Cat´ egories faibles enrichies sur une cat´egorie
2.5 Plans d’addition de cellules I-injectivants
On peut en effet reformuler le probl`eme de la categorisation en termes de plans d’addition de cellules et d’objets I-injectifs. Supposons en effet que nous ayons exhibe une famille I de morphismes dont les objets I-injectifs sont les C-categories. Le probl`eme devient alors de rendre I-injectif un objet qui ne l’est pas. L’idee la plus repandue pour faire cela est de rajouter les fl`eches de I jusqu’`a rendre l’objet I-injectif, c’est-`a-dire d’appliquer `a l’objet un plan d’ad-dition de cellules. Ainsi l’equivalent en termes de plan d’add’ad-dition de cellules et d’objets I-injectifs du probl`eme de la categorisation est de trouver un plan d’addition de cellules P fonctoriel verifiant :
- i) tout morphisme f : A ջ B dont le but est I-injectif se factorise `a travers P (A),
- ii) pour tout objet A, P (A) est I-injectif,
- iii) si l’on poss`ede une notion d’equivalence d’objets I-injectifs, pour tout objet A, l’image par P du morphisme naturel A ջ P (A) est une equi-valence d’objets I-injectifs.
Tout plan fonctoriel d’addition de cellules resolvant ce probl`eme sera appele plan I-injectivant ou I-injectivisation.
Comme on l’a dit plus haut, l’idee que nous allons suivre pour resoudre ce probl`eme d’I-injectivisation est de construire un plan d’addition de fl`eches de I. Or il est assez facile de voir, avec les definitions d’objets I-injectifs et de I-cofibrations, que tout plan d’addition de fl`eches de I est une I-cofibration et donc, par propriete de rel`evement `a gauche par rapport aux objets I-injectifs, verifie le i). C’est ce que nous donne le lemme suivant.
Lemme 2.5.1 Soient C une cat´egorie cocompl`ete et I un ensemble de mor-phismes de C. Soient A un objet de C et P un plan d’addition de cellules de I sur A. Alors le morphisme naturel A ջ P (A) est une I-cofibration. En parti-culier pour tout morphisme f : A ջ B vers un objet I-injectif B, il existe un morphisme de P (A) vers B qui pr´ecompos´e avec le morphisme naturel de A vers P (A) redonne f .
A f - B ¡¡ ¡¡ ¡ ∃ µ P (A) ?
Preuve :
Tout d’abord il convient de remarquer que le morphisme naturel A ջ P (A) est une colimite sequentielle transfinie de sommes amalgamees de fl`eches de I. Or les fl`eches de I sont des I-cofibrations et les I-cofibrations sont stables par somme amalgamee le long d’un morphisme et par colimite sequentielle trans-finie d’apr`es le lemme 2.2.2. Donc le morphisme naturel A ջ P (A) est bien une I-cofibration. En outre par definition de I-cofibration, A ջ P (A) poss`ede la propriete de rel`evement `a gauche par rapport aux morphismes I-injectifs et donc en particulier par rapport aux objets I-injectifs.
CQFD.
Ce lemme nous a donc permis d’avoir une infinite de solutions pour le probl`eme i) de l’I-injectivisation. Il suffit que le plan d’addition de cellules ra-joute des fl`eches de I `a la source d’un morphisme vers un objet I-injectif pour factoriser ce morphisme `a travers le resultat du plan applique `a la source. Toutefois on peut aussi bien rajouter `a chaque etape du plan une partie quel-conque de I ou bien avoir une partition de I et un plan qui `a chaque etape rajoute les fl`eches d’un certain nombre d’elements de la partition de I. Nous allons donc donner une definition generale qui permet de modeliser de tels plans.
D´efinition 2.5.2 Soient C une cat´egorie cocompl`ete et ˯ un ensemble de morphismes de C. Soit (˯k)k∈K une partition de ˯. Donnons nous une fonc-tion t d’un cardinal T quelconque vers l’ensemble des parties de K. On appelle plan d’addition de cellules suivant l’ordre t tout plan P de longueur T tel que, pour tout ordinal ̍ < T , les diagrammes apparaissant dans P̍ ne sont obtenus qu’`a partir des fl`eches des ˯k avec k d´ecrivant t(̍ ).
On notera t−1(k) pour k ∈ K l’ensemble des ordinaux ̍ < T pour lesquels t(̍ ) contient k.
