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Le manuel scolaire de 3 ème as, édition 2004/2005

Chapitre V : Présentation des manuels scolaires de FLE, traducteurs des finalités au sein du système éducatif

5.5 Le manuel scolaire de 3 ème as, édition 2004/2005

Le manuel de 3èmeas, édition 2004/2005, conçu dans un contexte très particulier dominé essentiellement par le discours réformateur du système éducatif algérien à l’endroit de l’enseignement des langues étrangères, et notamment à celui de la langue française dont le statut est souvent problématique dans l’espace scolaire eu égard au passé encombrant existant entre les deux pays, présente des potentialités linguistique et culturelles indubitablement liées au contexte qui prévaut au moment de la réforme. L’ouvrage est élaboré par une équipe composée de neuf membres, pour la plupart des professeurs d’enseignement secondaire. Il est pertinent de rappeler que c’est la même équipe qui a élaboré le manuel antérieur à la réforme. Ce qui signifie qu’on a désigné une même équipe pour deux missions pédagogiques différentes, de notre point de vue, s’excluant mutuellement. L’une consiste à concevoir un manuel conforme au programme et aux finalités antérieures à la réforme, visant la maîtrise de la langue, ni plus ni moins. L’autre consiste à traduire un regard réformateur, voire innovant, lié à un nouveau programme, à une nouvelle

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méthodologie et à de nouvelles finalités éducatives considérant la langue comme un outil de communication et comme une entité culturelle/interculturelle dans un manuel. Ce qui semble justifier la désignation d’une autre équipe, composée cette fois-ci, uniquement de trois membres pour sa révision.

C’est le seul manuel de l’enseignement secondaire qui présente dans sa première page les deux équipes ayant participé à l’élaboration et à la révision du contenu. S’il fait l’objet de révision, c’est indubitablement à des fins d’adaptation au nouveau contexte qui prévaut sur le plan international.

Comme tout manuel est présenté dans un avant-propos, cette nouvelle équipe ne déroge pas à la règle. En effet, les auteurs présentent explicitement les attentes pédagogiques de l’E/A en insistant sur la révision dont fait l’objet le contenu :

’’Le manuel de français de troisième année secondaire a fait l’objet d’une révision dont l’objectif est d’adapter les contenus au programme en vigueur, d’actualiser les supports et de préparer l’élève à l’épreuve du baccalauréat’’ (Manuel, édition 2004/2005 : 2).

Cela signifie implicitement que des efforts sont sérieusement déployés pour mettre dans des conditions optimales l’apprenant, appelé à préparer l’épreuve de FLE du baccalauréat. Les auteurs semblent s’inscrire plutôt dans une démarche évaluative certificative en exposant l’enjeu dès le départ.

Quant au contenu, ‘’ce manuel propose des activités variées, des lectures complémentaires, des pistes de lecture et des techniques. Celles-ci aideront les élèves à travailler en parfaite autonomie’’ (Manuel, p. 2),les auteurs ne font aucune allusion à la dimension culturelle et aux représentations interculturelles. Ils semblent se focaliser sur le perfectionnement linguistique. En effet, le sommaire présenté semble conforter notre constat. A première vue, les projets retenus sur la base d’un choix éclectique s’alternent arbitrairement tout au long de l’ouvrage.

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Le projet relatif à ‘’l’argumentation’’ illustré dans ‘’le pour et le contre’’, sans s’étendre à la notion de ‘’défendre une thèse’’, préside l’apprentissage, suivi du projet se rapportant à la notion d’exhorter.

Le projet III, quant à lui, concerne le discours ex positif et occupe la troisième place, alors que les auteurs de manuels nous ont toujours habitués à entamer l’E/A par la notion d’exposer. Le discours littéraire occupant la dernière place a peu de chance d’être appréhendé sérieusement, dans la mesure où le volume horaire annuel s’avère, parfois, insuffisant pour concrétiser tout le contenu du programme.

Encore, faut-il préciser, qu’à la fin de l’année scolaire, les élèves sont saturés et peu enclins à toute implication personnelle.

