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Les différentes perspectives de l’étude culturaliste L’étude de la culture au XIX e

Chapitre 3 : Culture, identité et socialisa tion

2. Les différentes perspectives de l’étude culturaliste L’étude de la culture au XIX e

et au début du XXe

siècle se centrait sur l’étude des sociétés primitives avant d’englober les sociétés dites « civilisées ». Il s’agit de définir la culture selon un modèle (courant) théorique et d’en faire la description à partir des éléments concrets de la culture (langue, symboles, rites, croyances, système de parenté).

2.1. Le diffusionnisme

Si Taylor est le premier à donner une définition scientifique à la culture, Boas est considéré comme le fondateur de l’anthropologie culturelle. Contrairement à Taylor, il s’intéresse tout particulièrement à ce qui différencie les groupes et les cultures des uns des autres.

Il faut tenir compte que Boas était influencé par la conception particulariste allemande de la notion de culture. Il est considéré aux côtés de Graenber (1877-1934), Sapir (1884-1939) et Herskovitz (1895-1963), les défendeurs du relativisme culturel. Boas in- troduit « l’anthropologie culturelle » et son principe de base de la relativité des cultures et de leur impossible hiérarchisation a priori, afin de rompre avec la conception évolu-

tionniste. Le relativisme culturel de Boas prend pour principe éthique le respect et la to- lérance accordés à chaque culture.

Son approche est fondée sur l’existence d’aires culturelles en nombre limité, qui se dif- fusent à travers des emprunts à l’occasion de contacts culturels. Certains traits culturels similaires entre deux sociétés sont le résultat d’une diffusion de l’une à l’autre.

2.2. Le fonctionnalisme

Malinowski (1858-1942) avance la théorie que chaque société répond à ses be- soins en créant des institutions qui remplissent une fonction spécifique. À partir de ce point de vue, tous les faits culturels correspondent à une nécessité fonctionnelle et ne peuvent être compris qu’en référence à la totalité sociale.

Dans toute culture « chaque coutume, chaque objet, chaque idée et chaque croyance remplissent une certaine fonction vitale, ont une certaine tâche à accomplir, représentent une part irremplaçable de la totalité organique » (Malinowski, 1968).

Chaque culture forme un système dont les éléments sont interdépendants et cohérents. Ce système est équilibré et fonctionnel à travers l’harmonisation des composants, les uns avec les autres.

Malinowski dans l’élaboration de sa théorie de la culture, s’est fondé sur la conception des sciences de la nature des « besoins ». Les éléments constitutifs d’une culture au- raient pour fonction de satisfaire les besoins essentiels de l’individu. Pour lui la culture constitue la réponse fonctionnelle à ces impératifs naturels. La culture y répond en créant des « institutions », qui prennent le rôle d’unité de base d’une étude anthropolo- gique. Selon cette vision, les traits culturels n’ont aucune signification s’ils ne sont pas rapportés à l’institution à laquelle ils appartiennent. L’objet d’une étude anthropolo- gique est composé des institutions politiques, économiques et éducatives, et les relations existantes entre elles, en rapport avec le système global culturel à l’intérieur duquel elles fonctionnent. Cette vision est à la fois holistique et utilitaire et présuppose une co- hérence culturelle prépondérante qui détermine la société et ses membres.

2.3. Le culturalisme

L’école culturaliste, représentée par Ruth Benedict (1887-1948), Mead (1901- 1978), Linton (1893-1953) et Kardiner (1891-1981), s’intéresse aux sociétés primitives, à la détermination de la personnalité de l’individu par des modèles culturels, à travers la cohérence des traits culturels qui confirme l’emprise de la société sur l’individu par ses processus d’enculturation. Ils émettent l’hypothèse que les membres d’une société dé- terminée possèdent en commun des éléments constitutifs de leur personnalité de base.

Pour sa part, Benedict émet l’hypothèse de l’existence d’un culturel global qui inclurait toutes les possibilités culturelles. Chaque culture actualise un segment particu- lier de la culture globale à travers les « modèles culturels » qui se caractérisent par leurs orientations générales et les sélections significatives qu’ils font parmi tous les choix possibles.

Benedict considère que la culture de chacun est une accommodation aux mo- dèles types et aux pratiques d’une communauté. Chacun de nous est modelé par sa cul- ture à l’aide des institutions qui vont influencer, à travers la socialisation, nos compor- tements et nos pensées par rapport aux valeurs dominantes.

En ce qui concerne Mead, elle tente de comprendre le processus d’enculturation, c'est-à- dire la façon dont l’individu reçoit sa culture et les conséquences que ce processus en- traîne sur la formation de la personnalité.

Quant à Linton, il reprend, des travaux de l’école culturaliste, la partie concernant l’aspect strictement psychologique de l’individu, commun à tous les membres du groupe et déterminé directement par la culture à laquelle appartient l’individu.

