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. Le législateur impose la constitution d’un comité central d’entreprise à partir du moment où une entreprise comporte au moins deux établissements distincts dotés de comités distincts400. Il semble essentiel de s’interroger sur la raison d’être de cette institution : pourquoi le législateur impose-t-il la création d’un comité central d’entreprise ?

396 I. Desbarats, « L’entreprise à établissements multiples en droit du travail », op. cit., préface de Michel

Despax ; M. Cohen, op. cit., p. 132.

397 Cass. soc., 10 novembre 2010, n° 09-60451 ; G. Borenfreund, « la notion d’établissement distinct à la croisée

des chemins », RDT, 2011, p. 24.

398 Cass. soc., 18 mai 2011, n° 10-60383. 399 I. Desbarats, op. cit., p. 152.

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Il faut rappeler que les comités d’établissement permettent de représenter les intérêts des salariés, au niveau où ces derniers exécutent matériellement leur prestation de travail : succursales, usines, dépôts, etc. À travers ces comités, les représentants des salariés peuvent dialoguer directement avec la direction pour défendre les droits des salariés de l’établissement.

Toutefois, les comités d’établissements ne garantissent pas la réalisation de l’objectif constitutionnel qui veille à l’implication des salariés dans la gestion de l’entreprise401. En effet, ces institutions ne permettent pas d’assurer un dialogue avec les véritables décideurs au niveau de l’entreprise, et donc une participation effective à la gestion de cette dernière402.

Pour atteindre cet objectif, le législateur a imposé la mise en place du comité central d’entreprise afin qu’il assure une représentation cohérente et efficace de tous les salariés de l’entreprise affectés à plusieurs établissements. Cette institution contribue à centraliser la représentation des salariés et permet de prendre en compte les intérêts de ces derniers dans les décisions importantes qui touchent à la marche économique et financière de l’entreprise403.

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. Concernant sa composition, identiquement au comité d’entreprise, le comité central d’entreprise se caractérise par une composition tripartite : le chef d’entreprise – ou son représentant –, les élus du personnel404 et les représentants des organisations syndicales405.

B. Maintien des représentaux syndicaux désignés par les syndicats

représentatifs au niveau de l’entreprise.

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. Les représentants syndicaux nommés par les syndicats représentatifs au sein de l’entreprise406 poursuivent à leur tour leur existence bien que l’entreprise fasse partie d’un

401 I. Desbarats, op. cit., p. 233. 402 I. Desbarats, op. cit., p. 235. 403 L.2327-2 du Code du travail.

404 Les élus du personnel ne sont pas désignés directement par les salariés de l’entreprise, mais par les membres

des comités d’établissement (L.2327-3 du Code du travail).

405 Selon l’article L.2327-6 du Code du travail, chaque organisation syndicale représentative dans l’entreprise a

le droit de désigner un représentant au comité central d’entreprise.

406 Les deux articles L.2121-1 et L.2122-1 du Code du travail, issus de la loi du n° 2008-789 du 20 août 2008,

fixent les critères établissant la représentativité des syndicats au sein de l’entreprise ou de l’établissement. Ces syndicats, selon le premier article, doivent satisfaire aux sept critères cumulatifs que sont : le respect des valeurs

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groupe de sociétés. Il en va de même, à cet égard, des sections syndicales instaurées par les syndicats au sein de l’entreprise qui maintiennent, elles aussi, leur existence. Ces sections ont pour objet, comme le prévoit l’article L.2142-1 du Code du travail, de représenter les intérêts matériels et moraux de leurs membres407.

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. De même, les délégués syndicaux, nommés par les syndicats représentatifs408, continuent à accomplir leur mission dans l’entreprise. Ceux-ci, dans une entreprise comptant au moins 50 salariés pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois dernières années409, ont pour fonction, selon l’article L.2143-3 du Code du travail, de représenter leur syndicat auprès de l’employeur. L’imprécision de cette fonction a amené la doctrine410 à dire que les délégués syndicaux disposent d’une « compétence générale » tant que la loi ne définit pas exactement leurs attributions411.

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. Lorsque l’entreprise comporte plusieurs établissements, le législateur accorde aux syndicats représentatifs au sein de ces derniers le droit de désigner des délégués syndicaux412. Ce droit suppose que les établissements concernés emploient au moins 50 salariés, et qu’ils soient distincts. En plus de désigner des délégués syndicaux d’établissement, la loi permet aux syndicats représentatifs au niveau de l’entreprise de nommer des délégués syndicaux centraux d’entreprise413.

républicaines ; l’indépendance ; la transparence financière ; une ancienneté minimale de deux ans ; l’influence et les effectifs d’adhérents et les cotisations. Et ils doivent également, au vu du second article, obtenir « au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants. »

407 Trois remarques essentielles concernant les sections syndicales doivent être précisées. Premièrement, les

sections syndicales ne possèdent pas la personnalité morale et ne peuvent donc pas agir comme sujet de droit. Deuxièmement, elles peuvent être instaurées dans une entreprise même de moins de 50 salariés. Troisièmement, le droit d’instituer une section syndicale est accordé aux syndicats possédant « plusieurs adhérents » dans l’entreprise concernée. Le législateur ne détermine aucun effectif minimal d’adhérents.

