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L’obligation de prise en charge des risques sur le fondement du maintien de l’ordre public

Dans le document L'ÉTAT ET LES RISQUES DES ENTREPRISES (Page 185-195)

§ 1 Le maintien de l’ordre public

B- L’obligation de prise en charge des risques sur le fondement du maintien de l’ordre public

170. Il est de jurisprudence constante que, confrontée à des situations particulièrement périlleuses ou susceptibles de l’être, l’administration est tenue de mettre en œuvre ses pouvoirs de police afin de prévenir et faire cesser les troubles qui pourraient en résulter. On en trouve des illustrations en matière de risques des entreprises (1°). Cette obligation d’intervention s’est renforcée et a été renouvelée par une tendance contemporaine conduisant à multiplier les obligations de prévention, et imposant ainsi aux pouvoirs publics de répondre au besoin toujours croissant de sécurité des entrepreneurs463 (2°).

463 En ce sens : F. MELLERAY, « L’obligation de prendre des mesures de police administrative

1° L’obligation d’user des pouvoirs de police

171. En vertu de la jurisprudence Doublet464, il est affirmé de façon constante que

les autorités de police administrative générale sont tenues de mettre en œuvre les prérogatives dont elles disposent afin de faire face à des événements particulièrement périlleux. Il leur est donc fait obligation d’assurer, dans le cadre de leur compétence et sous le contrôle du juge administratif, le maintien de l’ordre public. Dans la mesure où périls et troubles à l’ordre public et risques des entreprises correspondent, l’obligation ainsi établie s’étend à l’intervention publique en matière de risque. De la sorte, et pour reprendre les termes de l’arrêt Doublet, lorsqu’un risque crée une situation particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la salubrité publiques d’où résulte un péril grave, l’autorité de police est tenue de mettre en œuvre les prérogatives qu’elle tient de la loi afin de prévenir et faire cesser ce péril465. La mesure de police doit être indispensable

et la méconnaissance de cette obligation est susceptible d’engager la responsabilité pour faute de l’administration466. Cette dernière a ainsi l’obligation de prévenir et de faire

cesser des risques de troubles sanitaires467, d’atteintes à la sécurité468 ou à la sûreté469, si

464 C.E., 23 octobre 1959, Doublet, p.540, D.1960, p.191, note D.G.LAVROFF, R.D.P. 1959, p.1235,

concl. A. BERNARD et 1960, p.802, note M. WALINE. Dans le même sens : C.E., 1er octobre 1971,

Association « Alba-Stella », T.déc., p.313.

465 Il faut noter que les conditions posées par l’arrêt Doublet ont pu donner lieu à une interprétation

moins restrictive : voir par exemple : C.E., 8 juillet 1992, Ville de Chevreuse, p.281.

466 Voir supra, Première partie, Titre second, premier chapitre, n°136 et s.

467 C.E., 4 octobre 1968, Sieur et dame Pascale, T.déc., p.372 : carence fautive de l’autorité de police

qui n’a pas fait cesser les activités d’un poissonnier portant préjudice à un commerce de fleurs.

468 C.E., 22 juin 1987, Ville de Rennes c/ C.R.L.C., A.J.D.A. 1988, p.65 : L’autorité de police avait

l’obligation d’alerter la population, dont une entreprise de linoléum et caoutchouc, de la survenance d’une crue. Concernant l’obligation d’édicter une mesure individuelle de police : a contrario, C.E., 1er

juin 1973, Demoiselle Ambrigot, p.915. L’obligation faite à l’autorité de police peut être celle d’effectuer des opérations matérielles : C.E., 29 décembre 1989, Cassagne, J.C.P. 1990.IV.57 ; C.E., 14 mars 1986, Commune de Val d’Isère, p.711, J.C.P. 1986.II.20670, concl. B. LASSERRE, note

F. MODERNE.

469 C.A.A. de Paris, 22 janvier 2003, M. Vigouroux c/ Ministre de l’Intérieur, préc. : défaillance des

autorités de police à protéger une officine contre des actes de violence ; C.E., 25 mars 1992, Compagnie d’assurance Mercator N.V. et autres, T. déc. p.6819 : carence fautive de l’autorité de police lors de l’attaque d’un camion transportant du porc ; C.E., 28 mai 1984, Sté française de production, T. déc., p.5538 : a contrario, obligation de prévenir un attentat à l’explosif contre des véhicule de la S.F.P.

les conditions précitées sont réunies. Il n’est pas douteux que les catastrophes naturelles ou industrielles remplissent fréquemment de telles conditions du fait de leur caractère imprévisible et des conséquences anormales qui peuvent en résulter.

