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Section I. La reconnaissance du groupe de sociétés comme cadre de négociation collective.

A. Le négociateur patronal

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. L’article L.2232-31 du Code du travail précise que la convention ou l’accord collectif de groupe est négocié par « l’employeur de l’entreprise dominante ou un ou plusieurs représentants, mandatés à cet effet, des employeurs des entreprises concernées par le champ de la convention ou de l’accord. » Selon ce texte, deux possibilités sont ouvertes pour la négociation et la conclusion de la convention ou de l’accord collectif de groupe : cette négociation est conduite soit uniquement par l’entreprise dominante du groupe, soit par la participation de toutes les entreprises du groupe concernées, à travers leurs représentants.

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. Dans le premier cas, l’entreprise dominante du groupe, toujours selon l’article L.2232- 31 du Code du travail, peut assumer seule cette négociation sans la présence et l’intervention des représentants des entreprises du groupe comprises dans le champ d’application de l’accord. L’entreprise dominante peut négocier l’accord collectif et parvenir à sa conclusion sans recevoir de mandat exprès de ces entreprises517.

Ce privilège accordé à l’entreprise dominante du groupe s’explique par le fait que le législateur considère cette entreprise comme le mandataire légal de l’ensemble des entreprises du groupe, et l’habilite de ce fait à négocier et à conclure des conventions et des accords collectifs au nom de ces entreprises518.

517 P.-H. Antonmattéi, « La consécration législative de la convention et de l’accord de groupe : satisfaction et

interrogations », Dr. soc., 2004, p. 602.

518 Le circulaire du 22 septembre 2004 (fiche n° 5 : JO, 31 octobre 2004, p. 18480) précise que : « Quel que soit

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Concrètement, l’entreprise dominante du groupe mène la négociation et la conclusion de la convention ou de l’accord collectif de groupe, soit à travers sa direction ou son représentant, soit par l’intermédiaire d’un mandataire librement choisi par elle. Ce mandataire peut même être choisi par l’entreprise dominante en dehors du cercle des entreprises membres du groupe.

Cependant, si la capacité de l’entreprise dominante du groupe à négocier et à conclure des conventions et des accords collectifs engageant toutes les entreprises du groupe – ou une fraction de celui-ci – peut paraître acceptable lorsque l’entreprise dominante fait partie du périmètre de ces accords, une difficulté se pose lorsque cette entreprise conduit la négociation et la conclusion de ces accords sans entrer elle-même dans le périmètre de ces derniers. L’article L.2232-31 du Code du travail ne donne pas de précisions sur ce point, mais nous partageons l’idée de la doctrine qui considère cette situation comme inopportune519. En effet, comment accepter que l’entreprise dominante du groupe soit exclue du périmètre de l’accord collectif négocié, conclu et signé par elle, et que l’application de cet accord porte uniquement sur des parties non signataires (sociétés filiales) ?

À ce sujet, il faut signaler que ce privilège accordé à l’entreprise dominante par la loi du 4 mai 2004 ne l’était pas auparavant. La jurisprudence sociale antérieure considérait comme sans effet un accord de groupe conclu entre l’entreprise dominante et les syndicats représentatifs au sein de cette entreprise, s’appliquant aux autres entreprises du groupe, tant que celles-ci n’étaient pas parties signataires de cet accord520. Selon cette jurisprudence, lesdites entreprises étaient des personnes juridiquement autonomes et ne pouvaient donc être assujetties aux accords de groupe que si elles l’avaient personnellement signé ou si elles avaient donné mandat à l’entreprise dominante de négocier en leur nom.

Nous considérons cette solution jurisprudentielle comme juste, dans la mesure où elle accorde à chaque entreprise concernée, et à non l’entreprise dominante seulement, le droit de s’associer à la négociation et à la conclusion de l’accord collectif de groupe. Les spécificités économiques et sociales des entreprises du groupe exigent que ces dernières soient présentes dans les différentes étapes de la négociation et de la conclusion de la convention ou de l’accord de groupe.

l’ensemble des employeurs des entreprises concernées, sans qu’il ait nécessairement à justifier d’un mandat exprès des employeurs des entreprises comprises dans le périmètre concerné. »

519 J.-F. Cesaro, « La négociation collective dans les groupes de sociétés », Dr.soc., 2010, p. 782. 520 Cass. soc., 23 janvier 2002, RJS, 4/02, n° 454.

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. Quant au deuxième cas, l’article L.2232-31 du Code du travail confie également la négociation et la conclusion d’une convention ou d’un accord collectif de groupe à « un ou plusieurs représentants, mandatés à cet effet, des employeurs des entreprises concernées par le champ d’application de la convention ou de l’accord. » Cette deuxième possibilité permet à certaines entreprises du groupe de conclure un accord collectif, ce qui nous conduit à dire que la participation de toutes les entreprises du groupe dans la recherche d’un accord n’est pas exigée par le législateur.

Même en l’absence de l’entreprise dominante du groupe, deux ou plusieurs entreprises filiales de cette structure économique peuvent, en concertation avec les organisations syndicales représentatives, créer des normes sociales applicables à leurs salariés. Il nous semble que le législateur part du principe que, puisque certaines entreprises du groupe exercent des activités économiques semblables, elles ont le droit de conclure des conventions et des accords collectifs.

L’article précité précise que les représentants des entreprises concernées doivent être mandatés, c’est-à-dire que le mandat doit être exprès et viser la négociation en question521. Concernant la détermination du nombre des représentants des entreprises participant à la négociation et à la conclusion de la convention ou de l’accord collectif, la doctrine estime que c’est l’entreprise dominante, en tant qu’elle constitue le mandataire légal de l’ensemble des entreprises du groupe, qui se charge d’en fixer le nombre522.

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