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3.2 Etalonnage radiométrique

3.2.3 Non-linéarité du détecteur

La non-linéarité du détecteur est déterminée en comparant la réponse du détecteur face à un flux variable avec une réponse linéaire idéale. La mesure est perturbée par les interférences. Une méthode de détermination permettant de s’affranchir des interfé- rences a été spécifiquement définie pour le cœur interférométrique.

3.2.3.1 Méthode de mesure

La mesure de la non-linéarité s’effectue en faisant varier l’intensité du flux incident dans le spectromètre. La lampe est munie d’un diaphragme pilotable. On le ferme pro- gressivement et, pour chaque position, on acquiert une image. On obtient au final une série de 200 images.

Comme pour la mesure des gains interpixels, la mesure de la non-linéarité est affectée par les interférences. Ici, ce sont les interférences destructives qui posent le plus pro- blème. Si, le signal mesuré par le détecteur s’annule du fait des interférences, la variation du flux en entrée d’instrument ne sera pas « vue » par le détecteur. Le signal restera nul et l’on ne pourra pas mesurer les non-linéarités de la réponse du détecteur pour la zone où les interférences sont destructives. Dans le cas contraire, l’intensité du signal inter- férométrique varie proportionnellement avec le flux incident. On rappelle que l’on peut ramener le signal interférométrique à l’interférogramme d’une source monochromatique de nombre d’onde σ0 selon (équation 1.28) :

I(δ) = M + m

2 +

M− m

2 cos(2πσ0δ)

où le maximum et le minimum (M et m) du signal sont proportionnels à l’énergie incidente. Autour de la différence de marche nulle, le contraste interférométrique est proche de 1 et le minimum proche de 0. Des difficultés de mesure de la non-linéarité sont donc susceptibles de se produire autour de la différence de marche nulle.

Pour pallier ce problème lié aux interférences générées par le cœur interférométrique, on effectue deux fois la mesure devant la lampe en déphasant l’interférogramme de π. Ce déphasage est obtenu en déplaçant la lame modulatrice de manière à décaler la différence de marche de λ0/2. Dans ce cas, si pour la première série les interférences

sont destructives sur un superpixel, elles sont constructives pour la deuxième. On dispose au final, pour chaque superpixel, d’une série de mesures de la réponse du détecteur en fonction du flux incident.

On aurait pu également effectuer le brouillage des interférences selon la méthode uti- lisée pour la mesure des sensibilités interpixels. Cette méthode présente l’inconvénient d’additionner les réponses du détecteur pour différents états interférométriques. L’in- tensité du signal incident varie en fonction de la différence de marche. Par conséquent, la réponse du détecteur n’est pas linéaire avec l’état interférométrique. Or, c’est juste- ment cette non-linéarité entre les différents états interférométriques que l’on cherche à mesurer. Il n’est donc pas correct de sommer les images d’interférogrammes décalés en différence de marche pour s’affranchir des interférences.

Le protocole de mesure de la non-linéarité est le suivant. On acquiert une première série de réponses du détecteur face à un flux variable. Le diaphragme de la lampe utilisée comme source de lumière est progressivement fermé. Le flux lumineux est mesuré par une photodiode de référence placée sur la sphère intégrante, dans laquelle est injectée la lampe. La photodiode a été étalonnée et sa réponse est considérée linéaire au regard de celle du détecteur. Une fois la première série de mesures effectuée, un déphasage des interférences de π est introduit grâce à la lame modulatrice. On procède à une seconde série d’acquisitions en suivant la même démarche que pour la première série.

En fin de mesure on obtient deux séries de réponse du détecteur en fonction de la puissance du flux incident.

3.2.3.2 Méthode de traitement et de correction

Avant de procéder au traitement des mesures d’étalonnage, les données sont corrigées de l’obscurité et des gains interpixels. Pour des raisons de rapidité d’exécution, on traite d’abord les images d’interférogramme pour en extraire le signal de chaque superpixel. On calcule le signal moyen des pixels présents dans chaque superpixel. On traite donc deux séries de 200 interférogrammes corrigés de l’obscurité et des gains interpixels.

Pour un échantillon considéré, on repère dans un premier temps dans quelle série, le signal est le plus important. De la sorte, on sélectionne la série où les interférences sont le plus constructives. La figure 3.3 présente l’allure de la réponse du détecteur en fonction du signal en sortie de la photodiode. Plus exactement, c’est le signal de l’échantillon numéro 354 de l’interférogramme extrait de la série où il est maximal. L’échantillon de l’interférogramme numéro 354 est le plus proche de la différence de marche nulle. Nous remarquons que la courbe obtenue est différente d’une droite. Les écarts à la linéarité sont importants au regard de la précision de mesure recherchée.

0 100 200 300 400 500 600 700 800 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 Signal de la caméra (LSB)

Signal de la photodiode normalisé (LSB)

Fig. 3.3 – Signal du détecteur en fonction du signal de la photodiode. Le signal de la photodiode a été ramené à des valeurs du même ordre de grandeur que celles en sortie du détecteur grâce à un coefficient multiplicatif.