172. L’obligation de maintenir l’ordre public se double de celle, plus générale, de prendre les mesures juridiques ou matérielles nécessaires à l’application d’une réglementation de police.

Elle revêt un intérêt particulier en matière de droit économique international470

et communautaire. En effet, des motifs tirés de la protection de l’ordre public peuvent constituer le fondement de dérogations aux règles instituées par des conventions internationales à objet économique471. L’État français peut donc, dans des circonstances

particulières, invoquer sa mission de sauvegarde de l’ordre public sur son territoire pour déroger à certaines règles de comportement. Par exemple, dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, il est prévu à l’article XX de l’accord général que chaque État conserve le droit de prendre les mesures nécessaires à la sauvegarde de son ordre public472 et ce, même lorsqu’elles auront pour conséquence de restreindre les

échanges internationaux. Elles ne doivent cependant pas être ouvertement discriminatoires ou protectionnistes. Ainsi, la France a-t-elle pu en 2000 interdire l’importation d’amiante « blanc » en provenance du Canada473. Si à ce jour, les exemples

d’utilisation de l’article XX ne sont pas nombreux, on peut supposer que des motifs tirés de la protection de l’environnement pourraient permettre aux autorités nationales d’interdire l’importation de produits nocifs pour certaines exploitations agricoles.

470 Voir D. CARREAU et P. JUILLARD, Droit international économique, Précis Dalloz, 1ere édition, 2003. 471 Voir par exemple : M. CASTILLO et R. CHEMAIN, « La réserve d’ordre public en droit

communautaire », in L’ordre public : Ordre public ou ordres publics ? Ordre public et droits fondamentaux, préc., p.133.

472 L’article XX énonce les domaines constitutifs de l’exception de l’ordre public : moralité

publique, protection de la santé et de la vie, de l’environnement, etc.

473 Affaire « Communautés européennes-mesures affectant l’amiante et les produits en contenant »,

173. Si le maintien de l’ordre public peut imposer aux pouvoirs publics de prendre en charge les risques des entreprises, il convient toutefois d’apporter trois précisions importantes.

Tout d’abord, comme cela a déjà été souligné, certaines mesures prises dans le but de faire cesser des troubles à l’ordre public peuvent elles-mêmes être à l’origine de risques pour les entreprises. L’intervention publique aggrave alors les dommages déjà subis474. Cette situation paradoxale n’est pas rare, elle concerne les diverses

composantes de l’ordre public général. Ainsi, en vue de lutter contre les effets économiquement dommageables d’une crise sanitaire, les pouvoirs publics peuvent-ils être amenés à procéder à des abattages de bétail massifs ou sélectifs. Les épisodes malheureusement récents de « la vache folle » ou de « la tremblante du mouton » ont démontré à quel point le maintien de l’ordre sanitaire pouvait conduire à accentuer les dommages déjà subis par les éleveurs. Il peut en aller de même lorsqu’est en cause le maintien de la sécurité publique. A la suite d’actes de violence ou de terrorisme ayant endommagé certains commerces, les pouvoirs publics peuvent adopter des mesures restreignant l’accès du public, diminuant de ce fait la fréquentation déjà réduite de la clientèle475. On sait également que l’administration peut refuser, afin de préserver

l’ordre public, de prendre certaines décisions, notamment d’exécution de la chose jugée. Ce sera le cas lorsqu’elle refusera d’expulser des grévistes occupant illégalement des centres d’échanges commerciaux.

Ensuite, certains troubles à l’ordre public, tout en étant constitutifs de risques pour les entreprises, peuvent revêtir certains caractères exonérant l’administration de son obligation d’action. L’inaction476 devient alors légitime. Il s’agit des hypothèses dans

lesquelles le risque qui se réalise est constitutif d’un cas de force majeure et rend impossible l’action publique. Son irrésistibilité et son imprévisibilité peuvent supprimer

474 Voir supra, Première partie, Titre premier, Chapitre premier, n°74 et s. 475 C.A.A. Bordeaux, 31 décembre 1993, Blanco, T. déc. p. 6802.

l’obligation d’agir de l’administration, celle-ci ne commettant donc pas de faute en ne tentant pas de faire cesser les troubles et les dommages qui en résultent477.