Pour resoudre le probl`eme ii) de l’I-injectivisation, l’idee est de rajouter autant de fois que necessaire les fl`eches de I pour rendre les objets quelcon-ques I-injectifs. On se demande alors quelles conditions doit verifier un plan d’addition de fl`eches de I pour que son resultat soit I-injectif. Comme les plans ont chacun une certaine longueur, si l’ensemble I est petit par rapport `a cette longueur, toutes fl`eches d’une source d’un morphisme de I vers le resultat du plan se factorisera `a travers l’une des etapes du plan. Deux cas se presente alors : soit le diagramme `a cette etape poss`ede dej`a un rel`evement, et dans ce cas c’est bon, soit le diagramme `a cette etape n’en poss`ede pas. Or si l’on veut que le diagramme se rel`eve pour le resultat du plan, il faudra qu’il se rel`eve
pour une etape ulterieure du plan. Ces considerations nous am`enent au lemme suivant qui nous donne une condition suffisante pour qu’un plan d’addition suivant un ordre ait son resultat I-injectif.
Lemme 2.5.3 Soient C une cat´egorie cocompl`ete et ˯ un ensemble de mor-phismes de C. Soient (˯k)k∈K une partition de ˯ et ˺ un cardinal r´egulier pour lequel les sources des morphismes de ˯ sont ˺-petites.
Soit A un objet de C. Donnons nous une fonction t d’un cardinal r´egulier T strictement sup´erieur `a ˺ vers l’ensemble des parties de K et un plan d’addi-tion de cellules P sur A suivant l’ordre t. Si P v´erifie la propri´et´e suivante : pour tout ordinal ̍ < T , pour tout k ∈ K et pour tout diagramme D sur P̍(A) fabriqu´e avec une fl`eche de ˯k qui ne se rel`eve pas dans P̍(A), il existe ̍′ ∈ t−1(k) tel que ̍′ ≥ ̍ et que le diagramme D ´etendu `a P̍′(A) appartienne au plan P̍′,
alors P (A) est ˯-injectif. Preuve :
Soit P un plan sur A verifiant la condition du lemme. Montrons que P (A) est ˯-injectif. Considerons alors le diagramme suivant :
X g - P (A)
Y ̏
?
Comme par hypoth`ese la source X de ̏ est ˺-petite et que A ջ P (A) est une colimite sequentielle transfinie de longueur T cardinal regulier strictement superieur `a ˺, il existe un ordinal ̍ < T tel que g se factorise par P̍(A). Soit le diagramme se rel`eve dans P̍(A) et, par extension `a P (A), on obtient que le diagramme ci-dessus se rel`eve. Soit le diagramme ne se rel`eve pas dans P̍(A), et dans ce cas, par la propriete de P , il vient qu’il existe ̍′ ≥ ̍ tel que t(̍′) contienne l’indice de la partie de ˯ `a laquelle appartient ̏ et que la restriction du diagramme `a P̍′(A) appartienne au plan P̍′. Ainsi P̍′+1(A) se rel`eve par rapport `a ̏, et par extension `a P (A),on obtient que P (A) se rel`eve aussi, ce qui montre que le diagramme considere se rel`eve.
CQFD.
Corollaire 2.5.4 Soient C une cat´egorie cocompl`ete et ˯ un ensemble de morphismes de C. Soient (˯k)k∈K une partition de ˯ et ˺ un cardinal r´egulier
pour lequel les sources des fl`eches de ˯ sont ˺-petites.
Soit A un objet de C. Donnons nous une fonction t d’un cardinal r´egulier T strictement sup´erieur `a ˺ vers l’ensemble des parties de K et un plan d’addi-tion de cellules P sur A suivant l’ordre t.
Supposons que t v´erifie que pour tout ̍ < T et pour tout k ∈ t(̍ ) il existe ̍′ ≥ ̍ tel que ̍′ appartienne `a t−1(k). Si P v´erifie la propri´et´e suivante : pour tout ordinal ̍ < T , le plan P̍ contient tous les diagrammes obtenus `a partir des morphismes de ˯k, pour k d´ecrivant t(̍ ), qui ne se rel`event pas dans P̍(A), alors P (A) est ˯-injectif.
