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2. Analyse des choix muséographiques

2.3. La présentation des collections de minéralogie dans les Galeries du

2.3.3. La présentation des collections de minéralogie à partir de 1809

À partir de 1809, le Château atteint son stade final avec la dernière grande campagne de travaux d’agrandissement menée à son terme par l’architecte Molinos. Celle-ci vise à étendre le bâtiment vers le Nord, en direction du Labyrinthe et vers cet ancien local de cours, qui

373

Idem., p. 203.

374

Idem., p. 205 : Le public semblait en effet se presser pour admirer ces collections de minéralogie et particulièrement ces belles pièces rangées dans « ces armoires éblouissantes par les reflets brillans et variés des pierres précieuses ».

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A.N. F17 3880, lettre du directeur du Muséum d’Histoire naturelle Antoine-Laurent de Jussieu aux citoyens Représentans composant le comité d’Instruction publique, datée du 28 Fructidor an III [14 septembre 1795].

servait également de lieu d’exposition de la célèbre collection de Tournefort au début du XVIIIe siècle. La liaison des deux constructions est ainsi établie et les deux sont reliées par la confection d’un portail à fronton sur le toit en terrasse de l’ancien local de cours qui ouvre sur le deuxième étage du Château376. Ce prolongement du Château permet ainsi la création de nouvelles salles dans les Galeries d’Histoire naturelle, plus précisément trois à chaque niveau. Les collections de minéralogie conservent toujours leur place au premier étage, dans la section Nord, tout en étant de nouveau très proches de celles de géologie.

Lucas nous offre de nouveau une description précieuse de ce qu’était la collection, en 1813 cette fois-ci, dans le second volume de son Tableau méthodique des espèces minérales, lorsque ces nouveaux aménagements ont été mis en place377. Les collections de minéralogie prennent place dans les deuxième, troisième et quatrième salle en entrant par le côté Nord. C’est donc une salle supplémentaire qui accueille les collections de minéralogie, permettant l’exposition d’un plus grand nombre d’échantillons. Le nombre des armoires en est ainsi augmenté, passant de soixante pour l’état précédent à désormais quatre-vingt dix-neuf378

. Ces armoires présentent en outre la même organisation décrite sept années plus tôt par Lucas. Dans l’organisation des différents objets, le classement fondé sur la classification de Haüy est toujours de mise, même s’il est intéressant de souligner qu’en partie inférieure des armoires, Lucas signale des morceaux organisés de manière différente. Ceux-ci ont en fait été placés à cet emplacement pour servir de complément à l’instruction, pour que les élèves appliquent les

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B.N.F., Est. Va 257 Fol. H37260.

377

Jules-André-Henri Lucas, Tableau méthodique des espèces minérales, Volume 2, 1813, p. IX-XIII.

378

Henri-Jean Schubnel, « Cristaux précieux », Revue de Gemmologie, n° hors-série, 1990, p. 3.

Entrée des galeries de Zoologie, 1885, fond Pierre Petit IC 590.

© Muséum national d'Histoire naturelle, Dist. RMN-Grand Palais. Image du MNHN, bibliothèque centrale

connaissances acquises lors des cours. Le Professeur Haüy aurait ainsi souhaité plus convenable que ces spécimens ne soient pas ordonnés suivant le classement général de façon à « accorder quelque chose à l’œil et à l’agrément »379. On retrouve là encore cette même propension à allier la valeur instructive et scientifique des collections avec un certain plaisir esthétique, même si la balance effective entre les deux tend à s’inverser depuis l’arrivée du Professeur Haüy. Cette idée peut d’ailleurs être corrélée aux propos que tenait René-Just Haüy au moment de l’acquisition de la collection Weiss qui enrichit si fortement la collection du Muséum. Il expliquait au moyen de divers arguments les raisons pour lesquelles cette collection se devait d’intégrer le Muséum et a évoqué les objectifs qui concourent à l’existence même d’un tel établissement :

« Un muséum d’histoire naturelle n’est pas seulement destiné à conserver tout ce qui a un rapport direct avec l’instruction ; il doit encore être le dépôt de toutes les productions qui augmentent un grand prix de quelque accident remarquable, comme la grandeur du volume, la beauté ou la rareté des tintes &c. Or les pierres fines dont il s’agit ici sont extrêmement intéressantes sous ces différens rapports »380.

Sous ce rapport, la vision de Haüy est très révélatrice de ce basculement de la vision autour des collections et en particulier celles de minéralogie. Citons Jonathan Simon qui évoque cette transition et prend d’ailleurs l’exemple de Haüy :

« C’est suivant cette logique que les conservateurs des muséums nationaux – y compris René- Just Haüy – intensifièrent leurs efforts pour rendre la présentation de leur collections minéralogiques plus systématiques durant le dix-neuvième siècle »381.

Terminons ce chapitre en citant l’architecte du Muséum Charles Rohault de Fleury, qui dresse, en 1832, un état descriptif des Galeries d’Histoire naturelle382, juste avant de lancer le programme de la Galerie de Minéralogie. Cet instantané permet ainsi, quelques années avant la séparation définitive de ces collections avec le bâtiment qu’elles occupaient depuis près de 200 ans, d’obtenir un dernier éclairage sur l’état dans lequel se trouvent les objets et de constater que la situation est de nouveau encore à saturation de l’espace

(cf. Annexe P3 ; II ; 30).

379 Jules-André-Henri Lucas, op. cit., p. XII. 380

Manuscrits et archives scientifiques du MNHN, Ms 2528, pièce 63 : Rapport autographe à l’Assemblée des professeurs du Muséum, relatives à l’acquisition éventuelle de la collection minéralogique de Mr. Weiss, daté du 27 Nivôse an X [17 janvier 1802].

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Jonathan Simon, op. cit., p. 112 : « It is following this logic that the curators of the national museums – including

René-Just Haüy – stepped up their efforts to render the presentation of their mineral collections more systematic during the nineteenth century » (traduction par Anton Moret).

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