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Les nouvelles th´eories du chˆomage ne vont pas mettre en cause l’impact inflationniste des politiques de relance - et il est difficile de dire que Keynes l’ignorait malgr´e les ambig¨

ui-t´es pr´esentes dans sa th´eorie -, mais elles tenteront d’offrir des explications des rigidiui-t´es du

march´e du travail sur la base de fondements micro´economiques en prenant l’agent

ration-nel comme entit´e d’analyse. Ce faisant, elles se situent sur le mˆeme terrain que la nouvelle

´economie classique. Ce choix g´en`ere une th´eorie `a la classification des moins ais´ees. D’un

cˆot´e, il est difficile d’y voir un d´esaveu de Keynes dans la mesure o`u les rigidit´es sont au

cœur de son programme de recherche. Chez Keynes, celles-ci ´etaient pr´esentes bien qu’elles

soient plus justifi´ees qu’elles ne soient expliqu´ees. La baisse du salaire, par exemple, n’y ´etait

pas souhaitable car pouvant conduire `a un r´etr´ecissement des d´ebouch´es et donc se poser en

´el´ement avant-coureur d’une crise, mais ses raisons n’´etaient pas pr´ecis´ees. La rigidit´e ´etait

plus approch´ee par rapport `a ce qu’elle pr´evenait que par rapport `a ce qui la causait. Sous

cet angle, le travail de ces nouvelles th´eories peut ˆetre vu comme une sorte de prolongement

de la th´eorie de Keynes. Cependant, de l’autre cˆot´e, l’int´egration de l’agent rationnel jette

un doute sur leur appartenance. La r´eponse des Nouveaux Keyn´esiens `a l’id´ee du chˆomage

structurel consiste certes `a montrer que l’´equilibre walrasien n’est qu’un cas exceptionnel et

que l’´equilibre de sous-emploi est la g´en´eralit´e, cependant, ils y souscrivent indirectement en

cherchant `a montrer que le sous-emploi est imputable aux d´efauts de march´e, causes des

rigi-dit´es, dont le salaire lui-mˆeme n’est qu’une plus ou moins simple mat´erialisation. La marque

keyn´esienne demeure `a cause de la permanence de l’´etat de sous-emploi, mais les

prescrip-tions de correcprescrip-tions des d´efauts du march´e ne diff`erent qu’ambigument du programme de

la nouvelle ´economie classique, le march´e concurrentiel ´etant la finalit´e. En fin de compte,

l’id´ee fondamentale que «l’emploi d´epend avant tout du coˆut salarial» (Hoang-Ngoc, 1998),

la pierre angulaire de l’´edifice n´eoclassique, se manifeste toujours.

Avant de pr´esenter les deux piliers, il est int´eressant de noter ce que ce passage th´eorique

signifie aussi pour l’´evaluation du chˆomage en tant qu’objet statistique. La th´eorie keyn´esienne

s’est prˆet´ee `a une d´efense de l’emploi qui questionnait moins les r`egles pr´esidant `a la rencontre

1.2. Les grandes mutations du d´ebat th´eorique sur le chˆomage

entre l’offre et la demande de travail qu’elle n’invitait `a soutenir la demande dans l’´economie.

Elle a, de ce fait, laiss´e l’emploi s’approprier une forme normative, `a savoir celle qui est

compatible avec le soutien `a la demande. Les proc´edures et structures qui entravent la baisse

du salaire ont cess´e d’ˆetre mises en cause car la baisse du salaire ´etait elle-mˆeme contraire `a

ce soutien. Les activit´es d´eviant de la forme normative se sont aussi trouv´ees exclues de ce qui

est comptabilis´e dans l’emploi car elles devaient ˆetre ajust´ees. Avec le renouveau th´eorique,

les structures de march´e sont remises au cœur des analyses. Et les «activit´es d´eviantes», en

l’occurrence l’informel pour le Mali, sont vues comme des expressions diff´erentes du rapport

des agents au march´e du travail.

