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LE PRELEVEMENT AUTOMATIQUE

Dans le document Le traitement du contentieux bancaire (Page 132-136)

§ 2- LES TECHNIQUES PARTICULIERES DE PAIEMENT LIEES AU COMPTE

B- LE PRELEVEMENT AUTOMATIQUE

191. Les contrats de crédit entre banques et clients prévoient en règle générale que le remboursement se fera par le biais de prélèvements mensuels. Initiée par EDF333 en 1956, Cette modalité d’exécution automatique de l’obligation du débiteur présente l’avantage d’éviter aux banques de faire face à la volonté des clients dans le cadre du paiement dû par ces derniers. Il en serait ainsi par exemple s’il revenait aux clients d’effectuer un virement mensuel à la banque, ou s’ils devaient se présenter tous les mois au guichet de la banque avec des espèces ou des chèques correspondant au montant des mensualités.

192. Les conventions de prêt fixent en règle générale les modalités de remboursement des dettes dues par les clients. Un tableau d’amortissement comportant le montant des mensualités à débiter du compte du client est à cet effet annexé au contrat334. Les prélèvements s’effectuent ainsi automatiquement à la date fixée au contrat. Cette date est habituellement proche de celle à laquelle le compte est approvisionné par les revenus périodiques du client, ce qui multiplie les chances de paiement. En effet, ce système qui s’accommode bien à l’extension des paiements par virement des salaires, permet aux banques de devancer les éventuels créanciers postérieurs du client devant être payés au cours du mois. C’est donc le contrat de crédit qui prévoit que le paiement s’effectuera par prélèvements bancaires. On est ainsi dans le cadre d’une exécution automatique voulue par les parties au contrat. Elle se distingue de la compensation qui se produit automatiquement, en dehors de tout accord de volonté, dès qu’elle est invoquée par l’une des parties. L’avantage est d’éviter 333 Cf. F. Perochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficultés, instruments de crédit et de paiement, 7e éd. LGDJ 2006, n° 864.

334 Il s’agit d’une obligation légale découlant du code de la consommation. L’art. L. 311-11 C. consom. dispose : « pour les opérations à durée déterminée, l’offre préalable précise en outre pour chaque échéance, le coût de l’assurance et les perceptions forfaitaires éventuellement demandées ainsi que l’échelonnement des remboursements ou, en cas d’impossibilité, le moyen de les déterminer. » D’après l’art. L. 312-8 C. consom., l’offre de crédit « 2° bis comprend un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance la répartition du remboursement entre le capital et les intérêts.(…) ».

d’être confronté à une éventuelle mauvaise foi ou à la négligence du débiteur. Dès lors que la situation du compte le permet, la banque prélève son dû à l’échéance prévue, sans avoir à solliciter l’accord du client.

193. Il est également possible aux parties de prévoir une suspension momentanée des prélèvements dans certaines conditions prévues par le contrat. Ce type de clause contribue à éviter le contentieux, dans la mesure où elle dispense les banques de recourir aux juridictions lorsque le client ne peut dans certains cas rembourser sa dette, ou encore s’il désire pour diverses raisons obtenir une pause dans les prélèvements.

L’effet de ce mécanisme est donc de permettre un paiement automatique de la dette due par le débiteur. Les mensualités à prélever sont en général fixées au contrat, et ne peuvent donc logiquement faire l’objet de contestations. Si l’on excepte les cas possibles de prélèvement indu, les litiges surviennent généralement lorsque le prélèvement ne peut être effectué du fait de l’absence de provision ou d’une provision insuffisante, ce qui correspond à un impayé.

194. L’intérêt procédural du prélèvement automatique est de permettre une inversion des positions de demandeur et de défendeur au cours d’un éventuel procès. Ainsi, en cas de différend portant sur le prélèvement, par exemple dans l’hypothèse où le client soutient que son compte a été indûment prélevé, il lui appartiendra de prendre l’initiative de saisir le juge, ou alors d’opter pour une négociation avec la banque. Le client étant demandeur, la banque bénéficiera ainsi d’une position favorable dans le cadre de la négociation ou de celle confortable de défendeur si le client choisit de saisir le juge. Cette technique présente donc un intérêt à la fois au plan substantiel et au plan procédural. En effet, s’agissant de l’aspect substantiel, l’avantage pour la banque est de pouvoir recouvrer sa créance sans intervention du débiteur. Au plan procédural, elle bénéficie d’une position favorable dans une négociation ou au cours d’un éventuel procès. Le client aura logiquement tendance à privilégier la négociation, au vu des inconvénients que peut présenter un procès pour le demandeur, par exemple en matière de charge de la preuve. Le fond du droit a donc une incidence sur l’attitude des banques, dans le cadre du prélèvement automatique. Il s’agit d’une technique substantielle conférant aux banques un avantage procédural certain. Le recours par les banques à cette technique contribue ainsi à éviter le contentieux.

