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Le Conseil supérieur de la magistrature

Dans le document Université Panthéon-Assas (Page 180-183)

Première partie : Vers un régime fédéral en Irak

2.1. Chapitre 1 : Les structures de l’État

2.1.3. Section 3 : Le pouvoir judiciaire

2.1.3.4. Les autres instances judiciaires indépendantes

2.1.3.4.1. Le Conseil supérieur de la magistrature

Un Conseil de la magistrature peut, sinon éliminer, du moins limiter les intrusions politiques dans le fonctionnement de la justice. Le Conseil peut également, par ses recommandations pour les nominations de juges, s’assurer de la compétence des candidats et prévenir les candidatures uniquement politiques qui, en donnant lieu à des nominations, perpétueraient la confusion de la justice et de la politique.

Le Conseil de la magistrature irakien, qui existait déjà avant le début de la dictature baassiste sous le nom de Conseil de la justice, et avait été maintenu sous la LAT, voit son rôle renforcé sous la Constitution de 2005, qui en élargit les

475 Art. 17 du Règlement intérieur de la Cour suprême fédérale, promulgué en vertu de la Loi n° 1 de 2005. Disponible sur le site officiel de la Cour Suprême www.irakja.iq.

476 Art. 94 de la Constitution irakienne de 2005

compétences tout en réaffirmant son rôle pilier au sein du pouvoir judiciaire fédéral en tant qu’instance chargée de superviser, sur le plan administratif, les affaires des autres institutions judiciaires fédérales.

Toutefois, peu de précisions sont données quant à sa composition et à ses modalités de fonctionnement, qui sont renvoyées à une loi ultérieure477 – qui est sans doute, dans l’esprit des constituants, la Loi sur l’organisation du pouvoir judiciaire par ailleurs souvent évoquée par la Constitution. La Loi en question n’ayant toujours pas été adoptée, le Conseil supérieur de la magistrature reste amplement conditionné par les lois antérieures.

Le dernier texte législatif avant la Constitution ayant traité de ce Conseil est la LAT, mais cette loi ayant elle-même souvent fait référence à l’Ordonnance n° 35 de 2003 pour combler ses propres manques de précisions, il reste aujourd’hui à déterminer quelle loi s’applique pour chacun des aspects du Conseil.

2.1.3.4.1.1. La composition du Conseil supérieur de la magistrature sous la Constitution permanente

Certains juristes considèrent que la composition du Conseil supérieur de la magistrature doit rester déterminée par les dispositions de l’Ordonnance n° 35 de 2003 jusqu’à la promulgation de la nouvelle Loi sur l’organisation du pouvoir judiciaire prévue par la Constitution478.

Nous ne partageons pas cet avis et estimons que, compte tenu de sa promulgation plus récente et de sa prévalence en tant que Constitution provisoire, c’est la LAT qui devrait servir de référence concernant le Conseil de la magistrature, et les dispositions de l’Ordonnance n° 35 ne devraient être conservées que pour les questions n’ayant pas été prévues dans la LAT. Un autre élément vient conforter notre position:

il s’agit de la composition actuelle du Conseil supérieur de la magistrature. En effet, le président du Conseil, le juge Medhat Al-Mahmoud, est également le président de la Cour suprême fédérale479, ce qui correspond exactement aux dispositions de l’article 45 de la LAT, alors que l’Ordonnance n° 35 prévoyait que la présidence du Conseil

477 Art. 90 de la Constitution irakienne de 2005. : « Le Conseil supérieur de la magistrature est chargé de la gestion des affaires des instances judiciaires, et la loi organisera les modalités de sa constitution, ses compétences ainsi que les règles son fonctionnement. » Certaines compétences du Conseil sont par ailleurs précisées dans l’article 91 de la Constitution.

478 ZIBARI, A., op.cit., p. 167.

479 Information vérifiée par des recherches effectuées sur le site de la Cour suprême fédérale et le site du Conseil supérieur de la magistrature.

supérieur de la magistrature revenait au président de la Cour de cassation. En tout état de cause, il apparaît clairement que le manque de précision de la Constitution sur ces sujets peut générer différentes interprétations et, en cela, être source de conflits.

Rappelons que le Conseil de la magistrature selon la LAT est composé du président de la Cour suprême fédérale, des vice-présidents de la Cour de cassation fédérale, des présidents des cours d’appel fédérales, ainsi que du président et des vice-présidents de chaque Cour régionale de cassation. Nous remarquons que le Conseil de la magistrature est donc entièrement composé de juges qui, en tant que corps professionnel, peuvent, comme tout organisme similaire, avoir des tendances corporatistes. Pour limiter ces risques, faut-il prévoir la participation de représentants du Barreau ou d’autres corps professionnels pour donner au Conseil une crédibilité qui rejaillira sur l’indépendance et la qualité de la justice ?

2.1.3.4.1.2. Les compétences du Conseil supérieur de la magistrature sous la Constitution permanente

Si l’article 90 de la Constitution renvoie la définition des compétences du Conseil supérieur de la magistrature à la loi, l’article 91 en cite toutefois certaines. Les compétences nouvellement attribuées par la Constitution élargissent le rôle du Conseil supérieur de la magistrature par rapport à celui qui lui était attribué sous l’Ordonnance n° 35 et la LAT.

- Le Conseil supérieur de la magistrature est chargé de la gestion des affaires administratives480 et de la supervision de toutes les institutions de la justice fédérale ;

- Le Conseil supérieur de la magistrature désigne les candidats aux postes de président et de membres de la Cour de cassation fédérale, de président du ministère public, et de président de la Commission de supervision judiciaire ; il soumet ces candidatures à la Chambre des représentants pour approbation.

Avant la Constitution de 2005, les candidats à ces postes étaient nommés par le ministère de la Justice ;

480 Le terme « administratives » ne figure pas dans la version originale en arabe mais nous paraît sous-entendu en raison du contexte et de la nature du Conseil de la magistrature.

- Le Conseil supérieur de la magistrature propose le budget annuel du pouvoir judiciaire fédéral et le soumet à la Chambre des représentants pour approbation.

C’est donc maintenant le pouvoir judiciaire lui-même qui propose son budget annuel par le biais de l’une de ses instances, et non le pouvoir exécutif représenté par le Conseil des ministres ou par le ministère de la Justice, comme c’était le cas avant la Constitution de 2005. Ceci marque un progrès considérable dans le sens de l’indépendance du pouvoir judiciaire et du principe de séparation des pouvoirs. La Chambre des représentants continue toutefois de donner son approbation, tout comme elle le fait pour le budget du gouvernement, dans la mesure où ces décisions budgétaires impliquent diverses considérations financières et économiques nécessitant la participation des élus du peuple.

Outre ces prérogatives précisées par la Constitution, le Conseil demeure habilité à présenter les candidatures du président et des membres de la Cour suprême fédérale au Conseil de la présidence pour nomination par ce dernier, en vertu des dispositions de la LAT toujours en vigueur sur ce point.

Dans le document Université Panthéon-Assas (Page 180-183)