Ce qui implique que la place hiérarchique imposée à la littérature dans l’espace de ce manuel informe implicitement sur le peu d’intérêt accordé par les auteurs au discours littéraire et à l’éducation interculturelle en général.

Le sommaire présente, dans une forme condensée, une progression hiérarchique de l’intention de communication supportée par un objet d’apprentissage, sans toutefois présenter le contenu des séquences ciblées.

Les techniques sous-jacentes sont présentées pêle-mêle et ne sont pas réparties en fonction des intentions de communication et des objets d’étude comme on a pris l’habitude de le remarquer dans les manuels scolaires. Les enseignants, faut-il le souligner, n’ont pas suffisamment de repères pour introduire telle ou telle technique dans les rubriques du projet. La configuration de l’E/A semble se référer à une présentation notionnelle/fonctionnelle où les fonctions langagières s’inscrivent dans une approche plutôt communicative. L’ouvrage compte quatre projets :

-Le zapping B. Pivot Projet I : Argumenter / Le pour et le contre

-Le stylo à bille Jean Rostand -L’Internet et l’intégration planétaire J.C Da Silva -Hamid Serradj réunit les fellahs M. Dib

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-Médinas et Casbahs d’Algérie Federico Mayor -Affiche publicitaire ANEP

-Citoyens, citoyennes du Grand Gouvernorat d’Alger C. Rahmani -L’appel des Lauréats du Prix Nobel de la Paix Prix Nobel Iol, Césarée, Cherchell, Ruine de la beauté M. Chaabni Projet III : Exposer

La population mondiale FNUAP Les greffes Le Nouveau Mémo Larousse

Qu’est-ce qu’un clone ? Réda Cadi

Les tribulations d’un caillou latin Louis Jean Calvet Projet IV : Raconter/Décrire

Extraits de la Nouvelle de M. Dib -Un beau mariage

-L’invitation chez tante Hasna -La mariée

-Les repas de noces -La fête

-Le grand boulevard A. Chedid

L’entame de l’E/A, comme nous pouvons le constater, à partir de cette présentation des activités dans le sommaire, par le discours argumentatif, laisse supposer que cette équipe se démarque de la répartition classique où préside indéniablement le discours ex positif, et pose un regard nouveau sur l’alternance des projets retenus dans l’espace de la classe de langue.

Ce qui porte à penser manifestement que l’on a tendance à remettre en question l’optique fonctionnelle du FLE, du moins implicitement, pour orienter le regard dans une nouvelle perspective dans laquelle l’usage instrumental/fonctionnel peut

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cohabiter dans un même espace pédagogique avec une autre entité communicative qui n’est pas faite seulement des mots de la langue mais d’autres éléments dont l’exploitation conduit à bon port au sens latent du texte.

Cependant, le prétexte à l’exploitation des indices culturels/interculturels semble passer inaperçu, en effet, en entamant l’E/A par un texte tel ‘’le stylo à bille’’ (Manuel, p.10), exempt pratiquement de toute charge culturelle, anticipe sur l’espace dérisoire de la pluralité culturelle dans la conception de cet ouvrage, causant parfois des difficultés énormes aux enseignants qui ne sont pas toujours préparés pour l’enseignement de ce type de texte.

Même le questionnaire d’appui à la consolidation du discours argumentatif (Manuel, p. 11) s’inscrit dans cette vision. A titre d’exemple, le discours littéraire (Manuel, p.106) qui constitue, au risque de nous répéter, une opportunité idéale pour aborder les vrais problèmes communicatifs relevant du culturel, est laissé en fin d’année ! Ce qui laisse supposer que l’alternance des projets dans ce manuel, si elle semble à première vue arbitraire, obéit à une valorisation de la langue exemptée de sa substance culturelle/interculturelle qui continue à occuper une fonction dérisoire dans la conception des ouvrages scolaires algériens. Soulignons, au passage tout de même, que c’est l’unique manuel dont la longévité a été trop courte, pour être remplacé, trois années plus tard, par un autre, contrairement aux précédents qui restaient en usage, pendant de nombreuses années.