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LES PROCESSUS DE TRAITEMENT DE L’IMPAYE

Dans le document Le traitement du contentieux bancaire (Page 140-143)

204. En cas d’impayé, les banques ont mis en place des processus de règlement privilégiant une solution consensuelle au différend. D’où la structuration en leur sein des services de recouvrement amiable, et même l’émergence des sociétés externes chargées de jouer ce rôle. Les mécanismes précontentieux de traitement des incidents de paiement connaissent ainsi un essor particulier. L’accent est mis sur la recherche d’une solution négociée, le but étant d’éviter l’émergence du litige. Dans cette optique, les services de recouvrement amiable se sont considérablement développés ces dernières années au sein des établissements de crédit. Ces services sont généralement sollicités lorsque l’agence et le client ne sont pas parvenus à régler le différend. Les chargés de clientèle développent en agence une relation commerciale avec les usagers, et sont donc les premiers négociateurs en cas d’incident de paiement et plus largement dans le cadre des différends entre banques et clients. Le chef d’agence peut également être saisi, au cas où la solution n’est pas trouvée entre le client et son interlocuteur habituel. Il peut par conséquent essayer de proposer au client une solution consensuelle en cas de différend persistant.

205. L’échec de l’action du chargé de clientèle (et éventuellement du chef d’agence) entraîne le transfert du dossier au service de recouvrement amiable qui s’emploie à son tour à trouver un accord avec le client. Le changement d’interlocuteur et la capacité de persuasion d’un personnel spécialisé dans la pratique du recouvrement amiable peuvent en effet favoriser l’émergence d’un accord. On a donc au moins deux niveaux de négociation avant un éventuel transfert du dossier au service contentieux. Ces deux étapes de négociation (agence et service de recouvrement amiable) présentent l’avantage de multiplier les chances de conclusion d’un accord. Ainsi, d’après l’un des responsables juridiques au Crédit Agricole, 90% des dossiers d’impayé trouvent une solution amiable. En effet, au cours de ces deux étapes, les banques ne se considèrent pas encore au stade du litige, et négocient pour éviter d’en arriver à une situation de désaccord essentiellement juridique. L’approche commerciale de la solution du différend est ainsi privilégiée.

206. On comprend davantage au vu de cette statistique pourquoi les banques privilégient la négociation en matière de gestion des impayés, plutôt que les recours contentieux. Elles ont bien intégré l’adage selon lequel « mieux vaut un mauvais arrangement qu’un bon procès. ». Cet adage se vérifie davantage lorsque les créances portent sur de petits montants. La comparaison entre la durée, le coût d’un procès et le montant de la dette conduit à choisir la négociation, en particulier dans le cas où le client est de bonne foi. Les échéances du prêt font donc l’objet d’un nouveau terme destiné à permettre au client d’obtenir un délai supplémentaire lui permettant d’avoir de meilleures chances de régler sa dette. La négociation porte en effet rarement sur le montant de la dette. Les banques ont davantage de raisons de recourir à la négociation dans la mesure où le client peut solliciter d’être placé sous un régime de protection, notamment dans le cadre du traitement du surendettement ou des procédures collectives. Il est donc dans l’intérêt des banques d’essayer d’éviter d’en arriver à ces situations. En outre, il est possible que les clients défaillants s’adressent aux associations de consommateurs qui les conseillent dans la gestion de leurs impayés. C’est ainsi qu’il peut leur être proposé de saisir le tribunal afin d’obtenir une ordonnance prévoyant une suspension des mensualités du prêt. La négociation peut donc permettre d’éviter une démarche du client en vue d’obtenir du juge des délais de grâce (art. L. 313-12 C. consom340.).

340 Conformément à cette disposition, « l'exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de li-cenciement, suspendue par ordonnance du juge d'instance dans les conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil. L'ordonnance peut décider que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt. En outre, le juge peut déterminer dans son ordonnance les modalités de paiement des sommes qui

207. Comme on le voit, les banques ont modifié la gestion du risque client, en privilégiant la négociation à un règlement judiciaire des litiges liés à l’impayé bancaire. Il est possible de l’illustrer par des exemples tirés des pratiques en cours au sein de quelques banques, qui confirment l’orientation de ces établissements vers des solutions évitant le recours aux juridictions.

