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caractérisation de l'apprentissage formel, informel et non formel

2.2.3 L’éclairage de l’approche écologique de l’apprentissage dans le cadre des théories de la com plexité et de l’émergentisme

2.2.3.2 Les notions d’affordance et d’émergence

Les concepts d’affordance et d’émergence, au cœur de la théorie écologique, permettent de faire ressortir les spécificités de l'apprentissage formel par rapport à l'apprentissage informel. Ces notions rejoignent l'idée de connexion et fonctionnement en réseaux:

[...] affordance means a relationship between an organism (a learner, in our case) and the environment that signals an opportunity for or inhibition of action. [...] Ecological linguistics regards learning not as gradual, linear acquisition, but as emergence. Emergence happens when relatively simple elements combine together to form a higher-order system. The whole is not only more than the sum of its parts; it is of a different nature than the parts. (Van Lier, 2004 : 4-5)

L’affordance est une relation qui peut se développer entre l’apprenant et l’environnement linguistique au cours de l’activité, qu’il s’agisse des activités programmées spécifiques de l’environnement formel, activité de découverte ou d’apprentissage du lexique, activité d’écoute ou des activités relativement imprévisibles liées à l’environnement informel, écoute de chansons ou lecture d’un journal. Cette relation qui peut être l’occasion ou non d’un apprentissage dépend de variables liées à l’individu, à ses représentations, à ses stratégies, à ses intérêts. De ce fait, elle n’est pas automatique et les savoirs qui en émergent ne sont pas systématiquement prévisibles.

Une multitude de facteurs intervient dans l'appropriation d'une langue pour que les affordances identifiées soient valorisées et transformées en apprentissage. Certes, quelques facteurs sont prévisibles, surtout dans l’apprentissage formel: le contenu, le temps, les modalités d’apprentissage ou l’évaluation, mais d’autres sont aléatoires ou de simples coïncidences. Compte tenu du pouvoir de l’anglais au niveau global, les contacts avec cette langue sont plus nombreux que dans le cas d’autres langues dans la région du Banat. Les analyses des interactions au cours d’une activité collaborative sur un blog que je propose aux collégiens roumains de 5e me permettront de vérifier si cette richesse linguistique de l’environnement a un impact sur l’apprentissage de l’anglais.

La notion d’affordance comprend la totalité des possibilités survenues comme résultats de l'interaction apprenant - environnement, la typologie des affordances va alterner en fonction des caractéristiques des variables engagées dans le processus. L'environnement informel, en tant que forme plus libre, moins contraignante et imprévisible, peut être défini selon des catégories plus larges, laissant place aux nouveautés. A travers le questionnaire adressé à l'échantillon analysé, des collégiens de 6e et de 3e, je me propose de repérer les dimensions ou les valeurs que les apprenants associent à l'apprentissage informel et non-formel de l'anglais. Les résultats du mémoire du master78 ont montré une fréquence particulière des occurrences de l'anglais tant dans l’environnement scolaire que dans l’environnement extrascolaire, les élèves étant exposés davantage à cette langue. Parmi les situations informelles dans lesquelles les collégiens interrogés

78 « Contribution à la caractérisation de l'environnement plurilingue de l'apprentissage des langues vivantes en

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pratiquent l'anglais au sein des communautés, ont été mis en évidence: la famille, le cercle d'amis et les cours particuliers. Néanmoins, l’analyse de Poizat selon lequel « toutes les sociétés, sans exception, fabriquent leurs solutions éducatives qui ne sont ni écoles, ni famille, ni simplement milieu environnant » (Poizat, 2003 : 11) suggère que l’apprentissage ne se limite pas aux environnements connus et d’autres environnements d’apprentissage peuvent être envisagés.

Il faut souligner que l’approche écologique est une approche contextualisée et située et les concepts sur lesquels elle s’appuie doivent être mis en relation avec l’environnement d’apprentissage. Elle meten évidence “how different aspects of context relate to each other and to the subject under investigation” (van Lier, 2004 : 204). Autrement dit, il ne suffit pas d’analyser les caractéristiques de l’apprentissage formel et de l’apprentissage informel en tant que modalités distinctes d’apprentissage mais de faire ressortir les spécificités de leur complémentarité dans un contexte particulier79.