1.2.2.2.1 WS-PS, le nouveau IS-LM

Le mod`eleWS-PS, dress´e par Layard et al. (1991) s’impose comme le mod`ele canonique

du renouveau keyn´esien, une sorte de nouveau IS-LM. Alors que ce dernier cherchait `a

d´ega-ger une combinaison de niveaux de revenu et de taux d’int´erˆet qui respectent l’´equilibre sur

les march´es de la monnaie et des biens et services, le WS-PS vise `a d´egager le niveau

d’em-ploi qui refl`ete simultan´ement les strat´egies des deux forces du travail, l’offre et la demande.

La mont´ee de ce mod`ele mat´erialise le retour du march´e dans l’explication du chˆomage car

il traduit une compl`ete isolation de l’emploi des facteurs mon´etaire et budg´etaire, ´el´ements

dont le mod`eleIS-LM ne cherche pas `a s’affranchir. Le niveau de chˆomage que leWS-PS fait

apparaˆıtre se trouve donc exclusivement li´e aux structures du march´e du travail.

WS, le wage setting relation, est la courbe qui lie le salaire au niveau d’emploi. Elle est

d´ecroissante et retranscrit les propri´et´es qui sont reconnues au salaire. Celui-ci d´epend du

ni-veau des prix anticip´es (illustration de la prise en compte des anticipations et de la demande

effective), du taux de chˆomage (la pression de celui-ci est reconduite) et d’autres variables

susceptibles d’affecter la fixation des prix que les mod´elisations englobent dans un unique

param`etre. En associant respectivement `a ces relations les valeursP

e

,uetz, on peut d´efinir

la relationWS comme suit :W =P

e

F(u, z)

47

. Alors que le salaire r´eagit positivement `aP

e

et `a z, il est n´egativement li´e au taux de chˆomage (ou positivement au niveau de l’emploi).

Dans un contexte o`u les prix effectifs s’alignent sur les prix anticip´es, on a W = P F(u, z),

P ´etant le niveau effectif des prix. Le salaire r´eel est alors ´egal `a

WP

= F(u, z). Il d´epend

n´egativement du taux de chˆomage et positivement des autres facteurs.

PS, le price setting relation, est la courbe qui lie le prix au salaire. Cette relation est

d´efinie comme suit : P = (1 +µ)W, µ´etant le mark-up, c’est-`a-dire la marge per¸cue sur le

salaire. On en d´eduit :

WP

= (1 +µ) donc

WP

=

(1+1µ)

. Cette derni`ere ´equation met en exergue

la lutte entre salaires et profits dans les gains de l’entreprise. Toute augmentation de la marge

doit se traduire par une baisse du salaire r´eel, de mˆeme que la progression de celui-ci ne peut

venir qu’au prix d’une d´egradation de la premi`ere.

1231456 789ABCDBEE9F BCDBEE9F B 7 89 Fig.1.5: WS-PS

Les deux expressions du salaire r´eel d´eterminent la relationWS-PS (figure 1.5), autrement

dit les salaires et prix qui correspondent `a un niveau de chˆomage donn´ee, et pr´ecis´ement celui

pour lequel les prix anticip´es ´egalisent leurs niveaux effectifs. L’´equilibre d´epend de l’´egalit´e

suivante :

F(u

n

, z) = 1

1 +µ (1.1)

Le taux de chˆomage qui respecte l’´equilibre entre les deux courbes est le taux de chˆomage

naturel ou letaux structurel de chˆomage comme sugg´er´e par Phelps (1994). L’architecture du

mod`eleWS-PS fait une place aux composantes structurelles dont celles l´egales. Par exemple,

le mod`ele permet de traduire la hausse des indemnit´es de chˆomage sur le salaire, `a traversz,

1.2. Les grandes mutations du d´ebat th´eorique sur le chˆomage

tout comme il permet une lecture des effets de lois antitrust sur la marge des entreprises (ceci

conduirait `a une hausse de la droite P S). Il permet de voir les effets des dispositifs d’emploi

sur le chˆomage. Sur cette id´ee de chˆomage structurel peut se greffer toute th´eorie ayant trait

aux structures (ou aux dysfonctionnements) du march´e du travail. Le mod`ele d’appariement

de Beveridge constitue un bon exemple, `a ce titre.

