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Dans l’exemple du Mali, du fait de l’orientation socialiste du d´eveloppement, nous allons

articuler la pr´esentation autour de l’emploi public

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dont l’histoire retranscrit non seulement

celle du march´e du travail tout entier, et ce jusqu’`a une p´eriode r´ecente (moins de vingt

ans), mais aussi donne un aper¸cu des id´eologies qui pr´esidaient aux politiques ext´erieures au

simple cadre de l’emploi. En partant de l’emploi public, on peut disposer d’´el´ements de

com-pr´ehension quant aux dimensions quantitatives (explosion de l’´economie informelle `a partir

des ann´ees 1980, faiblesse du secteur priv´e formel) et qualitatives (codifications des

interac-tions marchandes et non marchandes relatives au monde du travail) du march´e du travail

actuel. Alors que son expansion et ses crises informent implicitement sur les premi`eres, on

peut proc´eder `a une lecture des secondes `a travers les mutations comportementales de ses

acteurs.

Nous ferons une pr´esentation sur fond de politiques d’emploi. Le chapitre compte trois

sections, concernant chacune les p´eriodes cl´es de cette politique. La premi`ere est la p´eriode

1960-1983 (2.1), que nous appellerons la Phase I de la politique de l’emploi. Alors que 1960

est l’ann´ee de l’ind´ependance du pays, le choix de 1983 tient au fait que c’est l’ann´ee de

l’introduction du concours d’entr´ee dans la fonction publique, ´ev´enement marquant dans

l’orientation lib´erale qui ´emerge d`es lors. Les mesures de cette p´eriode, la Phase II (2.2),

traduisent la mise en œuvre des politiques d’ajustement et visent `a r´epondre `a des probl`emes

majoritairement issus de la premi`ere phase. Cette phase va de 1983 jusqu’`a 1998 o`u ´emerge

une politique explicite de march´e aux objectifs bien d´efinis et `a la strat´egie de plus long terme.

Cette politique constitue la Phase III qui dure toujours (2.3).

53. En parlant de la place de l’´Etat dans l’emploi, il convient de porter des pr´ecisions sur la r´ealit´e que recouvre le terme d’emploi public. Il en existe deux d´efinitions qui renvoient `a deux approches, juridique ou ´economique, chacune servant `a le mesurer `a sa fa¸con. L’approche au sens de l’Observatoire de l’emploi public fran¸cais repose sur des crit`eres juridiques combinant le statut de l’employeur et celui de l’agent. Est employ´e public tout individu qui rel`eve de la fonction publique ou qui travaille dans un organisme `a caract`ere admi-nistratif recrutant des agents de droit public. L’approche ´economique est celle de la comptabilit´e nationale. Les employ´es publics sont comptabilis´es comme l’ensemble des personnels des services publics financ´es majo-ritairement par pr´el`evements obligatoires. Source : www.insee.fr. Nous prenons la premi`ere approche, dans la mesure o`u nous incluons les entreprises d’Etat et les services parapublics.

2.1 Phase I : Un pilotage centralis´e du march´e du travail

2.1.1 L’emploi public, principal instrument de gestion de la main d’œuvre

2.1.1.1 L’´emergence de l’emploi public

L’´Etat malien des premi`eres ann´ees de l’ind´ependance s’est ´erig´e en principal employeur

dans l’´economie. On peut identifier deux principales causes au d´eveloppement rapide de

l’em-ploi public et `a son ´etablissement comme outil de gestion de la main d’œuvre. D’un cˆot´e,

l’approche socialiste du d´eveloppement a conduit le gouvernement `a ´etablir les infrastructures

administratives et sociales en pivots d´eterminants du d´eveloppement. Les services

administra-tifs, `a eux seuls, ont augment´e de plus 40%

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entre 1959 et 1962. Leurs frais de fonctionnement

ont suivi passant de 9,1 milliards de francs maliens en 1959 `a 14,4 milliards en 1962, soit une

hausse de 57%. La nouvelle orientation politique, le socialisme, va faire du secteur public le

moteur de la cr´eation d’emplois. De l’autre cˆot´e, le d´esir de se lib´erer de l’influence du

coloni-sateur, notamment du pouvoir exerc´e par les entreprises ´etrang`eres dans le secteur moderne

(importations et exportations surtout), a motiv´e l’´Etat dans la cr´eation d’entreprises

natio-nales, visant `a substituer aux importations des productions nationales. Ainsi, au mouvement

de nationalisation des entreprises existantes avant l’ind´ependance (nationalisation de

l’Of-fice du Niger, transformation de la Compagnie Fran¸caise pour le D´eveloppement du Textile,

CFDT, en Compagnie Malienne pour le D´eveloppement du Textile, CMDT, etc.), il a alli´e

un effort d’investissement dans les ´equipements de production, notamment dans les

indus-tries lourdes. Il en a r´esult´e l’apparition de nombreuses entreprises d’´Etat