Néanmoins, cette approche de l’apprentissage des langues présente une limite importante,

la difficulté de généralisation compte tenu de la multitude de variables à prendre en compte et de

leurs interactions. Ces variables concernent tant les particularités de l’environnement que les profils des individus; les interactions au sein du même environnement que les interactions avec des membres appartenant à d’autres environnements. Dans notre recherche, les collégiens ont contact avec l’anglais tant à l’école, à travers l’enseignement obligatoire, qu'en dehors de l’école , dans un environnement très proche, comme la famille ou le cercle d’amis, par exemple, mais aussi, plus éloigné, lors des séjours à l’étranger, des activités dans des réseaux sociaux sur Internet.

Ces micro-environnements proches se composent d’autres sous-environnements. Dans la classe de langue, l’anglais a un rôle fondamental en tant qu’objet d’étude dont l’objectif est la communication dans cette langue. Si dans ce cas, les élèves sont amenés à prendre conscience de l'acte d'apprentissage de la langue, la perspective change au moment où l'anglais devient un outil grâce auquel l'élève réaliseune autre activité. La lecture d'un article ou la consultation des pages d'Internet en anglais pour faire un projet en sciences, par exemple, sont des cas où l'objectif de l'élève n'est plus l'apprentissage de la langue mais son emploi pour la résolution d'une autre tâche. Il a pourtant un contact avec la langue, avec une autre intentionnalité que son apprentissage et l'affordance prend ainsi d’autres dimensions: l’anglais devient dans ce cas un outil donnant accès à d’autres apprentissages. Par conséquent,les émergences sont fonction de plusieurs variables: si l’élève perçoit l’utilité de la langue pour son projet, il peut chercher le sens des mots pour obtenir au moins une compréhension globale du document.

La mise en relation du concept d’affordance avec l’environnement donne la possibilité d’envisager ses extensions en fonction des particularités de l’environnement. La classe de langue est un environnement formel caractérisé par un nombre de contraintes où les contacts avec l’anglais se limitent au contenu des leçons qui varie en fonction du profil et de la méthodologie de l’enseignant tandis que dans l’environnement non-formel ou informel, les affordances se multiplient sans pour autant déboucher sur une émergence de savoirs. La variable affective est dans les théories sociales de l’apprentissage comme dans l’approche écologique une condition à

83 prendre en compte. Pour van Lier :

The affective side of all cognitive and social work is extremely important […] Research in psychology and neuroscience has shown the emotional component of cognition is instrumental in stimulating the brain functioning (2004: 140).

L’affect est ainsi un facteur important dans l’émergence des savoirs. Si, par exemple, l’enfant aime les jeux vidéo il va faire des efforts pour comprendre les instructions en anglais, il va essayer par exemple de trouver dans son environnement des ressources qui puissent l’aider à satisfaire ses besoins linguistiques. Parallèlement, les représentations que les apprenants ont de leurs besoins linguistiques et culturels ne coïncident pas toujours avec les représentations que les enseignants ont des besoins linguistiques de leurs élèves. Les savoirs appris à l’école ne sont pas nécessairement transférables et utilisables dans la vie sociale, dans les situations de vie dans lesquelles l’apprenant utilise l’anglais.

Dans une perspective écologique, la motivation et la participation sont des facteurs décisifs dans l’apprentissage. Elles jouent le rôle de forces dynamiques qui vont conduire l’apprenant à s’engager dans les activités d’apprentissage et dans la recherche des outils qui faciliteront sa compréhension et, éventuellement, son apprentissage.

learning (or language development) does not mean the transmission of rational facts or routines from teachers into learners’ brains, but rather participation in processes that lead to higher or better processes, however defined by society or the individual. (Van Lier, 1998 : 128)

Dans une classe où un pourcentage assez élevé de collégiens apprend l’anglais aussi en dehors de l’école (par des cours particuliers, par exemple) les affordances de l’environnement non- formel peuvent parfois émerger dans l’environnement formel. Van Lier met en évidence aussi la dimension individuelle des affordances: « certain affordances become available partly because we are who we are » (2004 : 207). Par conséquent, je me propose de démontrer dans l’analyse des données que la nature des affordances relève tant de la dimension contextuelle que de celle personnelle de l’apprenant en situation d’apprentissage.

2.2.3.3 L’apprentissage comme processus émergeant de l’emboîtement

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