La linéarisation consiste à ramener cette courbe à une droite. Pour chaque valeur du signal, on applique une correction qui annule la non-linéarité. Il a été choisi d’apporter une correction additive. Une correction multiplicative posait problème pour les faibles

signaux. La fonction de correction de la non-linéarité, fcor

lin est définie telle que :

Nlin(i) = N (i) + flincor[i,N (i)] (3.16)

Avec Nlin le niveau linéarisé, N (i) le niveau avant correction de la non-linéarité. Il est

déjà corrigé de l’obscurité et des gains interpixels. La coordonnée i est celle du super- pixel. Notons que la fonction de correction dépend de cette coordonnée et du niveau de signal avant correction de la non-linéarité.

Le calcul de la fonction de correction s’effectue en calculant la différence :

flincor[i,N (i)] = Nlin(i)− N(i) (3.17)

Il reste maintenant à définir la réponse linéaire Nlin à laquelle on souhaite aboutir.

Pour ce faire, on définit un signal pivot pour lequel, la correction sera nulle pour tous les échantillons.

flincor[i,Npvt] = 0 ,∀ i (3.18)

où Npvt est le signal pivot. Pour chaque super-pixel, ce signal pivot correspond à un

signal de photodiode différent.

Du fait des états d’interférence différents des échantillons, il ne faut pas le même flux en entrée pour atteindre le signal pivot. Sur la figure 3.4, on a représenté le signal de la photodiode en fonction du signal de deux échantillons différents. L’échantillon numéro 1 est situé à grande différence de marche et l’échantillon numéro 354 est situé au voisinage de la différence de marche nulle (ZPD pour Zero Path Difference). Pour un niveau en sortie du détecteur donné, nous voyons qu’il faut un flux lumineux en entrée d’instrument plus important pour l’échantillon numéro 1. Ceci vient du fait que, pour une source non monochromatique, les interférences sont beaucoup moins contrastées à grande différence de marche. A l’extrême, les interférences s’annulent, alors que pour la différence de marche nulle, les interférences sont constructives quelle que soit la longueur d’onde. Dans ce cas, le signal à différence de marche nulle est le double de celui à grande différence de marche. Les polynômes de modélisation du flux en fonction du niveau des échantillons sont également représentés sur la figure 3.4. Les coefficients des polynômes sont calculés par optimisation selon le critère des moindres carrés. Ces modélisations permettent d’évaluer le flux correspondant à la valeur du signal pivot. Le graphe du bas représente l’erreur de modélisation. Son profil est celui d’un bruit, probablement le bruit de mesure. Le rapport signal à bruit correspondant est voisin de 800.

Le signal pivot est choisi égal au signal moyen de l’interférogramme corrigé de l’obs- curité, obtenu lors de la mesure des gains interpixels. Pour cette valeur, on a en effet considéré que tous les pixels avaient la même réponse. Ce choix demeure arbitraire, ce qui importe le plus est que le pivot reste le même pour tous les échantillons, de manière à appliquer une correction de non-linéarité calculée dans les mêmes conditions d’un échantillon à l’autre.

Une fois le flux correspondant au signal pivot connu pour chaque superpixel, on peut calculer les valeurs de la droite du signal corrigé. Celle-ci est définie par :

−1 −0.5 0 0.5 0 100 200 300 400 500 600 700 800 Erreur de fit (LSB) Signal de la caméra (LSB) Erreur 1 Erreur 354 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450

Flux mesure normalisé (LSB)

Mesure 1 Fit 1 Mesure 354 Fit 354

Fig.3.4 –Signal délivré par la photodiode en fonction du signal enregistré par la caméra. Les points représentent la mesure, et les courbes sont issues d’une optimisation en modélisant la relation à l’aide d’un polynôme. Les différences entre la mesure et le modèle sont représentées sur le graphe du bas. Les numéros 1 et 354 correspondent aux numéros des zones considérées. La zone 1 est à grande différence de marche. Son signal est donc celui de la ligne de base. La zone 354 est la plus proche de la différence de marche nulle. Le signal, pour des interférences constructives, est de l’ordre du double de la ligne de base, ce que l’on voit effectivement sur la courbe. Cette modélisation permettra de déterminer le signal de la photodiode correspondant à la valeur pivot de la caméra.

avec b(i) = 0 ∀ i, puisqu’on a corrigé le signal mesuré du niveau d’obscurité, et a(i) = Npvt/Fpvt où Fpvt est le flux correspondant au signal pivot. La figure 3.5 représente les

variations non linéaires des échantillons 1 et 354 ainsi que les réponses linéaires que l’on va chercher à obtenir. Remarquons les points d’intersection pour un signal égal au signal pivot. 0 200 400 600 800 1000 1200 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 Signal du détecteur (LSB)

Signal de la photodiode normalisé (LSB) Mesure 1

Droite de linéarisation 1 Mesure 354 Droite de linéarisation 354 Pivot

Fig. 3.5 – Signal en sortie de caméra en fonction du signal délivré par la photodiode et sa droite

de linéarisation. Les deux droites de linéarisation ont bien leur point d’intersection avec la courbe qu’elles sont sensées linéariser au niveau du pivot, fixé en début de traitement (200 dans ce cas). La numérotation des zones reste la même que pour la figure 3.4.