Enfin, l’obligation de prendre en charge un risque sur le fondement du maintien de l’ordre public ne fait pas disparaître l’exigence de proportionnalité que doit respecter l’autorité publique478. La légalité de la mesure de police est conditionnée par sa

nécessité. Le juge administratif sera alors conduit à vérifier qu’il n’existait pas en l’espèce de mesures alternatives permettant d’atteindre de façon plus efficace - moins attentatoires aux libertés - le but recherché479. Il examinera donc les effets des diverses

solutions qui s’offrent à l’administration afin de déterminer la légalité de celle qui a été retenue. Les pouvoirs publics sont donc tenus, lorsqu’ils prennent en charge des risques sur le fondement de l’ordre public, d’adopter la mesure la plus efficiente480.

477 Il faut distinguer cette hypothèse de celle que l’on a vue précédemment lors de l’étude la

responsabilité administrative (voir supra, note 54) et qui concerne les cas de force majeure venant rompre le lien de causalité entre le fait de l’administration et le préjudice subi par une entreprise. Dans ce cas, la force majeure est considérée comme la seule cause du dommage, mais ne supprime pas la faute, à défaut d’avoir supprimé l’obligation d’agir. Or, il est question ici du cas où la force majeure rend impossible l’exécution de l’obligation, et supprime de ce fait la faute.

478 C.E., 19 mai 1933, Benjamin, p.541, D.1933.3.354, concl. MICHEL, S.1943.3.1, concl., note

A. MESTRE.

479 Voir en ce sens B. SEILLER, « Pour un contrôle de légalité extrinsèque des déclarations d’utilité

publique », A.J.D.A. 2003, p.1472. Pour l’auteur, le contrôle de la légalité extrinsèque se caractérise par une comparaison entre la solution retenue par l’Administration et celles envisageables, mais non retenues. Ainsi, seule la décision la mieux adaptée à la situation est légale.

480 Voir pour des développements sur l’efficience économique de l’action publique, infra, Première

partie, Titre second, Second chapitre. Par exemple, l’administration a pu interdire l'activité des photographes-filmeurs près du Mont Saint-Michel en considérant qu’elle « présentait, à la date à laquelle l'arrêté précité a été pris, pour le maintien de l'ordre, des dangers auxquels il n'était pas possible de remédier par une mesure moins contraignante » : CE 13 mars 1968, Ministre de l'Intérieur c/ Epoux Leroy, p. 179, A.J.D.A. 1968, p. 222, chron. MASSOT et DEWOST. Dans le même sens : C.E. Sect., 7 décembre 1979, Sté les fils de Henri Ramel, p.456, D.1980, p.303, concl. B. GENEVOIS, J.C.P. 1981, n°19500, note B. PACTEAU.

2° L’accroissement contemporain des obligations de sécurité imposées aux pouvoirs publics

174. Une étude minutieuse de la société contemporaine laisserait sans aucun doute apparaître l’émergence depuis une décennie d’un sentiment d’insécurité de plus en plus important au sein des divers groupes sociaux. Ce sentiment, exacerbé par la multiplication des essais qui lui sont consacrés481, est fondé à la fois sur la plus grande

intensité de risques déjà connus mais aussi sur une « explosion » quantitative de risques jusqu’alors inconnus et liés pour beaucoup au développement scientifique et technologique482. Devant cette nouvelle configuration de l’insécurité et pour répondre

au sentiment qui en résulte, l’intervention de l’État est plébiscitée par l’ensemble de la population. L’obligation qui lui est faite de maintenir l’ordre public n’est alors considérée que comme partie d’une obligation plus générale d’assurer la sécurité de tous les citoyens483. La tendance contemporaine consiste alors à voir dans la puissance

publique celle dont l’essence est d’assurer l’ensemble des administrés contre tout type d’insécurité issue de tout type de risque.

La revendication générale d’un monde sans insécurité se traduit ainsi par l’exigence de la reconnaissance dans l’ordre juridique interne d’un droit à la sécurité484.

481 Si on se limite au droit administratif, on est frappé de voir combien les thèmes de sécurité et de

prévention des risques de toute nature sont abordés de façon récurrente dans les revues spécialisées depuis une dizaine d’années.

