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Analyse et résultats des entretiens avec les professeurs : pratiques et représentations

5.1. La biographie langagière des enseignants enquêtés

5.1.3. Pratiques occasionnelles

Après avoir présenté les pratiques langagières habituelles, nous allons voir plus précisément quelles sont les pratiques occasionnelles. L’examen des entretiens montre que

seul P6, de nationalité française, se trouve occasionnellement en situation de parler chinois dans la mesure où il déclare n’avoir que « quelques rudiments » de cette langue.

De même, d’après les entretiens il n’y a pas d’usage occasionnel du chinois sur le lieu du travail en dehors de la salle de classe puisque nous avons vu qu’il fait partie avec le français, le taiwanais et l’anglais des langues de communication entre les enseignants.

5.1.3.1. L’usage du taiwanais avec la famille et les amis

Dans les entretiens de P2 et de P4, nous pouvons remarquer que ces deux professeurs déclarent avoir un accent quand elles parlent en taiwanais. P2 va jusqu’à

qualifier son accent de « ridicule » afin de bien insister sur le fait que cette langue fait partie de son répertoire linguistique, qu’elle l’a acquise après sa « langue maternelle » qui est le

chinois. De même, P4 dit (E4, prise de notes, P4, L. 37-39):

« 37 E : Parlez-vous d’autres langues comme le taiwanais par exemple?

38 P4 : Oui, je le parle mais j’ai un accent mandarin. Sinon, à cause de mon père je

39 comprends le hakka mais je ne le parle pas. »

Capable de parler taiwanais, P4 ne signale pas si elle le parle habituellement ou non, en revanche elle précise avoir un accent. Cela suggère qu’elle ne le parle pas souvent et que c’est une langue qu’elle ne pratiquait qu’occasionnellement dans sa jeunesse.

Nous avons également un tout autre cas méritant notre attention, il s’agit de l’entretien n°10 qui nous informe que P10 parle chinois de façon habituelle aussi bien en famille qu’au travail mais qu’il n’emploie pas régulièrement le taiwanais. En effet, malgré le fait qu’il est originaire de Tainan, et que du côté maternel, on parle le taiwanais, ce professeur explique avoir grandi dans un contexte favorisant l’usage exclusif du chinois

standard. Son père venait de Chine continentale et sa mère bien que taiwanaise, ne lui parlait qu’en chinois standard pour une raison qu’il ignore (E10, P10, L. 49-58 & 60-67) :

« 49 P10: je parle aussi ce qu’on dit taiwanais taiwanhua, mais je pense que je le parle 50 assez mal

51 E : pour quelles raisons ?

52 P10 :parce que ce n’est pas une langue que je parle très souvent. En effet, la

53 composition de ma famille est intéressante : mon père vient du continent, il 54 fait partie des gens que l’on appelle waishengrren que je vous traduis par « des 55 demis Chinois » tandis que ma mère est originaire de Taiwan. Bien sûr tous les 56 membres de la famille de ma mère parlent taiwanais donc je le comprends mais

57 je ne le parlais pas. De plus, à l’école je parlais tout le temps chinois car je suis 58 allé dans une école où le taiwanais était interdit

(…)

60 Donc, à l’école primaire le taiwanais n’était pas présent,

61 mais bien sûr, une fois retourné à la maison, j’avais la possibilité de parler un peu 62 le taiwanais même si, en réalité, ma mère me parlait pratiquement toujours en 63 chinois standard, j’ignore pour quelle raison. J’ai commencé à parler et utiliser le 64 taiwanais au collège avec mes camarades qui eux le parlaient couramment, 65 fréquemment, pratiquement tout le temps(…) »

Ainsi, on apprend que c’est assez tardivement que P10 a appris à parler taiwanais au contact de ses camarades de classe alors qu’il en avait déjà une compréhension orale

puisque les membres de sa famille maternelle le parlaient.

