inscrit dans la durée, est celui d’une participation effective de l’ensemble des personnes appelées à vivre en France à la construction d’une société rassemblée dans le respect de valeurs partagées, telles qu’elles s’expriment dans des droits égaux et des devoirs communs.

Pour le Haut Conseil à l’intégration11, « l’intégration n’est pas l’assimilation : elle ne vise pas

à réduire toutes ses différences. L’intégration n’est pas l’insertion : elle ne se limite pas à aider des individus à atteindre des standards socio-économiques satisfaisants – beaucoup ont su s’y hisser sans l’assistance de quiconque sans pour autant vivre au contact de la société d’ac- cueil […]. L’intégration n’est pas non plus un simple processus moral voire caritatif, elle demande un effort réciproque des arrivants et des accueillants, une ouverture à la diversité qui est un enrichissement mais aussi, une adhésion et une volonté responsable pour garantir et construire une culture démocratique commune ».

L’accueil, constituant la première étape d’un parcours d’intégration réussie, est devenu au fil du temps un enjeu de politiques publiques porté au plan national.

L’émergence de cette question peut, en effet, être située au milieu des années 1980. En 1986, le SSAE (Service social d’aide aux émigrants) est chargé d’une mission d’accueil des popula- tions arrivant dans le cadre du regroupement familial. Au milieu des années 1990, cette ques- tion de l’accueil a été considérée comme devant relever plus fortement encore d’une logique partenariale, d’où l’instauration de Plans départementaux d’accueil des primo-arrivants. À compter d’octobre 2002 (discours du président de la République à Troyes) et des décisions du Comité interministériel à l’intégration de 2003, l’accueil est devenu un enjeu central de la politique nationale d’intégration. Il a donc été décidé de mettre en place un service public de l’accueil et de proposer à tous les primo-arrivants un accueil identique sur l’ensemble du ter- ritoire national.

Dans ce contexte et en ce qui concerne plus particulièrement le domaine scolaire, l’État doit garantir l’exercice du droit à l’éducation et à la formation à tous les enfants et aux jeunes vivant sur le territoire national. Plus précisément pour les enfants et adolescents nouvellement arrivés, l’école est un lieu déterminant pour l’intégration sociale, culturelle et professionnelle. Leur réussite scolaire liée à la maîtrise de la langue française est un facteur essentiel de cette intégration. Au-delà de cet aspect, l’appui à la scolarisation mais aussi plus largement l’ac- compagnement éducatif constitue un atout pour l’avenir, d’autant que souvent cet appui se fait en lien avec la famille et l’environnement, revêtant de fait une dimension collective, pro- pice à l’intégration des parents également. L’obligation d’accueil dans les établissements sco- laires relève du droit commun indépendamment du statut des parents. Elle s’applique de la même façon pour les élèves nouvellement arrivés que pour les autres élèves. Toutefois les modalités de mise en œuvre de cet accueil varient actuellement selon le département.

L’accueil et l’intégration… des dispositifs

La logique de la politique d’intégration en France qui tend à éviter les singularismes fait qu’il n’existe que peu ou pas de dispositifs, d’actions, voire d’acteurs intervenant exclusivement et spécifiquement auprès des publics étrangers. L’intervention au moment de l’accueil constitue

en quelque sorte une exception.

11/ Rapport du HCI, 2006, Bilan de la

politique d’intégration 2002-2006,

Dans ce domaine, le législateur a souhaité instaurer « un véritable service public d’accueil et d’intégration des primo-arrivants » s’appuyant sur un accueil généralisé et un suivi quasi indi- vidualisé. Cette volonté a donné lieu à la constitution de l’ANAEM (Agence nationale de l’ac- cueil des étrangers et des migrations). Créée en 2005, elle s’est appuyée sur les moyens financiers et humains de l’OMI (Office des migrations internationales) et des services sociaux spécialisés (SSAE) précédemment chargés de l’accueil.

Par ailleurs, il a été décidé la mise en place d’un contrat d’accueil et d’intégration (CAI). Il consiste en un contrat personnalisé mettant en avant les intérêts réciproques (du primo- arrivant et de l’État français) dans une logique de droits et devoirs. Expérimenté dès juillet 2003, il est généralisé à l’ensemble du territoire français depuis 2006.

Dans le cadre de la loi de programmation pour la cohésion sociale, l’acceptation du CAI par tout nouvel arrivant constitue un élément d’appréciation de la condition d’intégration républi- caine qui est un des éléments fondant la délivrance de la carte de résident. Depuis la loi sur l’immigration et l’intégration du 25 juillet 2006, le CAI est devenu obligatoire pour tout nouvel arrivant. « L’étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulière- ment en France entre l’âge de 16 ans et l’âge de 18 ans12, et qui souhaite s’y maintenir dura-

blement, prépare son intégration républicaine dans la société française. À cette fin, il conclut avec l’État, un contrat d’accueil et d’intégration […] par lequel il s’oblige à suivre une forma- tion civique et, lorsque le besoin en a été établi, linguistique […]. Toutes ces formations et prestations sont dispensées gratuitement. » (article L311-9, Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile).

Le contrat est individuel et personnalisé, signé pour un an, renouvelable une fois. Il vise, par les prestations développées, à permettre une meilleure intégration du nouvel arrivant. L’accent est mis sur la maîtrise de la langue au niveau oral13, la formation civique et l’accompagnement

social, et est adapté au besoin des personnes. Par ailleurs, les personnes qui le souhaitent peuvent bénéficier d’une journée de formation civique supplémentaire, optionnelle (journée « vivre en France »).

Si nombre d’acteurs s’accordent sur l’importance de la prise en charge des primo-arrivants dès l’arrivée sur le territoire et sur l’intervention de l’apprentissage de la langue, le contrat d’accueil et d’intégration présente des limites liées à ces objectifs mêmes. Conçu dans une logique d’égalité de traitement de l’ensemble des primo-arrivants sur le territoire national et dans une logique contractuelle et individuelle, il ne permet pas une prise une charge de l’en- vironnement du nouvel arrivant, de la famille dans son ensemble. Signé jusque-là par des adultes, il ne prend que peu en compte la question scolaire. Le contrat d’accueil et d’intégra- tion permet un contact avec la personne au moment de son arrivée sur le territoire. Or, les besoins et difficultés par rapport à l’intégration appellent un accompagnement sur la durée, étant entendu que l’arrivée n’est pas forcément le moment où s’expriment toutes les difficultés.

… mais aussi des acteurs

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