482 Voir en ce sens : P. LAGADEC, La civilisation du risque. Catastrophes technologiques et responsabilité sociale,

Ed. du Seuil, Paris, 1981 ; C. DOURLENS, J.-P. GALLAUD, J. THEYS, P.A. VIDAL-NAQUET, Conquête de la sécurité, gestion des risques, L’Harmattan, coll. Logiques sociales, Paris, 1991 : « Qu’on l’envisage sous l’angle de la protection et de la prévention ou bien sous l’angle de la réparation, la sécurité semble être aujourd’hui perçue comme un droit. De l’État on attend qu’il assure la sauvegarde des biens et personnes, qu’il prescrive des réglementations susceptibles de prévenir les événements dommageables, qu’il intervienne pour assurer le bon fonctionnement des mécanismes de compensation ou qu’il s’engage lui-même dans la réparation », p.12.

483J. CHEVALLIER, L’État post-moderne, Droit et société, Maison des sciences de l’homme, L.G.D.J.,

Paris, 2003.

484 Voir en ce sens : D. TRUCHET, « L’obligation d’agir pour la protection de l’ordre public : la

question d’un droit à la sécurité. », in L’ordre public : Ordre public ou ordres publics, Ordre public et droits fondamentaux, préc. Selon l’auteur : « (…) l’administration (et pas seulement l’autorité de police)

L’action publique se légitime alors aux yeux des citoyens par sa capacité à prévoir, prévenir et faire cesser l’ensemble des événements susceptibles de leur être dommageables. Elle doit tenir compte de ce qui n’est que supposé, et dans une logique de précaution dorénavant constitutionnalisée, ne faire courir aucun risque éventuel à la population485 sans en avoir préalablement étudié les conséquences potentiellement

dommageables.

175. Une telle demande semble à première vue paradoxale en matière économique. La doctrine libérale dominante en ce domaine s’oppose par principe à toute intervention étatique jugée perturbatrice de l’ordre naturel du marché. L’action publique devant se limiter au maintien des conditions normales d’exercice des activités économiques486, assurer l’ordre, c’est permettre l’exercice des libertés. Mais bien au-delà

de la théorie économique, le monde économique dans son ensemble fustige la fréquence et le poids des réglementations économiques, des taxes, autorisations et autres limites à l’exercice de leur activité. L’exigence d’un « moins d’État » est à peine nuancée par un timide « mieux d’État » dans le monde des affaires. Pourtant, aussi paradoxale qu’elle semble, la tendance examinée plus haut touche aussi le monde économique. Que surviennent un risque naturel d’une ampleur inattendue, un risque technologique ou industriel, un risque politique, etc., c’est vers l’État, supposé garant de la sécurité de tous à l’égard de tous les risques, assureur de tous les dommages imprévus, que les opérateurs se tournent. C’est ainsi que, à la suite d’une inondation, une marée noire, un acte de terrorisme, l’explosion d’une usine, une épizootie, les entrepreneurs demandent des comptes à l’État, chargé de prendre en charge tous les

serait tenue en toutes circonstances de protéger de manière quasiment absolue l’ordre public et de garantir le droit que les citoyens auraient à la sécurité. »

485 Il sera vu plus loin que la demande d’une sécurité généralisée exige de la part de pouvoirs publics

un éventail de moyens d’action plus large que celui dont ils disposaient initialement. Il leur appartient de développer les moyens de détection des risques, de gestion des informations, de prévision et de prévention des dommages, de réaction, etc.

486 Voir, pour un rappel des doctrines économiques libérales, Première partie, Titre premier,

risques qu’ils n’ont pu prévoir. Ceci est d’autant plus remarquable qu’une telle demande concerne un risque que l’État n’a ni initié, ni permis, ni créé.

Cette exigence des entrepreneurs manifeste la croyance en l’existence d’une obligation générale de sécurité imposée aux pouvoirs publics. Celle-ci peut trouver une justification théorique dans l’idée que les prérogatives de puissance publique octroyées à l’État ne sont que la contrepartie de l’obligation d’assurer la sécurité des citoyens ; le pouvoir ne lui étant reconnu que dans la mesure où il assure la sécurité de tous ses administrés. En outre, une obligation pouvant naître d’une demande sociale, l’actuelle et intense revendication de tous les groupes sociaux tend à imposer aux pouvoirs publics une obligation morale de sécurité. Liés par celle-ci, la sécurité devient pour eux un principe d’action politique.

