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ˆetre disponible pour en occuper un ;

– et ˆetre effectivement `a la recherche d’un emploi ;

Le premier crit`ere exclut toute personne qui a travaill´e au minimum une heure sur la

semaine de r´ef´erence, c’est-`a-dire celle de l’enquˆete statistique. La prise de l’unit´e d’heure

peut paraˆıtre arbitraire, mais en r´ealit´e, ce crit`ere s’aligne sur une hypoth`ese d’indivision

(voire d’indivisibilit´e) du temps de travail qui trouve elle-mˆeme sa source dans le mode de

gestion du temps propre au salariat. Le salariat a valid´e `a son niveau des valeurs associ´es

au travail sur d’autres plans (travail comme vecteur d’int´egration sociale, comme fondement

`a l’estime propre, etc.). Ce faisant, il lui a conf´er´e une place tout aussi importante dans le

dans la sociologie, l’anthropologie, et mˆeme l’ethnologie) commande beaucoup la part allou´ee au premier dans les pratiques. De mˆeme, la notion de justice et d’´equit´e ont une place dans cet ´echange au travers des lois sur le salaire minimum et des droits de protection. On ne saurait ignorer ces ´el´ements, mais l’approche ´economique ne permet pas de les mettre en avant.

11. Le chˆomage est plac´e dans ce cadre, comme produit d’une construction historique comme chez Salaiset al.(1986) aussi.

1.1. Le chˆomage, un objet statistique et th´eorique

temps de l’individu. Il a alors reproduit les solutions en coin : un individu est soit occup´e `a

plein temps ou ne l’est pas du tout, sachant que le plein temps est conventionnel. Sous cet

angle, le premier crit`ere illustre une parfaite continuit´e entre la d´efinition et les postulats. De

ce fait, les chiffres produits peuvent ˆetre remis en cause dans un cadre o`u la gestion du temps

rel`eve d’une position interm´ediaire entre ces deux coins. Quand l’emploi cesse d’ˆetre r´egulier,

c’est-`a-dire `a plein temps et continu, l’´evaluation du chˆomage subit un biais. L’emploi s’´etend

aux positions interm´ediaires, d’o`u son approche extensive, tandis que le chˆomage se restreint

`a ceux qui n’occupent pas un emploi, excluant ceux qui n’en exercent pas `a plein temps.

Le deuxi`eme crit`ere, relatif `a la disponibilit´e de l’individu, d´ecline lui aussi une

caract´e-ristique du salariat, l’engagement contractuel. Le d´eveloppement du salariat, notamment ses

´evolutions dans le sens d’une protection de l’employ´e, a introduit l’engagement contractuel

comme une caract´eristique de syst`eme. Il permet de pr´eserver l’employ´e contre les d´ecisions

ar-bitraires de l’employeur. Son d´enouement, que celui-ci rel`eve d’une expiration (fin de contrat,

sauf retraite) ou d’une rupture (licenciement, d´epart), signifie le retour d’un individu dans la

main d’œuvre disponible et inutilis´ee. De ce fait, il constitue une ligne de d´emarcation entre

l’actif occup´e et le chˆomeur. Le probl`eme avec le crit`ere de disponibilit´e d´ecoule des ´el´ements

non ´economiques que l’engagement contractuel suppose ou sur lesquels il se fonde (exemple :

lois du travail). La transposition du concept du chˆomage est mise `a mal quand ces ´el´ements

n’agissent dans le sens d’une distinction claire entre les statuts d’actif occup´e et de chˆomeur.

Dans un pays comme le Mali, o`u la pr´esence de l’appareil juridique est spatialement (grandes

villes) et sectoriellement (´economie formelle) limit´ee, ce crit`ere se trouve fragilis´e. La taille

de l’´economie informelle le met en cause.

Quant au troisi`eme crit`ere, il se rapporte fondamentalement `a la tentative d’int´egrer le

sa-lariat. Il ouvre la voie `a une appr´eciation arbitraire de la recherche d’emploi (quelle d´emarche

est valide ? sur quelle base celle-ci serait-elle meilleure et plus consistante par rapport `a une

autre ?). Ici aussi les composantes extra-´economiques accentuent le caract`ere tr`es restrictif du

chˆomage et la difficult´e de transposition.