Preuve :
Montrons que sous les conditions du corollaire le plan P verifie la condition du lemme precedent. Soit donc un ordinal ̍ < T et un diagramme D sur P̍(A) obtenu `a partir d’un morphisme d’un ˯k avec k ∈ t(̍ ) qui ne se rel`eve pas dans P̍(A). Par propriete de t, il existe un ordinal ̍′ ≥ ̍ tel que k appartienne `a t(̍′). Prenons le plus petit ̍′ verifiant cela. En outre par propriete de P , il vient que P̍′ contient tous les diagrammes obtenus avec ˯k (car k ∈ t(̍′)) ne se relevant pas dans P̍′(A), c’est en particulier le cas pour D etendu `a P̍′(A), par minimalite de ̍′. Ainsi P verifie la condition du lemme et donc P (A) est ˯-injectif.
CQFD.
Donnons deux exemples de plans d’addition de cellules qui verifient les proprietes i) et ii) de l’I-injectivisation.
Lemme 2.5.5 Soient C une cat´egorie cocompl`ete et ˯ un ensemble de mor-phismes de C dont les sources sont ˺-petites pour un certain cardinal r´egulier ˺. Soient ˺′ le plus petit cardinal r´egulier sup´erieur `a ˺ et ̄ un cardinal quel-conque.
Notons EΦ,̄ le plan d’addition de cellules fonctoriel de longueur ˺′ dont tous les plans simples sont eΦ,̄ et notons E′
Φ,̄ le plan d’addition de cellules foncto-riel de longueur ˺′ obtenu `a partir des compositions rationnelles et dont tous les plans simples sont eΦ,̄.
Alors, pour tout objet A de A, EΦ,̄(A) et E′
Φ,̄(A) sont ˯-injectifs et tout morphisme f : A ջ B dont le but est ˯-injectif se factorise `a travers le morphisme naturel A ջ EΦ,̄(A) et aussi `a travers A ջ E′
Φ,̄(A). Preuve :
Tout d’abord on remarque que comme EΦ,̄ et E′
Φ,̄ sont des plans d’addition de morphismes de ˯, par le lemme 2.5.1, les morphismes naturels A ջ EΦ,̄(A)
et A ջ EΦ,̄′ (A) sont des ˯-cofibrations qui donc ont la propriete de rel`evement `a gauche par rapport aux objets ˯-injectifs. Ceci prouve la seconde partie du lemme.
Pour montrer que les resultats des plans EΦ,̄ et E′
Φ,̄ sont ˯-injectifs, il suffit de montrer que ces plans verifient le corollaire 2.5.4. Tout d’abord on remarque que dans notre cas il n’y a pas de partition de ˯, ce qui revient `a dire que la partition n’a qu’un element. Du coup la fonction t correspondant `a nos plans n’est autre que la fonction constante du cardinal ˺′ dans l’ensem-ble des parties du singleton `a valeur le singleton. Ainsi t verifie de mani`ere triviale la condition du corollaire 2.5.4. Il ne reste plus qu’`a montrer que pour tout ordinal ˻ < ˺′, les plans simples (EΦ,̄)˻ et (E′
Φ,̄)˻ contiennent tous les diagrammes obtenus avec des morphismes de ˯ qui ne se rel`event pas dans (EΦ,̄)˻(A) et (E′
Φ,̄)˻(A). Or les plans simples (EΦ,̄)˻ et (E′
Φ,̄)˻ sont en fait les plans eΦ,̄ qui par definition contiennent tous les diagrammes possibles obtenus `a partir de ˯. Si dans (EΦ,̄)˻, on a bien tous les diagrammes pos-sibles sur (EΦ,̄)˻(A), en revanche par rationalite des compositions de E′
Φ,̄, dans (E′
Φ,̄)˻ on ne garde que les diagrammes qui ne rel`event pas dans (E′ Φ,̄)˻. Dans les deux cas la propriete du corollaire 2.5.4 est verifiee, ce qui nous donne que les resultats des plans EΦ,̄ et E′
Φ,̄ sont bien ˯-injectifs. CQFD.
On a donc exhibe deux plans d’addition de cellules qui verifient les pro-prietes i) et ii) des plans I-injectivants. Le probl`eme consiste maintenant `a savoir s’ils verifient ou non la propriete iii) concernant les equivalences. En fait cette propriete iii) est la plus difficile `a obtenir. En nous inspirant des idees de [5] pour resoudre ce probl`eme, nous allons chercher deux plans d’ad-dition de cellules particuliers verifiant i) et ii). Le premier aura une propriete d’unicite de rel`evement par rapport aux objets I-injectifs et le second aura la propriete iii) mais uniquement pour les objets I-injectifs. Nous allons donc con-struire le premier plan et montrer que, si l’on suppose l’existence du second, le premier verifie iii).