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. Le personnel de

54. Ces chiffres, rapport´e par Martin (1976) sont issus de Amin (1965), de Amin (1971) et de Jones (1976). 55. Beaucoup de soci´et´es nationales ont ´et´e cr´e´ees sous la premi`ere r´epublique, notamment entre 1961 et 1962 : L’OPAM (Office des Produits Agricoles du Mali), nationalisation de l’Office du Niger, la SONEA (Soci´et´e Nationale d’Exploitation des Abattoires), la SOCOMA (Soci´et´e des Conserves du Mali), la SNEHM (Soci´et´e Nationale d’Exploitation de Huileries du Mali), les ACM (les Ateliers et Chantiers du Mali), la SONAREM (Soci´et´e Nationale des Ressources Mini`eres), la RTM (R´egie des Transports du Mali), Air Mali, la R´egie des Chemins de Fer du Mali, l’EDM (Energie du Mali), la SOMIEX (Soci´et´e Malienne des Importations et des Exportations), la Pharmacie Populaire, la LPM (Librairie Populaire du Mali), les EDIM (Ediitions et Imprimeries du Mali), la BRM (Banque de la R´epublique du Mali), la BMCD (Banque Malienne des Cr´edits et D´epˆots), la COMATEX (Compagnie Malienne des Textiles), l’EMAB (l’Entreprise Malienne des Bois), l’EMAMA (l’Entreprise Malienne de Maintenance), l’OCINAM (l’Office Nationale de la Cin´ematographie), les TAMALI (Tanneries du Mali), la SEPAMA (Soci´et´e des Produits Arachidiers du Mali), la SMECMA

2.1. Phase I : Un pilotage centralis´e du march´e du travail

Tab.2.1: Effectifs par secteur et niveau professionnel dans les entreprises modernes, 31 d´ecembre 1965

Manoeuvres, ouvriers Ing´enieurs

techniciens, employ´es non Tecnhiciens et

sp´ecialis´es et sp´ecialis´es Cadres

Maliens et afr. Non africains Maliens et afr. Non africains Maliens et afr. Non africains

Commerce priv´e 665 35 - 11 1 32 Commerce d’Etat 1 123 4 6 2 8 3 Industrie 3 078 16 27 42 30 21 Travaux Publics 5 028 93 19 42 10 40 Transports 4 628 29 117 23 25 38 Services 473 18 7 1 3 10 Total 15 055 195 176 121 78 144

Dont Soci´et´es d’Etat 8 811 (58,52%) 27 (13,85%) 174 (98,89%) 68 (56,2%) 75 (96,15%) 63 (43,75%) Source : Enquˆete sur les entreprises modernes, 1964-65, pp.18-19

Minist`ere d’Etat charg´e du Plan et de la Coordination des Affaires ´economiques et financi`eres, Bamako, 1966 Tir´e de Dessau (1975)

l’emploi public, dont la fonction publique, est pass´e de 13 337 agents en 1961 `a 22 903 en 1968

soit une hausse de 71,73%. Avec les soci´et´es nationales qui exer¸caient dans les domaines aussi

vari´es que strat´egiques (agriculture, ´energie, industrie vivri`ere, etc.) et repr´esentaient 60% `a

70% (Minist`ere du Plan de Bamako, rapport´e par Diarrah (1990)) de l’activit´e ´economique,

l’´Etat ´etait le premier pourvoyeur d’emplois. Les soci´et´es d’´Etat concentraient en moyenne

60% de la main d’œuvre occup´ee dans le secteur moderne en 1965. Pour la main d’œuvre

d’origine malienne et africaine, cette part ´etait encore plus ´elev´ee, elle atteignait 84,52%.

Avec l’essor de la fonction publique, de l’administration (centrale et d´ecentralis´ee) et

des entit´es parapubliques (offices, soci´et´es d’´Etat, entreprises publiques et parapubliques),

le Mali ind´ependant se constitue rapidement un secteur public fort, maillon n´ecessaire `a la

r´ealisation de son Plan

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quinquennal (1961-1965) de d´eveloppement, dont les principaux

(Soci´et´e Malienne d’Etude et de Construction de Mat´eriel Agricole), la SOCORAM (Soci´et´e de Construction Radio´electrique), la SONATAM (Soci´et´e des Tabacs et Allumettes du Mali (SONATAM), la SEMA (Soci´et´e d’Equipement du Mali), l’ITEMA (Industrie Textile du Mali), la SEPOM (Soci´et´e des Produits Ol´eagineux du Mali), la COMANAV (Compagnie Malienne de Navigation), la SOCIMA (Soci´et´e des Ciments du Mali), la CMTR (Compagnie Malienne des Transports Routiers), la SOCAM (Soci´et´e des Conserves Alimentaires du Mali), la SHM (Soci´et´e des Hˆotelleries du Mali), la SONETRA (Soci´et´e Nationale d’Entreprises et de Travaux Publics), l’UCEMA (Usine C´eramique du Mali), la SONAREM (Soci´et´e Nationale de recherches Mini`eres), l’ECIBEV (Etablissement de Cr´edit et d’Investissement B´etail-Viande), les Abattoir frigorifique, l’ULM (Union Laiti`ere de Bamako).

56. Voir : Rapport sur le Plan quinquennal de D´eveloppement ´Economique et Social de la R´epublique du Mali, Minist`ere du Plan et de l’´Economie Nationale, Bamako, 1961 ;Bilan d’ex´ecution du plan quinquennal, Direction du Plan et de la Statistique, Bamako, 1969 ; Economie et Plan de d´eveloppement, R´epublique du

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