195. En somme, l’ensemble des règles protégeant les emprunteurs, les cautions et les investisseurs peut certes avoir une incidence baissière sur le contentieux, comme nous l’avons montré plus haut. Mais ces règles peuvent aussi avoir l’effet inverse, dans la mesure où elles créent de nouvelles sources de discussions. L’effet de réduction du contentieux est sensible seulement si la norme vient se substituer à une règle antérieure qui était génératrice de contentieux. C’est par exemple le cas du formalisme légal du cautionnement issu de la loi de 2003 qui se substitue au formalisme jurisprudentiel antérieur. En revanche, si la norme vient édicter de nouvelles contraintes là où il n’y en avait pas, elle peut créer du contentieux si elle est imprécise, susceptible d’interprétations divergentes335. C’est par exemple le cas de l’obligation d’information de la caution. D’où la nécessité pour le législateur d’être suffisamment précis et concis en matière de production de normes, afin d’éviter que les règles de droit soient susceptibles d’interprétations variées. D’où également la nécessité de limiter les divergences de jurisprudence. La sécurité juridique des parties se doublerait ainsi d’un nécessaire désengorgement des juridictions, même si on peut logiquement penser que dans bien des cas, le contentieux évité par la mise en place des règles protectrices est nettement supérieur à celui que peuvent générer ces règles. L’essentiel pour le législateur et la jurisprudence doit être de débarrasser les juridictions de contentieux de masse évitables. On peut ainsi se féliciter de l’intervention du législateur en 2003 en matière de formalisme du cautionnement, ou de celle d’une chambre mixte en 2005 pour mettre fin à la divergence de jurisprudence au sein de la Cour de cassation sur le devoir de mise en garde. On peut également saluer ici les efforts de la Cour de cassation dans le sens de la construction d’un régime raisonnable de la responsabilité du banquier envers les créanciers du crédité admis à la procédure collective, avant l’intervention législative de 2005. Il est par ailleurs important de louer les efforts du législateur et de la jurisprudence, qui ont su créer des règles adaptées à l’époque contemporaine, lesquelles permettent de prévenir efficacement le contentieux des vices du consentement.

335 En ce sens, on peut également citer l’art. L. 133-25 CMF issu de l’ordonnance du 15 juillet 2009, laquelle transpose en droit interne la directive 2007/64/CE du parlement et du conseil du 13 novembre 2007. Cette directive concerne les services de paiement dans le marché intérieur. Cette disposition, qui établit une nouvelle hypothèse de responsabilité du prestataire de service de paiement, est susceptible de générer du contentieux, du fait des notions qu’elle emploie : « Le payeur a droit au remboursement par son prestataire de services de paiement, d’une opération autorisée, ordonnée par le bénéficiaire ou par le payeur qui donne un ordre de paiement par l’intermédiaire du bénéficiaire, si l’autorisation donnée n’indiquait pas le montant exact de l’opération de paiement et si le montant de l’opération dépassait le montant auquel le payeur pouvait raisonnablement s’attendre en tenant compte du profil de ses dépenses passées, des conditions prévues par son contrat-cadre et des circonstances propres à l’opération. » Les notions utilisées par ce texte sont susceptibles d’interprétations divergentes, et peuvent ainsi générer un abondant contentieux. L’expression « pouvait raisonnablement s’attendre » peut en effet avoir un contenu différent, selon que l’on est payeur, ou prestataire de services de paiement. Il va sans dire que dans bien des hypothèses, il reviendra au juge de trancher au cas par cas.

Les différentes pratiques bancaires quant à elles contribuent à concrétiser l’objectif de prévention de l’endettement, et indirectement du contentieux.

196. Mais dans le contexte d’une législation consumériste sans cesse évolutive et d’une action jurisprudentielle toujours plus exigeante vis-à-vis des banques, on peut s’interroger sur le point de savoir quelle est la réaction de ces dernières. L’observation montre qu’elles essaient d’éviter le juge, pour s’orienter vers la négociation précontentieuse. Il ressort en effet de tous les entretiens effectués auprès des établissements de crédit que les incidents de paiement des débiteurs ne conduisent pas ces organismes à entreprendre immédiatement des recours devant les juridictions. La négociation constitue ainsi une étape très importante dans le traitement des défaillances de la clientèle.

Titre 2 : LA NEGOCIATION PRECONTENTIEUSE AU MOMENT DE LA

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