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LES EFFETS DE L’ACCORD

Dans le document Le traitement du contentieux bancaire (Page 184-187)

Section 2 : LA NEGOCIATION EN MATIERE DE PROCEDURES COLLECTIVES

B- LES EFFETS DE L’ACCORD

277. Les effets attachés à l’accord de conciliation le rapprochent d’un contrat sui

generis, à l’image du plan conventionnel de redressement. L’accord de conciliation suspend les effets de l’accord initial, et régit désormais les rapports des parties, permettant ainsi à l’entreprise d’avoir de meilleures chances de payer ses dettes. Le législateur prévoit par ailleurs que « pendant la durée de son exécution, l’accord constaté ou homologué interrompt ou interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle tant sur les meubles que sur les immeubles du débiteur dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet…»450. C’est donc dire que cet accord produira des effets juridiques importants, car il fait obstacle aux actions et poursuites contre le débiteur, par les créanciers ayant conclu l’accord. Cette disposition protège ainsi l’entreprise bénéficiant de la conciliation, ménageant 448 F. Pérochon, R. Bonhomme, Entreprises en difficultés, instruments de crédit et de paiement, 7e éd. LGDJ 2006, p. 63, n° 88.

449 Com. 5 mai 2004, D. 2004. 1594, note Lienhard ; RTD civ. 2004. 534, obs. Crocq ; RTD com. 2004. 584, obs. Legeais, et 590, obs. Macoring-Venier ; Defrénois. 2004, p. 1663, obs. Gibrila ; Banque et Droit août 2004, p. 51, obs. Rontchevsky ; RDB août 2004, p. 248, obs. Legeais.

ainsi à cette dernière, de meilleures chances de remplir les obligations découlant du contrat réécrit par les parties. En outre, l’accord de conciliation « interrompt, pour la même durée, les délais impartis aux créanciers parties à l’accord à peine de déchéance ou de résolution des droits afférents aux créances mentionnées par l’accord. »451.

278. Par ailleurs, « les personnes coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir des dispositions de l’accord constaté ou homologué... »452. Ce texte consacre une différence essentielle entre le droit des procédures collectives et celui du surendettement. En cette seconde matière, le bénéfice des mesures contenues dans le plan conventionnel de redressement ne profite en principe pas à la caution comme nous l’avons relevé plus haut (à moins qu’elle soit associée aux discussions et signe le plan avec les créanciers). Il existe donc deux droits différents pour les cautions et les coobligés, selon que la sûreté porte sur une dette professionnelle453 ou non. Dans le 1er cas, ils ont l’avantage de pouvoir se prévaloir des mesures contenues dans l’accord constaté ou homologué, alors qu’il en va autrement dans le second cas.

279. Les raisons de ce traitement différencié peuvent tenir à la volonté du législateur de promouvoir le cautionnement, dans le cadre des entreprises ; ce qui pourrait davantage inciter les cautions à apporter leur soutien aux entreprises ayant un besoin d’emprunter. La finalité serait donc de faciliter le crédit aux entreprises, ce qui ne se justifie pas nécessairement en matière de droit de la consommation. L’autre but visé est certainement d’inciter le chef d’entreprise, qui se serait porté caution des dettes de sa société, à solliciter rapidement l’ouverture d’une procédure de conciliation, sachant qu’il en tirera profit. La jurisprudence tendrait par ailleurs à décourager un cautionnement excessif qui conduirait de nombreux particuliers au surendettement.

280. L’accord homologué entraîne également la levée de plein droit de toute interdiction d’émettre des chèques conformément à l’art. L.131-73 CMF, mise en œuvre à l’occasion du rejet d’un chèque émis avant l’ouverture de la procédure de conciliation. C’est dire la force de l’accord, qui, à lui seul et sans aucune autre procédure particulière, permet de lever une interdiction prévue par la loi. Un contrat homologué met fin de plein droit aux effets 451 Art. préc.

452 Art. L. 611-10-2 C. com.

453 A titre subsidiaire, on relèvera que l’art. L. 313-10-1 C. consom. interdit l’utilisation des garanties autonomes dans le cadre des crédits aux particuliers régis par ce code.

d’une loi. C’est certainement une disposition pouvant alimenter la matière des sources du droit.

Mais si le débiteur ayant bénéficié d’une procédure de conciliation ne respecte pas les obligations contenues dans le plan, il encourt des sanctions.

Lorsque l’accord de conciliation a été constaté par le président du tribunal, il acquiert force exécutoire. L’inexécution par le débiteur devrait entraîner des poursuites par les créanciers signataires de l’accord, dans le cadre des procédures civiles d’exécution. Le problème se pose de savoir si le débiteur sera tenu du montant de la dette tel que prévu par la convention initiale, ou s’il sera tenu du montant négocié dans le cadre de la conciliation. On doit considérer que le titre exécutoire ne concerne que les créances figurant dans l’accord amiable constaté. Pour le surplus, les créanciers auront recours à l’accord initial pour obtenir soit un nouveau titre exécutoire, soit faire jouer les clauses prévues en cas d’inexécution. Il est aussi possible à l’une des parties à l’accord, de saisir le président du tribunal, afin d’en obtenir la résolution454. Mais en pratique, la défaillance du débiteur sera très souvent synonyme de dégradation de sa situation économique, ce qui conduira à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement, voire de liquidation judiciaire. L’art. L. 611-12 C. com. prévoit qu’en pareil cas, l’accord constaté ou homologué prend fin de plein droit. Les créanciers recouvrent l’intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues. On rentrerait ainsi dans le processus classique de déclaration des créances prévu par les procédures collectives.

281. S’il s’agit d’un accord de conciliation homologué, l’art. L. 611-10-3 C. com. prévoit également la résolution de l’accord par le président du tribunal en cas d’inexécution. D’après cette disposition, le débiteur encourt également une déchéance des délais de paiement à lui accordés lors de la procédure de conciliation455. Par conséquent, les créanciers pourront dès lors poursuivre le débiteur sur la base de la convention initiale. En effet, l’accord de conciliation est résolu, ce qui provoque son anéantissement rétroactif. Ce sera très souvent en prélude à des plans intervenant après la conciliation, notamment la sauvegarde ou le redressement judiciaire. L’inexécution de ces deux derniers plans pouvant conduire à leur résolution conformément à l’art. L. 626-27 C. com. En pareil cas également, l’accord initial reprendrait sa force.

454 Art. L. 611-10-3 al. 1 C. com.

282. Les accords obtenus dans le cadre du mandat ad hoc ou de la conciliation visent donc à réaménager les contrats, en vue de permettre au débiteur d’exécuter ses obligations. Ils n’ont pas pour but de régler des litiges, dès lors que les parties se trouvent dans une phase précontentieuse, donc antérieure au litige, d’où le rejet de la qualification de transaction. Les techniques du droit des contrats, qui permettent une adaptation de la volonté des parties à des contextes nouveaux, sont ainsi mises au service de l’économie. Par ailleurs, les exigences de forme requises dans les contrats de consommation ne sont pas pertinentes en ce qui concerne les relations contractuelles entre banques et professionnels. Il va sans dire que l’analyse de la forme du plan de conciliation ne présente pas à ce stade un intérêt particulier.

283. Mais il arrive que le contentieux prenne naissance, malgré toutes les précautions sus évoquées. En effet, les procédures collectives ou celles de surendettement n’absorbent pas toutes les défaillances des débiteurs envers leurs banques. Les mécanismes de règlement doivent donc être mobilisés.

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