Il n’y a pas que chez P10 que le taiwanais n’est pas habituellemnt parlé avec les enfants bien que l’environnement familial y semble à la base plutôt favorable puisqu’il y a des locuteurs de cette langue parmi les parents et grands-parents. Par exemple, dans l’entretien

n°12, P12 déclare parler habituellement chinois, taiwanais et français. Cependant, il apparaît nettement que le taiwanais semble privilégié par P12 lorsqu’elle s’adresse aux personnes

âgées de sa famille. En revanche, avec ses enfants le taiwanais va être employé comme un exercice scolaire, ce qui indique qu’elle ne le parle pas de façon habituelle avec ses

enfants (E12 prise de notes, P12, L.19-22) :

« P12 :(…) Je parle chinois, taiwanais et français en famille et au travail. Le taiwanais, je le

parle avec les grands-mères de mes enfants car elles ont 82 ans et ne parlent pas chinois. Sinon avec mes enfants, j’emploie le taiwanais plutôt pour les faire pratiquer car maintenant les enfants apprennent à l’école le taiwanais dès l’âge de sept ans. (…)

»

5.1.3.2. L’usage du taiwanais sur le lieu de travail en dehors de la salle de

classe

Il n’est possible de constater que dans l’entretien de P12 l’emploi occasionnel du

taiwanais dans la salle des professeurs. En effet, dans certaines universités comme Wenhua personne ne l’utilise (Cf. entretiens n°4 et n°7), mais au contraire, cette langue est déclarée

comme étant habituellement employée à Wenzao, à Fujen ou à Chenggong dans les salles des professeurs de ces établissements. P12 qui travaille à Chenggong dit (E12 prise de notes, P12, L.25-26) :

«

P12: Au travail, je parle chinois et français habituellement. Parfois, on parle l’anglais et le

taiwanais dans la salle des professeurs ou pendant certaines réunions

. »

5.1.3.3. L’usage du français sur le lieu de travail en dehors de la salle de

classe

Nous avons déjà brièvement abordé ce point dans le §2.1.2.8. à propos de l’anglais dans le deuxième entretien car P2 déclare qu’au travail, c’est le français qu’elle parle occasionnellement en raison du fait qu’elle doit accomplir diverses tâches administratives, et parce qu’elle fait désormais partie du département d’anglais appliqué (E2, P2, L.154-165) :

« 154P2 : oui ! mais comme j’ai aussi une position administrative euh je m’occupe de la 155 coopération internationale ! alors je parle pour la plupart du temps en anglais 156 E : en anglais d’accord ! et sinon c’est en chinois ?

157 P2 : oui oui !...en chinois oui ! 158 E : et en français ? occasionnellement ?

159 P2 :euh………..occasionnellement..quand je parle avec des professeurs qui 160 parlent français.. parce que dans le département .. -d’anglais

161 -d’anglais appliqué. il y a des professeurs de_ différentes nationalités 162 E : d’accord

163 P2 : alors ces professeurs parlent plusieurs langues ! donc quand ils savent que je parle 164 E : mm ! d’accord !

165 P2 : aussi français ! il fait- ils font exprès de me parler en français ! pour me faire plaisir ! »

Cet extrait indique malgré tout que certains de ses collègues étrangers lui parlent en français, cependant, pour P2, il s’agit de situations occasionnelles. En effet, P2 enseignait auparavant à Wenzao au sein même du département de français qu’elle dirigeait également. Ainsi, en comparaison, elle avait davantage d’occasions de parler français et le côtoyait plus fréquemment dans la salle des professeurs. L’usage du français est donc bien moins fréquent qu’auparavant.

5.1.3.4. L’usage de l’anglais sur le lieu de travail en dehors de la salle de classe Dans l’entretien 1, j’ai précisé que les langues pratiquées habituellement par P1 en

famille sont le taiwanais ainsi que le chinois, et au travail le chinois, français et taiwanais. L’anglais ressort comme la langue que P1 ne pratique qu’occasionnellement (E1, P1, L.96-

« 95 E : Et quelles sont les langues que vous parlez occasionnellement ?

