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2. Analyse des choix muséographiques

2.3. La présentation des collections de minéralogie dans les Galeries du

2.3.2. L’aménagement des collections de minéralogie dans les Galeries du

Suite aux travaux amorcés sous Buffon, avec l’agrandissement du Cabinet dans sa partie Sud, et ajouté à cela l’exhaussement totalement achevé au tout début du XIXe

siècle, les collections de minéralogie purent se déployer encore davantage autour de leur emplacement initial du premier étage du Château. Lors du dernier état des collections, ces dernières étaient présentées dans une seule salle que l’on nommait la salle du règne minéral. La grande nouveauté avec la nouvelle organisation des espaces d’exposition est que la distinction est désormais faite entre les collections minéralogiques et les collections géologiques. L’exposition de la collection reflète l’évolution connue quelques temps auparavant de l’enseignement se rapportant au règne minéral, qui s’exprime désormais par la nomination de deux Professeurs, l’un pour la minéralogie, le second pour la géologie.

Ce sont ainsi trois salles qui présentent ces collections : la première consacrée aux fossiles et davantage à ce qui relève des collections de géologie et les deux suivantes aux roches et aux minéraux. Plusieurs descriptions peuvent nous aider à retracer l’aspect que prenaient les collections mais malheureusement, faute d’illustration existante de cette phase d’aménagement, nous ne pourrons nous en tenir qu’à quelques commentaires.

Jean-Baptiste Pujoulx, en 1803, dresse une description assez précise du Jardin des plantes et des différentes salles du Muséum dans son ouvrage servant de guide de visite, dans lequel il chemine dans les salles, adoptant un parcours extrêmement précis et étudié où les aller-retour sont nombreux368. Cette visite commence ainsi par la première salle, celle juste après la salle réservée aux fossiles qui se trouve du côté Nord. Dans cette première salle de minéralogie, Pujoulx décrit la succession des vitrines en entamant sa visite dans l’encoignure sud-est par l’armoire369

à côté de la croisée et en dirigeant ensuite de gauche à droite en remontant la

368

Jean-Baptiste Pujoulx, Promenades au jardin des plantes, à la ménagerie et dans les galeries du Muséum d’histoire

naturelle, 1803, Tome 1, p. 199.

369

Idem., p. 208 : Pujoulx explicite ce qu’il entend par armoire : « Pour plus de clarté, j’appelle armoire tout châssis plus

salle370. Il décrit la particularité de cette première armoire, exposant non pas des spécimens minéralogiques, mais les modèles cristallographiques développés par Haüy, ces objets en bois permettant de reproduire et de manipuler les cristaux en étudiant leurs angles. Juste à côté dans cette même armoire il note également un « gonyomètre », un instrument utilisé pour réaliser les mesures des angles des échantillons. Cette nouveauté, couplé au fait que tous les objets sont accompagnés d’étiquettes indiquant leurs formes géométriques, montre l’évolution dans la démarche d’exposer les minéraux, où la valeur instructive se fait plus importante. La suite des armoires renferment autant que possible de manière regroupée les différents minéraux ainsi que quelques roches.

Il nous faut aussi nous appuyer sur l’ouvrage de Lucas, et son premier volume daté de 1806, qui est alors membre du Muséum en tant que garde des Galeries du Muséum, employé donc au plus près de ces collections, pour saisir les clefs du parcours déterminé par Haüy. Ceux sont ainsi soixante armoires qui occupent ces deux salles consacrées à la minéralogie. La première salle contient 31 salles et la seconde 29. Les deux salles exposent leurs collections classées selon le principe suivant371.

La première salle renferme :

 Les substances acidifères ;

 Les substances terreuses ;

 Les substances peu connues.

La seconde salle contient quant à elle :

 Les substances combustibles ;

 Les substances métalliques ;

 Les divers agrégats minéraux ou roches

 Les produits des volcans.

Lucas nous fournit également en appendice une table alphabétique des substances minérales permettant d’identifier pour chacune l’armoire la contenant372

.

Enfin, signalons que Pujoulx dans sa description propose un commentaire résumant bien la charnière dans laquelle se trouvent les collections, à savoir prises entre le souvenir du XVIIIe siècle et l’émancipation de la science minéralogique au tournant du XIXe siècle.

370

Idem., p. 206.

371

Jules-André-Henri Lucas, Tableau méthodique des espèces minérales, Volume 1, 1806, p. 367.

372

Ibidem. : Il définit également le terme « armoire », expliquant qu’elles sont fermées de portes garnies de glaces à un ou deux battants et que chaque division perpendiculaire de ces mêmes armoires doit être considérée comme formant à elle seule une armoire entière et dans toute la hauteur. Enfin, elles présentent des tablettes intérieures.

« Il est donc un moyen de doubler nos jouissances, c’est d’envisager ces objets sous les rapports de leurs singularités, de leurs principales propriétés, de leur utilité, et de rassembler ainsi, sous un même point de vue, quelques-unes des considérations qui plaisent au minéralogiste, à l’artiste et à l’homme du monde »373.

En effet leur exposition s’apparentait précédemment pour beaucoup à la satisfaction de la curiosité des visiteurs, en privilégiant des choix souvent esthétiques, tant dans la sélection même des objets, que dans leur disposition dans les salles, avec notamment ces armoires du cabinet de Bonnier de la Mosson qui renvoient indubitablement à leur premier usage dans le cabinet de Bonnier, c’est-à-dire comme de véritables écrins pour de pures objets de curiosité. Ce principe se retrouve d’ailleurs pour une part ici et l’enthousiasme décrit par Pujoulx pour ces collections le résume bien374. Effectivement, la présence des objets d’art constitue encore une section non négligeable de ces collections qui est appréciée des visiteurs si l’on se fie au témoignage fourni par Pujoulx et le détail des réactions qu’il dépeint. Ce fait entre de plus en écho avec des demandes qui vont dans le même sens de la part de l’administration du Muséum. On retrouve en effet une riche correspondance, initiée souvent par le directeur du Muséum, Antoine-Laurent de Jussieu, à propos d’objets dont il souhaite faire profiter l’établissement. Il s’agit bien souvent de saisies révolutionnaires qu’il argue comme étant à même de trouver leur place dans les collections du Muséum et dont le bénéfice escompté serait très avantageux. Il dresse ainsi des listes de pièces diverses, comme des tables en marbre, des tronçons de colonnes, des vases, etc. qui pourraient, selon ses dires, « contribuer

à l’instruction et ajouter en même temps à l’ornement de cette galerie »375

. On voit ainsi le même schéma se répéter, sauf que cette fois-ci l’argument avancé est avant tout celui de l’instruction au bénéfice du public, ce qui se remarque par ailleurs à travers la démarche du nouveau Professeur de minéralogie, Haüy, qui est surtout effective dans ce classement nouveau des objets dans les armoires selon les nouvelles connaissances minéralogiques.

2.3.3. La présentation des collections de minéralogie à