Pour certains pays, les crit`eres entraˆınent des probl`emes d’ordre m´ethodologique et

sta-tistique. Ils tentent de pallier ces biais et insuffisances au travers de sp´ecifications

suppl´emen-taires ou mˆemes de statistiques compl´emensuppl´emen-taires

12

. Cependant, la question se pose

diff´erem-ment pour d’autres pays qui d´evient de ces hypoth`eses. C’est le cas du Mali. La n´ecessit´e de la

g´en´eralisation de l’espace marchand du travail et d’un statut de r´ef´erence pose des probl`emes

qui vont jusqu’`a jeter un doute quant `a la pertinence du concept dans son cadre. L’hypoth`ese

de domination du salariat comme statut principal de travail implique le d´eveloppement et la

g´en´eralisation de la marchandisation du travail, hypoth`ese que la faiblesse de l’espace

mar-chand met `a mal. Ensuite, l’incompl´etude/d´estabilisation des normes de l’emploi (r´ecurrence

des ph´enom`enes comme le temps partiel, le travail instable, le travail peu r´emun´er´e, etc.)

et la r´ecurrence de formes variantes de travail contribuent `a une dissociation entre l’emploi,

activit´e g´en´eratrice de revenu, et le statut qui sert de fondation au concept du chˆomage. Tout

ceci conduit `a l’´elargissement de l’espace interm´ediaire

13

entre les deux statuts. Cet espace

rogne le chˆomage sans n´ecessairement traduire l’expansion du statut qui lui est oppos´e et

dont son existence d´ecoule. Il entraˆıne un d´ecalage entre les chiffres du chˆomage et la r´ealit´e

du march´e du travail. Dans une ´economie en d´eveloppement comme le Mali, on peut voir

dans l’´economie informelle la «source» de ces activit´es variantes et donc la cause principale

de la fragilit´e du concept de chˆomage et sa difficult´e `a traduire la r´ealit´e du march´e du travail.

On peut mettre en exergue les limites du concept de chˆomage en se basant sur les crit`eres

comme moyens d’appr´ehension de l’actif occup´e dans l’informel.

12. France : En France, `a cˆot´e du chˆomage au sens du BIT, l’INSEE calcule aussi le chˆomage au sens du recensement. Celui-ci regroupe tout ceux qui se d´eclarent chˆomeurs sans prendre en compte leur disponibilit´e ni des preuves tangibles de leur recherche d’emploi. La troisi`eme d´efinition du chˆomage est ´etablie par le Pˆole Emploi (ex ANPE) ; elle rassemble les demandes d’emploi en fin de mois (DEFM). Depuis 1995, celles-ci excluent les chˆomeurs exer¸cant une activit´e `a temps r´eduit (78 heures par mois). A l’issue de cette reforme, le chˆomage du Pˆole Emploi se r´ev`ele plus ´etroit car il exclut le sous-emploi. Il est suivi de celui du BIT et ensuite vient celui du recensement de l’INSEE. Voir Marchand (1991).

´

Etats-Unis : A cˆot´e du chˆomage au sens du BIT, existent aussi des indicateurs construits par le Bureau of Labors Statistics (BLS) et par l’OCDE. Ils proposent un ´elargissement du concept en y incluant les travailleurs d´ecourag´es et les personnes travaillant `a temps partiel.

13. Freyssinet (2004) distingue trois positions interm´ediaires entre les trois statuts : le temps de travail r´eduit involontaire comme situation de ceux entre les actifs occup´es et les chˆomeurs, le temps de travail r´eduit volontaire comme situation des personnes entre l’inactivit´e et l’emploi et les chˆomeurs d´ecourag´es, situ´es entre les inactifs et les chˆomeurs.