Comme on connaît l’équation de la réponse linéarisée, on peut calculer la correction de la non-linéarité pour les valeurs de flux mesurées. On reprend l’équation 3.17 :

flincor[i,N (i)] = Nlin(i)− N(i)

flincor[i,N (i)] = Npvt

Fpvt · F (N(i)) − N(i)

(3.20) On note F (N (i)) le flux mesuré par la photodiode de référence pour le niveau N (i). On obtient une série de 200 valeurs de la fonction flincor. On modélise cette réponse par un polynôme de degré 7, de manière à connaître la correction de la non-linéarité pour toute valeur du signal en sortie du détecteur. Le degré du polynôme a été fixé empiriquement de sorte à ne pas limiter la modélisation du signal et plus particulièrement de sa non- linéarité, tout en n’étant pas affecté par le bruit aléatoire. On retrouve la valeur de chacun des coefficients par optimisation au sens des moindres carrés. La figure 3.6 représente les fonctions de correction pour les échantillons 1 et 354. Les points sont obtenus par traitement des mesures et les courbes sont les fonctions polynomiales qui

modélisent la correction en fonction du niveau du détecteur à corriger. Le graphe du bas présente les différences entre les mesures et la fonction modélisée. Nous remarquons que les corrections de non-linéarité des deux zones sont très proches pour des niveaux comparables. C’est ce à quoi nous nous attendions : au premier ordre la non-linéarité est la même sur l’ensemble du détecteur. La valeur de la correction de la non-linéarité varie considérablement en fonction de du signal à corriger. La variation de la correction est supérieure à la centaine de comptes numériques. Pour atteindre les précisions de mesure souhaitées, il faut donc corriger la non-linéarité.

−4 −3 −2 −1 0 1 2 0 100 200 300 400 500 600 700 800 Erreur de fit (LSB) Signal du détecteur (LSB) Erreur 1 Erreur 354 −50 0 50 100 150 200 250 300 350 400

Différence à la droite de linéarisation (LSB)

Différence mesurée 1 Fit 1 Différence mesurée 354 Fit 354

Fig. 3.6 – Différence de non-linéarité entre la droite de linéarisation et la courbe effectivement

mesurée en sortie de la caméra. On constate que les deux échantillons ont des corrections comparables dans le domaine commun de fonctionnement. Ceci traduit le fait que les non-linéarités sont voisines. On s’attendait à ces similitudes : les pixels de la matrice sont au premier ordre semblables, donc présentent la même non-linéarité. L’erreur d’optimisation est tracée sur le graphe du bas. La courbe se lit comme un abaque de correction. Pour un signal donné en abscisse, la correction à apporter est l’ordonnée de la courbe. La numérotation des zones reste la même que pour les courbes précédentes (figures 3.4 et 3.5).

La correction de la non-linéarité sera effectuée à partir de la fonction polynomiale flincor que l’on vient de calculer. Pour chaque interférogramme préalablement corrigé de l’obscurité et des gains interpixels, on effectue (équation 3.17) :

Nlin(i) = N (i) + flincor[i,N (i)]

Remarquons que la correction de la non-linéarité, effectuée pour chaque échantillon de l’interférogramme, combine la correction des gains interpixels à chaque niveau de signal. Des méthodes alternatives existent pour la mesure de la non-linéarité. On peut, comme pour la mesure des gains interpixels, masquer un bras de l’interféromètre de

manière à supprimer les interférences. La méthode mise en œuvre pour l’ancienne ver- sion du cœur interférométrique consistait à déplacer le miroir monté sur la platine de translation. De la sorte, le contraste des interférences chutait rapidement du fait de la largeur spectrale de la lampe. On pouvait alors effectuer les mesures sans se soucier des interférences.

Si l’on note Nbrut(i,j) le niveau brut en sortie d’instrument, le niveau corrigé,

Ncor(i,j), avant calcul du spectre, est égal à :

Ncor(i,j) = flincor{E(i,j) · [Nbrut(i,j)− NO(i,j)] , i , j} (3.21)

Les niveaux corrigés obtenus en fin de correction radiométrique sont proportionnels au flux incident suivant un même facteur de proportionnalité. L’étalonnage n’est cepen- dant pas absolu : les niveaux corrigés ne sont pas exprimés en unités de luminance mais en comptes numériques. L’étalonnage absolu de l’instrument n’est pas nécessaire pour réaliser des mesures d’absorption différentielle. On cherche en effet à mesurer des varia- tions spectrales de transmission atmosphérique et non des niveaux absolus de luminance spectrale.