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Chapitre III : La dimension culturelle dans l’espace scolaire

3.1 Quelques perspectives sur la notion de culture en milieu scolaire

3.1.4 Notion de culture universelle :

Partant du principe qu’il n’existe aucune culture qui ambitionne de représenter l’homme de façon universelle, la notion de culture qui s'étend à tout, qui concerne tout, qui embrasse la totalité est souvent confinée dans des visions ambiguës et problématiques eu égard à la diversité des cultures des peuples et à leurs particularismes qui excluent de leur champ le patrimoine commun de l’humanité. La culture n’est pertinente que si elle est regardée, sous cet angle-là, surtout, lorsqu’il s’agit de la considérer comme un tout indissociable appartenant à tout le monde. La diversité des cultures constitue, finalement un écueil à la définition du point de vue universel sur l'homme. La didactique des cultures éprouve le besoin de trouver une sorte de compromis culturel universalisable tirant son origine d’un principe fondateur d’une vision culturelle universelle pour pouvoir contrecarrer tout projet insidieux, impérialiste et ethnocentrique classant dangereusement l’humanité en peuples civilisés et en peuples qui ne le sont pas.

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Culturellement, il y a des phénomènes qui sont présents dans toutes les cultures mais que chacune d’entre elles interprète à sa manière : le temps, l’espace, le sentiment, la passion, l’émotion, l’amour, la mort font partie, parmi bien d’autres de ‘’ces universels – singuliers’’ qui, pour L. Porcher pourraient constituer la base méthodologique et le fondement épistémologique d’un apprentissage opératoire d’une compétence culturelle étrangère et, par conséquent, la base et le fondement d’un enseignement qui y conduirait. Dans Manières de classe, L. Porcher propose ‘’le concept d’universel singulier, comme point de départ possible pour un enseignement culturel à la fois décentré et enraciné, c’est-à-dire dans lequel chacun trouverait son compte tout en percevant la spécificité de l’autre’’. (L. Porcher, 1987). Sous prétexte qu’on se situe dans un cadre scolaire, on se contente d’appréhender principalement la culture de type académique, qui est la seule culture reconnue par les instances de légitimation. Du coup, on néglige les autres domaines non légitimes.

En quoi peut-on parler de culture universelle ?

Une culture se définit traditionnellement par tout un ensemble de valeurs qui lui sont propres et endogènes à la fois. On distingue alors les cultures à partir de la différence des pratiques, des coutumes, des usages, des croyances qui déterminent les comportements d’un groupe. Il semble, ainsi, qu’au premier abord, la notion de culture renvoie à la particularité. Et manifestement, la somme des particularités constituerait l’universalité. Une des principales caractéristiques de la notion d’universalité est le principe d’unité des diversités. L’universalité est ce qui renferme tout, qui neutralise les frontières du temps et de l’espace, qui propose une vision du monde où chacun se reconnaît ou reconnaît une part de lui-même, sans contester le principe de fonctionnement, et qui ne peut être liée ni à une puissance économique ou politique, ni à une culture déterminée. Cette notion contenant un aspect d’humanisme et de cosmopolitisme offre la possibilité de concevoir l’unité de l’homme dans la diversité de ses modes de vie.

La déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle de 2001 s’inscrit dans un discours de réhabilitation et de valorisation de la pluralité des cultures, stipulant que la

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diversité culturelle est désormais un ‘’héritage commun de l’humanité’’, à ce titre, sa défense par l’ensemble des pays fait partie de la morale universelle et de l’éthique. Ce discours institutionnel conforte explicitement la thèse selon laquelle la différence n’exclut pas la communication et la solidarité entre les peuples : Par essence, la culture rassemble les hommes, même si dans le même temps, elle signe leur particularité. D’une façon générale, toute forme de culture tend plutôt vers l’ouverture, la cohabitation, l’universel : si elle est la reconnaissance d’une identité, elle est aussi et surtout une ouverture à l’altérité. Selon Jean Pierre Warnier, ‘’l’expression de ‘’mondialisation de la culture’’ désigne cette circulation des produits culturels à l’échelle du globe. Elle suscite des réactions contrastées. Les uns y déchiffrent les promesses d’une planète démocratique unifiée par une culture universelle, une planète réduite aux dimensions d’un village global comme le disait Marschall Mc Luhan. D’autres enfin militent pour affirmer leurs particularismes jusqu’à faire usage de la violence’’ (J.P Warnier, 2003 : 3). On imagine mal qu’une culture, digne de ce nom, conduise par elle-même à l’isolement et donc à la marginalisation d’un peuple…

On peut ainsi avancer l’idée que le contact des cultures est socialement présent. C’est cet aspect social de la culture qui nous intéresse particulièrement ici, bien qu’elle laisse intacte la dualité entre l’universel et le singulier.

Chapitre IV : Constructions didactiques de la dimension culturelle dans l’E/A.

