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La notification de l’assignation au préfet (bail d’habitation) ou aux créanciers inscrits (bail commercial)

TITRE III. La fin du bail

F. La notification de l’assignation au préfet (bail d’habitation) ou aux créanciers inscrits (bail commercial)

341.- Dans l’une comme dans l’autre hypothèse, la notification est adressée dans le but de

permettre de trouver une solution non contentieuse au manquement du locataire (lequel manquement est nécessairement un impayé en matière de bail d’habitation).

1. La notification de l’assignation au préfet (bail d’habitation)

342.- Imposée par la loi « exclusions » du 29 juillet 1998 en cas de mise en œuvre de la clause

résolutoire en matière de baux d’habitation (L. 6 juill. 1989, art. 24), la notification de l'assignation (à la diligence de l'huissier mais par lettre recommandée avec demande d’avis de réception) au moins deux mois avant l'audience au préfet doit permettre à ce dernier de mener un enquête afin de tenter de résorber l'impayé et d'informer le juge de la situation exacte du débiteur. Pour parvenir à ce double objectif, le texte précise qu'il incombe au représentant de l'État de saisir « en tant que de besoin » les organismes dont relèvent les aides au logement (SDAPL, notamment), le FSL ou les services sociaux compétents.

En 2000 (loi SRU du 13 déc. 2000), puis en 2005 (loi de cohésion sociale du 18 janv. 2005), le législateur a étendu le champ d'application de ces mesures préventives en cas de dette locative, non seulement à l'hypothèse de l'action en résiliation judiciaire, mais aussi aux demandes reconventionnelles aux fins de constater ou de prononcer la résiliation.

Compte tenu de la finalité sociale du texte, on saluera cette double extension du champ d’application de l’obligation de notifier502.

Concernant l’extension de l’obligation de notifier en cas d’action en résiliation judiciaire intentée en raison de la dette locative du bailleur, la notification est également de mise dans le cadre d'une procédure en résiliation judiciaire du bail motivée à la fois par une dette de loyers et par un défaut de jouissance paisible503. Ce qui est conforme tant à la lettre qu’à l’inspiration du texte.

Quant à l’office du juge en la matière, le magistrat du fond n'a pas l'obligation de relever

500 Civ. 3e, 9 mars 2005, Bull. civ. III, n° 60 ; D. 2005. AJ 955, obs. Rouquet Document 343 ; ibid. 2006. Pan.

932, obs. Rozès.

501 Civ. 3e, 15 oct. 2008, Bull. civ. III, n° 152 ; D. 2008. AJ 2719, obs. Rouquet Document 344 ; RTD com.

2009. 81, obs. Kendérian ; AJDI 2009. 194, note Dumont-Lefrand ; dans le même sens, V. déjà Civ. 3e, 2 avr.

2003, Bull. civ. III, n° 77 ; D. 2003. AJ 1366, obs. Rouquet Document 345 ; AJDI 2003. 583, obs. Blatter. 502 Comp., auparavant, jugeant que la demande reconventionnelle en résiliation de bail n'a pas à être notifiée : Civ. 3e, 10 déc. 2002, Bull. civ. III, n° 256 ; D. 2004. Somm. 843, obs. Pierre ; AJDI 2003. 271, obs. crit.

Rouquet Document 346 ; RDI 2003. 160, obs. Trébulle.

d'office le défaut de notification de l'assignation au représentant de l'État, lequel défaut n'est pas un moyen de pur droit comme impliquant l'appréciation de circonstances de fait504.

2. La notification de l’assignation aux créanciers inscrits (bail commercial)

343.- Parce que le droit au bail est l'élément central du fonds de commerce sur lequel est assis

le gage des créanciers du locataire, les textes exigent que, dès lors qu'ils sont inscrits, ces créanciers soient informés de l'action en résiliation du bail commercial diligentée par le bailleur. On comprendra que, pour être utile, cette notification doit impérativement être préalable au prononcé du jugement, le créancier pouvant, à ce stade, efficacement intervenir auprès de son débiteur505, voire, spécialement en cas d'impayé, se substituer à lui en mettant un terme aux manquements contractuels506.

Ainsi, l'alinéa 1erde l'article L. 143-2 du Code de commerce (ancien article 14 de la loi du 17 mars 1909) précise-t-il, in fine, que « le jugement ne peut intervenir qu'après un mois écoulé depuis la notification », le défaut de notification entraînant l'inopposabilité de la résiliation au créancier concerné507.