Linton introduit le terme « personnalité de base » pour distinguer ce qui est partagé entre les membres d’un même groupe sur le plan du comportement et de la personnalité. Il cherche à démontrer que chaque culture favorise un type de personnalité parmi tous les autres types. Ce type privilégié, conforme à la norme sociale, devient alors le type « normal ». Ce type normal, à son tour, est considéré comme le fondement culturel de la personnalité. L’acquisition et l’apprentissage se fait par le biais du système éducatif.

Linton considère que dans une même culture d’appartenance, aucun individu ne tient l’ensemble de connaissance de sa culture. Chaque individu ne connaît de sa culture que

ce qui lui est nécessaire et conforme à ses divers statuts. L’existence d’une combinaison des statuts conduit à une modélisation d’une personnalité de base typique et propre à chaque individu.

À son tour, Kardiner étudiera d’une part, le processus de formation de la personnalité de base à travers ce qu’il désignera comme les « institutions primaires » : la famille et les écoles, propres à chaque société. D’autre part, comment en retour, une fois la personna- lité de base construite, l’individu réagi sur la culture du groupe selon une sorte de pro- jection des systèmes de valeurs et de croyances déjà acquise. Kardiner définit la person- nalité de base comme « une configuration psychique particulière propre aux membres d’une société et qui se manifeste par un certain style de comportement sur lequel les in- dividus brodent leurs variantes singulières » (Kardiner, 1939).

Il considère que l’innovation et la création dans une société contribuent à la modifica- tion de la culture par la personnalité de base, à cause de la façon et du degré d’intériorisation effectué par l’individu de sa culture. L’évolution interne d’une culture se fait par un processus d’accumulation des variations individuelles résultant d’intériorisation et de vécu des phénomènes communs que constitue la personnalité de base. Ce processus est à la base de l’évolution interne d’une culture.

2.4. Le structuralisme

Lévi-Strauss (1955) s’inspire, dans ses travaux, de certaines idées de l’école « culture et personnalité », et plus particulièrement de Benedict, en les réutilisant selon une perspective nouvelle. La première idée est celles des différentes cultures qui sont définies par un certain modèle culturel. « L’ensemble des coutumes d’un peuple est tou- jours marqué par un style ; elles forment des systèmes » (Lévi-Strauss. 1955). La deu- xième idée concerne les types de cultures possibles en nombre limité « Je suis persuadé que ces systèmes n’existent pas en nombre illimité » (ibid). En ce qui concerne la troi- sième idée, Lévi-Strauss considère que l’étude des sociétés est la meilleure méthode pour déterminer les combinaisons possibles entre les éléments culturels « (les individus) se bornent à choisir certaines combinaisons dans un répertoire idéal qu’il serait possible de reconstituer » (ibid)

Enfin, la dernière idée conçoit que ces combinaisons peuvent être étudiées en elles- mêmes, indépendamment des individus appartenant au groupe pour qui elles demeurent inconscientes. « En faisant l’inventaire de toutes les coutumes observées, de toutes celles imaginées dans les mythes, celles aussi évoquées dans les yeux des enfants et des adultes, les rêves des individus sains ou malades et les conduites psychopathologiques, on parviendrait à adresser une sorte de tableau périodique comme celui des éléments chimiques, où toutes les coutumes réelles ou simplement possibles apparaîtraient re- groupées en familles, et où nous n’aurions plus qu’à reconnaître celles que les sociétés ont effectivement adaptées ». (ibid)

Néanmoins, à côté de la découverte des études particularistes américaines et l’adoption de certaines de ses idées, on observe l’influence de l’héritage de la pensée française. En effet, derrière sa définition de « culture » et sa conceptualisation de l’analyse structu- rale, se trouvent la conception française de la culture universaliste et la hiérarchie cultu- relle de la civilisation. Lévi-Strauss cherche à dépasser l’approche particulariste des cul- tures pour intégrer dans son analyse la « totalité culturelle » ou la « Culture » au singu- lier avec un « C » majuscule. Lévi-Strauss observe que les cultures particulières ne peu- vent être saisies sans se référer à la Culture, comme « capital commun » de l’humanité, à travers lequel elles puisent pour accommoder leurs modèles spécifiques.

Dans son analyse, Lévi-Strauss procède en repérant et en répertoriant les « invariants » culturels toujours identiques d’une culture à l’autre. Ces invariants sont en nombre limi- tés à cause de la limite de la nature psychique humaine et l’impossibilité d’acquérir tous les aspects de la culture dans les expériences vécues. D’après lui, il est possible de trou- ver des lois universelles qui sont autant de principes indispensables de la vie en société. À partir de cette conceptualisation, il va établir une liste limitée de matériaux culturels selon une structure possible pour dégager l’invariabilité des principes culturels fonda- mentaux.

3. Trois paradigmes dans les études sur la culture