1.1. Le chˆomage, un objet statistique et th´eorique

1.1.1.1.2 L’acteur informel `a l’´epreuve des crit`eres de d´efinition du chˆomeur

Dans la d´efinition du chˆomage adopt´ee par le Bureau International du Travail en 1982

14

et internationalement accept´ee, le chˆomage est d´efini comme la situation d’une personne qui :

– n’exerce pas d’emploi salari´e ou non salari´e

15

(mais dans tous les cas, r´emun´er´e) durant

la semaine de r´ef´erence c’est-`a-dire celle de l’enquˆete ;

– est disponible dans les 15 jours (suivant la p´eriode de l’enquˆete) pour occuper un emploi

salari´e ou non salari´e ;

– et est effectivement `a la recherche d’un emploi, c’est-`a-dire a pris des dispositions

sp´e-cifiques au cours des quatre derni`eres semaines pour trouver un emploi.

La transposition de la notion de chˆomage dans une ´economie `a dominante informelle

comme le Mali pose des probl`emes. Le comptage de l’agent informel comme actif occup´e, qui

l’exclut du lot des chˆomeurs, occulte le contenu de l’activit´e qu’il exerce car elle suppose ses

contours. D’o`u une discordance entre le chiffre et la r´ealit´e observ´ee. `A travers la suivante

appr´eciation du statut de l’actif informel par rapport aux crit`eres de d´efinition du chˆomeur,

nous mettrons en exergue les limites dont souffre le concept de chˆomage quand on l’importe

dans une ´economie comme celle du Mali. Il est `a noter que ces faiblesses sont

fondamenta-lement inh´erentes au concept ; elles sont seufondamenta-lement exacerb´ees par l’informel, portant encore

plus atteinte `a la pertinence du concept.

L’absence d’activit´e r´emun´er´ee : l’informel comme espace interm´ediaire entre chˆomage et

emploi

Le premier crit`ere du chˆomage exige que le chˆomeur n’ait pas travaill´e ne serait-ce qu’une

heure durant la p´eriode de r´ef´erence, celle de l’enquˆete statistique. Mˆeme si cette activit´e

ne revˆet qu’un caract`ere occasionnel

16

ou accidentel, elle exclurait l’agent sond´e du lot des

14. Cette d´efinition a ´et´e adopt´ee lors de la Conf´erence Internationale des Statisticiens du Travail en 1954 et a ´et´e modifi´ee par la conf´erence de 1982.

15. Le chˆomage ne s’appr´ecie pas exclusivement par rapport au salariat, mais plutˆot aux normes associ´ees `

a celui-ci et `a son d´eveloppement. Les pratiques qui caract´erisent le salariat et les r´eglementations dont il a fait l’objet au fil de son d´eveloppement se sont impos´ees comme des ´el´ements normatifs. Donc le non salari´e, `

a condition qu’il marchande sa production, est consid´er´e comme un actif occup´e.

16. Selon l’article L.20 du Code du Travail du Mali, mis en place par la loi n°92 du 23 septembre 1992, un emploi est occasionnel si sa dur´ee est inf´erieure ou ´egale `a 15 jours. Il est temporaire si cette dur´ee est

chˆomeurs. Sur la base de ce crit`ere, la notion du chˆomage se r´ev`ele fortement restrictive. Elle

suppose la g´en´eralisation d’une certaine forme d’emploi dont on ne d´evierait que rarement ou

partiellement, un statut de r´ef´erence caract´eris´e par la r´egularit´e du travail, la correspondance

du temps de travail avec un niveau accept´e comme la norme et celle du salaire avec un niveau

jug´e acceptable. Ce statut est le salariat, auquel l’existence du chˆomage est contingente. Dans

le syst`eme de marchandisation de la force du travail qu’il mat´erialise, ˆetre chˆomeur consiste `a

ˆetre dans l’impossibilit´e ou la difficult´e de louer ses services de travail. Cependant, l’emploi,

qui est con¸cu de mani`ere plus extensive, cesse de refl´eter les caract´eristiques du salariat

quand celui-ci ne domine pas. Il se conditionne seulement `a la g´en´eration d’un revenu. Cette

distance qui se fait entre le chˆomage, fond´e sur un statut, et l’emploi, fond´e sur un revenu,

affecte l’´evaluation de l’´economie informelle.