176. Cette réalité n’a pas manqué d’être retranscrite dans des textes dont la complexité due à l’absence de vue globale du phénomène n’a d’égal que la diversité des domaines dans lesquels le législateur a décidé d’introduire des obligations de sécurité, de précaution, de prévention, de prudence, etc.487. La sécurité est d’ailleurs devenue, depuis

la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité, un droit fondamental de la personne dont l’État est tenu d’assurer la sauvegarde. Quelques exemples permettront d’appuyer ces propos.

Outre la trilogie traditionnelle des composantes de l’ordre public rappelée à l’article L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales, l’obligation de sécurité peut se décliner par matière. Le droit de l’environnement est un des premiers secteurs touchés. Les négligences de l’administration en ce domaine peuvent par exemple être sanctionnées au titre des articles L.232-2 du Code rural, relatif à la pollution des cours d’eau. De même, la vigilance de l’administration est requise en matière sanitaire par

487 La nécessité ressentie par les pouvoirs publics d’apporter une réponse immédiate à la

revendication sociale s’est concrétisée par l’adoption d’une multitude de dispositions particulières, dans des domaines très variés. On observe ainsi dans la quasi-totalité des codes, des prescriptions imposant aux pouvoirs publics d’assurer la sécurité de tel ou tel domaine d’activité.

l’article L.251-1 du Code rural relatif à la biovigilance ou par l’article L.231-4 relatif à l’épidémiosurveillance. Récemment la directive communautaire relative à la responsabilité environnementale a imposé aux États membres diverses obligations visant à prévenir et réparer les dommages écologiques purs488.

Les domaines de la consommation ou de l’urbanisme489 sont également touchés

par le développement des obligations de sécurité. Ainsi, l’article L.214-1-1 du Code de la consommation impose-t-il la traçabilité de certains produits ou denrées et impose à l’administration des prescriptions propres à chaque produit. De même, l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme prévoit qu’un refus de permis de construire peut être justifié pour des motifs liés à la sécurité publique. L’article L.111-3-1 impose quant à lui aux autorités publiques d’intégrer dans certains cas une étude de sécurité publique dans les études préalables.

177. A côté de ces obligations générales de sécurité, des obligations plus spécifiques de prévention de risques se développent également. Les plus topiques sont celles qui sont imposées aux pouvoirs publics en matière d’urbanisme. Par exemple, l’article L.121-1 du Code de l’urbanisme dispose que les documents d’urbanisme permettent de prévenir les risques naturels, les risques technologiques, les pollutions et nuisances de toute nature. L’article L.123-1 dispose que les plans locaux d’urbanisme doivent prendre en compte les risques naturels. De même, les plans de prévention des risques naturels instaurés par la loi du 2 février 1995, permettent, en plus des zonages établis dans les documents d’urbanisme, de prévenir un certain nombre de risques490.

488 Directive n°2004-35 du 21 avril 2004. Voir en ce sens : C. HERMON, « La réparation du

dommage écologique, les perspectives ouvertes par la directive du 21 avril 2004 », A.J.D.A. 2004, p.1792, A. VAN LANG,« La directive « responsabilité environnementale » et le droit administratif : influences prévisibles et paradoxales », D.A. 2005, n°7, p.7. Pour cet auteur, la directive marque la reconnaissance d’un ordre public écologique, fondement d’interventions positives des pouvoirs publics : « l’émergence de la notion d’ordre public environnemental, loin d’affaiblir celle d’ordre public proprement dit, lui apporte une diversification et surtout une modernisation nécessaire », p.8.

489 L’article L110 du Code de l’urbanisme pose les règles générales d’utilisation des sols parmi

lesquelles se trouve la protection de la sécurité et de la salubrité publiques.

490 La loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et

Le droit de l’environnement491 a quant à lui développé des techniques de

prévention des risques industriels intégrées à la réglementation des installations classées. Ainsi, des servitudes peuvent-elles être imposées par le préfet autour de telles exploitations en vertu de l’article L.515-8 à 11 du Code de l’environnement. Par ailleurs, les pouvoirs publics sont tenus d’informer les citoyens sur les risques technologiques et naturels en vertu de l’article 21 de la loi n°87-565 du 22 juillet 1987.

Ces obligations de prévention sont également consacrées par la jurisprudence qui semble répondre aux besoins de sécurité exprimés par les administrés en exigeant des pouvoirs publics qu’ils empêchent la réalisation de certains risques déterminés.

Dans le document L'ÉTAT ET LES RISQUES DES ENTREPRISES (Page 185-195)