Introduction

Partant du postulat que chacun sait aujourd’hui que les apprenants d’une langue étrangère ne s’exposent pas seulement à des difficultés de nature linguistique durant leur cursus scolaire et la bonne maîtrise du code linguistique ne suffit pas à la communication. En effet, les structures formelles d’une langue ne sont qu’un vecteur et ne représentent que la surface visible et émergente de la communication. L’obstacle culturel, et plus encore l’écueil interculturel dont chacun reconnaît, désormais l’importance, accentue, souvent les difficultés de l’E/A à l’insu de l’enseignant qui focalise tous ses efforts sur le principe de fonctionnement linguistique. L’évaluation des prestations des apprenants se concentre

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généralement sur la performance linguistique : appropriation lexicale et sémantique, respect de la morphologie et de la syntaxe, adaptation pragmatique à la situation.

S’agissant des contenus culturels, les apprenants d’une langue étrangère ne tirent pas profit, en fait, de la présence des potentialités culturelles offertes par les manuels car elles sont rarement exploitées et suffisamment explorées comme support à l’E/A. On constate un fossé entre le discours officiel réformateur favorisant la prise en charge pédagogique de la dimension culturelle et les pratiques de classe qui marginalisent la dimension culturelle au profit d’un enseignement linguistique. Quand l’attitude des enseignants n’est pas ouvertement négative, elle est souvent simplement indifférente à la question de savoir s’il est pédagogiquement nécessaire de prendre en compte la dimension culturelle comme support à la langue. L’éducation à la pluralité et à l’éducation interculturelle, prônées par les directives réformatrices, a de la peine à être comprise par les enseignants et à se traduire en nouveaux contenus de l’enseignement.

Ce qui fait indubitablement défaut, c’est un professionnalisme adéquat qui permettrait aux enseignants de traduire les finalités en objectifs, dans des activités pédagogiques précises, à l’aide de moyens et méthodes d’enseignement adaptés. La didactique des langues est manifestement sous-estimée dans sa signification et ses conséquences. Ainsi, en classe, les apprenants d’une langue étrangère ne comprennent pas, en général, les différences culturelles de gestion de la communication parce que les connotations passent inaperçues et ne sont jamais prises en compte sur le plan méthodologique.

Dans l’Europe unie autour d’un projet économique commun à tous les pays membres, il existe actuellement deux modèles de gestion de la pluralité culturelle dans ce grand espace européen où les peuples de chaque pays circulent librement : le modèle multi/pluriculturel représenté par Le Royaume Uni et la référence interculturelle qui caractérise en particulier la France. Le modèle multi/pluriculturel, variante anglo-saxonne du pluralisme reconnait clairement les différences culturelles et admet la coexistence

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d’entités culturelles distinctes sur un même espace vital, en donnant la priorité au groupe d’appartenance, ‘’L’individu est d’abord, et essentiellement, un élément du groupe. Son comportement est défini et déterminé par cette appartenance. L’identité groupale prime sur l’identité singulière. L’accent est mis sur la reconnaissance des différences ethniques, religieuses, migratoires, sexuelles, etc. Le multiculturalisme additionne des différences, juxtapose des groupes et débouche ainsi sur une conception mosaïque de la société. Ce modèle additif de la différence privilégie les structures, les caractéristiques et les catégories’’. (M.A Pretceille, 2004). Au royaume Uni, l’étranger ne laisse pas sa culture prime à la frontière, mais contraint à respecter et à cohabiter avec les autres cultures coexistantes avec la sienne. Ce n’est pas le cas en France où toute distinction à caractère culturelle est sévèrement rappelée à l’ordre républicain.

Ce modèle, tout en reconnaissant les différences, n’a pas permis de résoudre ni le problème des relations entre les groupes, ni la paix sociale. Les sociétés européennes caractérisées par la diversité ne sont pas une simple addition de groupes culturels, ni une simple somme de différences. Ainsi, si le modèle multi/pluriculturel s’arrête au niveau du constat, la démarche interculturelle n’a pas pour objectif d’identifier autrui en l’enfermant dans un réseau de significations, mais de l’outiller suffisamment pour l’aider à éduquer son regard culturel et prévenir les malentendus dans ses échanges inter communicatifs. L’interculturel accorde une place plus importante à l’individu en tant que sujet qu’aux caractéristiques culturelles individuelles. L’objectif est d’apprendre à objectiver son propre système de références, à s’en distancier et donc admettre l’existence d’autres perspectives. La compétence interculturelle développe des capacités empathiques permettant à l’individu de se mettre à la place des autres, se projeter dans une autre perspective. Appréhender une culture, c’est dépasser une vision parcellaire et ne pas la réduire à une énumération de faits et de caractéristiques culturels, ne pas classer, ne pas généraliser : apprendre à décoder correctement les messages émis.

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