En effet, l’´evaluation de l’informel profite de l’approche extensive de l’emploi car la

m´e-thodologie malienne s’aligne sur la d´efinition de la Conf´erence Internationale des Statisticiens

du Travail (BIT, 1993, 2003) selon laquelle, «la population active occup´ee dans le secteur

informel»[comptabilis´ee au mˆeme titre que celle du formel]«comprend toutes les personnes

qui, pendant une p´eriode de r´ef´erence donn´ee, ´etaient pourvues d’un emploi dans au moins

une unit´e du secteur informel ind´ependamment de leur situation dans la profession et du fait

que cet emploi constitue leur activit´e principale ou secondaire»(p. 9). De ce fait, les chiffres

produits ignorent d´elib´er´ement la nature et le contenu de l’emploi. Ainsi, nous remarquons

que, s’il est ais´e de dire qu’en 2007, 90,4% (DOEF, 2008) de la population active malienne

´etait occup´ee dans la mesure o`u, sur la base de la d´eclaration des concern´es, ils exer¸caient

une activit´e g´en´eratrice de revenu, il apparaˆıt plus probl´ematique d’admettre que le taux de

chˆomage ´etait de 9,6%. De mˆeme, il est difficile de lire dans les taux de chˆomage 8,8%

17

et

de 3,27% (DOEF, 2008, p. 61), respectivement pour 2004 et 1997

18

, des reflets du v´eritable

´etat du march´e du travail.

Le sens que l’on peut trouver au chˆomage dans un syst`eme o`u le salariat n’est pas la forme

dominante de travail repose sur la pr´esence des ´el´ements caract´eristiques de celui-ci (ou qui

inf´erieure ou ´egale `a 3 mois et saisonnier si la dur´ee est inf´erieure ou ´egale `a 6 mois. 17. Voir le tableau 3.5. Les d´etails sont disponibles dans l’EPAM de 2004 (DOEF, 2004).

18. Les chiffres diff`erent l´eg`erement pour 1997. D’apr`es l’´Etude sur l’Emploi et le Chˆomage, le taux de chˆomage est de 3,1% en 1997, 12,5% dans les milieux urbains et 1,1% dans les milieux ruraux (DOEF, 1997, p. 39).

1.1. Le chˆomage, un objet statistique et th´eorique

en sont devenus corolaires avec son d´eveloppement). Or dans une ´economie `a dominante

informelle o`u c’est plutˆot l’auto-emploi qui domine, cette transposition est mise `a mal par la

distance qu’il se produit entre les caract´eristiques des activit´es informelles et les normes de

l’emploi (dans sa conception formelle). Cette distance va souvent jusqu’`a plus rapprocher ces

caract´eristiques du chˆomage que de l’emploi.

L’informalit´e des rapports (absence de cadre juridique, absence de r´eglementation) favorise

des ph´enom`enes de discontinuit´e du travail (fr´equence des entr´ees et sorties), d’irr´egularit´e

de la r´emun´eration et de diff´erences de r´egimes horaires (nombre d’heures de travail souvent

tr`es faible ou, souvent, tr`es ´elev´e) qui ´ecartent l’activit´e informelle des normes de r´ef´erence.

Ces ph´enom`enes, tr`es r´ecurrents, sont mˆemes reconnus comme caract´eristiques de l’´economie

informelle car on peut les retrouver dans les caract´eristiques associ´ees `a l’informel par le BIT.

Selon celui-ci (BIT, 2002, p.4), l’informel manque de sept s´ecurit´es essentielles qui sont :

– la s´ecurit´e du march´e du travail, c’est-`a-dire les possibilit´es d’emploi suffisantes ;

– la s´ecurit´e de l’emploi c’est-`a-dire la protection contre le licenciement arbitraire ;

– la s´ecurit´e professionnelle c’est-`a-dire la possibilit´e de valoriser sa profession en

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