La sanction est irrévocable, la jurisprudence estimant qu'il ne peut être suppléé ultérieurement

au défaut de notification508 et que la connaissance qu'aurait pu avoir le créancier de la procédure ne dispense pas le bailleur de notifier509.

La solution est la même lorsque la notification a eu lieu après que le jugement eut été rendu, mais avant son exécution, puisque « l'inopposabilité de la résiliation intervenue est acquise de plein droit dès lors que le bailleur a manqué à ses obligations à l'égard du créancier inscrit »510.

Lorsqu’un créancier estime que la notification n'a pas été régulière, il ne sera recevable à former un appel contre la décision que s’il offre d'exécuter les causes du commandement dans le délai d'un mois de la notification de la demande en résiliation du bail511. Cela se justifie par le fait qu'une notification irrégulière ne saurait conférer au créancier la qualité de partie à l'instance en résiliation du bail : cette irrégularité n’a d'autres effets que de rendre la résiliation ainsi que la procédure suivie inopposables à son encontre, sans lui ouvrir le droit d'appel. Par conséquent, en présence d’une notification irrégulière à son égard, le créancier préférera la voie de la tierce opposition contre la décision ayant constaté l'acquisition de la clause

504 Civ. 3e, 13 oct. 2004, Bull. civ. III, n° 168 ; D. 2005. Pan. 755, obs. Damas ; AJDI 2005. 308, note Rouquet Document 348 ; dans le même sens, rendu à propos d'une demande de validation de congé, précisant qu'il ne

peut être reproché au juge du fond de ne pas avoir vérifié d'office si le bail en question était soumis à la loi du 1er

sept. 1948, V. déjà, Civ. 2e, 14 févr. 1985, Bull. civ. II, n° 38 ; Gaz. Pal. 1985. 2. 640, note Guinchard et

Moussa ; JCP 1988. II. 21030, note Héron. 505 Civ. 3e, 14 déc. 1988, Bull. civ. III, n° 183.

506 Com. 27 mai 1972, Bull. civ. IV, n° 157 ; Com. 11 juill. 2006, Bull. civ. IV, n° 176 ; D. 2006. AJ 2242, obs. Rouquet Document 349.

507 Civ. 3e, 3 mars 1981, Rev. loyers 1981. 247 ; Civ. 3e, 8 févr. 1989, Bull. civ. III, n° 31.

508 Com. 25 mai 1970, D. 1970, Somm. 166 ; Civ. 3e, 22 mars 1989, Bull. civ. III, n° 67 ; D. 1990, Somm. 258,

obs. Rozès ; Civ. 3e, 6 déc. 1995, Bull. civ. III, n° 252 ; D. 1996, Somm. 386, obs. S. Piedelièvre.

509 Civ. 3e, 4 juin 1986, Bull. civ. III, n° 86.

510 Civ. 3e, 12 juill. 2006, Bull. civ. III, n° 169 ; D. 2006. AJ 2242, obs. Rouquet Document 350 ; Loyers et

copr. 2006, n° 200, obs. Brault ; JCP E 2007. 1563, n° 78, obs. Kenfack.

résolutoire512.

Sur la date qu’il convient de prendre en considération pour apprécier la notion de « créancier

inscrit », on retiendra qu’il s’agit de la date de la résiliation513.

512 Sur cette possibilité, V. Civ. 3e, 21 juill. 1975, D. 1975. IR 194 ; Com. 19 mai 2004, Loyers et copr. 2004, n°

188, obs. Brault ; Aix-en-Provence, 11 juin 1987, D. 1989. 100, note Roy-Loustaunau.

513 Civ. 3e, 22 mars 2006, Bull. civ. III, n° 75 ; R., p. 337 ; D. 2006. AJ 1044, obs. Rouquet Document 352 ; V.

aussi Com. 16 oct. 2007 Bull. civ. IV, n° 216 ; D. 2007. AJ 2736, obs. Rouquet Document 353 ; ibid. 2008. Pan. 1649, obs. Rozès.

Sous-titre II. La restitution des lieux et les indemnisations

344.- Quelle que soit la cause de la fin de la relation contractuelle, le preneur doit restituer les

lieux. A défaut, il s’expose à être redevable d’une indemnité d’occupation.

Quant au bailleur d’un local commercial, il est, sauf exception, redevable d’une indemnité d’éviction.