408 L.2143-3, al.1 du Code du travail. 409 L.2143-3 du Code du travail.

410 J. Pélissier, G. Auzero, É. Dockès, op. cit., p. 1267.

411 Cette compétence générale permet aux délégués syndicaux d’assurer plusieurs fonctions :la représentation et

la défense des syndiqués et de l’ensemble des salariés, la présentation des réclamations et revendications relatives aux intérêts collectifs des salariés, la négociation avec la direction essentiellement sur les salaires et la durée du travail, etc. Ibid.

412 L.2143-3 du Code du travail.

413 L.2143-5 du Code du travail. Cet article distingue entre le cas où l’entreprise emploie « au moins deux mille

salariés », et celui où cette dernière compte « moins de deux mille salariés ». Suivant le premier cas, la désignation des délégués syndicaux est accordée aux syndicats ayant « recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quelque soit le nombre de votants, en additionnant les suffrages de l’ensemble des établissements compris dans ces entreprises. » Dans le deuxième cas, les syndicats représentatifs dans l’entreprise peuvent nommer l’un de leurs délégués syndicaux d’établissement en vue d’exercer également les fonctions de délégués syndical central d’entreprise.

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Désigner les délégués syndicaux centraux d’entreprise se justifie, selon le législateur de 1982, par la volonté d’adapter les structures syndicales à celles de l’entreprise414. Par cette désignation, les syndicats se voient dotés d’un interlocuteur syndical au plus haut niveau de l’entreprise, et donc d’une représentation auprès de la direction générale de celle-ci415. En outre, les délégués syndicaux contribuent à coordonner l’action syndicale dans l’ensemble des établissements de l’entreprise416.

II. Maintien des institutions représentatives des salariés mises en place au

sein de l’unité économique et sociale (UES).

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La reconnaissance d’une unité économique et sociale (UES) conduit à mettre en place des institutions représentatives des salariés qui lui sont propres (B). La spécificité de l’UES nous conduit, dans un premier temps, à la déterminer (A).

A. Détermination de l’une unité économique et sociale (UES).

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. Déterminer ce qu’est une UES exige d’en appréhender la notion (1) et d’en étudier la mise en œuvre (2).

1. La notion d’unité économique et sociale (UES) : une notion fonctionnelle

conçue pour garantir l’application du droit du travail au sein d’une

entreprise éclatée.

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. Création jurisprudentielle, l’unité économique et sociale (UES) a été conçue depuis les années soixante pour faire échec à la fraude patronale qui découpait l’entreprise en plusieurs entités en vue d’échapper de la mise en place des institutions représentatives du personnel417. Ces manœuvres frauduleuses divisaient artificiellement l’entreprise en plusieurs sociétés, afin que chacune d’elles se maintienne en deçà du seuil d’effectifs qui rend obligatoire

414 I. Desbarats, op. cit., p. 420. 415 Ibid.

416 Ibid.

122 l’instauration d’un comité d’entreprise418.

L’UES se présente ainsi comme une notion fonctionnelle qui contribue à recomposer l’entreprise découpée fictivement en plusieurs sociétés, et permettre de ce fait d’appliquer les dispositions légales relatives à la représentation du personnel. Les salariés de ces sociétés, dans ce cadre, forment une seule collectivité de travail et ont donc le droit d’instituer des instances représentatives communes.

L’utilité de l’UES a conduit à sa consécration légale par la loi Auroux du 28 octobre 1982419. L’article L.2322-4 du Code du travail, issu de cette loi, dispose que : « lorsqu’une unité économique et sociale regroupant cinquante salariés ou plus est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place d’un comité d’entreprise commun est obligatoire. »

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. Créée initialement pour garantir la mise en place des institutions représentatives du personnel au sein d’une entreprise divisée en plusieurs sociétés, l’UES a été utilisée par la suite pour assurer d’autres fonctions. En effet, le législateur considère l’UES comme un cadre pour l’application des dispositions relatives à la participation obligatoire aux résultats de l’entreprise420, un périmètre pour apprécier la validité d’un plan de sauvegarde de l’emploi421, et également un cadre pour l’instauration d’un service de santé commun422. À son tour, la chambre sociale de la Cour de cassation considère l’UES comme un périmètre de réintégration d’un représentant du personnel illégalement licencié423.

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. Seulement, il faut préciser que si l’UES constitue un cadre où certains droits, essentiellement de nature collective, s’exercent au profit des salariés, cette structure ne possède pas une personnalité morale distincte des entités qui la forment. L’UES ne peut contracter, ester en justice, et ne peut être un employeur des salariés des entités qui la

418 Cass. soc., 8 juin 1972, JCP, 1973, I, 17316. Dans cet arrêt, La Cour de cassation confirme l’analyse des

juges du fond qui ont bien constaté l’existence d’une unité économique et sociale entre deux sociétés juridiquement autonomes, et ont donc jugé obligatoire d’instaurer un comité d’entreprise commun à ces deux sociétés. Les juges ont établi que « le président-directeur général avait réparti fictivement le personnel de ces deux sociétés de manière à laisser à chacune d’elles un effectif inférieur à 50 salariés et éluder ainsi les prescriptions de l’ordonnance du 22 février 1945. »

419 Loi n° 82.915 du 28 octobre 1982 relative au développement des institutions représentatives. 420 R.3322-2 du Code du travail.

421 L.1235-10 du Code du travail. 422 D.4622-12 du Code du travail.

123 composent424.

2. Mise en œuvre de l’unité économique et sociale (UES).

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L’étude de la mise en œuvre de l’UES commande d’envisager les voies de sa reconnaissance (b), après avoir analysé les critères exigés à cet effet (a).

a. Les critères exigés pour la reconnaissance de l’unité économique et

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