Beveridge (1944), dans l’analyse de la rencontre des deux forces du march´e du travail,

a ´etabli une relation n´egative entre le taux de chˆomage et le taux d’emplois vacants dans

une ´economie. Dans la mesure o`u aucun des deux ne peut ˆetre nulle `a cause des frictions, le

passage de certaines personnes d’un emploi `a un autre, on consid`ere que l’´economie atteint un

niveau de«plein emploi technologique»quand il y a ´egalit´e des deux taux. Bien que qualifi´e

de seulement de frictionnel, l’apparition du chˆomage et son incompressibilit´e sont attribu´ees

aux modalit´es de rencontre entre l’offre et la demande du travail, qui dessinent elles mˆemes

les structures du march´e du travail. D’un cˆot´e, se dressent les processus d’insertion, de

r´ein-sertion ou de transition professionnelle tandis que, de l’autre, se trouvent la probl´ematique

d’ad´equation entre l’emploi, la qualification et la formation. Donc le plein emploi n’´equivaut

pas `a l’absence de chˆomage, car il existe un niveau de chˆomage incompressible dˆu aux

im-perfections du march´e, aux transitions, `a la d´emographie et aussi aux flux de cr´eations et de

destructions d’emplois, mais au niveau de chˆomage qui s’accorde avec ces structures. A partir

de l`a, l’emploi est lui-mˆeme accept´e dans sa diversit´e car la forme qu’il prend ne refl`ete que

ce march´e (y compris si cette forme est l’emploi informel).

Dans un cadre o`u l’instrument mon´etaire est isol´e, leWS-PS d´egage un taux de chˆomage

pour lequel les prix anticip´es ´egalisent ceux effectifs, un taux de chˆomage pour lequel l’inflation

est nulle. Ce taux est le Non Accelerating-Inflation Rate of Unemployment, NAIRU, terme

que l’on doit originellement `a Modigliani et Papademos (1975) sous l’appellation deNIRU

48

puis `a Tobin (1980) sous l’appellation de NAIRU qui est le niveau de chˆomage qui assure la

stabilit´e de l’inflation et dont la baisse ne peut venir que des structures de march´e.

48. Le NIRU, leNon Inflationnary Rate of Unemploymentest«a level that we label the noninflationary rate of unemployment (NIRU). It is defined as a rate such that, as long as unemployment is above it, inflation can be expected to decline except perhaps from an initially low rate. The existence of NIRU is implied by both the “vertical” and the “non-vertical” schools of the Phillips curve.»(Modigliani et Papademos, 1975, p. 142).

1.2.2.2.2 Le NAIRU

En revenant aux formules pr´ec´edentes, on peut ´etablir un lien entre le chˆomage et le taux

d’inflation. Sachant que P = (1 +µ)W et queW = P

e

F(u, z), on a P = (1 +µ)P

e

F(u, z).

On a donc une fonction de prix. L’inflation ´etant le taux d’augmentation du prix, elle peut

ˆetre obtenue `a partir de la d´erivation de la fonctionP. Supposons queF, peut ˆetre d´eclin´ee

en combinaison lin´eaire de la forme :F(u, z) = 1−αu+z,α´etant la sensibilit´e du salaire au

taux de chˆomage (ce d´eveloppement respecte les propri´et´es de la fonction du salaire not´ees

plus haut), alors nous obtenons :P =P

e

(1 +µ)(1 +αu+z). La d´erivation de cette fonction

donne :

π = ∂P

e

P + (µ+z)αu (1.2)

´

Etant donn´e que

∂PPe

n’est autre que l’inflation anticip´ee,π

e

, on a :π=π

e

+ (µ+z)−αu.

Le NAIRU est le taux de chˆomage pour lequel l’inflation reste stable, c’est `a dire au le

chˆomage pour lequelπ−π

e

= 0 Donc le N AIRU =

µ+αz

.

Le NAIRU r´ev`ele les trois composantes du march´e du travail dont d´epend le niveau de

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