208. Pour la banque CIC, une fois l’impayé détecté, le chargé de clientèle dispose d’un délai maximum de 45 jours consécutifs afin de parvenir à obtenir du client une régularisation de la situation. A l’issue de ce délai, si aucune réponse adéquate n’a été apportée en agence, le dossier est alors automatiquement transmis au service de recouvrement amiable. Cette automaticité n’est valable au sein du CIC que pour les particuliers. En effet, lorsqu’une difficulté de paiement est le fait d’un client professionnel, le transfert du dossier de l’agence vers le service de règlement amiable est laissé à l’appréciation du chargé de clientèle. Dès que le dossier est transmis au service de règlement amiable, le client défaillant change d’interlocuteur, le chargé de clientèle n’intervenant plus dans la résolution du différend. Ce changement d’interlocuteur peut provoquer un effet psychologique chez le client, qui se traduit par une meilleure prise de conscience de sa défaillance dans le remboursement du crédit. Cette prise de conscience peut l’inciter à trouver les solutions lui permettant de s’acquitter de sa dette.

209. Les chargés de clientèle en agence sont les premiers interlocuteurs des clients, et entretiennent avec eux une relation de proximité, afin de gérer au mieux les difficultés que peuvent rencontrer ces derniers. Le contact est en général un contact permanent avec les clients relevant de leur portefeuille, ce qui leur permet d’établir une relation de confiance, propice à la résolution amiable d’éventuels différends.

210. La procédure ci-dessus décrite est similaire à celle pratiquée dans la plupart des banques. Ainsi, la procédure en cours à la Société Générale prévoit une attente de 6 mois (6

seront exigibles au terme du délai de suspension, sans que le dernier versement puisse excéder de plus de deux ans le terme initialement prévu pour le remboursement du prêt ; il peut cependant surseoir à statuer sur ces mo-dalités jusqu'au terme du délai de suspension. ».

échéances impayées) avant la mise en demeure du client défaillant. Dans cet espace temporel, la négociation est de mise dès lors que le client est de bonne foi.

211. Pour le Crédit Agricole, la situation conflictuelle est constatée dès la troisième échéance de retard. La gestion de l’incident de paiement se fait d’abord en agence au jour le jour. Ainsi, en cas de dépassement de découvert ou de chèque impayé, le chargé de clientèle en agence appelle le client afin d’analyser avec lui la situation en vue de régulariser l’incident. On est à ce stade dans le cadre d’une relation commerciale.

Si la négociation se solde par un échec, et suivant certains critères (nombre de jours d’anomalie…), le dossier est transféré au siège de la banque. Le client est mis en demeure et y est convoqué afin d’essayer de trouver un accord avec le service interne de recouvrement amiable. Les parties négocient en règle générale sur un nouvel échéancier de paiement. La négociation porte rarement sur le montant du crédit. En cas d’abandon d’une partie de la créance ou de réduction de la durée de remboursement, la caution est associée à la négociation et signe l’accord. Si aucune solution ne ressort des discussions, le dossier est transmis au service contentieux. Cette procédure est identique pour les entreprises et les particuliers.

En principe, le Crédit Agricole traite tous les recouvrements en interne ; mais pour les petites créances sans garantie, elle recourt aux sociétés externes de recouvrement amiable par la technique du mandat. Il en est de même pour la banque HSBC. Pour cette dernière banque qui se veut de moyen et haut de gamme, le contentieux constitue également le stade ultime, la négociation étant privilégiée.

212. On est donc en présence d’un espace de négociation permanente entre les parties aussi bien en agence qu’au siège des banques, notamment dans le cadre des services de recouvrement amiable. Ces derniers se sont largement développés au sein des banques au cours de ces 20 dernières années et comportent des personnels spécialisés en cette matière. Dans le même temps, on a connu un essor important des sociétés externes de recouvrement amiable. Ces sociétés agissent soit en tant que mandataires des banques, soit en tant que cessionnaires des créances, et privilégient le recouvrement négocié de l’impayé. On peut s’interroger sur le point de savoir comment le droit appréhende les accords issus des négociations.

Section 2 : LA NATURE JURIDIQUE DES ACCORDS OBTENUS

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