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La politique étrangère

Dans le document Université Panthéon-Assas (Page 189-192)

Première partie : Vers un régime fédéral en Irak

2.2. Chapitre 2 : La répartition des pouvoirs dans le système fédéral irakien

2.2.1. Section 1 : Les pouvoirs exclusifs du gouvernement fédéral

2.2.1.1. La politique étrangère

Dans la plupart des États fédéraux, la Constitution attribue au gouvernement central l’ensemble des pouvoirs en matière de politique étrangère. En effet, le gouvernement central représente la personne morale qu’incarne l’État fédéral au plan international ; il est la seule autorité habilitée à accréditer les représentants d’autres États et à désigner les siens, à déclarer la guerre, à signer les traités de paix ainsi que les conventions et traités internationaux, et à adhérer aux organisations internationales.

Toutefois, et même si cette règle est générale, rien ne peut empêcher une constitution fédérale d’accorder à ses entités fédérées le droit à une représentation diplomatique et le droit de conclure directement des accords avec les pays étrangers, étant bien entendu que les entités fédérées agissent alors au nom de l’État fédéral et engagent la seule responsabilité de ce dernier au niveau international.

Cependant, la Constitution irakienne en particulier ne cite à aucun moment une participation quelconque des régions à l’exercice des pouvoirs exclusifs du gouvernement central. Les régions ont d’autant moins de marge de participation que la Chambre de la fédération, qui aurait pu leur permettre de faire entendre leur voix dans l’exercice de ces pouvoirs, n’existe toujours pas.

La Constitution de la Confédération helvétique a traité la question du partage des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les cantons en matière de relations internationales et d’affaires étrangères avec plus de souplesse. Elle affirme le droit des cantons à prendre part à l’exercice des questions de politique étrangère aux côtés du gouvernement fédéral pour assurer leurs intérêts. En effet, si l’autorité fédérale est compétente pour tout ce qui est relatif à l’organisation des relations internationales, elle a l’obligation constitutionnelle de respecter les pouvoirs que la Constitution a attribués aux cantons et à leurs intérêts vitaux497. C’est pourquoi le gouvernement de la Confédération helvétique consulte le canton concerné pour prendre en compte son avis498. En outre, les cantons peuvent, dans les limites définies par la Constitution, conclure directement des accords avec des pays étrangers, en informant la Confédération, et en veillant bien entendu à ne pas aller à l’encontre de ses lois et de ses intérêts ou de ceux des autres cantons. Les cantons traitent soit directement avec des entités homologues ou de niveau inférieur, soit par l’intermédiaire de la Confédération dans le cas d’États souverains ou d’autorités de niveau supérieur au leur499.

La Constitution canadienne, elle, attribue au gouvernement fédéral la direction des affaires étrangères, en particulier le pouvoir de conclure les traités internationaux, et ne fait aucune référence à des compétences directes des provinces dans ce domaine.

Cependant, selon les règles coutumières, les provinces ont le choix d’appliquer ou non les traités internationaux signés par le gouvernement central, ce qui, dans la pratique, incite celui-ci à se mettre préalablement d’accord avec les provinces avant de signer un traité, et accorde donc à ces dernières un rôle consultatif important. Dans ce cadre où la coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces est indispensable, l’équilibre est délicat entre les pouvoirs de l’un et les droits des autres, et chacun des

497 Art. 54 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999

498 Art. 55, de la Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999

499 Art. 56, de la Constitution fédérale de la Confédération suisse de 1999.

deux niveaux du gouvernement utilise son autorité pour préserver son poids et son influence dans les relations internationales500. Ainsi, le Québec a réussi à conquérir un rôle diplomatique direct501.

Dans le cas de la Belgique, la Constitution attribue au roi la direction des relations internationales, tout en accordant aux communautés et aux régions des pouvoirs, y compris la conclusion de traités internationaux, sur les questions de relations internationales qui sont constitutionnellement de leur ressort: « Les Gouvernements des régions et des communautés linguistiques concluent, chacun pour ce qui le concerne, les traités portant sur les matières qui relèvent de la compétence de leur Conseil. Ces traités n'ont d'effet qu'après avoir reçu l'assentiment du Conseil»502.

Contrairement à la Constitution suisse ou belge, et à l’instar du Canada, la Constitution irakienne réserve au gouvernement fédéral tous les pouvoirs directs en matière de politique étrangère. Certes, la Constitution reconnait à l’article 121-4 la possibilité pour les régions et les gouvernorats d’établir un bureau au sein des ambassades irakiennes à l’étranger pour suivre les affaires culturelles, sociales et de développement ; cependant, elle ne dit rien sur leur éventuelle habilitation à conclure dans ces domaines des accords avec les parties étrangères, même conditionnés à l’assentiment du gouvernement fédéral. On peut donc s’interroger sur la véritable autonomie de ces bureaux et sur les compétences des représentants de chacune de ces régions et gouvernorats.

Par ailleurs, la Constitution spécifie bien, dans ce même article 121, qu’une région ne peut pas étendre au plan international ses compétences internes, hormis dans le cadre instauré par le gouvernement central par le biais de pouvoirs délégués503. Par

500 BLINDENBANCHER Raoul. et BASMA Chandra., Dialogue sur les relations étrangères dans les États fédéraux, dialogue mondial sur le fédéralisme, traduit par M BASTAMI, Canada, Le Forum des Fédérations, 2007, pp. 25. Cité par OMAR, Ch., op. cit., p. 129.

501 Le Québec a des bureaux de représentation diplomatique dans vingt-cinq pays, gérés par un ministère des Relations internationales autonome. En outre, en 2006, le gouvernement fédéral du Canada et le gouvernement du Québec ont signé un accord pour que celui-ci ait un représentant permanent à la Délégation canadienne auprès de l’UNESCO à Paris et que les deux parties se concertent avant la prise de toute décision officielle liée aux travaux réalisés au sein de cette organisation internationale.

502 Art. 167 de la Constitution belge de 1994

503 C’est cette prérogative dite du prolongement à l’international des compétences exclusives à l’interne que réclame le Québec, selon les termes de la politique Gérin-Lajoie, d’après le nom du ministre qui l’a élaborée.

exemple, le Kurdistan ne peut siéger à une organisation internationale telle que l’UNESCO en dépit du fait qu’il exerce une politique interne indépendante en matière d’éducation.

Dans le document Université Panthéon-Assas (Page 189-192)