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CHAPITRE 2 : Education et santé : vers une modélisation

LES C APACITÉS LES SAVOIR FAIRE

II. Un état des lieux de la prévention des addictions en milieu scolaire

2. Les principales études disponibles

Du fait de la multiplicité des interactions à l’œuvre, il n’est pas possible de se limiter à une étude pour tirer des conclusions quant à la pertinence de telle ou telle démarche éducative. Des méta-analyses ont ainsi été conduites (tableau 6). Pour les auteurs de ce type de travaux, c’est sur la capacité des programmes à modifier des comportements que doit ultimement porter l’évaluation. Cette perspective est très réductrice aussi, d’autres éléments sont pris en compte. L’INSERM (2001) propose cinq catégories de mesure :

- l’acquisition de connaissances ;

- la variation d’attitudes (avec gradation des réponses) ;

- la modification déclarée de comportement (avec ou sans contrôle biologique) ;

- l’acquisition d’aptitudes à réagir face à une situation pour les participants ;

- la modification d’un certain nombre de caractéristiques personnelles,comme l’intention d’adopter un comportement, le sentiment d’efficacité à réagir face à une situation, l’estime de soi, quantifiables à partir d’échelles psychométriques validées.

D’une manière générale, la classification des programmes est variable et difficile avec des entrées plus ou moins englobantes. Tobler (1997) propose une classification large des programmes. Ils peuvent être « interactifs » (prise en compte des influences sociales et acquisition de compétences génériques) ou « non-interactifs » (apport de connaissances et travail sur les attitudes).

Battjes (1985) classe les approches éducatives utilisées dans les programmes de prévention de l’usage de produits psychoactifs selon quatre types d’approches :

- Approche rationnelle : fournir de l’information sur les effets et les conséquences (cours, jeux de questions réponses, montrer des substances) ;

- Approche développementale : accroître l’estime de soi, augmenter l’autonomie, apprendre à prendre des décisions, relations avec les autres (cours, discussion, résolution de problèmes, jeu de rôle) ;

- Approche sur les normes sociales : accroître l’autonomie, accroître l’estime de soi, réduire l’ennui (développement d’activités alternatives, programmes sociaux collectifs, tutorat, développement d’activités de loisirs) ;

- Renforcement social : détecter les pressions sociales à consommer, apprendre à y réagir, reconnaître les effets physiques et sociaux immédiats.

Hansen (1992) caractérise les programmes en fonction des thèmes retenus : - Information : apport d’information biologique, légale, historique ; - Décision : enseignement de stratégies pour identifier les problèmes, générer des solutions possibles, choisir entre différentes alternatives ; - Engagement : demande d’engagement à ne pas consommer pour les participants ;

- Clarification des valeurs : mise en regard des valeurs personnelles et des comportements qui devraient en découler ;

- Fixation d’objectifs : apprentissage de la fixation d’auto-objectifs et du suivi de leur réalisation ;

- Gestion du stress : apprentissage de la gestion du stress par l’action ou par la relaxation ;

- Estime de soi : développement d’images positives sur soi, gestion des idées négatives ;

- Résistance : repérage des pressions sociales et développement de l’affirmation de soi ;

- Compétences générales : apprentissage de compétences sociales comme la communication et la gestion des conflits interpersonnels ; - Normes : correction des normes imaginaires en informant sur les prévalences réelles des consommations de psychotropes ;

- Assistance : écoute et conseil ;

- Alternatives : développement d’activités autres.

Thomas (2002) montre que la moitié des études concernant la prévention du tabagisme en milieu scolaire et utilisant l'approche dite des influences sociales, avait un effet à court terme. Les interventions basées seulement sur de

l'information sont en revanche inefficaces. La meilleure étude est celle qui s’inscrit sur le plus long terme. Cependant, le Hutchinson Project a montré que 65 leçons réparties sur 8 années de scolarité n'avaient pas d'effet. Les résultats sont donc plutôt négatifs (Peterson et al., 2000).

Dans leur ensemble, les résultats des revues de littérature publiés dans la Cochrane Library52 sur l’efficacité d’intervention en prévention du tabagisme en milieu scolaire mettent en avant les préconisations suivantes :

- Ne pas développer de nouveaux programmes ; - Réorienter les ressources ;

- Faire arrêter les adultes ;

- Campagnes sur les manipulations des fabricants de cigarettes ; - Augmenter le prix du tabac.

Les conclusions des principales méta-analyses sont résumées dans le tableau 6. Tableau 6 : Tableau récapitulatif des principales méta analyses internationales sur les programmes de prévention des conduites addictives

Auteur(s) Année Nombre de programmes

considérés Principales conclusions

1986 143 programmes de prévention de l’usage des substances psychoactives en milieu scolaire ou

communautaire

1992 Analyse d’un sous-groupe de 91 programmes

Tobler

1997 120 programmes (de 1978 à 1990)

Catégorisation des programmes en « interactifs » (prise en compte des influences sociales et acquisition de compétences génériques) ou en « non- interactifs » (apport de connaissances et travail sur les attitudes)

Meilleure efficacité des programmes interactifs centrés sur le tabac Bangers-

Drowns 1988

33 programmes en milieu scolaire aux Etats-Unis ou au Canada entre 1968 et 1986

Ont permis les acquisitions de connaissances et les changements d’attitudes

Ont limités les changements de comportements

Lanvin et al. 1992 25 études sélectionnées Les établissements scolaires sont des lieux privilégiés de promotion de la santé Hansen 1992 45 publications sur des

programmes d’intervention ¾ des programmes ont eu un effet positif sur les comportements (tabac, alcool, cannabis)

Plus d’efficacité pour les programmes fondés sur les influences sociales Bruvold 1988 84 programmes en milieu

scolaire sur la prévention du tabagisme entre 1970 et 1980

Les approches traditionnelles sont plus efficaces en terme d’apports de connaissances que de modification de comportements contrairement aux approches prenant en compte les déterminants psychosociaux

52 Des études ont également été réalisées sur l’effet des actions communautaires et des médias sur le

Bruvold 1993 94 programmes en milieu scolaire sur la prévention du tabagisme entre 1980 et 1990

En ce qui concerne les croyances, il n’y a aucune différence identifiée entre des interventions plus traditionnelles (basées principalement sur l’apport d’information factuelle sur les drogues, leurs effets et leurs conséquences) et des interventions basées aussi sur d’autres principes tels que le renforcement social

(incluant l’acquisition de capacités pour reconnaître et résister

aux pressions sociales). Ces dernières obtiennent par contre

davantage d’impact sur le comportement tabagique.

Thomas 2002 23 programmes de prévention du tabagisme en milieu scolaire (évaluation RCT) entre 1984 et 1999

Résultats sont plutôt négatifs pour un programme composé de 65 leçons réparties sur 8 années de scolarité n'avaient pas d'effet.

Leviers identifiés :

Ne pas développer de nouveaux programmes, réorienter les ressources, faire arrêter les adultes, campagnes sur les manipulations des fabricants de cigarettes, augmenter le prix du tabac. Mukoma and

Flisher

2004 9 études considérées en Afrique du Sud et de l’Est

Les établissements scolaires sont des lieux privilégiés de promotion de la santé Légende : Les conclusions principalement avancées confortent l’idée de l’importance de prendre appui sur le milieu scolaire en matière de prévention. Les approches visant à développer les compétences psychosociales sont identifiées comme davantage efficaces.

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