96 P1 : Il n’y a pas vraiment de langues que je parle occasionnellement… L’anglais

97 lorsqu’il y a des invités de l’école... »

En revanche, dans le deuxième entretien, P2 déclare qu’au travail, c’est le français qu’elle parle occasionnellement en raison du fait qu’elle doit accomplir diverses tâches administratives, et parce qu’elle fait partie du département d’anglais appliqué (op. cit ; E2, P2,

L.165-173).

Dans l’entretien n°3, P3 explique qu’elle parle occasionnellement l’anglais tout comme sa

collègue P1 (E3, P3, L. 62) :

«

je crois que c’est plutôt l’anglais. L’anglais de temps en temps

»

Concernant P8, j’ai constaté qu’il semblerait que l’anglais soit une langue qu’elle ne pratique qu’occasionnellement dans sa vie quotidienne et plutôt dans le cadre des réunions

de travail (E8, P8, L.13-15):

« 13 P8: Français et chinois. L’anglais, je le lis pour la recherche mais j’ai du mal avec cette 14 langue à l’oral. Dans les réunions avec les collègues nous utilisons l’anglais car c’est 15 la langue commune à tout le monde. »

De la même façon P10 avoue que l’anglais est parlé très occasionnellement lors des réunions de travail. Ceci est d’ailleurs confirmé par P11, qui à la ligne 26, indique effectivement que l’anglais est utilisé très ponctuellement dans cette situation (E11, P11,

L.26-29) :

« 26 P11 :Habituellement, nous parlons français, chinois et taiwanais. Bon, entre 27 nous, le taiwanais c’est pour que les Français ne nous comprennent 28 pas, sinon c’est plutôt le chinois. Nous parlons aussi l’anglais de 29 façon plus occasionnelle. »

Dans l’entretien n°12, l’anglais est également parlé occasionnellement alors que l’on pourrait s’attendre à ce qu’il soit utilisé plus souvent dans la mesure où P12 ne travaille pas

dans un département de français (E12, P12, L.23-26):

« 23 E : Et au travail, dans la salle des professeurs, quelles langues parlez-vous 24 habituellement et occasionnellement ?

25 P12 : Au travail, je parle chinois et français habituellement. Parfois, on parle l’anglais et 26 le taiwanais dans la salle des professeurs ou pendant certaines réunions. »

5.1.3.5. L’usage du hakka et du cantonais avec la famille

L’entretien n°4 montre que P4 s’exprime en chinois avec ses amis, sa famille mais aussi au travail avec les collègues de l’université. Capable de parler taiwanais, P4 ne signale pas si elle le parle habituellement ou non. Lorsque je lui demande si elle parle d’autres langues

on apprend que le hakka fait partie de son répertoire linguistique (E4 prise de notes, P4, L.37-39) :

« 37 E : Parlez-vous d’autres langues comme le taiwanais par exemple?

38 P4 : Oui, je le parle mais j’ai un accent mandarin. Sinon, à cause de mon père je 39 comprends le hakka mais je ne le parle pas. »

Nous remarquons que le hakka n’a pas été employé de manière habituelle dans sa

jeunesse puisque P4 a uniquement développé une capacité de compréhension orale. Il va de même pour P10 avec la langue taiwanaise et pour P3 avec la langue cantonaise.

En effet, l’entretien n°3 montre que P3 parle, de façon habituelle, chinois et taiwanais

dans sa vie quotidienne. Elle ne pratique pas le cantonais car son père est le seul à le manier à la maison (E3, P3, L.40-57) :

« 40 P3 : oui je parle plutôt chinois et taiwanais.

41 E : d’accord

42 P3 : ça veut dire avec des gens que je connais moins bien je parle toujours chinois

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